Le résumé entier :
Après la Guerre, Poudlard essaye de survivre.
Entre la Guerre et l'année passée sous l'administration Rogue-Carrow, Poudlard n'est plus ce qu'elle était. Les élèves majeurs qui ont fait le choix de combattre durant la Bataille Finale se retrouvent avec des deuxièmes années qui n'ont connu le château que sous son ère Carrow. Celles et ceux qui ont torturé leurs collègues se retrouvent parmi celles et ceux qui ont résisté dans la salle sur demande. La guerre et la tyrannie ont laissé leurs marques, encore faudrait-il que chacun en fasse le deuil. Semaines après semaines, les limites de Poudlard et de son organisation interne se dessinent aux yeux des élèves.
Pour la nouvelle année particulière qui fait suite à la Guerre, les préfets ont pour mission de s'assurer du bon déroulement des rapports sociaux au sein du château. Tâche plus difficile qu'il n'y parait pour Eyrin Jonsson qui entame sa sixième année à Poudlard.
[NdA]
Edit fin juillet 2021 : Je réécris rapidement cette note d'autrice pour qu'elle soit plus informative.
Bonjour, ou bonsoir, à toutes et à tous,
La fanfiction qui vous est proposée ici est une réécriture d'une fanfiction que j'avais écris dans les années 2010. Elle s'axe majoritairement autour des conséquences de la guerre sur les élèves et la société sorcière. Pour cela, nous suivons la génération qui vient après celle de Ginny et Luna, la génération qui n'a pas participé à la Bataille Finale mais qui a connu l'administration Rogue-Carrow ; les personnages sont de fait inventés.
Cette fanfiction est la première de toute une série dont le fil rouge central est la remise en cause du système (ainsi que son contraire : le maintien et la défense du système en place) que l'on observe après une crise de cette ampleur. Dans le cadre de cette première fanfiction, nous suivons majoritairement des élèves de Serdaigle. La majorité des clichés de la fanfic de base ont été gardés, mais ont été ancrés dans la réalité (on oublie bien vite que ce sont des clichés une fois qu'on leur donne des conséquences psychologiques réelles, c'est assez marrant).
Puisqu'un des fils rouges est basé sur la contestation du système, il faut… un système à contester. Le problème, c'est qu'il y a beaucoup d'inconnues dans l'univers de JKR et la société qu'elle a inventé. À ce sujet, je ne reproduis pas notre monde moldu (ses enjeux, ses structures, ses idéologies) version sorcier, mais j'ai au contraire tenté de me questionner véritablement sur ce que pourrait être la société sorcière (et quels sont les enjeux politiques, sociaux, etc. qui la traversent) sans projeter notre vision moldue sur les sorciers et sorcières. Le mot clé étant « tenté » :')
Pour faire écho à ma première note d'autrice, la réécriture de cette fanfiction vient surtout d'une volonté, de ma part, de ne pas supprimer une fanfiction femslash du net parce qu'il y en a relativement peu - et surtout, très peu qui sont sous format « saga » et pas simplement une histoire d'amour (ou de connaissance de soi) sans réel contexte. L'idée, c'est d'avoir une vraie « épopée » dont le couple central est celui de deux femmes. C'est ce qu'il me manquait adolescente et j'aimerais qu'un tel texte reste disponible même s'il a les défauts qu'il a - c'est très symbolique plus qu'autre chose.
Prologue
1er Septembre
Le Poudlard Express n'avait pas changé depuis la Guerre. Les filles non plus, d'ailleurs ; Alice lisait un Sorcière Hebdo et Emily était perdue devant des photographies immobiles de bâtiments Moldus. Les couchettes avaient été tellement utilisées que nous nous enfoncions de quelques centimètres ; il fallait légèrement tendre le cou pour pouvoir s'accouder convenablement à la fenêtre, mais le paysage qu'elle proposait était toujours le même – comme la légère douleur à ma nuque lors de ces trajets. Les wagons étaient emplis de ces petites voix aigues et de ces rires encore enfantins propres aux Premières Années. Dans l'air, on sentait l'excitation de troquer son jean d'enfant contre sa robe de « grand » comme l'inquiétude de ne plus avoir ses parents à ses côtés.
