Chapitre 2 -Le Contrat Magique
Magnifique dans son costume du même gris que ses yeux, ses chaussures cirées, sa cravate nouée et ses cheveux platine bien plaqués en arrière, Drago Malefoy s'approchait lentement de l'entrée du Ministère de la Magie. Si son apparence extérieure montrait un jeune homme de presque vingt ans, séduisant et sûr de lui, l'intérieur était tout autre…
Sa nuit avait été pour le moins agitée. Ses cauchemars, peuplés de types tous plus revêches les uns que les autres, courant après lui pour le tabasser ou l'emmener en prison, l'avaient tenu éveillé une bonne partie de la nuit.
Soufflant un grand coup, il entra par la porte que seul un Sorcier aurait pu voir et épingla son badge au niveau de la pochette de sa veste. Lentement, il regarda autour de lui et se fit la remarque que l'atrium avait bien changé depuis la dernière fois qu'il y avait mis les pieds un an plus tôt, alors qu'il se présentait à son procès. La fontaine était toujours là, mais les statues avaient été modifiées. Désormais, on y voyait tout un groupe hétéroclite de créatures magiques et de sorciers, le sourire aux lèvres, semblant vivre en harmonie et œuvrer pour un seul et même avenir. Drago sourit malgré lui à cette vue et passa son chemin.
Le sol était fait d'un marbre vert foncé et noir, et toujours autant de cheminées aux flammes vertes se découpaient dans les murs tout autour. Des dizaines de sorciers et de sorcières allaient et venaient dans tous les sens, un air pressé et affairé sur le visage, d'autres portaient des piles de dossiers tellement hautes qu'elles ne pouvaient clairement tenir que par magie.
Des cliquetis sur sa gauche attirèrent son attention et, voyant que c'était par là qu'il devait se diriger, il avança dans cette direction, se trouvant devant une petite file de personnes qui attendaient l'un des six ascenseurs.
S'arrêtant à son tour, il prit place derrière une vieille dame portant un grand chapeau rose muni d'une gigantesque plume. Sentant une présence derrière elle, la femme se retourna et, lisant l'inscription sur le badge de Drago, lui renvoya une moue dédaigneuse.
Hé voilà ! pensa le jeune homme,ça commence ! Elle va arrêter de me fixer cette vieille bique ? Au moment où il allait perdre patience et invectiver l'importune, l'ascenseur arriva et la femme s'y engouffra. Drago préféra attendre le suivant… Il n'était pas en retard.
Après une ascension quelque peu chaotique dans une des cabines plus ou moins bringuebalantes, il sortit enfin au niveau 4, seul. Le couloir dans lequel il avança était indéniablement long et… coloré. En tout cas, pas du tout à quoi il s'était attendu. On devinait aisément de quelle Maison de Poudlard venaient la plupart des employés qui avaient leurs bureaux ici ! La moquette qui tapissait le sol était d'un rouge sombre et chaleureux, et les portes étaient toutes dorées. Les nombreux portraits qui ornaient les murs clairs le regardaient en souriant et le saluaient comme s'ils le connaissaient.
Drago secoua la tête de dépit et chercha la porte numéro 9, qu'il trouva facilement grâce à la présence d'une certaine personne qu'il aurait aimé revoir dans d'autres circonstances… En effet, devant la porte où était disposée une petite rangée de chaises, était assis, la tête baissée, Théodore Nott, son ancien condisciple de Serpentard, pris dans la contemplation de ses chaussures.
D'une toux discrète, il s'annonça et Nott releva vivement la tête. Il poussa un petit rire sans joie en le regardant.
– Alors ? entama Drago pour dissiper le moment de gène. Je vois que le Ministère n'a oublié personne… ironisa-t-il.
– Ouais… et Goyle est déjà dans le bureau, l'informa Nott en désignant la porte close d'un signe de tête.
– Je suis étonné de ne pas voir Crabbe… à moins qu'il ne soit déjà passé ? demanda le blond alors que Nott faisait une tête bizarre. Qu'est-ce que j'ai dit ?
– Et bien en fait, répondit-il, Crabbe a fait un scandale quand il a appris qui était son Tuteur… Il est sorti en trombe du bureau en criant, je cite : « Je n'irai jamais chez ces Sang-de-Bourbe de Crivey ! » Il a voulu s'enfuir, mais bien sûr, il a vite été rattrapé…
– Quel abruti ! s'énerva Drago. Il vient de perdre toutes ses chances d'avoir une vie normale après ça !
– Ouais, c'est sûr… constata Nott. Mais, tu sais, Drago, je le comprends un peu…
– Théo…
– Non, non, écoute-moi. Je ne suis pas en train de dire que je vais faire un scandale comme il l'a fait ! Je ne suis pas idiot ! Mais… Je t'avoue que vivre pendant un an chez les Moldus… et au milieu d'eux… Drago, nous n'avons jamais connu que la magie !
