Salutuut, désolée pour ma longue absence, disons que j'ai mis un paquet de temps à finaliser ce chapitre et que je ne savais tout simplement pas quand l'arrêter... Quoiqu'il en soit, bonne lecture et on se retrouve à la fin ;)


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Il courrait, courrait aussi vite que ses jambes le lui permettaient. Il était poursuivi, chassé par une horrible bête mangeuse d'enfants. Il l'entendait juste derrière lui, une voix terrible et grinçante et si froide. Viens... Viens à moi... que je te déchire... que je t'écorche... que je te tue... Il pouvait la sentir se rapprocher ! Juste derrière son dos, un souffle venimeux et il plongea pour esquiver mais pas assez loin, pas assez vite. Il sentit quelque chose mordre son bras et une douleur suffocante explosa dans tout son corps. Il tomba sur le sol rocheux et humide et n'eut même pas le temps de se redresser qu'une masse gluante le plaqua à terre. Il se débattit et lutta mais une énorme mâchoire déchira un morceau de son épaule. Si bon... si savoureux... Mangé ! Il était mangé vivant ! Il hurla et cria jusqu'à ce que sa gorge se déchire mais la bête continua à le dévorer sans pitié...

Harry Potter se réveilla en sursaut, la respiration haletante, trempé d'une sueur glacée. Son cœur battait si fort dans sa poitrine qu'il menaçait à tout moment de s'échapper de sa cage thoracique. Les mains tremblantes, il se frotta rudement le visage pour repousser les images affreuses. Il essuya ses larmes au passage et se força les quelques minutes suivantes à stabiliser son souffle. C'était juste un mauvais rêve, rien de plus, se rassura le jeune sorcier. Le Basilic était mort, il l'avait tué lui-même avec l'aide de Godric Gryffondor et Fumseck. Même s'il avait failli mourir, il n'avait pas été impuissant, il s'était battu et avait triomphé de Voldemort.

Un peu plus calme, Harry rouvrit les yeux pour observer son environnement, sachant instinctivement qu'il n'était pas dans son baldaquin dans le dortoir des deuxièmes années. Il n'était même pas dans un lit d'ailleurs, mais à même le sol étrangement confortable. Le jeune sorcier fronça les sourcils, ne reconnaissant pas la pièce dans laquelle il se trouvait, même s'il se doutait être encore à Poudlard. Il y avait juste cette atmosphère particulièrement magique qu'il l'enveloppait toujours lorsqu'il était au sein du château. En tout cas, la pièce de la taille d'une chambre était dénuée de tout meubles, ornements ou fenêtres. Le garçon se trouvait au centre d'un cercle de bougies presque fondues qui délimitaient un ensemble de symboles enchevêtrés gravés eux aussi de manière circulaire. Ce fut à ce moment-là qu'il remarqua qu'il était complètement nu avec les mêmes symboles dessinés partout sur son corps.

- D'accord, là c'est vraiment bizarre, chuchota-t-il pour lui-même en se redressant en position debout.

Ses muscles étaient un peu courbaturés mais rien d'insurmontable pour lui. Plus important était la faim et la soif qui le tenaillaient mais Harry s'efforça de les reléguer au second plan. Il tenta d'effacer les dessins sur son corps mais l'encre ou la peinture ou quoique ce soit avait séché. Ça partait au moins avec de la salive, ce qui signifiait qu'une bonne douche permettrait de remédier à cela. Plus encourageant était le fait que ses veines avaient regagné leur couleur normale et que la morsure du Basilic était maintenant complètement guérie. Il traça la chair cicatrisée sur son avant bras et frissonna en repensant à son cauchemar et à la douleur fantôme. Il secoua la tête pour occulter les souvenirs mais se figea en plein mouvement. Ses cheveux ? Il ne les sentait pas remuer autour de lui ou lui caresser la nuque. Harry s'empressa de soulever ses mains pour toucher son crâne et oui, c'était à peine si un fin duvet le recouvrait. Ses doigts descendirent ensuite vers son visage, frôlant sa cicatrice en forme d'éclair et il ne put même pas sentir ses sourcils.

Le jeune Gryffondor plissa le front et s'examina plus attentivement. Ses bras, ses jambes, ainsi que son intimité étaient dépourvus de tout poil. Plus surprenant encore était la douceur de sa peau, elle n'avait plus aucun défaut. Toutes les marques et petites cicatrices qu'il avait récoltées au fil des ans chez les Dursley avaient disparues, y compris celles sur son dos. Harry avait aussi l'impression d'être plus mince, un peu comme il l'était avant de commencer Poudlard. Puis il cligna des yeux plusieurs fois et se retoucha stupidement le visage. Il ne portait pas ses lunettes ! Pourtant il voyait parfaitement malgré la pénombre de la pièce.

Comment cela était-il possible ? La dernière chose dont il se souvenait était des voix inquiètes des Weasley et de la présence persistante de Dumbledore. Pourquoi et comment s'était-il retrouvé tout seul dans cette pièce étrange ? Combien de temps avait-il dormi ? Où étaient ses vêtements ? Comment allaient Ginny et Ron après leur aventure dans la Chambre des Secrets ? Hermione s'était-elle finalement réveillée ? Confus, Harry passa machinalement une main dans ses cheveux pour ne rencontrer que du vide. Cela lui rappela la désastreuse tentative de Tante Pétunia de dompter sa tignasse avec des ciseaux. Il n'avait été qu'un petit garçon de six ans mais même à l'époque; il s'était rendu compte d'à quel point il était ridicule et horrible à regarder. Ça devait être encore pire maintenant : chauve et sans sourcils, un véritable monstre de foire ! Tout le monde allait se moquer de lui, les Serpentard s'en donneraient à cœur joie. Si seulement il pouvait juste...

Le jeune sorcier n'eut même pas à terminer consciemment son souhait qu'une étincelle de chaleur crépita le long de son crâne et il sentit ses cheveux commencer à repousser dans tous les sens. Un léger picotement au niveau de ses sourcils et de ses cils et le même phénomène se produisit à ce niveau. Bientôt, ses cheveux noirs effleuraient à nouveau sa nuque, son front et ses oreilles. Harry les ébouriffa avec joie et soulagement. Il adorait la magie, il adorait sa magie, surtout quand elle le sauvait de situation embarrassante. Il essaya de se concentrer pour faire apparaître des vêtements ou même juste un caleçon, mais sans succès cette fois. Le Gryffondor soupira, il n'avait pas eu grand espoir que cela fonctionne de toute façon. Tant pis, il devrait faire sans.

