Note de l'auteur : Chanson ayant servi de titre à ce chapitre : Destinée, de Guy Marchand. Et oui, je sais que cette chanson est une blague, mais voilà, je l'aime bien moi cette chanson... Et puis, ça va bien à nos deux héros ! Et mes choix musicaux sont pleinement assumés ! Na !

Bonne lecture,

Lili.


~Destinée~

Debout dans le couloir de l'internat, son oreiller dans les mains et vêtu de son pyjama All Might, Izuku essaya de se convaincre de frapper à la porte close qui lui fait face. Cela faisait maintenant une semaine que Katsuki et lui étaient revenus de leur étrange périple. Ils avaient repris le chemin des cours, les entraînements avec la classe ou seuls tous les deux, avaient retrouvé leurs amis et leurs professeurs, leurs habitudes aussi. Et cela faisait donc une semaine qu'Izuku ne dormait que quelques malheureuses heures par nuit.

Il avait beau être totalement épuisé le soir et sombrer dans les bras de Morphée sa tête à peine posée sur l'oreiller, il se réveillait toujours quelques heures plus tard, transpirant, larmoyant et appelant désespérément Kacchan. Izuku n'en pouvait plus de ces cauchemars qui écourtaient ses nuits. A chaque fois, il lui était impossible de retrouver le sommeil après. Dès qu'il fermait les yeux, il revoyait son ami d'enfance se faisant fouetter sur le gibet ou disparaissant dans l'eau sombre et dangereuse du tsunami.

Il avait beau se rassurer, se dire que non, Katsuki était vivant, deux étages plus haut : rien n'y faisait. Impossible de se rendormir. Et ses nuits écourtées commençaient à se ressentir. Outre les cernes qui se dessinaient un peu plus chaque jour sous ses yeux, Izuku s'était plus d'une fois surpris à somnoler en classe. Hier, il avait même failli s'endormir dans le vestiaire, à moitié nu et une chaussette à la main. Si ses camarades n'avaient pas brusquement éclatés de rire, pour il ne savait quelle raison, nul doute qu'il se serait mis à ronfler là, assis sur le banc.

Bref, Izuku avait conscience qu'il devait réussir à faire au moins une nuit correcte. Mais voilà, à part en allant demander des somnifères à Recovery Girl, ce dont il n'avait vraiment pas envie, il ne voyait qu'une seule et unique solution. Et c'était bien pour ça qu'il était là, devant cette porte close, à une heure trente du matin, son oreiller dans les bras. Mais il hésitait, ne pouvant s'empêcher d'appréhender la réaction de l'occupant de la chambre.

Certes, depuis leur retour, sa relation avec Katsuki semblait s'être nettement améliorée. Ce n'était pas grand chose : des regards complices, des effleurements innocents de temps en temps. Évidemment, Katsuki lui criait encore dessus à la moindre occasion, mais c'était aussi comme ça qu'ils fonctionnaient tous les deux. Et Izuku serait définitivement paumé si Katsuki ne lui criait plus dessus de temps en temps.

Oui, les choses avaient changé entre eux. Après tout, il y avait bien longtemps que Katsuki ne le taquinait plus sans méchanceté. Pourtant, pas plus tard que ce soir, il l'avait fait. Izuku se sentit sourire. Cela s'était passé quelques heures plus tôt, dans la salle commune de leur dortoir. Izuku discutait avec Ochaco , discussion passionnante au sujet de la dernière intervention du Dieu Sylvestre qui avait évité un carambolage monstre sur la voie rapide.

Pris dans leur conversation, Ochaco et Izuku s'étaient inconsciemment rapprochés l'un de l'autre. Mais un mouvement dans le dos de la demoiselle avait attiré le regard d'Izuku. Un peu étonné, il avait alors vu Katsuki le fixer avec un air moqueur. Puis, Katsuki s'était mis de profil, le visage tourné vers lui, il avait levé une jambe en pliant son genoux, posé un bras en travers de ses pectoraux et levé l'autre en l'air.

