Elie est déposée en bas de son immeuble. Elle n'a aucune envie d'y monter. Il n'y a rien qui l'intéresse là-haut. Alors elle décide de se balader. Elle marche dan les rues peu peuplées de ce quartier et sent qu'on la suit, une nouvelle fois. Comme la dernière fois, elle emmène son traqueur dans une impasse. Comme la dernière fois, comme Elie s'en doutait, c'est Alia. D'une voix sourde, cassée par le sexe et la bataille qui la précédait, la mercenaire demande :
« Qu'est-ce que tu fais là ? Un jour, je vais te descendre.
Alia avait commencé à avancer mais au son de la voix du Commandant, elle frémit.
- Je voulais… Je voulais savoir si ça allait, c'est tout.
- Très bien, je te remercie. Je t'en prie, tu peux retourner dans je ne sais quel trou où tu vis, maintenant.
- Pourquoi tu es comme ça ? Tu as arrêté le Hallex, ça se voit, mais tu ne vas pas mieux.
- Qu'est-ce que ça peut te faire, franchement ? Je vais très bien.
- C'est ça… J'ai vu quelqu'un que tu connais aujourd'hui.
- Ha oui, tiens donc ? Et c'est qui ?
- Miranda. Elle est là pour toi, j'en suis sûre.
Alia voit que la nouvelle déclenche enfin une vraie réaction chez le Commandant. Et pas ces ridicules bravades de droguée, qu'importe la drogue qu'elle prend maintenant. Elle voit les traces de morsure dans le cou de l'humaine, devine parfaitement d'où elles viennent.
- Tu te trompes. Elle devrait pas être là.
- Ha oui, et pourquoi ça ? c'est une femme libre, elle peut aller où elle veut, pas comme toi, raille l'adolescente.
C'était une mauvaise idée. En une seconde, Elie est à quelques centimètres de son visage et une de ses mains saisit le cou de la jeune fille.
- Tu veux répéter ?
Les yeux remplis de larmes, Alia soutient le regard haineux que lui lance cette femme qu'elle ne reconnaît plus du tout. Elle avait peur que le Commandant Shepard devienne un zombi, une coquille vide, c'est devenu un monstre.
- Tu en es réduite à ça, maintenant ? Menacer une ado sans défense et qui ne voulait que t'aider ?
La remarque fait vriller quelque chose dans le cerveau d'Elie et le cœur de Shepard saigne un peu de ces actions insensées. La main qui tenait le cou bat en retraite et l'ancien spectre recule également. D'une voix tremblante, pas plus forte qu'un murmure, elle dit à l'adolescente
- Tu devrais partir. Le monstre en moi est insatiable, Alia. Ne me parle plus jamais. »
Ce que voit la jeune fille dans les yeux de cette personne brisée, c'est la vérité que porte ces mots : le monstre en elle a toujours faim. Alors elle se retourne, court et disparaît dans les méandres soudainement glacés d'Oméga. Ce qui reste dans l'allée, c'est une caricature d'être humain, un tas de chair et d'os qui fonctionne à la haine de soi. Le monstre reste figé, dans une posture d'arbre cassé, dans l'ombre des immeubles. Une larme solitaire serpente la joue émacié. Elle dit adieu à Shepard, et au cœur cavalier.
Après ce qui semble des heures, Elie s'étire, la douleur revient, partout, en force multipliée par douze. Elle attrape une pilule noire. La gobe. Puis commence à marcher. Doucement, Elle observe les gens autour d'elle, qui l'évitent, qui s'écartent. Ses vêtements sont toujours couverts du sang des asaris. Il faut qu'elle rentre chez elle mais la solitude ne lui fait pas envie. Et soudain, elle se souvient de ce qu'Alia a dit. Miranda est là. Il est obligé qu'Aria soit au courant. Pourquoi n'a-t-elle rien dit ? Pourquoi cacher ça ? Est-ce qu'elle veut m'isoler ? Ou me protéger ? Comment savoir ? Je lui demanderai, la prochaine fois que je la verrai. Si je m'en souviens. J'oublie beaucoup de choses, ces temps-ci… Depuis le dernier jour de la guerre en fait…
Pourquoi Miranda serait ici ? Et merde… Kelly. Une colère bleu sombre naît au fond de sa boîte crânienne. Je la tue quand je la vois. C'est une promesse qu'elle a brisée. On ne… Non. Tout le monde brise des promesses, ça ne vaut pas la mort… Lâche. Elie décide qu'une petite conversation avec Kelly s'impose, lui rappeler les valeurs des mots, et surtout celles des menaces. Mais pour savoir où trouver Kelly, Whelps a besoin d'Aria. Alors, la mercenaire prend une pilule jaune, et marche dans l'oubli.