Bien décidé à découvrir ce qui lui était arrivé, Harry s'approcha du bord du cercle et tendit lentement un bras en dehors des limites. Lorsque rien ne se passa et qu'il ne perçut rien de particulier, il enjamba prudemment les bougies pour se retrouver à l'extérieur. Le sol était plus froid et dur de ce côté-ci et un frisson secoua son échine en conséquence. Néanmoins, cela ne l'arrêta pas longtemps et il marcha sans bruit vers la porte en bois pour tenter de sortir. Bien sûr, elle était verrouillée et le garçon se résolut à explorer un peu plus la pièce.

Il n'y avait vraiment rien d'utile à part les bougies presque fondues et les symboles qu'il ne comprenait pas. Le garçon plissa le nez de contrariété en ne dénichant même pas un bout de chiffon pour couvrir son entre-jambe. Il se rapprocha à nouveau de la porte et colla son oreille contre le bois pour tenter de distinguer n'importe quoi provenant de l'autre côté. Il ferma les yeux et focalisa son ouïe vers l'extérieur comme il l'avait fait des centaines de fois à Privet Drive afin de savoir si la voie était libre pour se faufiler hors de son placard. Au début, il n'entendit pas grand-chose de discernable, comme si la pièce était complètement isolée du reste du château. Mais ensuite, il perçut comme des vibrations secouer le sol et parvenir jusqu'à ses pieds nus. Le rythme devenait plus discernable, s'accélérait et Harry reconnut soudainement le motif, quelqu'un approchait à grand pas !

Le Gryffondor s'éloigna promptement de la porte et ne trouva rien d'autre à faire que de s'accroupir près du mur pour dissimuler au maximum ses parties intimes. Il était partagé entre l'envie de recevoir des explications avec la gêne de se retrouver tout nu devant qui que ce soit. Quelques secondes plus tard, la porte s'ouvrit à la volée, projetant une quantité surprenante de lumière. Harry plissa les yeux à la luminosité soudaine et ne put que distinguer la silhouette d'un homme. Juste à cet instant, le courant d'air provoqué par l'ouverture de la porte véhicula une myriade de parfums différents qui le heurtèrent presque violemment de part leurs intensités et leurs clartés. Il avait l'impression que chaque odeur était terriblement accentuée, descendait le long de sa gorge et s'installait dans un mélange de saveurs dégoûtantes.

Désorienté et un brin nauséeux, il se recroquevilla un peu plus contre le mur, sa main se plaquant contre sa bouche et son nez pour tenter de réduire au maximum l'afflux de senteur. De sa vision périphérique, il vit l'homme en noir s'approcher abruptement et avec lui, la multitude d'odeur nauséabondes s'intensifier encore plus. L'estomac vide du garçon se souleva et de la bile lui monta à la gorge.

- Stop ! N'approchez pas s'il vous plaît, pressa-t-il, désespéré d'arrêter l'avancée de l'homme. Il était certain de réellement vomir si les odeurs s'amplifiaient encore plus. Heureusement, la silhouette sembla se pétrifier à ses paroles.

- Que diable Potter, gronda une voix menaçante que le Gryffondor reconnut instantanément.

Toujours accroupi, Harry tressaillit au son fort résonnant dans ses oreilles. Il inclina la tête sur le côté et scruta les prunelles onyx, le teint cireux, les cheveux gras tombant au-dessus des épaules, le nez crochu qui surplombait des lèvres minces. Professeur Rogue, la chauve-souris des cachots en personne. Le deuxième année gémit de dépit. Sur tous les habitants du château, il avait fallu que ce soit lui qui ouvre cette porte. L'humiliation d'Harry serait totale à n'en pas douter. Si seulement il pouvait juste réfléchir au-delà des odeurs, de la lumière et des bruits qui le déconcertaient...

- Ne restez pas planté là tel un veracrasse sans cervelle, redressez-vous ! ordonna brutalement le professeur de potion.

La posture du garçon se crispa plus encore si c'était possible. Il avait l'impression que Rogue criait directement dans ses oreilles en plus de tout le reste. Luttant pour surmonter ses sens débridés, il répondit de la manière la plus raisonnable qu'il put gérer.

- J'aurais besoin de vêtements avant de pouvoir faire ça, monsieur. Qu'est-ce qui m'arrive de toute façon ? Quelles sont toutes ses odeurs ? Comment vont Ron et Ginny ? interrogea-t-il sans bouger d'un pouce, commençant un peu à s'habituer à l'intensité de son odorat.

Harry capta le tressaillement de l'homme, bien que son visage demeura parfaitement impassible. Son odeur corporelle se teinta d'une nuance plus acide et le jeune sorcier ne sut comment l'interpréter, tout comme il ne pouvait pas nommer la moitié de ce qu'il sentait.

- Exprimez-vous clairement Potter, je ne tolérerai pas vos simagrées une minute de plus ! aboya agressivement Rogue.

Le garçon sentit une juste colère s'élever et ses lèvres se retroussèrent sur ses dents en réponse. Quel était le problème de l'homme à la fin ? C'était évident qu'Harry était tout nu et voulait juste se couvrir avant de se lever. Pourquoi agissait-il comme s'il était déraisonnable et provoquant ?

- J'étais tout à fait poli et compréhensible ! J'ai...

- Ça suffit ! le coupa Rogue avec fureur en s'approchant brusquement. Vous êtes ridicule, incontrôlable et inconvenant, s'emporta-t-il en saisissant les épaules d'Harry pour le relever.

