Bonus du chapitre 14 à 16.


Chapitre 14

Semi Eita

Je soupirai, ennuyé. J'avais posé le menton sur mon cahier, louchant sur mes notes en écoutant d'une oreille distraite mes camarades qui échangeaient ensemble, se posant des questions ou en apportant des réponses selon l'interlocuteur. Je n'étais pas un mauvais élève, mes notes n'étaient pas médiocres, mais elles n'étaient non plus glorieuses. Je travaillais aussi dur que je le pouvais et que les entraînements me le permettaient, et ce n'était pas facile tous les soirs d'ouvrir ses cahiers quand vous avez déjà épuisé votre réserve d'énergie. Je n'envisageais pas de m'engager en tant que volleyeur professionnel, j'avais d'autres attentes, d'autres projets. J'aimais le sport, j'aimais voir le fruit de mes efforts se répercuter sur mon corps, le rendant attrayant auprès des filles, mais je n'aimais pas assez le volley pour bâtir mon avenir avec lui. De ce fait, il m'était impossible de qualifier cette discipline comme étant ma passion, parce que ce n'était pas le cas. Je n'avais pas le même regard qu'Ushijima quand il était sur le terrain, je n'avais pas envie de faire plus d'efforts après les heures d'entraînements réglementaires et mes pensées ne tournaient pas constamment autour de cette pratique. Moi, ce qui me donnait le sourire, ce qui me dévorait les entrailles et qui occupait tous mes week-ends, c'était la musique.

À se demander pourquoi j'avais intégré ce club alors ? La réponse était assez simple, mais pas la plus saine qui soit. Je venais d'une famille aisée, mes parents dirigeaient une industrie qui employait pas mal de monde dans la région, ils étaient l'un des principaux employeurs autour de Sendai, et ils étaient heureux de voir que leur fils était parfait. J'ai choisi le club de volley pour son prestige, par orgueil.

Shiratorizawa était l'école privée haute gamme de la préfecture de Miyagi, qui proposait beaucoup d'activité de club, mais celui qui faisait la fierté de cette l'école, c'était le club de volleyball masculin. Les autres disciplines n'étaient pas mauvaises et brillaient dans leurs résultats, comme celui d'équitation, qui avait remporté plusieurs concours inter-lycée avant qu'il se retrouve boudé par les élèves à cause d'un accident survenu i ans.

Personne ne m'avait forcé la main pour intégrer le club de volley, j'aurais pu faire autre chose, mais ce choix, il faisait plaisir à mes parents. J'étais beau, gentil, ambitieux et sportif. Cette académie, ce club, il m'apportait une certaine gloire qui ravissait mon égo et mon arrogance, mais surtout, il donnait le sourire à mes parents. En aucun cas ils étaient tyranniques, ils aimaient juste le succès, et à défaut d'être brillant intellectuellement, la renommée du club compensait dans l'équilibre de la balance en apportant de la gloire et de la fierté. Ainsi, j'avais la paix, mes parents étaient contents et je conservais une certaine liberté sans les avoirs sur le dos. Je remplissais les critères de succès et d'excellences qu'ils attendaient de moi et en échange, ma vie était sereine, j'étais libre, libre de faire ce que je voulais de mon temps, libre de jouer de la musique.

Mais pourquoi ne pas avoir été dans le club de musique si c'était ça ma passion ? Pourquoi ne pas leur faire part de ce rêve fou que j'avais de faire carrière dans ce domaine ? Soit dans un groupe ou en solo ? De chanter et de jouer de la guitare ? Ou peut-être les deux ?

Par crainte. La mienne. Je n'étais pas sûr que ce projet soit approuvé par mes parents, ils ne me diraient pas non, mais est-ce que pour autant ils l'accepteraient ? J'en avais des doutes. Le monde de la musique était vaste et très sélectif, rien ne pouvait me garantir d'atteindre mes objectifs et de devenir célèbre. C'était une ambition dangereuse et risquée, c'était l'exacte opposé du club du volley qui était un choix sûr et stable. Le volley était rassurant, sécurisant, alors que la musique en était tout l'inverse, mais elle ne me faisait absolument pas peur à moi, au contraire, elle me prenait par les tripes dès que j'imaginais ce que je pourrais faire après le lycée. J'étais prêt à assumer mes choix, à me préparer pour me lancer une fois diplômé, à trouver un boulot sur le côté et à écumer les bars le soir, à gratter les cordes, de guitare ou vocale, et vivre cela comme une aventure, sans savoir quelles surprises me réserveraient le lendemain. J'étais prêt à me lancer dans ce pari insensé, mais je ne l'étais pas encore à le dire à mes parents. C'était l'étape la plus difficile à passer, et je ne savais pas si je finirai par y arriver un jour tellement cela m'effrayait.