Katsuki avait gardé la pose quelques secondes, le temps d'un clin d'œil. Mais cela avait suffi pour qu'Izuku se souvienne soudainement du dessin d'Ochaco, nue, que le blond avait fait dans le carnet. Se rendant brutalement compte de la proximité physique avec sa camarade, Izuku avait reculé précipitamment en bafouillant des paroles incompréhensibles et en rougissant furieusement.

Ochaco l'avait regardé, surprise, et lui avait demandé s'il allait bien, lui faisant prendre conscience du ridicule de la situation. En bégayant, il avait tenté de rassurer son amie, avant de fusiller des yeux un Katsuki hilare. Hilarité qui avait brusquement cessé quand Kirishima avait demandé au blond ce qu'il y avait de drôle.

- Mêle toi de ton cul, tête d'ortie ! avait rugi Katsuki avant de partir vers sa chambre.

Mais le léger sourire qui flottait encore sur ses lèvres démentait son soi-disant énervement.

Chassant ses souvenirs, Izuku prit son courage à deux mains et toqua à la porte devant laquelle il se tenait depuis de longues minutes. Il s'attendait à devoir attendre un long moment, sûrement même à devoir frapper plusieurs fois, mais à sa grande surprise, la porte s'ouvrit presque immédiatement.

- Quoi ? grogna l'occupant.

- Euh... c'est euh... tu vois... je... bafouilla Izuku soudainement incapable d'expliquer ce qu'il faisait là.

Une main lui agrippa brutalement le bras et le tira en avant, le faisant entrer dans la chambre. Izuku sursauta en entendant la porte claquer dans son dos. Doucement, il se retourna pour faire face à celui qui visiblement ne dormait pas malgré l'heure tardive. Sans vraiment s'en rendre compte, il détailla le visage de son hôte, notant les légères cernes sous les yeux écarlates et les traits tirés.

- Kacchan ? demanda-t-il doucement.

Mais il ne reçut aucune réponse. Au lieu de ça, Izuku se sentit poussé vers le lit une place, où Katsuki s'effondra sans aucune grâce.

- Ramène toi, grogna-t-il en se décalant contre le mur pour lui faire de la place.

Infiniment reconnaissant envers son ami d'enfance, Izuku se glissa sur le matelas, posant son oreiller à côté de celui du blond.

Ayant peu de place, Izuku se rapprocha autant qu'il put du corps allongé près de lui, tout en essayant de ne pas trop le toucher. Katsuki soupira lourdement et, passant un bras autour de sa taille, le ramena contre lui, lui calant la tête sous son menton.

- Arrête de te tortiller, putain !

- Merci Kacchan, souffla Izuku en se calant confortablement dans l'étreinte de Katsuki.

- Cauchemar ? demanda ce dernier.

- Oui, avoua Izuku.

- Moi aussi...

L'aveu soufflé du bout des lèvres toucha Izuku qui glissa l'un de ses bras dans le dos du blond, serrant le tee-shirt noir de celui-ci dans son poing.

Aucun d'eux n'ajouta quoi que ce soit et le marchand de sable vint enfin les cueillir tous les deux pour les emporter au pays des rêves. Quand le réveil sonna le lendemain matin, ils avaient eu une fin de nuit reposante et sans cauchemars, rassurés par la présence l'un de l'autre. Ils n'en parlèrent pas, n'en discutèrent pas entre eux. C'était un arrangement silencieux, un accord tacite. Et trois nuits par semaine environ, ils dormaient ensemble, ce simple fait suffisant à chasser les cauchemars qui hantaient leurs nuits.

~oOo~

Assis dans le bureau du proviseur, Izuku, Katsuki et Aizawa écoutaient en silence les explications du chef de la police, secondé par Nezu lui-même. Le petit mammifère, d'une espèce pas vraiment identifiée, avait beaucoup travaillé auparavant sur l'évolution des alters et avait donc aidé la police à comprendre le pourquoi du comment de l'étrange voyage spatio-temporel de ses élèves, bien aidé par les aveux rapides des responsables de l'étrange phénomène.