Le jeune sorcier se figea de choc pendant un instant, submergé par l'odeur, la voix et le toucher de l'homme. Il pouvait percevoir chaque callosité sur les doigts et les paumes, les ongles émoussés qui s'accrochaient à ses omoplates, la chaleur qui émanait des mains et se propageait dans tout son corps. Il n'était déjà pas très habitué au contact avec une autre personne mais là, c'était écrasant d'une manière qui se multipliait avec son odorat et son ouïe. Il leva les yeux vers le visage furieux de l'adulte qui le dominait de par sa taille, de par sa force, de par sa fonction. Harry était complètement à sa merci, isolé dans cette pièce inconnue, avec rien pour se protéger et totalement dénudé de surcroît. L'effroi l'envahit comme rarement auparavant et débloqua ses muscles. Il se débattit et se tortilla pour échapper à l'homme en noir.

- Lâchez-moi ! Lâchez-moi tout de suite ! cria le garçon à plein poumons.

- Cessez de vous comporter comme une bête sauvage ! grogna le maître des potions en resserrant sa prise.

Il n'avait aucune chance de rivaliser avec la force physique de Rogue, il n'était qu'un garçon de douze ans mince comme un bâton. Mais Harry était aussi un sorcier, il avait de la magie et elle brûlait d'être relâchée ! Sans pensée consciente, sa peau s'enflamma comme une torche et son assaillant poussa un cri de douleur, le libérant de suite. Le Gryffondor se dégagea d'un bond, le feu s'éteignant et ne provoquant qu'une agréable sensation de chaleur en lui. Il ne prit pas le temps de se demander comment diable il avait fait cela et se mit à courir aussi loin que possible du professeur de potion.

Harry quitta la pièce, fonça tout droit pendant plusieurs mètres et heurta de plein fouet quelque chose de duveteux. Deux bras solides l'encerclèrent pour l'empêcher de tomber et le choc lui fit fermer les paupières par réflexe. L'odeur du citron, de l'encre et du parchemin l'enveloppèrent comme une entité propre. Le jeune Gryffondor rouvrit les yeux pour distinguer une longue barbe argentée, un peignoir rouge bordée de fourrure blanche, de fines lunettes en forme de demi-lunes, surmonté d'un chapeau rouge à pompon blanc.

- Père Noël ? balbutia-t-il, ahuri. Puis le visage ridé de Dumbledore s'inclina vers lui avec un regard surpris et Harry aurait rougit d'embarras si la situation n'avait pas été si déroutante. Professeur, quelque chose ne va pas avec Rogue ! Il agit comme s'il était possédé, expliqua-t-il précipitamment en se décollant de la robe de chambre rouge vif.

Il voulait s'éloigner du vieil homme mais ce dernier resserra son étreinte. Qu'est-ce que les gens avaient à le toucher sans arrêt ces derniers temps ? Il était loin de ressembler à une peluche pourtant ! Harry siffla de contrariété et se tortilla avec force hors des bras de Dumbledore. Puis il se décala vers le mur et reprit sa position accroupie qui dissimulait au moins l'essentiel, gardant dans son champ visuel les deux professeurs. Rogue avait éteint les flammes qui s'étaient propagées à ses manches et appliquait une sorte de pommade sur ses mains. Son regard noir focalisé sur lui était meurtrier et Harry découvrit ses dents et cracha hardiment dans sa direction.

- Ne me touchez plus jamais ou les brûlures seront votre dernier souci !

La chauve-souris des cachots eut un mouvement de recul clair et les lèvres du garçon s'ourlèrent en un rictus satisfait. Que cela lui serve d'avertissement ! Un peu plus calme, il tourna son attention vers le directeur et planta ses yeux verts dans les bleus scintillants.

- S'il vous plaît, pourrai-je avoir n'importe quoi pour me couvrir, monsieur ?

Dumbledore cligna des yeux sans réponse, l'examinant avec une fascination manifeste. Contrarié par le manque de réactivité -à croire qu'il parlait une autre langue !- Harry allait réitérer sa demande quand son ouïe capta le son d'un bruissement d'aile accompagné d'un chant mélodieux. Un immense sourire envahit son visage quand il vit Fumseck voler droit vers lui avec un amas de tissu coincé dans son bec. Le jeune sorcier tendit les bras pour réceptionner ce qui semblait être l'une des robes fantaisistes du directeur, elle était en tout cas imprégnée de la même odeur.

Le vêtement était orné de centaines de petites coccinelles qui voletait dans des directions aléatoires sur un fond de verdure. Harry n'hésita même pas à l'enfiler, bien qu'en plus du style douteux c'était ridiculement trop grand pour lui. Cela protégeait au moins sa modestie et il fut distrait pendant quelques secondes par la douceur de l'étoffe qui effleura sa peau sensible. C'était si soyeux et lisse ! Il l'aurait caressé de ses doigts si Fumseck ne s'était pas posé sur son épaule. Le jeune Gryffondor souleva son avant bras pour que le Phénix puisse s'y déplacer et lui sourit avec reconnaissance.

- Merci beaucoup mon ami, ça commençait à devenir vraiment inconfortable.

Fumseck ne répondit rien au début, ses petites prunelles noires l'examinant de haut en bas avec attention. Puis il se pencha vers lui et mordilla le lobe de son oreille, son nez et quelques mèches de cheveux sur son front en succession rapide. Suite à cela le Phénix parut prendre une décision et il émit une trille soulagée et frotta le côté de sa tête contre sa joue. Harry souleva son autre main pour caresser le chaud plumage écarlate, comprenant que l'oiseau de feu s'assurait juste qu'il allait bien.

- Ça va Fumseck, confirma-t-il. Désolé de t'avoir inquiété, je ne sais pas trop ce qui s'est passé après m'être évanoui dans le bureau de McGonagall. Je vais bien maintenant, surtout avec des vêtements sur le dos.

Le Phénix redressa son cou élancé et émit un court chant carillonnant qui lui alla droit au cœur. Touché par la promesse, Harry combattit la boule dans sa gorge et embrassa maladroitement le dessus de la tête de l'oiseau. Avec tous les soins du monde, il flatta le poitrail de l'animal chaleureux, oublieux des deux hommes qui le surveillaient avec intensité.

- Tu sais que moi aussi je serais toujours là quand tu en auras besoin. Pour quoique ce soit, jura-t-il.