Je voulais vivre dans l'impulsivité, dans l'excès et surtout, de mon talent. Le mien, et non celui des autres.

Je tournai la tête, laissant ma joue reposer sur les pages froides de mon cahier et j'observai Prudence qui siégeait à mes côtés. Le champion de notre équipe avait instantanément réussi à accaparer toute son attention avec seulement quelques mots. Je pouvais remarquer la tension qui résidait dans les épaules de la blonde, le ton un peu plus aigu de sa voix qui se faisait plus douce pour répondre à ses questions. Son corps était beaucoup plus parlant que ses mots une fois qu'on y faisait attention, et là, il disait clairement qu'elle était loin d'être indifférence d'être auprès d'Ushijima.

J'étais un peu jaloux et déçu.

Quand j'avais entendu parler de l'arrivée d'une nouvelle venue tout droit de Tokyo et qui n'était pas japonaise, je l'avais toute suite cherchée des yeux, curieux de voir qui était cette fille, qui était cette créature exotique qui déliait toutes les langues des élèves de cette prestigieuse académie de pète-sec ?

Si déjà être typé européenne la rendait plus que captivante auprès des japonais, la particularité unique de ses yeux et des formes généreuses de son corps m'avait conquis dès que je l'avais trouvé. D'habitude, j'aimais les filles plutôt petites, très fines, aux allures fragiles et timides. Cela éveillait un instinct de protection machiste qui nourrissait mon arrogance et qui me réconfortait dans mon orgueil. Pourtant, Prudence était tout le contraire de ce type de fille, elle était grande, un corps plus épais par ses formes avantageuses et plus sculpté par une pratique sportive. Elle dégageait un charisme de femme de pouvoir, son regard débordait de confiance en elle. Sa prestance, son élégance et son charme européen avait titillé une soudaine curiosité chez moi, comme une nouveauté qu'il me fallait découvrir, me donnant très envie de la courtiser. Ce que j'avais tenté à plusieurs reprises, et je savais que c'était uniquement par arrogance, par prétention de pouvoir prouver que j'étais capable d'avoir une femme comme elle sous mon charme.

Est-ce que pour autant je ressentais de la culpabilité alors que c'était la considérer comme un trophée ? Comme un objet de valeur ?

Non, mon orgueil ne me l'avait pas permis. Néanmoins, j'avais accepté d'abandonner. Même si ça me frustrait de l'avouer, elle avait ignoré toutes mes tentatives sans pour autant se montrer ennuyée ou désobligeante envers moi. Elle ne me regardait pas comme elle regardait Ushijima, et même si je m'en rendais compte maintenant, cela n'empêchait pas à mon égo de se sentir blessé. Puis, j'ai fini par comprendre que mes intentions envers elle n'étaient pas louables, et que je l'avais dragué pour de mauvaises raisons. Ce qui était aussi un peu dur à encaisser pour mon estime de moi-même.

Quand avais-je ouvert les yeux ? Le lendemain du concours, Satori nous avait réuni avec Reon et Hayato en faisant un cinéma pour donner des airs complotistes à cette réunion improvisée. J'étais d'abord dans la négation, j'avais réfuté ses propos qui disaient que Prudence en pinçait pour notre champion et que celui-ci commençait à s'intéresser aux filles depuis que la blonde lui avait embrassé la joue. C'était tout simplement inconcevable dans mon esprit d'avouer que la fille que je convoitais était totalement imperméable à mes charmes parce qu'elle était déjà sous l'effet d'un autre. Et pourtant, les paroles de mon coéquipier m'avait fait réfléchir, et j'étais obligé d'admettre qu'il avait finalement raison. Les signes ne mentaient pas, comparé à mon arrogance. Prudence De Villiers était attirée par Ushijima Wakatoshi et non par moi.

Mais je n'étais pas du genre à me laisser abattre, même si j'étais touché dans ma fierté, j'étais assez mature pour comprendre qu'il ne servait à rien de devenir méprisant envers elle. Toutes les filles ne pouvaient pas toujours tomber amoureuse de moi, mais il fallait avouer que c'était plus que frustrant quand cela tombe sur celle que je convoitais. J'avais donc décidé de passer à autre chose, d'accepter cette vérité et de ne pas pousser à vouloir changer les choses pour que cela rentre dans mon sens. Je devais respecter ses choix et la voir enfin pour sa vraie valeur et non pour ce qu'elle représentait.