– Je sais, répondit le blond, dépité. Mais, avons-nous le choix ? Il nous reste quand même nos baguettes… tenta-t-il pour le rassurer, et lui aussi par la même occasion.
– En espérant qu'ils nous laisseront nous en servir !
– Ne parle pas de malheur ! s'insurgea Malefoy
Mais ils ne purent rien rajouter d'autre puisque la porte s'ouvrit pour laisser passer un Grégory Goyle à la mine revêche suivi d'un homme d'une trentaine d'année, au regard bienveillant et au sourire franc. Ils se saluèrent d'un signe de tête alors que Théodore Nott entrait à son tour dans le bureau en refermant la porte.
Environ une demi-heure plus tard, la porte s'ouvrit de nouveau et Nott sortit avec un sourire contrit aux lèvres, accompagné d'une femme d'une quarantaine d'années, qui lui parlait doucement.
Le cœur battant, Drago se leva et entra à son tour, refermant la lourde porte dorée derrière lui. Il reconnut son ancien professeur de Défense Contre les Forces du Mal et sa respiration s'accéléra imperceptiblement à ce souvenir.
L'homme leva la tête du document qu'il venait de parapher et adressa à son visiteur un sourire encouragent, lui intimant d'un geste de la main à prendre place en face de lui.
– Je suis à toi dans deux minutes Drago. Juste une ou deux petites signatures et nous pourrons discuter.
Le concerné ne répondit rien, se contentant de hocher la tête, tout en laissant ses yeux gambader autour de lui. Des cadres de photos sur le bureau attirèrent son attention. Une où il reconnut le Lycanthrope, mais beaucoup plus jeune, accompagné de celui qu'il reconnut comme Peter Pettigrow, et de deux autres types, un, le portrait craché de Potter, son père, sûrement, et l'autre, qu'il reconnut comme Sirius Black, un cousin de sa mère.
Un autre portrait comptait une bonne cinquantaine de personnes, l'Ordre du Phénix, en déduisit-il puisqu'au milieu, il reconnaissait bon nombre de membres de l'ancienne Armée de Dumbledore, parmi lesquels le fameux Trio d'Or, Longdubat, Lovegood et toute une flopée de Weasley.
Et enfin, un dernier cadre, plus petit, où il reconnut sa cousine Nymphadora Tonks épouse Lupin tenant dans ses bras un bébé de deux ans, semblant jouer à qui changerait sa couleur de cheveux le plus de fois possible, en riant aux éclats.
– Voilà, fit la voix de Lupin, ramenant ainsi Drago au moment présent.
Il se redressa sur sa chaise, attendant que l'homme continue.
– Donc, Drago, tu sais pourquoi tu es ici, n'est-ce pas ?
– En effet, Monsieur.
– Bien. Alors je vais te poser quelques questions, juste pour vérifier tes motivations, puis je ferai entrer ton Tuteur, signala-t-il en désignant une porte derrière son bureau.
Drago se tût, tentant de garder son esprit le plus clair possible.
– Tout d'abord, que penses-tu de l'idée de vivre chez les Moldus pendant une année entière ?
Drago réfléchit un moment. Il voulait faire bonne impression, mais ne voulait pas non plus faire croire que cette perspective ne lui faisait ni chaud ni froid.
– Je pense que cela sera une expérience extrêmement enrichissante que peu de Sorciers de ma… condition ont la chance de vivre, fit-il d'un ton qu'il voulait assuré, digne du Prince des Serpentard en personne.
– Très bien. C'était exactement ce qu'il fallait que tu dises… Si tu voulais être élu Miss Sorcière Hebdo ! l'informa Lupin avec un regard appuyé. Drago, dit-il en abandonnant tout faux semblant, il n'y a personne à impressionner, ici. Ne me raconte pas ce que tu crois que j'ai envie d'entendre… Je veux connaitre tes impressions. Réellement.
– Bien Monsieur. Drago souffla, et, le cœur battant, répondit à l'homme : en fait, je ne sais pas, Monsieur, pour tout vous dire, je ne connais rien aux Moldus. J'ai toujours vécu entouré de magie. Je ne sais rien faire sans ma baguette ! s'emporta-t-il. J'ai du mal à l'avouer, mais je suis terrorisé à l'idée de vivre entouré de Moldus… Mais je vais tout faire pour y parvenir le mieux possible…
Il se tut, conscient qu'il venait d'avouer une de ses faiblesses devant son ancien professeur. Il se rendit compte qu'au contraire, cela lui faisait du bien, alors il continua :
– Et pour finir, j'ai peur de tomber dans une famille qui voudra me faire payer pour mon passé… Je ne suis pas un Mangemort ! ajouta-t-il la voix tremblante. Même si j'ai cette horreur sur mon bras, je ne le suis pas !