Les prunelles noires de Fumseck brillèrent comme des pierres précieuses et il mordilla le nez du garçon avec affection. Clairement, il pensait que c'était Harry qui avait le plus besoin de protection mais lui laissait l'illusion pour lui faire plaisir. Le jeune sorcier fit la moue mais laissa couler. Les actes valaient bien plus que les mots et il montrerait à son ami à plume qu'il était digne de sa préoccupation. Satisfait de son état, le Phénix étendit ses ailes, prit son envol et disparut à l'angle du couloir, chantant une mélodie heureuse et apaisante qui résonna longtemps après son départ. Le sourire aux lèvres, le jeune Gryffondor se rappela de la situation actuelle lorsque Dumbledore émit un léger gloussement derrière sa barbe.

- Eh bien mon très cher garçon, vous vous êtes fait un ami des plus loyaux. Je suis ravi que Fumseck se soit enfin lié à quelqu'un d'autre que moi.

- Sans lui, je serais mort une dizaine de fois dans la Chambre des Secrets, merci de me l'avoir envoyé avec le Choixpeau.

Le vieil homme pencha la tête et sembla se concentrer fortement avant de lui répondre avec un petit sourire.

- Ah... j'avoue que je n'ai eu aucun rôle à jouer dans cette situation Mr. Potter, Fumseck a, comme bien souvent, agit de son propre chef.

Les yeux verts du garçon s'élargirent de surprise et de plaisir, même si en y réfléchissant ça ne l'étonnait pas tellement. Il se promit intérieurement d'acheter des friandises à l'oiseau dès que l'occasion se présenterait. Mais pour l'heure, il avait des milliers de questions pour le directeur de Poudlard, à commencer par ce que diable étaient les symboles peints sur tout son corps. Il retroussa la longue manche pour lui montrer mais sa peau était désormais complètement propre, exemptée de toute trace. Confus, Harry leva la tête vers Dumbledore.

- Qu'est-ce qui se passe Professeur ? Quelle était cette pièce dans laquelle je me suis réveillé ? Pourquoi on m'a rasé la tête ? Comment vont Ron et Ginny ? Hermione est-elle encore pétrifiée ?

- Albus, intervint Rogue en s'approchant prudemment, ne laissant pas le temps au directeur de répondre.

Harry le regarda avec méfiance mais le professeur de potion semblait s'être quelque peu calmé depuis son échange avec Fumseck.

- Je sais Severus, il ne s'en rend même pas compte, c'est tout bonnement incroyable.

L'homme en noir regarda son supérieur comme s'il était fou. Néanmoins, il ne fit aucun commentaire sur cela et questionna avec une légère pointe d'inquiétude dans la voix :

- Croyez-vous qu'il ne puisse plus...

- J'espère que non et puis il comprend manifestement ce que nous disons.

Harry fronça les sourcils et ne put retenir sa langue plus longtemps, fatigué d'être ignoré ainsi.

- Bien sûr que je comprends ce que vous dites, vous parlez anglais !

Dumbledore lui sourit gentiment, comme s'il était une petite chose remarquable et adorable. Encore une fois, il eut une courte pause avant qu'il ne lui réponde.

- C'est le point mon garçon, depuis tout à l'heure je crains que vous ne siffliez comme un serpent.

La bouche d'Harry béa de stupeur. Quoi ? Comment ? Vraiment ?

- Mais c'est pas possible ! Il n'y a aucun serpent à proximité ! Et puis vous semblez bien me comprendre vous !

Le vieil homme se concentra sur ses lèvres et prit quelques secondes avant de formuler sa réponse.

- Ça mon cher garçon, c'est le fruit d'années de travail et d'une fascination sans bornes pour les langages magiques. Je ne peux pas parler le Fourchelang mais je l'ai assez étudié pour saisir globalement ce que vous dites si vous n'allez pas trop vite.

La bouche d'Harry s'ouvrit et se referma plusieurs fois sans qu'aucun son ne s'échappe. C'était invraisemblable et le garçon aurait cru à une blague si Rogue n'avait pas été présent à l'observer avec une lueur calculatrice. Mais n'était-ce pas l'histoire de sa vie ? Des choses folles et abracadabrantes semblaient lui arriver à chaque fois et Harry devait juste y faire face et avancer. Il ferma les yeux et respira profondément. D'accord, il sifflait comme un serpent au lieu de parler normalement. Ses sens étaient beaucoup plus aiguisés et sa peau s'était mystérieusement nettoyée quand elle s'était enflammée, en plus de la disparition de toutes les petites cicatrices qui avaient jonché son corps. Au moins, il avait encore ses cheveux, il pouvait les sentir recouvrir ses oreilles et effleurer sa nuque.

Bon, tout cela n'était pas apparu de nul part, résonna-t-il. Que ce soit le venin du Basilic, les larmes du Phénix ou l'étrange endroit duquel il s'était éveillé, quelque chose avait causé ces changements. Il devait croire que ce n'était pas irréversible. Le plus important pour le moment était d'essayer de contrôler ses sifflements, de parvenir à parler normalement. Mais comment ? Harry n'arrivait même pas à entendre la différence. De son point de vue, il parlait la même langue que les deux professeurs. Le jeune Gryffondor fronça les sourcils et rouvrit les yeux, il se concentra sur les hommes, les humains, face à lui et essaya :

- Et là, je parle anglais ?

Dumbledore secoua la tête tandis que Rogue plissa les yeux avec suspicion. Bien sûr, cela n'allait pas être aussi facile, rien ne l'était dans la vie du garçon de douze ans. Il réfléchissait à une autre méthode quand son estomac gargouilla bruyamment dans le couloir faiblement éclairé. Les joues d'Harry se colorèrent d'embarras et il appuya ses deux mains sur son ventre pour le faire taire. Mais les deux hommes l'avait clairement entendu puisque Dumbledore s'exclama avec emphase :

- Ah, je manque à tous mes devoirs, Madame Pomfresh aura ma tête si je vous laisse dans cet état. Venez, déplaçons cette conversation à l'infirmerie, je suis sûr qu'un bon repas vous y attendra malgré l'heure matinale.