J'acceptais ma défaite face à Ushijima.

- Bon, on va manger ? Je meurs de faim et je n'arrive plus à réviser correctement, proposa Hayato en fermant son cahier.

- Ouais moi aussi j'ai les crocs, répondis-je satisfait de mettre enfin un terme à ce calvaire.

L'assemblée réunissait ses affaires dans un accord commun pour répondre à l'appel général de la nourriture qui avait fait l'unanimité.

- Tu manges avec nous Prudence-chan ? Questionna Tendo à travers le brouhaha des cahiers qui se fermaient et du raclement des chaises sur le sol.

La blonde tourna son doux visage vers mon coéquipier et semblait réfléchir à sa proposition.

- Je ne voudrais pas m'imposer, dit-elle poliment avec un fin sourire.

- Ne fait pas de chichi avec nous, rétorqua Tendo en toute franchise. Si tu nous dérangeais, tu ne serais pas ici avec nous, n'est-ce pas ? Questionna-t-il en posant son regard inquisiteur sur moi.

- Évidemment, répondis-je aussitôt, tu es la bienvenue parmi nous Prudence, ajoutais-je en le pensant sincèrement.

Je savais que Tendo m'avait directement posé cette question afin que je puisse affirmer que malgré ma récente difficulté à accepter la situation, j'étais content qu'elle traîne avec nous. Nous étions sept milliards à peupler la terre, et dont au moins la moitié de femme, je n'allais pas me morfondre et devenir méchant juste parce qu'une seule d'entre elles se refusait à moi. Je n'avais peut-être pas eu la meilleure attitude, ni les bonnes intentions envers elle, je n'étais pas un mauvais bougre pour autant.

- Très bien, je vais passer déposer mes affaires dans ma chambre et récupérer une veste, je vous retrouve à la cafétéria ? Demanda-t-elle en me fixant avec un beau sourire sur les lèvres.

- On fait comme ça, répondis-je alors que certains de mes coéquipiers prenaient déjà la direction de la sortie.

Elle hocha la tête et son regard se reporta aussitôt vers Ushijima qui passait à côté d'elle. Maintenant que je le savais, je pouvais plus facilement distinguer ces signes que j'avais ignoré depuis le début. Son regard pétillait quand ses prunelles bicolores se posaient sur l'imposante silhouette du champion, de l'expression ravie qui prenait place sur son visage et parfois même, des rougeurs apparaissaient sur ses joues.

- Ushijima-san, l'interpella-t-elle.

Il se tourna vers elle sans rien dire, il attendait qu'elle poursuive, toujours aussi impassible, enfin presque. Si j'avais toujours comparé Ushijima à un robot à cause de son manque évident d'émotion, que ce soit parce que c'était dans sa personnalité ou par pudeur, je ne pouvais nier l'intensité de son regard dès qu'il la fixait. C'était fort et intimidant. J'observai ces deux adolescents se dévorer du regard, ignorant tout de ce qui pouvait bien se passer dans leur entourage, décuplant l'expression muette que leurs émotions voulaient dire alors qu'ils s'y refusaient à les prononcer de vive voix. Maintenant que je voyais ce tableau dans son ensemble, c'était plus que flagrant que ces deux-là semblaient s'attirer mutuellement, qu'ils semblaient attiser la curiosité de l'autre.

- Je te rends ta veste, dit-elle en faisant descendre le zip.

Il fallait être aveugle pour ne pas voir qu'elle n'avait clairement pas envie de la lui rendre, et seul Ushijima, insensible à ces signaux, ne voyait absolument rien.

- Mohh, tu vas attraper froid si tu l'enlèves maintenant Prudence-chan, minauda Tendo, qui lui aussi avait guetté cette scène comme je l'avais moi-même fait.

- Non, ça va aller ne t'inquiètes pas pour moi, rétorqua-t-elle surprise de l'intervention de mon coéquipier, comme si elle venait de se rendre compte qu'il était encore là.

Tendo sourit, avec LE sourire. Le machiavélique, celui qui disait qu'il avait déjà prévu un plan, et qu'elle venait de sauter dedans à pieds joint. Il se régalait d'avance de la suite des événements. C'était aussi le sourire qui disait qu'il avait déjà une réplique toute prête à dégainer et qu'elle avait d'ores et déjà perdue le combat.