Fuyu et Hinata Shifumi étaient frère et sœur et étaient de grands partisans de l'idéologie de Stain et, par extension, de la ligue des Super Vilains. Désireux de se faire bien voir par Shigaraki et sa clique, ils avaient monté tout un plan pour kidnapper et livrer à la ligue celui qui leur avait échappé quelques mois plus tôt : Katsuki Bakugo. Un plan somme toute assez simple et ingénieux : combiner leurs alters respectifs pour s'introduire à Yuei et embarquer leur cible.

Hinata, l'aînée, avait un alter de ciblage, lui permettant de localiser très précisément une personne ou un lieu ciblé. Pour ça, il lui suffisait d'obtenir soit un peu d'ADN de la personne soit un morceau du lieu voulu. La femme d'une trentaine d'année avait donc surveillé de près les allées et venues du blond, désespérant un peu en voyant que ce dernier ne sortait que très peu de l'académie et toujours sous surveillance.

Dépitée, elle avait donc fait les poubelles, espérant y trouver quelques cheveux blonds du concerné. Hélas, là encore elle avait fait chou blanc. C'était finalement par un hasard total qu'elle était entrée en possession de ce précieux ADN. Lors de l'une des rares sorties du jeune homme, ce dernier avait accidentellement fait tomber de sa poche un kleenex. Elle s'était empressé de le ramasser, absolument ravie de constater qu'il contenait un peu de morve, même un poil de nez, et donc forcément un peu d'ADN.

Fuyu, plus jeune que sa sœur de quelques années, avait lui un alter de déplacement instantané. Son alter n'était pas très puissant et ne lui permettait pas de se déplacer de plus d'une dizaine de mètre à chaque fois. Mais la fratrie Shifumi avait eu l'idée, ingénieuse, de combiner leurs alters. Ainsi, ils pourraient se téléporter directement sur Katsuki Bakugo et l'enlever à la barbe et au nez de tout le monde pour ensuite le livrer à Shigaraki qui les accueillerait sûrement à bras ouvert dans sa petite bande.

Sûrs d'eux, Hinata et Fuyu s'étaient donc positionnés aussi près que possible du mur d'enceinte de Yuei, guettant le bruit caractéristique des explosions de leur cible. Puis, ils avaient lancé leur attaque, si minutieusement préparée et pensée. Malheureusement, les choses n'avaient pas exactement tourné comme ils l'avaient espéré. Pas du tout. A leur grande surprise, un trou noir était apparu derrière eux et les avait aspiré.

Selon Nezu, c'était le risque du point d'altérité. En combinant leurs alters, les deux criminels en avaient involontairement créé un nouveau qu'ils n'avaient pas su contrôler et ce dernier avait en quelque sorte agit de lui-même. Le ciblage de Bakugo avait été efficace, ce dernier se trouvant embarqué dans le trou noir créé par les deux criminels, mais ceux-ci avaient eux-aussi étaient victimes de cet alter.

Le frère et la sœur avaient d'ailleurs vécu un périple assez similaire à celui des deux étudiants. Eux avaient atterri à l'époque des dinosaures, devant échapper à un énorme tyrannosaure. Après ça, ils s'étaient retrouvés au Far West, poursuivis par des indiens en furie, puis à Marseille en pleine épidémie de peste noire, sur le Titanic le jour du naufrage, sur une banquise au beau milieu d'un troupeau de morses en rut, à Salem en pleine chasse aux sorcières et sur un banc de sable désertique, perdu en pleine mer et en plein cœur d'une tornade.

Ils avaient fini leur périple en atterrissant au beau milieu du commissariat. Les policiers n'avaient eu qu'à les ramasser, Hinata et Fuyu étant trop épuisés et mal en point pour se défendre ou fuir. Et ils avaient avoué leur crime sans aucune difficulté, trop heureux de se retrouver dans un environnement bien moins hostile et dangereux que les jours précédents. Depuis leur retour, deux semaines auparavant, ils étaient incarcérés et sous haute surveillance en attendant leur procès. L'incident ne risquait donc pas de se reproduire de si tôt.

