Chapitre 22 – L'attente

Lavande errait dans les couloirs. Un mois qu'elle n'apparaissait plus qu'aux heures des repas. Et encore… elle ne mangeait quasiment plus rien, se contentant seulement du minimum vital, et ce, le dos toujours tourné vers la table des Serpentard. Un mois s'était écoulé depuis qu'il l'avait quittée.

Elle trainait uniquement dans les ailes du Château où elle était sûre de ne rencontrer personne… surtout pas lui. Elle connaissait son emploi du temps par cœur, elle savait donc où il était à toute heure. C'était donc plus pratique pour l'éviter.

Les seuls moments où elle le voyait étaient lors des Séances de l'AD ou pendant les cours qu'ils avaient en commun avec sa classe. Et à ces moments-là, elle ne pouvait pas faire autrement. Elle gardait alors la tête baissée, faisait ce qu'on lui demandait, et s'éloignait de lui le plus possible. Lorsqu'enfin venait l'heure de partir, elle fonçait vers la sortie pour ne surtout pas avoir à se retrouver devant lui.

Parvati lui avait conseillé de l'oublier ou de tout faire pour le rendre jaloux… mais elle en était incapable. Depuis qu'il avait posé ses grandes mains noires sur son corps, elle n'avait pas envie d'en sentir d'autres…

Elle ne comprenait pas… elle n'avait rien vu venir… mais le pire, c'était qu'elle avait vraiment cru qu'il était amoureux d'elle. Il ne lui avait jamais dit, bien sûr, mais elle avait remarqué les changements dans son comportement. Sa façon de lui parler, sa façon de la réveiller le matin… mais surtout sa façon de lui faire l'amour avait changé… il y mettait beaucoup de tendresse. Pas qu'il n'y en avait pas avant, mais c'était différent depuis quelque temps.

Elle entendit des voix non loin d'elle. N'ayant aucune envie de croiser qui que ce soit, elle se dépêcha de bifurquer à un autre tournant pour se cacher. Elle suivit un escalier et se retrouva dans un couloir du troisième étage.

Celui-ci était sombre et poussiéreux. On voyait bien que personne n'y allait jamais… elle se dit que l'endroit était parfait pour elle. Il y avait, entreposés dans un coin, les restes d'un bureau, des chaises cassées, une vieille armoire, de vieux balais usagés, un chaudron troué et ce qui ressemblait à des fioles en verre cassées.

Elle ne serait pas dérangée ici. Elle s'assit dans un coin contre un mur, à côté de tout cet amas poussiéreux, et laissa couler les larmes qu'elle ne pouvait plus retenir.

Drago était pensif. Assis à la bibliothèque en attendant Hermione, il regardait son meilleur ami, seul à deux tables de lui. Il avait le nez plongé dans un livre, mais on voyait bien qu'il ne lisait pas.

Depuis un mois, il n'était plus que l'ombre de lui-même. Drago ne l'avait jamais vu comme ça, et cela ne lui plaisait pas. Mais alors pas du tout. Remarquant que sa brunette était en pleine discussion avec Madame Pince, il décida que Blaise avait d'avantage besoin de lui.

« Mon cœur, je vais voir Blaise un instant, on se retrouve plus tard d'accord ?» Hermione acquiesça. Il vint alors s'asseoir à côté de lui mais il ne le vit pas.

« Alors vieux ? Tout baigne ? » Blaise sursauta.

« Dray ! je ne t'avais pas vu… »

« Je vois ça… alors ? Tu me dis ce que tu as ? »

« Rien, tout va bien, Dray, je t'assure… »

« Blaise, mon frère… » Drago posa doucement une main sur son bras, en signe d'encouragement.

« D'accord… mais pas ici… vient, on sort. »

Il rassembla ses affaires et entraina Drago hors de la bibliothèque, dans une classe déserte.

« Qu'est-ce qu'il se passe ? »

« J'ai fait une connerie… » Le blondinet leva un sourcil, perplexe. Puis Blaise continua. « Avec Lavande… je… j'ai pas la force de te raconter, Dray… lis en moi plutôt… »

Drago resta interdit un instant, puis voyant que son ami le fixait avec un air des plus sérieux, se concentra quelques secondes et entra dans son esprit.

Il vit Blaise adossé au mur alors que Lavande était assise à ses pieds, en pleurs. Il écouta leur conversation. Il remarqua l'air impassible du Serpentard pendant que la Gryffondor lui parlait. Puis il entendit la dernière phrase de Lavande et assista à l'accablement de son meilleur ami juste après son départ.

Il sortit de sa tête et le regarda, sans voix. Blaise avait les yeux brillants.