- Il ne faudrait quand même pas prendre le risque alors que la Golden Week commence à peine. Wakatoshi-kun va te raccompagner jusqu'à ta chambre et vous nous rejoindrez ensemble.

Le champion tourna la tête vers lui, écoutant ses propos et hocha la tête, acceptant les directives de son meilleur ami. Tendo, ce fin manipulateur, calculait tous ses coups en utilisant la naïveté du champion pour créer une occasion qui permettait à Ushijima de passer plus de temps avec la blonde, et je devais avouer qu'il jouait finement bien jusqu'ici.

- D'accord, répondit Ushijima avant de reporter son regard sur Prudence. Je te suis, termina-t-il.

La demoiselle rougit aussitôt sous l'intensité et les paroles de notre champion qui ne semblait pas se rendre compte de l'effet qu'il produisait sur elle.

- J'vais prendre tes affaires, ajouta Tendo sans attendre de réponse de la part d'Ushijima et se saisit des biens qui étaient dans ses mains.

- Merci, répondit-il simplement.

- À tout à l'heure, minauda Tendo avec un signe de main complètement fier d'avoir créé cette nouvelle situation entre les deux adolescents.

Je lui emboitai le pas, me dirigeant avec lui vers nos propres dortoirs. Nos chambres étaient voisines donc nous empruntâmes ensemble le même chemin dans les couloirs du bâtiment alors que les autres s'étaient éclipsés bien avant nous.

- Ça va Semi-semi ? Questionna Tendo en brisant le silence qui perdurait depuis plusieurs minutes déjà.

- Oui, et arrête de m'appeler comme ça, tiquais-je pour le surnom horripilant.

Tendo ricana, pas du tout atteint par mon ton agacé.

- Je suis plutôt surpris de te voir prendre aussi bien les choses, continua-t-il. T'es sûr que tu l'acceptes ?

- Pour qui me prends-tu ? Demandais-je de façon rhétorique. Je ne suis pas un monstre qui irais forcer une fille à sortir avec lui. Elle n'est pas intéressée par moi, c'est comme ça, ce n'est pas grave, j'en trouverai une autre.

Nous nous arrêtâmes devant nos portes respectives.

- J'avoue que tu me surprends, je ne pensais pas qu'avec ton arrogance tu allais aussi facilement accepter les choses, dit-il sur le ton de la réflexion. Mais donc, t'es dans le coup avec nous alors ? Reprit-il sans me laisser le temps de répondre à la première partie de sa phrase.

Je soupirai, il faisait référence au plan qu'il avait baptisé : « La parade nuptiale des aigles royaux », qu'il avait expliqué quelques jours plutôt lors de cette fameuse réunion complotiste. Le but étant simplement d'éveiller les sentiments d'Ushijima et de Prudence et les mettre en couple avant la fin de l'année. Reon et Hayato s'étaient engagés à l'aider, moi ce soir-là, muré par mon orgueil, j'étais parti sans donner de réponse, ne voulant pas croire un seul mot de ce qu'il avait dit. Ce soir, j'étais convaincu de la véracité de ses propos, j'en avais eu la preuve durant cette soirée.

- Ouais, j'suis dans le coup, tu peux compter sur moi pour t'aider, répondis-je en rentrant dans ma chambre pour terminer cette conversation.


Chapitre 16

Oikawa Tooru

Je l'avais senti à l'instant où le coach nous avait annoncé que Shiratorizawa nous avait invité à un entraînement intensif de volley dans leurs locaux pendant la Golden Week, que ça allait puer la loose. Et la preuve étant là pour conclure cette fabuleuse analyse de ma part, le monde devrait se fier à mon avis plus souvent.

Si j'avais accepté de passer cinq jours consécutifs dans cette école élitique de mes deux, c'était uniquement pour en apprendre plus sur Ushiwaka. Je voulais connaître ses faiblesses, car il devait forcément en avoir au moins une, personne n'était parfait, et encore moins ce gorille. Mais ce qui m'agaçait le plus depuis notre première rencontre au collège, c'était qu'il arrivait bien à les cacher ses points faibles, et ainsi il paraissait tout puissant aux yeux de tous.

Cette journée s'était aussi mal déroulée que je l'avais pressenti, ce qui n'annonçait rien de bon pour ceux à venir. J'allais comprendre que quatre jours, ça pouvait être très long.