Harry n'eut même pas le temps de songer à protester qu'il était déjà entraîné dans le dédale de couloir que formait les cachots de Poudlard. Pieds nus et les mains occupées à soulever le bas de la robe trop longue, il suivit les deux hommes qui le guidèrent des étages plus haut. La première fenêtre qu'il croisa montrait que le ciel commençait à peine à s'éclaircir et la plupart des portraits dans les tableaux dormaient profondément. Le trajet se déroula sans qu'aucune paroles ne soient échangées, ce qui ne dérangea pas du tout le jeune Gryffondor. L'intensité de son odorat, l'acquittée de sa nouvelle vision, les bruits que le château produisait, en plus de ceux des deux professeurs, le distrayait sans arrêt. C'était sans compter la sensibilité accrue de sa peau qui véhiculait des informations contradictoires entre le sol rugueux en pierre et la douceur incroyable de la robe du directeur.

Lorsqu'ils arrivèrent à l'infirmerie, l'horloge suspendue au-dessus de la porte l'informa qu'il n'était pas encore cinq heures du matin. La pièce était déserte de patient, ce qui signifiait que les victimes du Basilic avaient probablement été guéries. Du moins, Harry l'espérait de tout cœur. Il avait tellement hâte de revoir Hermione et de s'assurer qu'elle allait bien. Son absence avait provoqué un réel vide pour lui et il était certain que Ron avait éprouvé la même chose. Il allait poser la question à Dumbledore quand son attention fut accaparée par un plateau de nourriture qui apparut juste à côté du lit qu'il avait occupé chaque fois qu'il s'était retrouvé ici. Soudainement, il n'y avait rien de plus important pour lui que de boire et manger. Immédiatement.

Le corps d'Harry bougea avant même que son cerveau n'enregistre l'odeur délicieuse qui émanait des plats fumants. Il se servit trois grands verres d'eau et les avala à la suite en prenant à peine le temps de respirer entre. Toujours debout, il attrapa une nectarine juteuse et croqua voracement dedans. Le jeune sorcier se figea de choc et faillit laisser tomber le fruit tant l'explosion de saveur dans sa bouche était époustouflante. Sucré, doux, parfumé, revigorant, simple, mais si bon... Le jeune garçon reprit une bouchée et la laissa s'attarder dans sa bouche cette fois, il ferma les yeux et se délecta du goût comme jamais, allant même jusqu'à se lécher les doigts quand il ne restait plus que le noyau dépourvu de toute chair. Il piocha ensuite une tranche de bacon dans l'assiette garnie et saliva pratiquement à l'odeur alléchante. Les saucisses étaient encore meilleures si c'était possible et Harry haleta de pure plaisir quand il mordit dans un moelleux au chocolat. Il éplucha une banane et alterna entre le gâteau et le fruit, ne parvenant pas à décider ce qu'il préférait.

C'était comme si c'était la première fois qu'il goûtait vraiment à la nourriture de Poudlard. Jusqu'à maintenant, il n'avait pu percevoir qu'une fraction des différentes saveurs à sa disposition et maintenant c'était comme si un tout nouveau monde s'offrait à lui. Pourtant pas un très grand mangeur, Harry se retrouva à goûter chaque aliment du plateau, appréciant particulièrement les multiples fruits à sa disposition. Repu comme jamais, le Gryffondor de douze ans s'affaissa sur le lit et lécha ses lèvres avec un bruit de contentement profond.

- C'est le meilleur repas que j'ai mangé de toute ma vie, mille merci à quiconque l'a préparé !

Un léger rire lui fit tourner la tête. Installés dans trois fauteuils confortables, Dumbledore, Madame Pomfresh et Rogue buvaient une tasse de thé en l'observant avec divers degrés d'amusement, de fascination et de dédain.

- Les elfes de Poudlard seront ravis de l'entendre mon garçon. C'était tout un spectacle de vous voir apprécier autant votre nourriture, sourit gentiment le vieil homme.

Les joues d'Harry s'empourprèrent, il avait été totalement inconscient de son public et de l'arrivée de l'infirmière. Il se redressa et arrangea au maximum la robe aux coccinelles du directeur et adressa un air contrit aux trois adultes. Il ne savait pas bien ce qu'il l'avait posséder pour manger ainsi -il n'avait même pas pris la peine d'utiliser des couverts !- mais une chose était sûre, il avait été affamé comme ces quelques fois où les Dursley le punissaient pendant des semaines consécutives. Ce qui lui fit se demander...

- Combien de temps ai-je dormi ?

Dumbledore consulta une curieuse montre à gousset, ce qui fit espérer à Harry qu'il était resté dans les vapes beaucoup moins longtemps que l'année dernière puis se caressa la barbe pensivement avant de répondre.

- Ça va faire bientôt dix jours, nous commencions à désespérer de votre réveil Mr. Potter.

Le jeune Gryffondor cligna des yeux sans comprendre, l'information était tellement invraisemblable qu'elle ne parvenait pas tout à fait à son cerveau. Dix jours ? Cela signifiait qu'il avait raté les examens de fin d'année et le réveil d'Hermione et que c'était le huit juin aujourd'hui ou peut-être le neuf et qu'il restait moins de deux semaines avant qu'il ne soit obligé de retourner chez les Dursley. Harry cligna encore des yeux, incertain de la réaction qu'il devait avoir.

- Qu'est-ce qui m'est arrivé ? demanda-t-il finalement.

- Là est toute l'histoire, mon cher garçon. Comprenez que le venin de Basilic est la plus puissante toxine qui existe dans notre monde. Peu importe sa quantité, elle finira par tuer ou détruire tout ce qui est entré en son contact. À côté de cela, les larmes de Phénix ont une propriété curative incomparable et absolue. Quelle que soit la blessure, la malédiction ou la maladie, les larmes la guériront. Ces deux substances hautement magiques sont des plus rares à trouver et à ma connaissance, personne n'avait auparavant essayé de les faire interagir ensemble.

"Dans la Chambre des Secrets vous avez été mordu par un Basilic, puis Fumseck vous a baigné de ses larmes afin de tenter de vous sauver. Les deux éléments se sont mélangés en vous et ont chacun tenté de prendre la domination sur l'autre. Tant que vous portiez l'armure de Gryffondor, la réaction était assez stable, entraînant simplement des épisodes de chaleur ou de froid intense. Cependant dès que vous l'avez retirée, il n'y avait plus aucun stabilisateur entre les deux réactifs et chacun a tenté de prendre le dessus sur l'autre, devenant de plus en plus violent à chaque cycle d'empoisonnement-régénération.