– Merci Drago… pour ta sincérité. Je pense que j'ai trouvé la famille idéale pour toi, dit-il mystérieusement.
Les autres questions portèrent, entre autres, sur la façon dont il envisageait son avenir et sur ce qu'il vivait depuis la fin de la guerre.
À la fin de la discussion, Lupin se leva et se dirigea vers la fameuse porte derrière lui. Drago se raidit, plein d'appréhension, et se redressa sur sa chaise, le cœur battant, attendant que son Tuteur fasse son entrée.
Il posa ses yeux sur la jeune femme qui venait d'entrer à la suite de Lupin et il eut l'impression de rater une marche, alors qu'elle se figeait, elle aussi, les poings serrés.
– Remus, est-ce que c'est une blague ? entendit-il chuchoter.
– Hermione, je croyais que tu étais volontaire… souffla Lupin, dépité.
– Oui, mais là… Avec lui ? Et il va falloir que je l'accueille chez moi ?!
– Il est ici et ilentend tout ce que tu dis, Granger ! pesta Drago qui tentait de garder contenance face au désespoir qui s'insinuait lentement mais sûrement en lui. Faut pas croire, continua-t-il, ça ne m'enchante pas plus qu'à toi !
– Excuse-nous, Drago, nous revenons dans une minute, fit Remus en entrainant Hermione dans la pièce qu'elle venait de quitter.
– Hermione, la raisonna Lupin aussitôt la porte refermée, tu as dit toi-même qu'il fallait leur donner une seconde chance ! Nous en avons tous discuté avec Kingsley. Et puis… dois-je te rappeler que c'est TOI qui as lancé cette idée quand King's nous a demandé de réfléchir à ce projet ?
– Je suis d'accord, Rem', mais… lui ? Tu sais tout ce qu'il m'a fait subir pendant toutes ces années ? Et puis… Il était présent quand sa tante m'a torturée ! Et il n'a pas levé le petit doigt ! s'énerva l'ancienne Gryffondor.
– Hermione, s'exaspéra l'ancien professeur en fermant les yeux et se pinçant l'arrête du nez, tu sais bien qu'il n'aurait pas eu le choix, de toute façon. Imagine ce qui se serait passé s'il avait dit ou fait quelque chose…
– Oui, je sais, reconnut-elle à contre cœur. D'abord, il serait sans doute mort, et ensuite, Harry n'aurait pas pu lui prendre sa baguette et donc devenir le vrai maître de la Baguette de Sureau…
– Exactement. Et puis, je pense vraiment que tu peux l'aider… Malgré tout ce que l'on a pu croire et ce qu'il a montré pendant toutes ces années, je reste persuadé qu'il n'a pas un mauvais fond…
– Si tu le dis, répondit-elle avec une moue dubitative.
– Tu sais, il est terrorisé.
– Pardon ?!
Hermione n'en croyait pas ses oreilles : elle n'imaginait pas le Grand Drago Malefoy, Prince des Serpentard, Monsieur-je-suis-sûr-de-moi-et-je-garde-la-tête-froide-en-toute-circonstance, avoir peur de quelque chose !
– Il l'a même avoué : il ne connait rien aux Moldus… Tu es la personne la plus adaptée pour lui montrer ce qu'il ne connait pas. Je suis persuadé que si l'on passe au-delà de nos préjugés, c'est un garçon qui gagne à être connu ! argumenta Remus avec la sagesse qui l'avait toujours caractérisé.
– Bon… Je veux bien essayer… Mais je te jure qu'à la moindre incartade ou à la moindre insulte, je te le ramène ici pour qu'une autre personne que moi s'en charge !
– Entendu… Allez, viens… Ne torturons pas l'esprit de ce pauvre garçon plus longtemps…
Lupin retourna dans son bureau, Hermione derrière lui.
– Bien, tout est arrangé… Drago, tu iras vivre au sein de la famille Granger pendant une année, à compter de demain. Et Hermione sera ta Tutrice. Je suis certain que tous les deux ferez en sorte de rendre cette cohabitation, la plus vivable possible. Si vous voulez bien, nous allons procéder à la signature du Contrat Magique.
Il sortit un parchemin d'un tiroir de son bureau et le posa face à Malefoy, pendant que celui-ci se rapprochait pour en faire la lecture et qu'Hermione prenait place sur le fauteuil à côté de lui, attendant de pouvoir signer à son tour le document – qu'elle connaissait par cœur pour avoir contribué à sa rédaction.
Drago ne dit rien, se contentant de hocher la tête en gardant les dents serrées, puis commença la lecture du Contrat :
Contrat Magique entre le Tuteur et sa Pupille
Dans le cadre du Programme d'Insertion des Jeunes Sorciers et Sorcières dans le Monde Molduvoici les termes du Contrat Magique auquel devront se plier le Tuteur et sa Pupille.