L'ambiance était aussi sinistre que celle qu'on pourrait retrouver dans un cimetière et les locaux puaient le prestige auquel chaque élève qui foulait cette école, avait finis par s'en enorgueillir. À ce stade, Aoba Johsai faisait pâle figure malgré sa notoriété de lycée privée pour les enfants de familles fortunées.

Au matin, alors qu'on faisait un échauffement avec de la course à pied dans une forêt qui entourait le campus démesuré de cette académie, un de leurs professeurs où je ne sais quoi, nous avait exploité comme des esclaves sans aucune raison justifiable, puis nous avions passé le reste de la journée à se faire rétamer par ces aigles arrogants. Et bien sûr, un malheur n'arrivait jamais seul, pour la fin de cette horrible journée, la cerise sur le gâteau, le pompon de la soirée : j'avais trébuché sur un caillou comme le plus grand des idiots. J'étais donc assis sur un rocher, sali à cause de la chute et pour couronner le tout, j'avais la cheville douloureuse.

Il me fallait préciser aussi que j'avais un peu arrangé la vérité. Je n'avais pas eu le courage de dire que ma chute était du à de la maladresse de ma part à cause de la présence d'Ushiwaka, et j'avais inventé une histoire d'insecte volant comme étant le coupable dans cette histoire.

Je levai les yeux vers Ushiwaka en face de moi qui me fixait de son air impassible. Juste le voir m'énervais encore plus, pourquoi était-il si fort ? Pourquoi j'avais l'impression que je faisais tout de travers comparé à lui ? Quelle était sa faiblesse ? Celle que je pourrais exploiter et utiliser contre lui et enfin le battre ! Et s'il pouvait arrêter de me regarder comme ça aussi, c'était juste horripilant !

J'entendis d'étrange bruits de chevaux arrivaient jusqu'à nous et curieux comme j'étais, je détournai les yeux pour observer les nouveaux arrivant.

- Tiens, tiens, mais c'est Prudence-chan sur son cheval de l'enfer ! Taquina de façon sournoise Tendo Satori, que j'avais renommé « le stalker » dû à ses étranges capacités de déduction, en scrutant une fille sur un grand cheval noir, accompagné du fameux professeur qui nous avait traité comme des esclaves en début de journée.

Je n'y faisais pas plus attention que ça au début, si le stalker la connaissait, c'était peut-être parce que c'était sa copine. À cette idée, j'étais dégouté de penser que lui, pouvait être en couple et pas moi, ça serait tellement injuste ! Si quelqu'un méritait d'avoir une copine, c'était bien moi, j'étais une boule d'amour parfait et adorable.

Alors que le seul adulte présent parmi nous s'approcha de moi pour s'enquérir de la situation, mon regard, lui, fut finalement attiré par Ushiwaka, qui avait pivoté vers la demoiselle à l'instant où elle avait posé les pieds au sol pour se tenir entre les deux chevaux pour les maintenir en place. Il n'avait fait aucun pas vers elle, mais son subtil changement de position m'intriguait, pourquoi il avait reporté son attention vers elle ? Qui était-elle ?

J'avais comme la sensation qu'il y avait un truc intéressant et qu'il fallait observer, mon instinct avait flairé quelque chose, j'en étais quasi certain, mais je ne savais pas encore quoi.

La jeune fille était plutôt grande, même si elle semblait minuscule à côté de l'animal aussi noir que l'ébène. Mes yeux se reportèrent aussitôt sur Ushiwaka, qui ne disait rien, il ne lui adressa même pas la parole, il se contentait de simplement la fixer. Je ne serais pas étonné qu'elle se sente gênée face à un tel regard, on dirait qu'il voulait la bouffer ou la trucider, au choix. C'était encore plus glauque que le bloqueur central en plein match, je n'aimerais clairement pas être à sa place. Mais alors que j'affichai une moue dépitée à cette idée, et être sur le point d'éprouver de la pitié pour cette pauvre créature féminine, je fus plus que surpris de voir cette même intensité luire dans le regard de la demoiselle.

J'observai minutieusement à tour de rôle les deux individus, écartant toute suite, les différents jugements qui me traversaient l'esprit, faisant plus appel à mon sens accru d'analyse. Je devais mettre quelques minutes de côté mon ressentit négatif pour comprendre les choses qui se manifestaient sous mes yeux. Ushijima n'avait à aucun moment cessé de la fixer depuis qu'elle était arrivée sur son cheval, son corps s'était automatiquement tourné vers elle à partir du moment où elle était descendue du dos de l'animal. Et alors que j'avais cru qu'elle serait gênée ou embarrassée, elle avait, au contraire, exprimée un regard similaire au sien. Ses étranges yeux luisaient de joie et un sourire nias s'était placé sur ses lèvres, elle donnait la sensation d'être entrée dans une bulle qui lui était propre, qui n'appartenait qu'à elle. Tout comme Ushijima qui semblait ignorer le reste des personnes présent depuis qu'elle était ici.

