Thème du jour : Fou rire

Contexte : suite de Musique et Danse


Deux jours avant le mariage, Sansa s'aperçut finalement qu'elle était sur le point de commettre une grave erreur.

Oh, des doutes, elle en avait eus, mais à chaque fois, elle se rassurait comme elle le pouvait en se répétant que Brandon n'était pas Ramsay, qu'il la traiterait avec gentillesse et respect et que, peut-être, elle finirait par tomber amoureuse de lui.

Ce fut à l'occasion d'un fou rire qu'elle comprit qu'elle s'était complètement trompée.

Ce jour commença comme tous les autres, pourtant. Elle se rendit dans la chambre de Cersei de bon matin et, après avoir bavardé autour de quelques gâteaux au citron – Bran lui envoyait gracieusement des caisses de citrons depuis Port-Réal – elles se dirigèrent une fois encore vers le centre de la pièce.

« Tu n'as aucune raison de t'inquiéter, » lui glissa Cersei alors qu'elles se mettaient à danser. « Tu es plus que prête. J'ai entendu dire que tu futur mari aime danser. Vous n'aurez aucun mal à occuper vos soirées. »

Cette remarque, loin de faire plaisir à Sansa, lui rappela qu'elle n'aurait plus aucune raison de visiter ainsi l'ancienne reine après son mariage – elle doutait que Brandon, malgré sa gentillesse, apprécie qu'elle préfère danser avec quelqu'un d'autre que lui.

Une lueur de malice apparut dans les émeraudes de la lionne.

« A moins que tu ne préfères qu'il te laisse tranquille, auquel cas tu n'auras qu'à lui marcher sur le pied deux ou trois fois... »

La vision fugace de Brandon serrant les dents pour ne pas gémir de douleur lors de l'ouverture du bal parvint à la faire éclater de rire. Ce n'était même pas particulièrement drôle, et même Cersei parut légèrement perplexe devant sa réaction, mais c'était plus fort qu'elle.

Le rire de Sansa s'éleva dans l'air en notes au goût de joie, bien vite rejointes par celles que produisait Cersei.

C'était étrange de voir l'ancienne reine rire. En fait, Sansa croyait bien que c'était la première fois que cela arrivait depuis la fin de la guerre, et peut-être même la première fois depuis des années.

Et, par tous les dieux, cela lui allait tellement bien. C'était lorsqu'elle souriait que sa beauté était à son zénith, et Sansa souhaita presque que ce moment soit figé pour l'éternité, simplement pour continuer d'apercevoir ces soleils d'euphorie dans ses iris verts.

Elle-même se sentait complètement détendue, comme cela lui arrivait de plus en plus souvent dès qu'elle était seule avec la lionne. Cersei ne la jugeait pas et lui donnait de précieux conseils, et Sansa savait qu'elle pouvait lui confier le moindre de ses doutes sans récolter un seul regard moqueur, y compris sur les sujets les plus intimes.

Cersei comprenait pourquoi elle répugnait autant à être touchée, sans doute plus que Brandon, malgré toute la volonté du monde, ne pourrait jamais le faire.

Quand elle était avec son futur époux, Sansa mesurait ses paroles et instaurait volontairement une distance avec lui, un mur de glace qu'elle n'arrivait pas à faire fondre.

A peine quelques minutes après avoir quitté la chambre de Cersei, la louve fut forcée de reconnaître la seule et unique vérité.

Elle n'était pas amoureuse de Brandon, ne le serait probablement jamais, et ne voulait pas l'épouser.

Le soir-même, alors qu'elle ne parvenait pas à s'endormir, elle se décida à tout annuler. Cette décision ne serait pas sans conséquence mais elle était prête à les assumer. Mieux valait réparer les pots cassés pendant quelques mois que de s'enchaîner à quelqu'un qu'elle n'aimait pas pour le reste de ses jours.

Sansa se leva, le cœur soudainement plus léger, et ses pas la guidèrent naturellement vers l'endroit où elle avait passé le plus de temps ces dernières semaines.

Cersei lui ouvrit la porte quelques secondes après qu'elle ait frappé, les sourcils froncés.

« Je ne vais pas épouser Brandon. »

La lionne s'écarta pour la laisser entrer et acquiesça doucement.

« C'est une bonne décision. »

Toutes deux se regardèrent dans les yeux pendant un long moment. Le cœur de Sansa battait si fort qu'elle était certaine que Cersei pouvait l'entendre.

« Ce n'est pas uniquement pour me dire cela que tu es venue, n'est-ce pas ? »

Etant donné l'heure tardive, Cersei avait déjà revêtu sa chemise de nuit. Sansa essaya de ne pas trop détailler son corps.

« Non, » admit-elle.

Elle vint se planter devant elle, puis, tout doucement, rapprocha son visage du sien. Elles étaient si proches qu'elle pouvait sentir son souffle sur son visage.

Finalement, ce fut Cersei qui combla la distance qui les séparait.

La tendre rencontre de leurs lèvres confirma à Sansa ce qu'elle soupçonnait depuis un moment déjà.

« C'est... c'est avec vous que je veux me marier, » révéla t-elle dans un souffle.

C'était avec Cersei qu'elle voulait gouverner le Nord, c'était à ses côtés qu'elle voulait passer ses journées et ses nuits, c'était avec sa main dans la sienne qu'elle voulait affronter toutes les épreuves.

Cersei appuya son front contre le sien et elles restèrent enlacées un long moment.

« Ton peuple ne l'acceptera jamais. Les... les unions entre deux personnes du même sexe ne sont pas jugées d'un œil plus favorable par les anciens dieux que par les nouveaux. »

« Je m'en moque, » rétorqua Sansa. « Mon peuple... je trouverai un moyen qu'il accepte la situation. Et quant aux dieux... eh bien, ils ne se sont jamais souciés de moi. Pourquoi donc est-ce que je me soucierais de leur avis ? »

Pour appuyer ses paroles, elle embrassa de nouveau Cersei.

« Es-tu bien sûre de toi ? Ma... ma jeunesse m'a désertée il y a bien longtemps. »

Une pointe de tristesse était apparue dans sa voix.

« Je suis sûre. C'est vous que je veux, et personne d'autre. »

A court d'arguments, elle laissa Sansa l'enlacer fermement et lui rendit son étreinte avant de la guider jusqu'au lit et de l'enlacer avec douceur.

Sansa s'occuperait des répercussions de son choix plus tard. Pour l'instant, tout ce qui comptait, c'était la sensation des bras de Cersei la serrant tendrement – la plus agréable au monde.