« Mais… pourquoi as-tu fait ça ? Tu étais bien avec elle, non ? Je t'avais jamais vu comme ça avec aucune fille ! »

« Je sais… mais… je ne l'ai pas fait de gaité de cœur, figure-toi ! J'ai eu peur, voilà ! » Il arpentait la pièce de long en large, les mains derrière le dos, les yeux rivés sur le sol.

« Peur de quoi ? Blaise… arrête, calme-toi tu me donnes le tournis ! Assieds-toi… explique-moi calmement… de quoi as-tu peur ? »

« Imagine que ces fichus Mangemort essaient de m'atteindre à travers elle… tu sais qu'ils en sont capables. Imagine qu'ils apprennent qu'on est ensemble, qu'ils l'attrapent et qu'ils la torturent, ou pire… »

« Comment ils apprendraient ça ? »

« Je sais pas, moi ! Mais c'est possible ! Quand ton père va venir te chercher, j'imagine qu'il ne viendra pas tout seul… et il risque d'y avoir ma mère parmi les Mangemort. Elle n'aura sans doute pas apprécié le fait que je me sois enfui ! Et tu sais aussi bien que moi qu'elle est presque aussi forte que Rogue en Légilimancie ! Si elle arrive à pénétrer mon esprit, elle va voir Lavande, ce que nous avons vécu elle et moi, et… pire que tout… ce que j'éprouve pour elle… Dray… je l'aime ! »

Drago s'en doutait un peu, mais le fait de l'entendre de la bouche de son meilleur ami était tout de même quelque chose… depuis qu'il le connaissait, et ça ne datait pas d'hier, il ne l'avait jamais vu amoureux d'une fille…

« Et je suppose qu'elle n'en sait rien… » Blaise baissa la tête. « Non, évidemment, tu ne lui as rien dit… et tu l'as laissée croire des choses abominables qui ne sont absolument pas vraies… je comprends maintenant pourquoi on ne la voit presque plus ! »

« N'aurais-tu pas fait la même chose avec Hermione si tu étais à ma place ? »

« Mais j'ai la même place que toi, Blaise ! Seulement avec Mya, c'est pas comparable… déjà on ne peut pas se séparer, ce qui équivaudrait à notre mort à tous les deux, et en plus, on sait tout les deux ce que pense l'autre, puis qu'on est toujours connectés. Donc, si l'un de nous essaie de mentir, l'autre le grille direct ! »

« C'es sûr, c'est plus facile ! Bon, qu'est-ce que je suis sensé faire… dis-moi ! Je ne vis plus depuis cette séparation et… elle non plus d'ailleurs, d'après ce que je vois… »

« Va la retrouver, Blaise, dis-lui ce que tu ressens pour elle. Explique-lui pour quelles raisons tu as fait ça ! Et nous la protègerons… il ne lui arrivera rien. »

« Merci Mec ! » Blaise serra son ami dans ses bras et sortit de la classe avec une détermination nouvelle.

Severus essayait de calmer ses nerfs à vif. Il avait la tête au-dessus de son chaudron dont les volutes de fumée bleue se dispersaient un peu partout dans ses cachots. Seule cette activité lui occupait suffisamment l'esprit pour ne pas trop penser à d'autres choses.

À côté de lui, Narcissa était endormie sur le canapé près de la cheminée. Un peu plus tôt, il avait été obligé de lui faire boire une Potion de Sommeil pour l'apaiser. Il fallait qu'elle se remette de la crise d'angoisse qu'elle venait de faire. Ces crises arrivaient de plus en plus souvent depuis que la nouvelle de l'évasion de Lucius était tombée.

Il ne savait pas quoi faire… il aurait voulu l'emmener quelque part pour la cacher, mais il préférait aussi la savoir près de lui pour la protéger. Et comme il était hors de question qu'il quitte Poudlard, il la gardait avec lui.

En la regardant, il se dit que la vie ne les avait pas épargnés, ni l'un ni l'autre… mais qu'un jour, il l'espérait en tout cas, ils pourraient vivre leur amour ensemble, au grand jour, chose qui leur avait été refusée presque vingt ans plus tôt.

Dumbledore était inquiet. Ils n'avaient pas reçu de réponse à la lettre qu'avait envoyée Drago à son père. Voldemort se doutait-il de quelque chose ? C'était plus que probable…

Cela faisait presque un mois que le hibou était parti, et rien n'était arrivé. Aucun réponse, aucune attaque d'aucune sorte, ni contre le Château, ni contre le Ministère, ni contre aucun membre de l'Ordre… Rien.

Et ça ne lui plaisait pas du tout… il pressentait que quelque chose de grave et de dangereux se tramait… il avait demandé à l'Ordre de se tenir prêt et à Harry de continuer les séances intensives de l'AD.