"Quand c'était le venin qui dominait vous preniez des caractéristiques serpentines en même temps que votre température corporel chutait et que votre cœur ralentissait jusqu'à s'arrêter complètement. Puis les larmes prenaient le dessus et vous guérissaient à chaque fois un peu plus comme le ferait un Phénix en s'enflammant. Tout ce que j'entreprenais ne semblait qu'intensifier la réaction et ce n'est que l'intervention de Fumseck avec de nouvelles larmes qui a ralenti suffisamment le cycle pour que nous puissions vous administrer la Goutte du Mort Vivant."

Le professeur Dumbledore fit une petite pause pour boire une gorgée de thé avant de reprendre son récit de sa voix paisible. Harry était stupéfait d'entendre toutes ces choses qui lui étaient arrivées sans qu'il n'en garde le moindre souvenir.

- Avec l'aide du professeur Rogue, de Madame Pomfresh et de l'esprit de Poudlard, nous avons cherché une solution pour neutraliser le venin de Basilic ou à défaut de stabiliser les deux éléments antagonistes afin que vous puissiez reprendre conscience. Il s'est avéré que le meilleur moyen pour cela était d'utiliser l'amour que votre mère vous portait, combiné à l'influence des larmes de Phénix et d'un cercle rituel soigneusement conçu par le professeur Babbling et moi-même. Le professeur Rogue a ensuite préparé la potion Wiggenweld pour vous délivrer du Philtre de la Mort Vivante et le château lui-même a alimenté le cercle runique censé vous venir en aide. Cependant, cela a pris sept jours avant que vous ne repreniez finalement conscience et nous craignions que quelque chose ait mal tourné. Heureusement vous paraissez en assez bonne santé, hormis quelques légères différences, termina joyeusement le directeur.

- Ceci, c'est à Severus et moi d'en juger, intervint Madame Pomfresh en se levant, sa baguette magique dans la main. Si vous permettez Mr. Potter.

Harry demeura complètement silencieux pendant que l'infirmière faisait apparaître une plume et du parchemin et commençait à lui lancer toute une série de sortilèges. L'un d'eux permit de remplir une fiole de son sang qu'elle tendit immédiatement à Rogue qui se mit lui-même à lui faire subir toute une batterie d'examens. Les explications de Dumbledore avaient été longues, mais beaucoup de choses avaient été vague ou laissées sous silence. Quel était exactement ce rituel ? Que permettait-il de faire ? Comment Poudlard les avait aidés ? Qui était Babbling ? En quoi l'amour de sa mère avait été impliqué ?

Il avait fait des recherches l'année dernière à la bibliothèque avec Hermione suite à sa conversation avec le directeur et à part dans les contes pour enfant, il n'avait rien trouvé qui mentionnait que l'amour d'une mère conférait une protection contre les autres. Encore moins une qui permettait de brûler à mort une personne qui menaçait sa vie. Sa tentative de frapper Jedusor dans la Chambre l'avait juste prouvée. Il y a un an, Dumbledore ne lui avait pas révélé toute la vérité et au reniflement de Rogue quand le vieil homme avait mentionné "l'amour de sa mère", il ne la lui disait pas entièrement non plus aujourd'hui.

Le garçon réprima un froncement de sourcil, ça ne servirait à rien de poser plus de question, il était pratiquement certain qu'on lui répondrait qu'il était encore trop jeune pour la vérité. À la place, le Gryffondor ferait encore des recherches mais accès sur les runes cette fois. Les symboles sur son corps et sur le sol duquel il s'était réveillé devaient en être. Peut-être que sa mère avait aussi effectué un rituel permettant de le protéger de Voldemort ? C'était déjà plus vraisemblable que l'explication de Dumbledore. Son attention revint au moment présent lorsque Madame Pomfresh l'interpella.

- Maintenant mon garçon, nous allons tester vos sens à l'aide d'une série de tests simples.

Harry hocha la tête sans répondre et obéit docilement aux instructions de la matrone, sachant déjà que tous ses sens s'étaient énormément affûtés. La barrière de la langue était un peu ennuyeuse mais l'infirmière s'arrangeait avec des questions simples et le garçon lui répondait avec ses mains ou des signes de tête. Après presque une demie heure où le jeune Gryffondor fut examiné de fond en comble, les deux adultes rangèrent finalement leurs baguettes et les plumes cessèrent de s'agiter sur les rouleaux de parchemin. Le silence s'installa alors dans l'infirmerie et le jeune garçon regarda les trois sorciers communiquer sans mots entre eux. Il suspecta que les résultats ne seraient pas plaisants à entendre et que sa vie allait juste une nouvelle fois prendre un tournant inattendu. Il s'arma de courage et de calme et attendit nerveusement qu'on lui explique ce qui avait changé en lui. Ce fut Madame Pomfresh qui commença à parler.

- Avant toute chose je tiens à vous certifier que votre vie n'est plus en danger. A l'exception des deux cicatrices sur votre avant bras et sur votre front, votre organisme est en très bonne santé. Plus que cela, c'est comme si vous n'aviez jamais subi aucune blessure ou maladie. Par exemple, mes sorts ne détectent même pas la repousse des os de votre main d'il y a quelques mois ou encore le plus petit antécédent de grippe.

Harry était un peu perplexe mais cela concordait avec l'observation de sa peau quand il s'était éveillé. L'infirmière continua en lui fournissant des données précises sur sa fréquence cardiaque, son rythme respiratoire, sa température corporelle, son poids et une demi-douzaine d'autres détails qui le laissèrent confus. Apparemment, tout était anormalement bas pour qu'il soit en aussi bonne santé. Son cœur battait un peu trop lentement, il ne respirait pas assez et sa température était trop basse pour ne citer qu'eux. Pourtant tout son organisme allait bien, voire même trop bien en ce qui concernait ses sens. Son ouïe était plus fine avec une nette capacité à percevoir les aigus et les vibrations autour de lui. Il n'avait manifestement plus de problème de vue puisqu'elle était dorénavant comparable à certain rapace. Son odorat était précis et très aiguisé ce qui influençait forcément son sens du goût.