En sortant du bureau, Izuku ne put s'empêcher d'agripper le bras de Katsuki qui le regarda, les sourcils froncés.

- Qu'est-ce que t'as encore ? grogna-t-il sans se défaire de la poigne de son ami.

- Un tyrannosaure, la peste noire, une tornade, souffla ce dernier en tremblotant. Heureusement qu'on a pas eu tout ça. Je ne sais pas ce qui est le plus effrayant.

- Les morses en rut, rétorqua Katsuki. C'est ça le plus dangereux. Pour le reste, on s'en serait sorti facilement. Ces deux enfoirés sont juste deux gros nullos pas foutu d'utiliser ce qu'ils ont entre les deux oreilles.

Izuku ne put s'empêcher de sourire, conscient que Katsuki venait de reconnaître qu'ensemble ils s'en étaient bien sortis. Ce fut donc le cœur léger qu'il poursuivit son chemin vers le dortoir.

- Oï Deku ?

- Oui, Kacchan ?

- Tu sais plus marcher tout seul, abruti ?

Constatant qu'il tenait toujours le bras de Katsuki, Izuku le relâcha précipitamment, bafouillant des excuses qui soutirèrent un ricanement moqueur au blond.

~oOo~

Dans les vestiaires, la seconde A se changeait avant de rejoindre le terrain d'entraînement où les attendait leur professeur principal. Cela faisait maintenant deux mois que Katsuki et Izuku étaient revenus de leur étrange voyage. Et si le premier entraînement avait été tendu, tous craignant qu'un nouveau phénomène étrange ne se produise, toute la classe avait enfin dépassé ce stade. L'ambiance dans les vestiaires était donc joyeuse et bruyante, comme d'habitude.

Debout devant son casier, Izuku referma sa combinaison verte tout en jetant un œil autour de lui. Machinalement, son regard se posa sur le dos nu de Katsuki, qui discutait avec Kirishima, son débardeur en main. Son cœur se serra en voyant les quelques cicatrices sur la peau pâle, criant rappel de ce qu'avait subi son ami d'enfance. Pourtant, elles étaient vraiment peu nombreuses à côté de ce que cela aurait pu être.

Entre l'alter de Recovery Girl et son propre alter qui avait l'avantage de lui assurer une peau douce et sans défaut, Katsuki n'avait finalement que quatre cicatrices, légèrement rosées. Mais Izuku ne pouvait s'empêcher de penser au dos lacéré, sanguinolent et infecté qui hantait encore ses nuits quand il voyait ces quatre lignes. Deux étaient assez courtes, parfaitement parallèles sur l'omoplate droite, une autre à peine plus longue mais plus large ornait le flanc gauche.

Et la quatrième, la plus impressionnante, partait du bas de la nuque et dévalait jusqu'à la hanche gauche, barrant celle sur le flanc. Izuku la suivit des yeux, son regard descendant jusqu'à la ceinture du pantalon noir du blond. Ce dernier se pencha pour refermer ses bottes et Izuku se retrouva à fixer le postérieur tendu vers lui. Se rendant compte de ce qu'il faisait, il détourna rapidement les yeux en rougissant.

- Tu te sens bien Izuku ? s'inquiéta Tenya. Tu es tout rouge. Tu as de la fièvre ? Tu veux aller à l'infirmerie ?

- Ah non... bafouilla Izuku embarrassé. C'est bon, c'est rien...

Il s'interrompit en sentant une main se poser sur son front. Surpris, il tourna les yeux, voyant alors Katsuki qui avait enfilé son débardeur entre-temps, près de lui.

- Ka... Kacchan ? bégaya-t-il en se sentant rougir encore plus.

Les sourcils froncés, Katsuki lui prit le visage à deux mains et posa son front contre le sien, augmentant encore plus les rougeurs qui s'étalaient sur le visage du plus jeune.

- Non, t'as pas de fièvre, dit finalement Katsuki en se reculant. Qu'est-ce que t'as sale nerd ?