Elle avait le visage d'une fille amoureuse, je le savais puisque je le voyais assez régulièrement sur celui des nombreuses demoiselles qui venaient m'aborder au quotidien. Elle n'était pas la petite copine du stalker comme je l'avais spéculé au début, mais celle d'Ushiwaka ?! Comment pouvait-il avoir une petite-amie avec sa tête de vieux robot !? Comment avait-il fait pour la draguer ? Est-ce qu'il savait draguer même ? C'était tout simplement impossible, en aucun cas je pouvais l'admettre. Il ne pouvait pas me battre sur le plan amoureux en plus de celui sur le terrain ! Puis quoi encore ? Ça allait être quoi la prochaine étape ?

Je plissai les yeux, les choses me paraissait d'un non-sens d'un côté comme de l'autre. Comment une fille pouvait être sous le charme d'un garçon aussi frigide qu'Ushiwaka ?

Je pris alors plus de temps à détailler cette créature surprenante. Et elle l'était, j'avais envisagé qu'elle n'était pas jolie, et dans ce cas je me serais volontiers moqué d'eux, même si cela aurait été puéril et mesquin de ma part, mais ça m'aurait rassuré dans mon for intérieur. Mais bien au contraire, elle était ravissante, son pantalon moulait ses cuisses et ses hanches de façon à ne pas masquer les muscles un peu plus marqués que chez la plupart des filles. Elle était aussi moins fine, ses hanches et son buste semblait plus large, tout comme sa poitrine d'ailleurs. Je ne m'arrêtai pas sur ce détail de son anatomie, même si j'en avais très envie, et remontai mon regard sur son visage ovale. Elles avaient des lèvres pulpeuses et des joues rebondis, mais un détail qui ne m'avait pas frappé au premier abord me percuta soudainement. Ses yeux n'étaient pas de la même couleur et les traits de son visage trahissait son appartenance à une ethnie occidentales. C'était tout simplement peu commun et excentrique. Je finis mon observation par ses cheveux d'un blond volumineux et très clair, cascadant telles des vagues onduleuses dans son dos, maintenue par un élastique et par le casque qui reposait sur le sommet de son crâne.

Quand ses pupilles hautement originaux s'échappèrent de l'emprise de ce maudit Ushiwaka et se portèrent sur moi, je ne détournai pas le regard, ne ressentant aucun malaise à être pris en flagrant délit à étudier sa personne. Elle ne fuyait pas le contact visuel, la lueur euphorique avait disparu, laissant la place à celle de l'assurance. Aucune timidité ne venait adoucir ses yeux ni ses joues, ce qui accentua ma curiosité. Les occidentaux étaient quelque chose de mystérieux, je n'en n'avais jamais croisé dans ma vie jusqu'ici et la seule connaissance que j'en avait venait de la télé. Alors, au fin fond de ma pensée, c'était même moi qui me retrouvais à être un peu intimidé par elle quand elle se mit à son tour à m'observer de la même façon que je venais de le faire pour elle, et cela sans montrer aucune gêne de le faire sous mes yeux.

Il était important de préciser que c'était vraiment au fin fond de ma pensée que j'étais intimidé.

Je reposai finalement mes yeux sur Ushiwaka, étais-ce sa copine ? Non, pas encore, c'était encore au stade à considérer l'autre jusqu'à que l'un des deux trouve le courage de se lancer.

Alors comme ça, c'était les occidentales qui plaisaient à Ushiwaka ? Même pour ça il ne pouvait pas faire comme tout le monde, il fallait toujours que ce type souhaite se démarquer des autres. Mais je me retenais de sourire, car l'arrivée improvisée de cette demoiselle m'avait enfin fait découvrir une potentielle faiblesse chez mon rival, et c'était elle. Et s'il y avait un domaine auquel j'étais certain d'être meilleur que lui, c'était bien celui des filles.

Je savais quoi faire maintenant. J'allais faire enrager Ushiwaka, autant que l'entraînement le permettait, en draguant sa copine pendant cette Golden Week.

Finalement, je n'arrivais pas à contenir mon sourire plus longtemps.