Encore plus déroutant était le fait que sa signature magique avait changé. Madame Pomfresh essaya de le dire délicatement, mais tout ce qu'Harry retint, c'était qu'elle n'était plus totalement humaine. Même son sang, examiné par Rogue, ne l'était plus. Le garçon baissa la tête et étudia ses mains. Il n'était plus humain. Les adultes ne le disaient pas, mais il pouvait juste deviner les mots qui gravitaient dans leurs esprits : anormalité, monstre. Harry n'avait même pas réussi à rester un sorcier plus de deux ans avant que la cruelle réalité ne le rattrape. Peut-être que les Dursley avaient eu raison depuis tout ce temps, après tout il n'arrivait même plus à parler normalement... Il fronça les sourcils, malheureux, puis se secoua intérieurement. Ce n'était pas le moment d'avoir de telles pensées !

- Puis-je tout de même continuer à étudier à Poudlard ? questionna-t-il en direction de Dumbledore.

Pensif, le directeur lui fit répéter plus lentement avant de répondre.

- Bien sûr Mr. Potter, vous êtes toujours un enfant sorcier et cette école a déjà accueillie toute sorte d'élèves depuis sa création. N'ayez crainte, vous aurez toujours votre place à Poudlard.

Rassuré, Harry sourit légèrement au vieil homme. Tant qu'il pouvait rester à Poudlard avec ses amis, il serait heureux. D'ailleurs...

- Hermione et les autres se sont-ils réveillés sans mal ? interrogea-t-il avec une pointe d'anxiété.

- Oui, tranquillisa le vieil homme. Le professeur Rogue préparait le philtre de mandragore pendant que vous étiez dans la Chambre des Secrets et Madame Pomfresh finissait juste de l'administrer à tous les patients lorsqu'elle est apparue dans le bureau du professeur McGonagall. Ils se sont tous réveillés le lendemain matin sans aucune séquelle. D'ailleurs la jeune Miss Granger vient tous les jours à l'infirmerie avec les Weasley pour avoir de vos nouvelles.

Harry éprouva une douce sensation de chaleur dans la poitrine. Parfois, il avait encore du mal à croire qu'il avait réussi à se faire de si bons amis. C'était la chose la plus précieuse qu'il détenait et il redescendrait cent fois dans la Chambre des Secrets si cela signifiait les aider. Ce qui lui rappela...

- Et Hagrid ? A-t-il été innocenté ? Est-il sorti de prison ?

Il espérait que le garde-chasse était de retour à Poudlard sain et sauf. Harry et Ron s'étaient rendus tous les jours dans sa hutte pour nourrir Crockdur et lui tenir compagnie. Hagrid bien qu'un membre du personnel du château avait une place particulière dans le cœur du jeune sorcier. C'était lui qui lui avait fait découvrir le monde magique et avait célébré pour la première fois son anniversaire. Il ne le remercierait jamais assez pour lui avoir offert Hedwige, sa plus fidèle amie ainsi que son inestimable album photo.

- Bien sûr, j'ai écrit au ministère dès que votre état s'est stabilisé. Il était de retour chez lui avant que l'aube ne se lève. Chaque jour, il va de mieux en mieux et il reprendra son activité normale très bientôt. Cet été, nous espérons lui trouver une nouvelle baguette pour qu'il puisse réapprendre à utiliser sa magie.

Les lèvres d'Harry s'étirèrent en un sourire ravi, Hagrid le méritait tellement ! Il avait été victime d'une horrible injustice pendant cinquante ans et le garçon était vraiment heureux d'avoir pu aider à y mettre fin. Rasséréné, il s'installa plus confortablement sur le lit blanc, ajustant la longue robe pour qu'elle recouvre ses pieds. Distrait une nouvelle fois par la douceur de l'étoffe, il se mit à la caresser du bout des doigts, poursuivant les coccinelles qui voletaient sur ses genoux. C'était incroyable les détails qu'il parvenait à distinguer avec sa nouvelle vision. S'il le souhaitait, il pourrait compter chaque brin d'herbe représentée, chaque nuance de fleurs différentes. Soudain, il se demanda ce que ce serait de sortir dehors avec ses sens plus aiguisés, mieux encore, comment ça serait de voler sur son Nimbus 2000. Il laissa échapper un soupir de nostalgie, les entraînements de Quidditch lui manquaient tout autant qu'Hermione.

Hermione. Ron. Comment réagiraient-ils à ses changements en lui ? Resteraient-ils toujours ami avec un monstre ? Pourrait-il le supporter si jamais ils le rejetaient ? À cette pensée, son estomac plein se contracta et toute la nourriture qu'il avait englouti menaça de ressurgir. Les poings du jeune Gryffondor se serrèrent et il se força à respirer profondément. Plus tard, il y réfléchirait plus tard. Pour l'instant, il se concentrerait sur les trois adultes qui discutaient entre eux des prochaines étapes. Madame Pomfresh insistait pour le garder en observation, Dumbledore voulait mettre au courant le professeur Babbling de son réveil pour qu'elle les aide à trouver une solution pour son incapacité à parler anglais, tandis que Rogue souhaitait lui faire subir encore plus de tests. Ennuyé qu'il discute ainsi de lui comme s'il n'était pas là, Harry se leva du lit et fit signe qu'il voulait aller aux toilettes.

Une fois son affaire terminée, il décida qu'une bonne douche s'imposait et familier avec la salle de bain de l'infirmerie, il n'y réfléchit pas à deux fois avant de se déshabiller. Le jeune sorcier prit son temps, se lavant soigneusement le corps et les cheveux. La sensation de l'eau chaude cascadant sur lui était paradisiaque et il ne put s'empêcher de s'examiner une nouvelle fois à la lumière du jour. Il se toucha sous toutes les coutures, pour se réapproprier ce corps plus mince et presque sans défaut. Lorsque ses doigts effleurèrent la marque de morsure du Basilic, il frissonna, se rappelant la peur et la douleur qu'il avait éprouvé dans la Chambre des Secrets.