- Ri... rien ! assura Izuku en agitant frénétiquement les mains devant lui sous les regards soucieux de ses camarades.

- C'est peut-être parce que tu tortillais du cul juste sous son nez, rigola Mineta.

- Je ne tortille pas du cul, le pruneau ! rugit Katsuki en agrippant le col du mini-héros en devenir. Et si tu dis ça, c'est que tu l'as regardé mon cul, hein ! Pervers !

- Vu sa taille, plaisanta Denki, c'est le seul truc qu'il peut regarder sans lever les yeux !

Mineta remercia intérieurement le blond électrique d'être intervenu, détournant ainsi l'attention de l'explosif qui le relâcha sans douceur avec un sourire narquois.

- En plus, c'est vrai que tu as un beau cul, soupira Denki avec envie. Comment tu fais ? Moi j'ai beau faire pleins d'exercices, j'ai toujours le cul tout plat.

- Pas si plat que ça, intervint Kirishima en jetant un œil critique sur l'anatomie fessière de son ami.

- C'est important un beau postérieur ? s'enquit Shoto avec une sincère curiosité.

Tout en finissant de se préparer, les adolescents discutèrent donc de l'importance d'avoir un postérieur bien fait, et surtout de la difficulté à obtenir un résultat à la hauteur de leurs espérances. Ravi que la conversation se soit détournée de lui, Izuku garda la tête baissée, se dépêchant d'enfiler les divers éléments de son costume. Il sentait parfaitement le regard scrutateur de Katsuki sur lui et ne tenait pas à l'affronter.

Depuis quelque temps, il se surprenait à observer de plus en plus son ami d'enfance. Bon, il l'avait toujours observé, mais ce n'était pas le même genre d'observation. Pas du tout. Il lui arrivait de passer de longues minutes à détailler les traits de son visage, ou la manière dont ses cheveux blond caressaient sa nuque. Il s'était plus d'une fois perdu dans la contemplation des mains si habiles de son ami d'enfance, surtout quand ce dernier cuisinait ou écrivait.

Et ça, c'était sans compter tous les moments gênants où il bloquait sur le torse nu de son camarade quand ils se changeaient ou se croisaient en sortant de la douche. Les nuits où ils dormaient ensemble, Izuku pouvait s'endormir en contemplant le cou de celui dont il squattait le matelas. Bref, il matait clairement Katsuki, même s'il ne le faisait pas exprès et qu'il en était le premier gêné.

Ayant fini de se préparer, Izuku quitta le vestiaire en compagnie de ses amis. A quelques mètres devant lui, Kirishima et Kaminari discutaient joyeusement aux côtés de Katsuki. Machinalement, Izuku posa les yeux sur le dos de ce dernier. Un mouvement lui fit baisser les yeux et il se sentit rougir en remarquant le léger tortillement du postérieur qu'il avait un peu trop regardé plus tôt.

Relevant brusquement les yeux, Izuku tomba directement sur le profil moqueur de Katsuki. Ce dernier se déhancha un peu plus, son rictus narquois s'agrandissant en voyant les rougeurs d'Izuku s'étendre à vitesse grand V sur ses joues. Katsuki mima un "Coincé" rieur et Izuku bouda, comprenant que le blond se moquait gentiment de lui. Vexé, il pressa le pas pour le dépasser, lui pinçant discrètement une fesse au passage.

- Aïe ! Putain de sadique !

Le rugissement de Katsuki surprit les apprentis héros, mais la réponse amusée d'Izuku les choqua encore plus :

- Mais c'est ce que tu aimes, Kacchan !

- Putain, je vais t'exploser les dents ! Ramène-toi Deku !

Encore sous le choc, leurs camarades virent Izuku partir en courant, riant de bon cœur alors qu'il était coursé par un Katsuki rugissant.

- Il se passe quoi ? s'enquit Mina amusée.

- On aimerait bien le savoir, lui répondit Hanta en fixant le duo qui se faisait arrêter par Aizawa-sensei.