Le Poudlard Express n'avait pas changé – même le chariot de friandises qui s'était arrêté devant notre cabine n'avait pas arrêté de grincer, mais les élèves les plus âgés, eux, n'étaient plus les mêmes. Il suffisait de voir les regards sévères des Septièmes Années qui passaient rapidement d'un wagon à l'autre ou les yeux fuyants des Cinquièmes Années qui se faisaient discrets entre deux portes. La Guerre n'avait pas été la même pour tous.
- Eyrin, tu veux quelque chose ?
Je détournai les yeux de la fenêtre et acquiesçai en direction d'Alice ; un assortiment varié ne ferait pas de mal. Les sucreries pourraient peut-être rendre l'insouciance et la légèreté qu'une rentrée à Poudlard avait perdu. Je n'eus pas le temps de récupérer mon lot sur le chariot, cela dit, qu'une des baguettes à la réglisse avait déjà disparue entre les dents d'Alice. Je la regardai, surprise.
- Eh, c'est fait pour être manger, je te signale, dit-elle.
- Vous voulez quelque chose d'autre ? s'impatienta la sorcière au chariot. Il se fait tard et j'ai encore des wagons à faire.
Je fis non de la tête avant de réaliser ; l'heure, l'heure m'avait échappé. Entre le temps qu'il fallait pour enfiler la tenue complète de l'école, ajuster cette fichue cravate bleue et celui nécessaire à la récupération du badge de préfet que j'avais glissé n'importe comment dans ma valise ce matin de peur de louper le train, je risquais d'être sacrément en retard.
Dû aux circonstances particulières de cette année, nous avions hérité de nouveaux préfets. La lettre que nous avions reçu fin août avait été assez vague ; une histoire de responsabilités et de conséquences des projets pédagogiques des frère et sœur Carrow. De ce qu'il était possible de comprendre entre les lignes, la direction ne souhaitait pas que les tensions qu'avait créé la paire Rogue-Carrow ne compliquent le « retour à la normale » des élèves à Poudlard. J'imagine que personne ne pouvait sciemment penser que s'être entraîner sur des Premières Années à coup d'endoloris n'allait pas laisser des marques dans les relations entre élèves. C'est du moins ce qui expliquerait qu'il avait été décidé d'enlever toutes responsabilités aux élèves ayant participé directement à la guerre ; parfois dans des camps opposés. Dans tous les cas, McGonagall souhaitait que les Sixièmes Années prennent temporairement le relais, rompant la longue tradition de nomination des préfets en cinquième année. L'année prochaine ; disait la lettre, tout reviendrait à la normale.
Plus vague encore était la raison pour laquelle j'avais moi-même hérité d'un badge de préfet. L'avantage, c'était que la situation était inédite pour tout le monde. J'allais bientôt me retrouver avec d'autres préfets de sixième année tout autant déboussolés que moi-même – enfin, si je finissais un jour par atteindre le premier wagon.
Je me dépêchais pour rejoindre mes collègues en naviguant entre quelques petites têtes blondes. Les élèves étaient bien trop dispersés et agités. Rien à voir avec le départ du train. A croire que plus nous nous rapprochions de Poudlard, plus les Premières Années réalisaient ce qui les attendait. L'appréhension des plus âgés était-elle contagieuse ?
J'aperçus enfin le premier wagon du train, rompant la distance tant bien que mal.
- Et si jamais je suis envoyé à Serpentard ? demanda une petite tête blonde devant la cabine. Tout le monde va croire que j'ai aidé Voldemort !
- Tout le monde à Serpentard n'a pas aidé Voldemort, lui répondit un camarade de Serdaigle. Ce n'est pas grave d'être à Serpentard, ça veut juste dire que tu as de l'ambition. Il n'y a pas de mal à être ambitieux. Hey, Jonsson ! reprit-il en me voyant. C'est bon de te revoir !
- De même Peter, alors l'Ukraine ?
- Froid, je dirais.
Alors que le petit s'éloignait doucement de la porte de la cabine, je le montrai d'un geste de la tête, interrogeant silencieusement mon collègue.
- Ce n'est pas le premier que j'entends dire ce genre de choses, répondit-il.
Cette année risquait d'être vraiment particulière. Je ne savais pas trop ce que la direction pouvait bien espérer que l'on réussisse à faire dans ce contexte. Tout allait être si étrange, maintenant.
