Bonjour/Bonsoir à tous !
Voici le deuxième chapitre de mon histoire consacrée à la confrontation d'Arthur et de Lancelot.
Je m'attaque ici au point de vue de Lancelot face à cette situation. Étant donné qu'Alexandre Astier est resté très mystérieux concernant l'état d'esprit de Lancelot à ce moment-là, j'ai décidé d'écrire ce chapitre selon ma propre vision des choses. A voir si les prochains opus à venir me donneront raison ou pas XD
En attendant, je vous souhaite une bonne lecture !
Une fois encore les Burgondes lançaient une attaque sur la forteresse de Kaamelott. Cela n'avait en soit rien de réellement surprenant. Ce n'était pas la première fois que les gardes du chemin de ronde alertaient les occupants du château à ce sujet. Pourtant cette bataille qui s'annonçait n'était semblable à aucune de celles de ces dix dernières années. Les conseillers du nouveau monarque ne s'y trompaient pas. Ils s'agitaient comme jamais, parlaient ensemble d'une riposte et se tournaient vers leur souverain dans l'espoir qu'il trouverait une solution pour protéger son royaume. N'avait-il après tout pas été le plus grand des chevaliers de Bretagne avant de devenir roi ? Un chef de guerre tel que lui ne pourrait pas rester de marbre alors qu'on menaçait de lui reprendre tout ce qui lui était enfin acquis, non ?
Mais Lancelot ne prêtait pas attention à leurs dires ou même à leur présence. Son regard restait immanquablement braqué sur l'horizon. Il savait qu'il était là. Après plus de dix ans de recherches infructueuses Arthur était enfin de retour. Il l'attendait de pied ferme, sachant que le combat serait à présent inévitable. Le reste n'avait alors pour lui plus aucune importance. Elle était là sa mission sacrée, la raison qui le poussait encore à se lever tous les matins. Retrouver Arthur et mettre enfin un terme à son existence. Seule la mort de son rival pourrait enfin lui apporter la confiance des dieux qui l'avaient placé sur le trône du royaume de Logres. Sa disparition irait de paire avec l'achèvement ultime de la quête du Graal. Il en était persuadé. C'était ce que la voix dans sa tête n'avait de cesse de lui répéter. Jour et nuit, il entendait les paroles de Méléagant tournailler dans esprit malade comme une étrange ritournelle. Il ne pourrait apporter la lumière divine sur la Terre tant qu'il n'aurait pas effacé toute trace d'un royaume haïs par les dieux. Il ne pourrait établir les fondations de son propre royaume tant que les espoirs de son peuple étaient tournés vers la mémoire de son prédécesseur. Pour établir son autorité, il fallait faire table rase du passé ! Cela avait été la dernière instruction qu'il lui avait laissée l'étrange homme en noir avant de disparaître, laissant son élu accomplir sa destinée.
Durant des années, il avait donc poursuivi sans relâche tous les chevaliers qui représentaient ce passé haïssable. Cela n'avait pas été une tâche facile considérant les différents mouvements de résistance qui s'organisaient en Bretagne. Pourtant, il avait fini par toucher du doigt ce rêve inaccessible lorsque ses agents saxons avaient enfermé dans les douves ce qui restait de chevaliers félons. Arthur lui-même faisait partie des captifs. Cette mission pouvait enfin être considérée comme accomplie. Il aurait alors dû s'en réjouir, mais il en était en réalité bien incapable. Pourquoi ? Pourquoi ne pouvait-il être heureux à l'idée d'avoir remporté sur son rival une victoire écrasante ? Pourquoi ne s'était-il pas rendu aux oubliettes dès l'arrivée de l'ancien roi dans sa prison ? Pourquoi n'avait-il pas eu la force d'approuver les dires de ses conseillers et d'ordonner la mise à mort immédiate d'Arthur ?