~oOo~

Dans le gymnase, Midnight regardait les deux étudiants qui lui faisaient face, un léger sourire aux lèvres. Elle avait entendu ce qui leur était arrivé un peu plus de deux mois auparavant, aussi avait-elle immédiatement compris la demande des deux apprentis héros. Bien sûr, elle avait accepté. Admettre ses faiblesses, affronter ses peurs, cela demandait du courage selon elle. Et le faire dans des conditions sécurisées était définitivement intelligent.

Adossé contre le mur du bâtiment, Aizawa observait avec attention ses élèves. Ceux-ci avaient décliné la proposition d'un suivi psychologique que leur avait proposé le directeur à leur retour. Mais Aizawa les gardait à l'œil, craignant que leur aventure mouvementée n'ait des répercussions psychologiques importantes. Grâce aux caméras de surveillance du dortoir, il savait que ces deux-là dormaient régulièrement ensemble.

Ce qu'ils faisaient dans l'intimité de la chambre de Bakugo ne le regardait pas, ça ne l'intéressait pas vraiment non plus. En revanche, Aizawa avait remarqué que l'entente entre ses deux élèves les plus problématiques s'était grandement améliorée. Ce petit voyage avait au moins eu le mérite de les rapprocher et d'enterrer définitivement la hache de guerre entre eux.

Aussi avait-il été un peu étonné de voir le duo débarquer un jour dans son bureau pour lui demander de l'aide. Visiblement, deux choses avaient suffisamment marquées les deux adolescents pour les mettre réellement en difficulté : le fouet et le tsunami. Aizawa avait longuement discuté avec eux de ce qu'il pouvait faire pour les aider à affronter ces deux traumatismes, partageant leurs avis sur la question : ils devaient les surmonter.

Aizawa avait commencé par les accompagner à la piscine du lycée. Mais, sans surprise, cela n'avait posé aucun problème aux deux apprentis héros, pas même quand Katsuki était resté longuement sous l'eau, Izuku ayant interdiction formelle d'aller le repêcher. Aizawa les avait donc emmené à la plage, un jour où il faisait beau. Les deux garçons avaient eu un peu plus de mal à s'approcher de l'eau et à y pénétrer, mais au final ça s'était bien passé.

Aizawa était donc passé à la vitesse supérieure, avec l'accord des deux concernés. Embarquant Asui avec eux, après tout l'eau était l'élément de la jeune fille, le professeur avait emmené ses élèves à la plage, un jour de tempête. Si Katsuki n'avait rien dit devant les énormes vagues qui déferlaient sur la plage, se crispant juste un peu. Izuku, lui, avait reculé de quelques pas, agrippant le tee-shirt du blond pour le tirer vers lui.

Ils étaient restés de longues minutes à regarder les vagues, en silence, Izuku accroché au tee-shirt de Katsuki. Puis, Katsuki s'était tourné vers Izuku, avait tendu la main vers lui et avait dit :

- Viens !

Izuku avait pris la main tendue de son ami d'enfance et, ensemble, ils s'étaient approchés de l'eau.

Aizawa et Asui les avaient suivi de près, notant leur crispation, leur hésitation, mais aussi leur farouche détermination. Ces deux-là n'étaient pas décidés à se laisser impressionner, et ils avaient pénétré dans l'eau, main dans la main, avançant lentement jusqu'à ne plus avoir pied. Asui les avait talonnés, prête à intervenir en cas de problème et avait tenu Aizawa informé des évènements grâce à une radio.

Sans surprise, Izuku avait paniqué, mais Katsuki avait réussi à le calmer. Le blond ne semblait pourtant pas plus à l'aise, même si visiblement il contrôlait mieux ses émotions que son camarade. Tous deux semblaient cependant soulagés de retrouver la terre ferme après quelques minutes. Ni Aizawa, ni Asui, n'avaient fait la moindre remarque devant les mains toujours jointes des deux adolescents.