Un manquement à un seul de ces termes entrainera des sanctions qui resteront à la discrétion du Département d'Insertion du Ministère.
CHAPITRE 1 : LE TUTEUR
1) Devra :
- Accueillir sa Pupille au sein même de sa famille ;
- Mettre tout en œuvre pour que l'Intégration de sa Pupille se passe dans les meilleures conditions (moyens matériels, immobiliers et mobiliers) ;
- Fournir à sa Pupille une chambre individuelle afin de préserver son repos et son intimité ;
- Rendre un rapport mensuel sur l'évolution de l'insertion de sa Pupille ;
- Participer aux réunions d'informations régulièrement mises en place par le Département d'Insertion ;
- Distribuer régulièrement à sa Pupille l'argent fourni par les Fonds du Ministère afin qu'il puisse l'utiliser comme bon lui semble ;
- Faire preuve de respect envers la Pupille qui lui ait confiée.
2) Ne devra pas :
- Mettre délibérément sa pupille dans une situation de danger pour lui ou pour les autres ;
- Refuser les visites concernant la famille ou les amis de sa Pupille (l'assistance d'un Agent du Bureau des Aurors est possible si le Tuteur le juge nécessaire) ;
- Utiliser une quelconque forme de châtiment (corporel, humiliation…) (La pupille est dans ce cas-là orientée vers un autre Tuteur, et le Tuteur incriminé rayé de la liste des volontaires du Ministère) ;
- Tenir rigueur des éventuels anciens faits et gestes de sa Pupille (si d'autres faits venaient à être reprochés, le Département d'Insertion est naturellement disposé à les entendre lors du rapport mensuel).
CHAPITRE 2 : LA PUPILLE
1)Devra :
- Remettre sa baguette magique à son Tuteur dès le début de la cohabitation et ce, jusqu'au terme du contrat (la restitution de ladite baguette avant le terme du contrat reste à la seule charge du Tuteur) ;
- Garder le Secret Sorcier devant les Moldus ;
- Suivre son Tuteur dans tous ses déplacements, hormis ceux dont le Tuteur n'y voit pas un intérêt concernant les clauses du contrat ;
- Faire preuve de respect envers son Tuteur, sa famille ainsi que toutes les personnes et lieux qui lui seront présentés.
2)Ne devra pas :
- Employer des termes injurieux envers les Moldus et les Nés-Moldus ;
- Attenter à la sécurité de son Tuteur ou de sa famille (le contrat est directement rompu dans ce cas-là, et aucun recours ne peut être demandé par le prévenu qui perd ainsi toute chance de réintégration) ;
- S'éloigner de son Tuteur pour quelque raison que ce soit, sans en avoir au préalable demandé l'autorisation à celui-ci ;
- Exercer toute forme de pression envers son Tuteur ou sa famille dans le but d'influencer leur jugement lors du rapport mensuel.
Drago était abasourdi. Il devait donner sa baguette à Granger ! Et elle était dans son droit si elle décidait de ne lui rendre qu'à la fin de son Insertion ! Il serra les poings si fort que ses phalanges commencèrent à blanchir et il était tellement en colère que ses pupilles se dilatèrent jusqu'à faire disparaître presque totalement le gris de ses yeux.
Changements qui ne passèrent pas le moins du monde inaperçu aux yeux des deux autres personnes présentes. Lupin regarda Hermione lui intimant silencieusement de prendre la parole. Ce qu'elle fit après avoir prit une ou deux inspirations :
– Je sais ce qui te met en colère Malefoy, commença-t-elle avec une voix qu'elle espérait affirmée. Mais saches que je ne te prendrai pas ta baguette.
La colère de Drago fondit comme neige au soleil, vite remplacée par la plus totale incrédulité.
– Pardon ?!
– Tu as très bien compris.
– Où est le piège, Granger ? demanda-t-il tout de même, d'une voix neutre.
– Il n'y en a pas Malefoy. Il ne tient juste qu'à toi de tout faire pour la garder… répondit-elle, faisant s'écarquiller les yeux redevenus gris de son ancien condisciple de Poudlard.
Puis, lui intimant de faire de-même, elle prit la plume posée sur le bureau et apposa sa signature.
– Bien, parfait ! acquiesça Lupin en se levant, les enjoignant d'en faire autant, une fois que la deuxième signature fut appliquée. Il ne me reste qu'à vous souhaiter bonne chance pour la suite. Je vous retrouve lors de la première réunion dont vous recevrez la convocation par hibou. À bientôt.
– A bientôt, Remus, salua Hermione.
Et Drago se contenta d'un hochement de tête.
