Bonjour toustes, tout d'abord merci pour vos nombreuses reviews, je suis vraiment portée par vos commentaires sur ce petit projet. Je continue ici avec ce nouveau chapitre, et j'ai vraiment hâte de connaître vos ressentis sur la tournure des événements. J'espère être restée fidèle à ce que sont ces deux personnages.
Bonne lecture à vous, on se retrouve vite dans les reviews !
Lorsqu'il sortit du sommeil, la première pensée de Jarod fut dirigée à Grant, l'apprenti Mixologue de Manhattan. Son léger mal de crâne fit écho à ce douloureux premier de l'an. La seconde pensée de Jarod fut dirigée à la personne se réveillant doucement à ses côtés. Après celle-ci, toutes les pensées qui suivirent furent dirigées à cette dernière.
La voir sortir du sommeil se révéla être un spectacle fascinant.
Il l'observa attentivement secouer légèrement la tête, bailler sans ouvrir les yeux et se mettre sur le dos. Sans se rendre compte qu'il retenait sa respiration, il attendit avec impatience que son regard se pose sur le monde pour la première fois de la journée.
Lorsque les yeux de Parker s'ouvrirent, il resta figé et fixé sur le profil de la jeune femme à ses côtés. Finalement contraint de respirer, il attira son attention en expirant bruyamment. Elle tourna la tête et croisa son regard pour la première fois. Il sentit le coin de ses lèvres se soulever légèrement.
« Hi » murmura-t-il, sans quitter son sourire. « Hi », répéta-t-elle, de façon presque inaudible. La lumière était encore faible dans la chambre et elle était dos à la fenêtre, de fait, il ne put clairement distinguer son expression. Il se fixèrent un moment, profitant de la quiétude les enveloppant dans le silence de la chambre encore sombre.
De façon instinctive, il s'approcha d'elle pour déposer un léger baiser sur la peau nue de son épaule. Il l'entendit soupirer. Lorsqu'il se redressa pour observer le visage de la jeune femme, il distingua les yeux clos de celle-ci. Il s'autorisa à poser délicatement ses lèvres sur ses paupières, puis le bout de son nez pour finir par parcourir tout son visage de la sorte. Elle ne réagit véritablement quand il atteignit sa bouche. Maintenant éveillée, elle répondit à son baiser et laissa ses mains parcourir le crâne de son partenaire.
L'étreinte fut intime, portée par une tranquillité suspendue. Ils prirent le temps de s'éveiller aux sensations procurées par l'autre, mus par un désir de faire fit de l'extérieur. Leurs ébats ne ressemblèrent ainsi pas à ceux qu'ils avaient connus jusque-là. Dans la semi-pénombre d'un jour naissant, ils se découvrirent de façon inédite, brisant la règle primordiale de leur arrangement.
Ce n'était plus seulement du sexe.
Leurs respirations étaient calmes et Jarod observait le plafond, perdu dans ses pensées. A ses côtés, sur le ventre, elle se laissait progressivement emportée par le sommeil. Elle se focalisait sur l'oiseau qui annonçait du haut d'un arbre le véritable commencement de la journée. Elle soupira discrètement de contentement, et ses yeux se fermèrent d'eux-mêmes.
« Parker ? » murmura Jarod, le regard toujours dirigé vers le plafond. Elle lui répondit par un léger grognement, incapable d'ouvrir les yeux.
« Parker ? répéta-t-il avec plus d'insistance, tournant cette fois-ci la tête en direction de la jeune femme.
_ Quoi ? » répondit-elle, clairement ennuyée par le fait qu'elle fut contrainte d'abandonner l'idée de se rendormir. Elle l'entendit prendre une grande inspiration pour s'apprêter à parler. Mais rien ne vint. Sentant qu'il n'était pas serein, elle ouvrit finalement les yeux. Lorsqu'elle posa son regard sur celui de son partenaire, elle y trouva une confusion. Elle reconnut là l'expression qu'il arborait toujours quand il ne comprenait pas une référence populaire. Elle haussa alors un sourcil pour le faire parler. L'air toujours confus et visiblement stressé, il s'adressa à elle la gorge serrée :
« Parker, je crois que je t'aime »
Elle écarquilla d'abord les yeux et déglutit. Puis, en quelques secondes, son expression se durcit de façon inquiétante. Elle s'assit alors brusquement en agrippant les draps pour se couvrir, soudainement inconfortable avec l'idée d'être nue à côté de Jarod. Alors qu'elle ne lui montrait que son dos, il ne fut pas en mesure de lire les émotions parcourant le visage de Parker.
Il se redressa sur ses avant-bras et attendit. Il réalisait lui-aussi ce qu'il venait de lui avouer il se préparait déjà au pire. Il sentait d'ailleurs son cœur battre à toute vitesse, parfaitement conscient que la situation était sur le point de prendre une douloureuse tournure. Néanmoins, il n'agit pas et se focalisa obstinément sur la figure assise devant lui. Il la vit passer ses deux mains dans ses cheveux, ses doigts se coinçant dans quelques nœuds. Puis, il l'entendit souffler.