Peut-être que la réponse se nichait aux tréfonds de son esprit tourmenté. Car il y avait une autre de voix qui désirait se faire entendre. Cette dernière était bien plus frêle et timorée que la première. Elle ne pouvait être entendue qu'au dernières heures du crépuscule, durant un très court laps de temps où la folie et la raison se rencontrent et se côtoient. Lancelot ne se fiait plus à elle mais il ne pouvait nier son existence. Elle cherchait sans cesse à le ramener vers les idéaux du jeune chevalier qu'il avait été dans sa jeunesse. Ces mêmes valeurs qui, alors qu'il était dévoré par la colère et la soif de vengeance, l'avaient poussé à sauver la vie d'un vieil ami qu'il avait initialement prévu d'achever. Il lui arrivait parfois de penser à la volonté qu'il avait eu de résister à un Méléagant désireux de le voir embrasser totalement sa part d'ombre et sa folie. Ses paroles raisonnaient parfois en rêve en un murmure à peine perceptible.
« Je suis votre plus mauvaise élève. J'ai sauvé Arthur en utilisant la magie blanche. Qu'est-ce que vous dites de ça ? »
Mais les choses avaient tant changé en une décennie. Il se demandait d'ailleurs souvent si cet homme avait été autre chose d'un songe. Un obstacle de plus sur son chemin qui l'empêchait d'accomplir sa glorieuse destinée. Il ne pouvait se résoudre à penser que son indécision devant Arthur était due à cette toute petite part d'esprit et peut-être même de cœur qui se refusait tout bonnement de se débarrasser de lui. Maintenant qu'il se trouvait à un tournant de son histoire, il fallait profiter de cette occasion inespérée pour réagir.
Il ne sortit de ses rêveries qu'au moment où il sentit les fondations de la forteresse être ébranlées par l'assaut ennemi. Décidemment, les alliés d'Arthur n'y étaient pas allés de main morte. Il prit alors plus attention aux propos échangés entre ses conseillers. Ils jacassaient et évoquaient l'existence d'un passage sous-terrain qui leur permettraient de fuir avant qu'il ne soit trop tard. D'après eux ce n'était qu'une légende et une chimère. Et si elle existait, Arthur était le seul à en connaître l'accès.
Mais cette affirmation n'était pas totalement exacte. Lancelot le savait. Comme beaucoup de choses du passé, ce passage secret faisait partie des nombreuses confidences qu'il partageait avec lui. Il avait été son meilleur ami et son premier ministre. Il était donc normal qu'il en sache bien plus que ces hommes sur les secrets de son prédécesseur. A nouveau, cette pensée lui fit l'effet d'un électrochoc. C'était comme si lors d'un bref instant son cœur avait connu un léger pincement. Rejetant cette idée d'un revers de main, il s'avança vers le passage et actionna une manette. Des escaliers s'enfoncèrent lentement dans le sol. Sans aucune émotion, le monarque regarda ses hommes s'engager sur ce chemin sans rien tenter lui-même. Cela ne servirait après tout à rien. Il savait que la confrontation devait avoir lieu ici, dans cet endroit si porteur de souvenirs de leur amitié passée. Il ne s'y trompa d'ailleurs pas. Quelques secondes plus tard, il retrouvait ses conseillers revenant tout penauds de leur fuite. Ils étaient suivis de près pas un Arthur Pendragon conquérant qui les regarda de haut. Il prononça alors sur un ton à la fois moqueur et dépité.
« J'imagine que vous êtes toujours les gros lâches que j'ai connus autrefois ? »
Pour toute réponse, ils se contentèrent de se taire. Il voyait difficilement comment ils auraient pu contredire le souverain qu'ils avaient tentés de renverser des années auparavant. Voyant qu'il n'avait rien d'intéressant à ajouter, l'ancien monarque indiqua les escaliers d'un geste autoritaire.
« Allez foutez-moi le camp d'ici avant que je ne change d'avis et que je vous fasse pendre. »
Une fois encore, ils s'enfuirent la queue entre les jambes. Il ne resta plus de présent dans cette salle qu'Arthur et Lancelot. L'ancien chevalier regardait le monarque d'un air calme et décidé. Scrutant son regard, il abaissa sa main jusqu'à son épée se tenant prêt à dégainer. Il déglutit alors légèrement avant de laisser paraître un léger rictus sur son visage. Cela faisait si longtemps qu'ils ne s'étaient pas retrouvés ainsi seul à seul. L'émotion le prit subitement mais pas un seul signe ne le trahi. Cette fois-ci il irait jusqu'au bout. Aucun de ses sentiments confus pour son rival ne viendrait entraver sa détermination. Ce combat signerait le glas de la vie d'Arthur Pendragon. Il s'en était fait la promesse !
