Harry n'eut pas beaucoup à argumenter, Malefoy accepta sans broncher le voyage en France, la seconde solution ayant été mise de côté, bien qu'il y eût déjà deux volontaires pour lui couper le bras ! Hagrid envoya donc un hibou à Fernand Mondiel pour le prévenir.
Quatre jours plus tard, les quatre jeunes sorciers se retrouvèrent sur le quai de Saint-Pancras, cette fois non pas pour embarquer à bord du célèbre Poudlard Express, mais à bord d'un train Moldu, bourré de Moldus, dans une ville pleine de Moldus, dans un pays … bref, Malefoy faisait la gueule ! Le quatuor prit place dans un 'carré', c'est-à-dire quatre places face à face avec une table au milieu. Le Serpentard ne pu s'empêcher de jouer les précieux :
- Je ne veux pas voyager dans le sens inverse de la marche, ça me donne la nausée.
Comme ni Ron ni Hermione ne tenaient à voyager à côté de ce goujat, c'est Harry qui s'y colla. On entendit un coup de sifflet et le train se mit en marche. Ron afficha un large sourire et ouvrit le sac qu'il tenait sur ses genoux :
- Eh les gars, ça ne vous rappelle rien ?
Et il étala tout un tas de friandises sur la table : des choco-grenouilles, des dragées de chez Bertie Crochue, des Gnomes au caramel, des Souris à la menthe …
- Ron, ce train est plein de Moldus ! chuchota Hermione
- Mais Mione, les Moldus aussi mangent des bonbons ! répondit Ron, gobant un choco-grenouille si rapidement que la friandise n'eut pas le temps de s'échapper. Le rouquin regarda la carte qui était dans le paquet et s'écria les yeux écarquillés : J'ai Neville Londubat !
- Tu n'es qu'un grand gamin, Ron ! dit Hermione, avec un sourire et plein de tendresse dans le regard.
Quant à Neville, il avait connu son heure de gloire et était devenu une célébrité en décapitant Nagini, le serpent-horcruxe de Voldemort. Il étudiait à présent la botanique à l'Université Magique d'Edimbourg, et Hermione songea qu'elle le croiserait peut être cette année à la bibliothèque du campus. Les trois amis se goinfrèrent de sucreries à s'en faire exploser le ventre et au bout d'un moment Ron s'adressa à Malefoy d'un ton revêche :
- Eh, t'en veux ?
- Non merci, répondit le blond d'un air dégoûté.
- Tant pi pour toi !
Le reste du voyage se passa sans encombre, Hermione et Ron s'endormirent. Harry sentit Malefoy se crisper quand ils passèrent le Tunnel sous la Manche. C'était effectivement un moyen de transport bien singulier pour un sorcier. Même Harry, qui avait grandit dans une famille de Moldus, n'était pas très à l'aise de penser qu'ils voyageaient sous l'eau.
Arrivés à Paris, la capitale française, pas le temps de visiter, au grand dam d'Hermione, qui rêvait de revoir la Tour Eiffel. Ils empruntèrent le RER pour se rendre de la gare du Nord à la gare de Lyon. Ron n'était pas rassuré et ne comprenait rien à tous ces noms de stations en français et Malefoy encore moins. Le voyage fut difficile pour les deux sorciers non initiés au Monde Moldu, d'autant plus que le train de banlieue était bondé et que les quatre touristes britanniques ne trouvèrent pas de place assises. Le sorcier blond terrifié, dans son costume hors de prix, resta tout près de Harry, le regard méfiant, et outré d'être entouré et bousculé par autant de Moldus. Le sorcier brun fut touché de voir son ancien rival ainsi, apeuré, presque fragile, dans ce milieu qui lui semblait si hostile. Ici, il n'était plus aussi sûr de lui, et imbu de sa personne ! Cela procurait à Harry une certaine satisfaction, il prenait un malin plaisir à le regarder du coin de l'œil, à le voir mal à l'aise. Mais en même temps il éprouvait aussi un peu de peine. Finalement la connaissance du Monde du Serpentard se limitait à l'environnement sorcier, et il n'avait pas du sortir beaucoup de son manoir et des dîners mondains dans lesquels ses parents avaient du le traîner durant toute son enfance ...
Au départ de la gare de Lyon, un second train les emmena directement en gare de Dijon. Le soleil déclinait quand ils arrivèrent au terminus. Et effectivement ils furent frappés de constater que les Moldus d'ici n'étaient absolument pas choqués de voir des sorciers se promener parmi eux. Ainsi ils croisèrent une vieille sorcière avec un nez crochu et un chapeau pointu, avec sous son bras un chat noir de jais aux yeux jaunes, un groupe de jeunes sorciers avec leurs baguettes à la main à la vue de tous, et un couple de sorciers traversant le ciel sur leur balais … Hermione les informa :
- Suivez-moi, j'ai réservé des chambres à la Maison Millière, c'est une auberge tenue par une sorcière. J'ai trouvé l'adresse dans le 'Sorcier-Routard', les avis sont bons ! C'est à 10 minutes de marche.