S'il ne savait pas quand Voldemort allait attaquer, il savait que tôt ou tard, cela arriverait. Il espérait seulement que le Mage Noir n'aurait pas le temps de trouver une solution pour atteindre l'immortalité. Il se félicitait toutefois qu'il ait partagé cette information avec Severus avant de partir à l'étranger.

Il ne savait pas non plus si Drago et Hermione arriveraient à en venir à bout, mais il savait que leur puissance causerait pas mal de dégâts… mais est-ce que cela sera suffisant ? Il en doutait…

Il se sentait vieux et las… il avait hâte que tout ça soit fini… il espérait que Merlin soit assez clément avec lui pour lui accorder une retraite bien méritée… et qu'il aurait le temps d'en profiter.

Lord Voldemort était debout devant la fenêtre dans le salon du Manoir. Regardant le soleil qui commençait à se coucher derrière les nuages, il cherchait un moyen de rentrer dans ce fichu Château sans que l'autre Vieux Fou ne le remarque… Il avait vu la lettre de Lucius, et celle de Drago.

Il avait laissé cet imbécile de Malefoy envoyer son hibou, attendant de voir ce que cela allait donner comme résultat. Ce que cet idiot était naïf ! Il était aveuglé par l'abandon de sa femme et n'avait pas réfléchi un seul instant au fait que le courrier de son fils puisse être surveillé !

Il pressentait que depuis quelque temps, un petit nombre de défections avait eu lieu : tout d'abord le fils de Maria Zabini, qui devait rejoindre sa mère dans ses rangs, et qui avait subitement disparu le jour de son anniversaire.

Ensuite, la fille de Parkinson, qu'il n'avait quasiment jamais vue et qu'il aurait dû rencontrer de la même façon qu'il rencontrait les femmes et les filles des autres Mangemort…

Il y avait aussi Rogue… à cette seule pensée, sa colère reprit. Rogue, l'espion. Rogue le traitre ! Qui avait profité de son absence pour le trahir, Lui ! Alors qu'il avait partagé avec lui ses projets pour devenir immortel. Il avait bien été obligé de lui en parler, étant donné qu'il lui avait demandé de lui fabriquer une potion en ce sens ! Chose qu'il n'avait pas su faire, d'ailleurs !

Et enfin, il y avait Drago… Lucius semblait croire que son fils restait fidèle à sa cause… Mais il n'avait pas encore montré à quel point ! Il n'avait encore rien tenté pour le prouver, et les informations qu'il leur envoyait étaient sans intérêt pour lui.

Il se leva de son fauteuil, et passa entre ses Mangemort agenouillés sans les voir. Il n'avait toujours pas trouvé la solution à son problème !

« Maître… excusez-moi de vous importuner… »

« Montague. Comme oses-tu interrompre mes pensées ! »

« Pardonnez mon audace, Maître… mais j'ai peut-être une solution, Maître… » Le Mangemort tremblait, même s'il essayait de ne rien laisser paraître. Il ne savait pas si son intervention allait le condamner ou bien au contraire lui apporter la reconnaissance de son Maître qu'il attendait depuis tant de temps.

« Tu as intérêt à être convaincant ! »

Montague se leva, mais garda toujours les yeux baissés sur ses chaussures et prit la parole.

« Maître… il y a dans le Château une armoire dans laquelle j'ai été enfermé un jour par deux traîtres à leur sang. Cette armoire possède une jumelle. Si vous entrez dans l'une, vous pouvez ressortir par l'autre. Quand je me suis retrouvé coincé dans cette armoire, je me suis retrouvé dans la boutique de Barjow & Beurk, et c'est comme ça que j'ai pu rentrer chez moi. Il y a de fortes chances que cette armoire soit encore au magasin. Le seul souci, c'est que je n'ai aucune idée de l'endroit où se trouve sa jumelle à Poudlard. »

« Et donc, il est possible que l'on sorte dans un endroit infesté d'Aurors ! C'est peut-être ce que tu souhaites, aussi ! ENDOLORIS ! »

Le Mangemort s'écroula et hurla de douleur. Voldemort laissa un instant exprimer sa colère : il avait besoin de calmer ses nerfs. Mais c'était la seule solution qu'ils avaient… pas forcément la meilleure, mais la seule. Il leva sa baguette pour arrêter le sortilège.

« Très bien, Montague, comme c'est toi qui as trouvé cette solution, et que tu connais déjà cette armoire, tu iras en éclaireur. Nous attendrons devant celle de la boutique que tu reviennes. »

« À vos ordres, Maître. » Et il se releva avec peine.

« Nous allons mettre au point un nouveau plan d'attaque et je vais faire venir les vampires. Il faut que nous soyons à Poudlard demain soir, à la tombée de la nuit. »