Midnight porta la main à sa ceinture, saisissant son fouet. Elle remarqua immédiatement la tension dans la posture défensive de Bakugo et le léger mouvement de Midoriya qui se rapprocha de son camarade, se mettant légèrement devant lui, prêt à bondir. Elle sourit, amusée. De ce qu'elle savait de ces deux-là et de ce qu'elle avait constaté par elle-même, habituellement, le blond était celui qui fonçait toujours dans le tas. Au vu de leurs positions actuelles, il était évident que Bakugo se préparait à encaisser ou esquiver le coup. Midoriya était quant à lui prêt à foncer droit sur elle. Les rôles étaient inversés.

Levant le bras, elle abattit son fouet dans le vide, le claquement de la lanière résonnant dans le gymnase. La tension des deux étudiants augmenta d'un cran mais ils ne reculèrent pas, prêts à affronter leur professeur et surtout ce fouet qui hantait leurs nuits. Midnight s'élança, restant attentive aux réactions des deux élèves. Le but de l'opération n'était pas de les traumatiser plus, mais bel et bien de les aider à surmonter leurs peurs.

~oOo~

Comment en étaient-ils arrivés là ? Katsuki n'en savait rien mais il appréciait de sentir le corps d'Izuku blotti contre le sien dans son lit trop petit pour deux personnes. Il appréciait tout autant les lèvres de son ami d'enfance posées sur les siennes. Ce n'était pas la première fois que cela se produisait, en excluant les baisers échangés à la Gay Pride de Chicago, quatre mois plus tôt. En fait, cela faisait maintenant presque un mois qu'en plus de dormir ensemble, les deux adolescents s'embrassaient.

Ça avait commencé suite à un incident durant leur apprentissage chez Endevor. Un groupe de vilains s'en était pris au héros incandescent et à ses trois apprentis. Les mettre hors d'état de nuire n'avait pas été très long, ni très difficile, mais en voulant protéger un civil, Katsuki avait été légèrement blessé au bras. Rien de grave, une simple plaie qui avait été soignée en quelques minutes par Recovery Girl.

De retour au dortoir, Katsuki n'y pensait même plus. Jusqu'à ce qu'Izuku ne débarque dans sa chambre, les larmes aux yeux, s'affolant bien trop pour une si petite blessure. Bien sûr, Katsuki l'avait engueulé, lui signalant qu'il avait connu bien pire et qu'il n'y avait franchement aucune raison de s'inquiéter. Mais Izuku ne l'avait pas lâché, allant examiner lui-même l'endroit anciennement blessé.

Bien sûr, Izuku avait refusé tout net de retourner dans sa chambre, et avait donc squatter son lit, s'accrochant à lui comme une moule à son rocher. Pas que Katsuki s'en soit plaint. Dans les prunelles émeraudes de son ami, Katsuki avait vu le fantôme des cauchemars récurrents de ce dernier. Dans le silence de la chambre, seul les murmures incessants d'Izuku étaient audibles.

Lequel des deux avait amorcé le premier contact ? Katsuki n'en savait rien. Etait-ce lui pour faire taire les marmonnements du nerd ? Ou Izuku pour se rassurer ? Peu importait finalement... Tout ce que Katsuki savait avec certitude, c'était que cela avait semblé normal, naturel même, comme si depuis le début ils étaient voués à en arriver là. Une évidence... Alors ils avaient continué, encore et encore... prenant un peu plus d'assurance à chaque baiser échangé.

Comme pour les nuits, ils n'en avaient pas parlé entre eux. De toute façon, Katsuki n'avait jamais été très doué pour parler de ce genre de choses. Taquiner Izuku et discuter de ce qu'il se passait entre eux, ce n'était pas la même chose. Et s'il prenait plaisir à voir les rougeurs envahir les joues de son ami d'enfance quand il le charriait gentiment, il serait le premier mal à l'aise si Izuku se mettait à parler d'eux.