Peter me tint la porte de la cabine et j'entrai silencieusement. La plupart des préfets étaient déjà présents. Ian Miller, préfet-en-chef arborant les couleurs de Poufsouffle, nous lança un regard pressant. Il n'y avait pas besoin de le dire deux fois ; je m'installai rapidement à la première place libre que je trouvai. Il n'attendit pas plus longtemps pour commencer son discours de bienvenue, malgré l'absence du préfet des Gryffondors. Visiblement, cette réunion allait être longue. McGonagall souhaitait que l'on ait bien moins de pouvoirs, bien plus de responsabilités. Une question de réparations, de devoir de mémoire et de réconciliation ; une année particulière pour les préfets, un rôle plus social que surveillant.
Soudain, la porte du wagon s'ouvrit, dévoilant le sourire éclatant d'un grand blond. Kilian Griffin. Préfet de Gryffondor.
- Excusez-moi, j'étais occupé.
- Eh bien, j'espère que cette fille en vaut la peine parce que tu viens de gagner le droit d'effectuer une deuxième ronde, répondit Miller.
- Déjà qu'une ronde dans ce fichu train ne sert à rien!
- Je ne t'ai pas demandé de commenter, Griffin. Assis-toi et essayes de ne pas attirer l'attention plus que nécessaire, pour une fois.
Je cherchai Peter des yeux ; il haussa les épaules, semblant aussi perplexe que moi devant la scène qui se jouait face à nous. Le message de Miller était clair et je n'étais pas prête à le contrarier de si tôt. Cela dit, voir Griffin obtempérer sans protester avait quelque chose d'agréable.
Après les quelques rondes d'usage le long du Poudlard Express venait la cérémonie de Répartition dans la Grande Salle. Mettre un pieds dans le château me glaça le sang. La pierre ne m'avait jamais parue aussi froide et la hauteur des plafonds aussi intimidante. La Grande Salle n'était plus cette merveille que l'on appréciait revoir années après années, elle était devenue le témoin de l'horreur. Bien vite, notre procession silencieuse vers la cérémonie de Répartition s'était transformée en une lente marche contrainte. Entre le lourd silence – coupé uniquement de quelques interjections de Premières Années qui découvraient la Grande Salle pour la première fois, les cris revenaient en mémoire. La peur qui prends le ventre. Et Flitwick, Flitwick qui – d'une voix si pressée et si pressante, cherchait à localiser tous les élèves mineurs de Serdaigle avant que le château ne soit attaqué. Chercher Alice ; chercher Emily, partir en laissant tout le monde derrière sous prétexte que nous étions mineures. La colère puis le vif soulagement de retrouver mon père et d'être en vie.
J'avais le vertige.
- Hey, tu ne manges pas ? demanda Alice.
Personne n'avait applaudi les nouveaux venus à Serpentard. Les Serpentards eux-mêmes avaient été discrets pour accueillir leurs nouveaux membres. En réalité, la cérémonie de Répartition – comme les Premières Années, n'intéressaient personne cette année. Les regards en témoignaient. Les Septièmes Années se jaugeaient ; qui était celui qui s'était battu, celle qui s'était enfuie ? Quels avaient été ceux qui, à la première occasion, avait souhaité trahir Potter ? ou pleuraient - certains silencieusement, d'autres bruyamment, devant les souvenirs qui remontaient. L'espace d'un instant, ce fut comme si tous les Septièmes Années partageaient une réalité que nous autres ne pouvions ni voir ni entendre. McGonagall avait vu juste.
- Si si, j'étais juste ailleurs, répondis-je finalement en attrapant une côtelette de porc, la laissant choir sur mon assiette.
- Ca fait bizarre, tu ne trouves pas ? De revenir ici, je veux dire…
- Oui, après tout ce qu'il s'est passé…
- Dire que c'était l'année dernière seulement, lança Emily, et qu'on est assises ici comme s'il ne s'était jamais rien passé !
Les Septièmes Années ne devaient probablement pas penser qu'ils étaient assis ici comme si rien ne s'était passé, mais je m'abstins de tout commentaire à ce sujet. Pour Emily comme pour moi, nous avions connu la Guerre sans réellement la connaître.