Parker se sentait perdre pied. Sa panique face aux mots de Jarod lui obstruait la gorge. Il ne pouvait pas l'aimer. L'aimer signifiait se jeter dans la gueule du loup, courir vers une mort certaine et injuste. Elle ne pouvait pas accepter qu'il puisse ressentir une telle chose pour elle. Il ne le méritait pas.
Elle compta jusqu'à dix, ferma brièvement les yeux et se tourna vers l'homme encore immobile à ses côtés. Il l'observait l'air si peiné qu'elle sentit son cœur se serrer davantage. Il savait pertinemment ce qu'il s'apprêtait à entendre. Elle décida d'ignorer la douleur que lui procurait un tel constat et s'adressa à lui avec le plus grand des détachements : « Pars. »
Il se redressa jusqu'à s'asseoir, son visage alors à la même hauteur que celui de Parker - qui ne cilla pas. Bien qu'il fût directement conscient du rejet qu'il encourait en lui déclarant une telle chose, il n'était pas préparé à la peine que ce simple mot lui procura. Le « maintenant » sec qu'elle lui assena par la suite l'acheva. Il sentit ses yeux s'embrumer. Honteux, il se tourna immédiatement et sortit du lit. Sans la regarder, il enfila son t-shirt et son boxer, oubliés au sol lors de leurs ébats. Puis, il se leva et se dirigea vers la chaise au coin de la chambre pour empoigner son pullover, son jean et ses chaussures posés la veille sur celle-ci. Ses affaires en main, il se tourna une dernière fois sur le pas de la porte. L'expression de la jeune femme était toujours aussi dure. Dans la pénombre de la chambre et dans le court instant qui précéda sa sortie, il ne put clairement distinguer les yeux brillants de sa partenaire.
Elle était d'abord restée immobile, allant jusqu'à ne pas cligner des yeux. Néanmoins, lorsqu'elle entendit le son distinct d'une porte que l'on claque, elle s'effondra. Ses sanglots secouèrent tout son corps, ils l'empêchèrent presque de respirer. Puis, une douleur physique s'empara d'elle. Ce fut comme si sa peine prenait la forme d'un poids que l'on déposait contre sa cage thoracique. Elle reconnut là ce qu'elle avait senti après la perte de sa mère et durant le deuil de Thomas. Néanmoins, dans cette présente situation, elle était à l'origine même de cette agonie. Ses propres angoisses et mécanismes de défense étaient les uniques responsables de son malheur. A ce constat, la douleur sembla décupler lorsqu'elle fut accompagnée d'une intense culpabilité. Cette dernière lui tordit l'estomac, la fit suffoquer jusqu'à ce que sa seule porte de sortie prît la forme d'un cri retranscrivant toute sa détresse. Elle s'autorisa alors à vocaliser sa peine et à laisser ses pleures la secouer. Elle maudit ces années de souffrances responsables de celle qu'elle venait d'infliger à la seule personne qui la traitait encore avec respect et amour.
Après s'être calmée, elle demeura muette durant des heures. Mais ses pensées n'étaient pas apaisées, bien au contraire. Elle s'autoflagella d'abord, se rendant à l'évidence du fait que dès leur première rencontre nocturne, elle se doutait qu'ils puissent en arriver là. A vrai-dire, elle s'avoua qu'elle avait toujours su et toujours nié la nature des sentiments qu'ils éprouvaient l'un pour l'autre. D'ailleurs, elle contempla pour la première fois avec honnêteté ses propres sentiments. Elle rejoua tant de souvenirs allant de son enfance à leur course-poursuite pour finir par leurs ébats les plus récents et reconnut là les signes de sa profonde infatuation pour cet homme. Cela n'aida pas à mettre un terme à son auto-culpabilisation, bien au contraire. Elle se sentait extrêmement en colère contre elle-même et se répéta des dizaines de fois qu'elle était stupide. Et Parker détestait plus que tout se sentir stupide.
Elle pensa également au fait que leur relation était teintée d'une inconscience folle. Ceux qui l'aiment souffrent et finissent par mourir. Elle le savait pertinemment, et ce depuis le début. Néanmoins, elle constata avec effroi que la violence et le danger présents dans leurs existences agissaient souvent comme des voiles qui masquaient sa peur panique de l'engagement et sa confiance si difficile à accorder. Dans le silence maintenant étouffant de sa chambre, elle se confronta de façon brutale à ses dysfonctionnement hérités de toutes ces années de souffrances et de traumatismes.
Après plusieurs heures de ruminations, Parker se sentait comme au pied d'une montagne, écrasée par l'honnêteté dont elle fit preuve avec elle-même et le sentiment d'avoir jeté le seul cadeau offert par l'univers.
Et curieusement, elle se sentit plus humaine que jamais.