Katsuki n'était pas stupide, loin de là. Il avait bien remarqué que depuis leur retour quatre mois auparavant, il regardait plus souvent Izuku. Il s'inquiétait bien plus pour lui aussi. Il avait rapidement remarqué les cernes et les traits tirés du plus jeune, signe qu'il ne dormait pas assez. Le blond en avait immédiatement conclu que son ami d'enfance faisait des cauchemars. Lui-même dormait moins bien, trouvant étrange de ne plus sentir la présence d'un corps contre le sien, de ne plus se laisser bercer par une autre respiration que la sienne.

Les cris et les suppliques d'Izuku hantaient ses nuits, accompagnés du claquement du fouet et du souvenir cuisant de la douleur insupportable. Combien de fois s'était-il réveillé en sueur, avec l'horrible sensation de se noyer, emporté par la vague dévastatrice de Sumatra ? Combien de fois avait-il tenté de sauver Izuku d'une horde de zombie, d'une pluie de bombes nucléaires ou d'une tribu cannibale ? Il n'en savait rien. Il ne comptait plus.

Aussi avait-il accueilli son ami d'enfance dans son lit avec reconnaissance. Sa simple présence chassait les cauchemars, et si par malheur il se réveillait, sa chaleur et son souffle dans son cou suffisaient à le faire retomber dans les bras de Morphée. Cet arrangement silencieux lui convenait très bien. Et si les cauchemars s'étaient estompés, ne rendant plus forcément nécessaire ces nuits communes, ni l'un ni l'autre n'avaient mis fin à cette étrange habitude.

Non, Katsuki n'était pas stupide, loin de là. Et même si c'était la première fois qu'il ressentait ça, il devinait ce que c'était. Il savait pourquoi il n'aimait pas quand son nerd personnel n'était pas là où il pouvait le voir. Il savait pourquoi il était inquiet dès que cet abruti n'allait pas bien. Il savait pourquoi son cœur accélérait bêtement sa course quand ce crétin lui souriait. Il savait bien pourquoi il aimait tant embrasser son ami d'enfance. Mais l'avouer à voix haute, non clairement, il n'était pas prêt pour ça.

De toute façon, Izuku ne semblait pas avoir besoin de mots pour comprendre. Il ne cherchait pas non plus à discuter de l'évolution de leur relation. Finalement, les choses leur convenaient très bien comme ça à tous les deux. Ils s'entraînaient ensemble, ils dormaient ensemble trois nuits par semaine, et s'embrassaient à l'abri des regards indiscrets. Et si les autres n'étaient pas au courant de ces arrangements, c'était parce que ça ne regardait qu'eux. Ça leur appartenait. Ils verraient bien où ça les mènerait.

Fin.


Commentaire de l'auteure :

Voilà ! C'est fini ! J'espère que ça vous a plu.

Avez-vous notez la référence à une autre chanson dans ce chapitre ? Un indice : Indochine !


Bureau des plaintes des personnages martyrisés :

Assise devant son PC, Lili sirote son coca, très contente d'avoir mis le point final à sa petite histoire. Penchés sur son épaule, Hawks et Aizawa lisent avec attention les derniers paragraphes.

Livide, Katsuki fixe l'auteure avec horreur.

- Pincez-moi ! Je rêve ! Elle n'a pas sous-entendu que j'étais... amoureux de cet espèce de crétin de nerd incapable et abruti ?

- Si, confirme Lili, probablement suicidaire.

- Et d'où tu sors ça putain ?! rugit Katsuki les paumes crépitantes.

- Alors tu vois, si on regarde bien, on voit que...

Pendant que Lili énumère les mille et une raisons pour lesquelles elle pense que Katsuki va bien finir par sauter sur Izuku pour autre chose que lui défoncer la tronche, sous l'œil très amusé d'Hawks, Aizawa se penche alors vers Izuku :

- Et toi ? T'en penses quoi ?

- Ah, elle est sympa son histoire, même si Kacchan prend cher, répond en souriant l'innocent adolescent.

- Laisse tomber, soupire le professeur désabusé.

Se tournant vers les lecteurs, Izuku demande :

- Et vous ? Vous en avez pensé quoi ? Un petit mot pour le lui dire ?