- J'imagine qu'il faut bien qu'on recommence un peu à vivre, répondis-je. Tant qu'on oublie pas le passé et qu'on en tire les leçons qu'on doit en tirer…
Il était évident que le trauma semblait bien trop profond pour que l'on soit capable d'en tirer quelque leçon que ce soit après quelques mois seulement, mais il fallait bien répondre quelque chose. Les vacances d'été avaient eu une influence étrange ; prendre de la distance vis-à-vis de Poudlard n'avait que renforcé l'horreur, mon esprit était devenu incapable de penser à la guerre sans penser d'abord à Poudlard. J'avais espéré naïvement que revenir ici permettrait de retrouver l'esprit de Poudlard que j'avais toujours connu. Il m'était maintenant évident que cela prendrait du temps.
Le professeur McGonagall se leva soudainement, mettant un terme à mes pensées, tandis que les tartes à la crème – dont je n'avais même pas aperçu l'apparition – disparaissaient.
- Comme je le disais plus tôt, c'est une nouvelle Ère qui commence à Poudlard, et j'espère sincèrement que vous saurez profiter de ce renouveau. Mr. Rusard, le concierge, m'a demandé de vous rappelez que les fausses baguettes, les boîtes à flemmes, les feuxfous fuseboom et tout autre objet provenant de « Weasley, Farces pour sorciers facétieux » sont formellement interdits, une liste complète de ces objets se trouve dans son bureau et est accessible à tous. Eh bien, et maintenant je ne vois qu'une chose à dire : reposez-vous ! Et que cette année soit une année de paix ! '
La fin du discours de la Directrice signifiait le début de mon devoir de préfète. Je jetai un dernier regard à Alice et Emily avant de rejoindre Peter. Nous devions emmener les Premières Années à travers l'aile ouest du château afin de les accompagner jusqu'à la Salle Commune.
Ce ne fut que le lendemain matin que je réalisai l'état réel de Poudlard. Si les couloirs que j'avais emprunté avaient tous été nettoyés et qu'il ne restait plus de débris, les stigmates de la guerre étaient toujours présents ici et là. Des murs qui n'avaient pas encore été entièrement réparés, des marches cassées, des fenêtres sans vitres. Il était difficile d'imaginer ce qu'avait été la dernière bataille et pourtant chaque pas que nous faisions dans le château nous obligeait à y penser. Peut-être n'avais-je pas été réellement prête à revenir. Peut-être mon père avait-il raison.
- Bonjour Miss Jonsson, fit soudainement Flitwick devant moi, j'ai vu que vous souhaitiez préparer toutes les matières pour vos A.S.P.I.C.s excepté l'astronomie.
Vrai. Nous étions dans la salle de classe de Flitwick afin de décider des options à suivre pour les deux prochaines années. Combien de temps avais-je été absente alors qu'il devait déblatérer ses explications ? Mais tout de même, deux ans à Poudlard. Deux ans, cela pouvait être long.
- En effet professeur, répondis-je distraitement, l'astronomie ne m'a jamais réellement intéressée.
Le professeur de sortilèges acquiesça avant de tapoter doucement avec sa baguette sur la feuille blanche qui se trouvait devant moi, laissant apparaître différents carrés et horaires.
- Ah nan ! Pas possible, s'écria soudainement Alice. Double cours de potions et double cours d'histoire de la magie dans la même journée !
- En même temps, faut avoir un sérieux problème pour continuer histoire de la magie, intervînt Emily.
- Ouais enfin… Tu me rappelles tes cours ? demanda Alice. Divination ? En voilà une matière ! Si tu as une bonne note en Divination, tu pourras peut-être passer ta vie à lire dans une boule de crystal et prédire la prochaine révolte des centaures. Quelle carrière de rêve. Tu n'oublieras pas de me dire qui gagnera le championnat de Quidditch que je me fasse de l'argent de poche!
Alice aura au moins réussi à me faire rire ce matin. Emily se renfrogna et la blonde l'implora de ses yeux de chien battu de peur qu'elle ne lui fasse la tête.
- Tu pourrais arrêter de rire aussi toi ! s'agaça Alice en se retournant vers moi alors qu'Emily ne montrait toujours aucun signe de conciliation. Ça m'aide pas vraiment.
- Désolée, désolée, m'excusai-je.