En arrivant sur place, ils furent accueillis par une sorcière qui parlait un anglais assez sommaire, avec un accent à couper au couteau. Il y avait un problème avec la réservation, deux chambres seulement étaient disponibles, au lieu des quatre prévues.
- Je ne partage pas ma chambre avec cet affreux Jojo ! Et toi non plus Mione, c'est hors de question ! tempêta Ron.
- Ca va, je vais avec lui, Ron. déclara Harry en essayant de calmer son ami.
- Je ne dors pas avec toi, POTTER ! siffla Malefoy les dents serrées. En plus je suis sûr que tu ronfles !
- Ca va Malefoy, je ne bougerai pas d'un poil, tu ne te rendras même pas compte que je suis là ! En revanche, je te promets que le Poudlard Express est silencieux à côté de Ron !
- T'es gonflé toi, je te retiens ! dit Ron outré.
Entre temps la tenancière avait ouvert les portes de deux chambres spacieuses.
- Arrêtez de râler les garçons, regardez, ce sont deux lits d'une personne. Vous ne serez pas obligés de dormir l'un contre l'autre ! constata Hermione amusée.
Harry rougit légèrement pensant que ce ne serait pas si désagréable de dormir contre le sorcier blond mais s'empressa de chasser ces honteuses images de sa tête. Mais pourquoi donc pensait-il à des choses aussi saugrenues ?! Chacun posa ses bagages et s'installa. Comme il était déjà tard, les quatre jeunes dînèrent rapidement et remontèrent dans leurs chambres. Malefoy se dirigea vers la salle de bain et s'adressa à Harry :
- Ne t'avises pas d'entrer pendant que je me lave, POTTER !
- Pourquoi voudrais-tu que je vienne te mater sous la douche, MALEFOY ?
Le blond claqua la porte, laissant Harry furax. Et puis finalement la tentation d'espionner ce jeune homme qui ne cessait de l'agresser, malgré la trêve qu'ils avaient scellée quelques jours auparavant, naissait au fond de lui. Pourquoi diable l'envie d'apercevoir Malefoy nu le tiraillait à se point ?! Peut-être pour avoir matière à se venger en cas de moquerie, peut-être simplement pour voir à quoi ressemblait son rival dans son plus simple appareil … Finalement Malefoy sortit vêtu d'un pyjama et Harry alla se doucher à son tour. L'idée que le blond aux yeux orageux se tenait là, nu avant lui le troubla. La chaleur qui restait dans la douche lui fit tourner la tête et il commença sérieusement à penser qu'il était devenu fou, ou qu'il était victime d'un sortilège … Quand il ressortit de la salle de bain, le blond était déjà couché, et lui tournait le dos. Harry se mit au lit, sans éteindre la lampe de chevet. Oui, lui, le garçon qui avait survécu, le grand Harry Potter, avait peur du noir. Il ne dormait jamais sans une petite lumière. Il se dit que de toute façon, si Malefoy était gêné, il n'avait qu'à l'éteindre lui même … Puis Harry brisa ce lourd silence :
- Tu dors ?
- Non.
- Tu... tu étais où ces deux dernières années ?
Malefoy poussa un soupir, et répondit à Harry :
- Dans un centre d'incarcération pour jeunes sorciers … Lors de mon procès, j'ai été soumis au véritaserum, ce qui a prouvé que j'ai été contraint... Et comme j'étais mineur durant une grande partie...des faits...mon avocat a réussi à me faire échapper à Azkaban.
Un long silence suivi cet aveu, puis le sorcier blond continua :
- J'ai pu passer mes ASPIC par correspondance, j'ai eu les résultats au mois de Juin, ce qui a accéléré ma sortie.
Harry fut étonné et à vrai dire, un peu jaloux que Malefoy ait obtenu son diplôme alors que lui même n'avait aucun bagage en poche. Certes le ministère lui avait validé d'office ses acquis mais ce n'était pas comme s'il avait vraiment du passer les examens … Troublé, il ne répondit donc qu'un faible « félicitations ». Malefoy à son tour interrogea Harry, la voix ensommeillée :
- Tu es toujours avec Ginny Weasley ?
- Non, elle m'a largué comme une merde après la fin de la guerre … Il faut dire que j'étais une loque, elle a eu raison … et... tu, euh... toi, tu as quelqu'un ?
Harry n'obtint pour réponse à sa question qu'un faible grognement. Il ne sut pas si cela voulait dire oui ou non mais apparemment son interlocuteur dormait déjà à moitié. Il le laissa donc se reposer, restant dans le doute sur la vie amoureuse du blond. Mais après tout, qu'est-ce que cela pouvait bien lui faire … ?