Sans l'aide de Fumseck et de Godric Gryffondor, il serait mort, Ginny aussi. Pire encore, Voldemort serait de retour et libre de semer la destruction et le chaos. Il fronça les sourcils en éteignant l'eau chaude. Cela ne pouvait plus continuer ainsi. Il s'était voilé la face ces deux dernières années, pensant qu'il pourrait enfin se la couler douce dans le monde magique, loin des Dursley, mais c'était une erreur. Sa vie n'était pas prête à ressembler à un long fleuve tranquille, pas tant que Voldemort serait après lui. Et vraiment, si ce n'était que lui qui était en danger, ça ne serait pas si dramatique, mais Jedusor s'en était pris à Ginny pour l'atteindre. Cela signifiait que ses ennemis n'hésiteraient pas à menacer ses proches. Cela, par contre, était inacceptable. Harry ne laisserait jamais ses amis souffrir à cause de lui. Il devait absolument les protéger du mal qui semblait constamment graviter autour de lui. Pour cela, il n'y avait qu'une seule solution. Devenir plus fort.

L'adolescent hocha la tête pour lui-même et se sécha sommairement avec une serviette moelleuse, avant de saisir l'uniforme scolaire qui était apparu sur le rebord du lavabo. Il le reconnut comme le sien et caché dans les replis de sa robe d'école, il y avait sa baguette magique en bois de houx. Harry l'attrapa sans y penser, trop occupé à réfléchir aux divers moyens de s'améliorer et pendant quelques secondes la baguette ne sembla pas le reconnaître et se débattit dans sa prise. Fronçant les sourcils, il la serra plus fort et laissa sa magie l'envelopper complètement.

- C'est toujours moi, même si j'ai un peu changé, déclara-t-il d'une voix ferme.

Cela sembla l'apaiser puisque sa baguette cessa de frémir et se réchauffa contre la paume de sa main, le reconnaissant enfin. Le jeune sorcier sourit pour lui-même et prit le temps de caresser le bois soigneusement, laissant la baguette se familiariser à nouveau avec lui. Pour faire bonne mesure, il lança même un sort de nettoyage, séchant les gouttelettes d'eau qui s'étaient répandues dans la salle de bain. Satisfait et se sentant plus à l'aise dans son uniforme, Harry regagna silencieusement la pièce principale, beaucoup plus fraîche que l'atmosphère humide qu'il quittait.

Dumbledore et Rogue étaient partis, laissant Madame Pomfresh assise à son bureau, griffonnant des choses sur un tas de parchemin. Elle était si absorbée par son travail qu'elle ne remarqua même pas sa présence. L'horloge indiquait qu'il était bientôt huit heures et le jeune Gryffondor se demanda s'il devait aller en cours ou non. À vrai dire, il n'était même pas tout à fait sûr du jour de la semaine. Pour tout ce qu'il savait c'était le weekend end et la majorité des élèves étaient encore endormis. D'ailleurs, le directeur ne l'avait pas informé s'il devait rattraper ses examens ou non ? Pas qu'Harry soit pressé de les passer mais sa nouvelle résolution l'incitait à prendre plus au sérieux ses études et quoi de mieux qu'une évaluation pour tester son niveau. Hermione serait fière de lui pour cette pensée. Elle avait dû sérieusement paniquer en se réveillant la veille des examens en ayant raté un mois entier de classe. Il se demanda si Ron lui avait transmis les notes de cours qu'ils avaient soigneusement recopiées pour elle -ils avaient même fait l'effort d'être attentif avec Binns !- et si cela suffirait à combler sa soif d'apprendre.

Le jeune adolescent se mordit la lèvre, désirant soudainement plus que tout courir vers la tour Gryffondor retrouver ses amis. Ils lui manquaient tellement... Mais une sourde angoisse lui nouait le ventre et le figeait sur place. Si jamais Ron et Hermione n'acceptaient pas toutes ses différences, si jamais leurs regards changeaient pour devenir comme les étudiants qui le désignaient comme l'Héritier de Serpentard. Il... Il... Il ne pensait pas le supporter. Pas eux. Toute l'école, tous ses professeurs, l'ensemble du monde sorcier même, pourvu qu'Harry ne perde pas leur amitié. Tout son corps sembla se refroidir à cette idée et il frissonna sans pouvoir se contrôler. Instinctivement il se recroquevilla un peu sur lui-même et frictionna ses avant-bras pour se réchauffer mais rien n'y fit, c'était comme si son corps s'était glacé de l'intérieur. Ses mouvements finirent par attirer l'attention de Madame Pomfresh qui se leva vivement pour l'examiner.

- Ça va, je vais bien, marmonna-t-il, en se forçant à se redresser.

L'infirmière l'ignora -surement parce qu'il avait parlé Fourchelang- et lui lança une série de charmes diagnostics. Harry se fatiguait un peu de ceux-là et ne fut pas étonné lorsqu'elle s'exclama :

- Vous êtes gelé mon garçon !

Il fut installé dans un lit et emmitouflé dans une couverture une minute plus tard. Cela aurait été plus agréable si la texture du matériau ne le dérangeait pas autant. Il sentait chaque peluche de laine s'accrocher à sa peau découverte et combinée à la légère odeur de renfermé que son odorat percevait, il ne parvenait pas à se détendre. Dès que Madame Pomfresh s'éloigna, il se débarrassa de la couverture offensante et se blottit dans sa propre robe d'école, essayant de garder un maximum de chaleur. Ce n'était pas comme s'il faisait moins dix, c'était pratiquement l'été bon sang ! Fronçant les sourcils de contrariété, il fut distrait de ses pensées renfrognées par un bruit régulier qui approchait.

Il inclina la tête sur le côté et se concentra dessus pour tenter de comprendre ce que c'était. À la fois régulier et désynchronisé, faible mais distinctif, en rythme et oui Harry pouvait parfaitement les distinguer maintenant que c'était plus proche, deux personnes se dirigeaient vers l'infirmerie. Sûrement Dumbledore et Rogue qui revenaient. Hum étrange... tout à l'heure il avait carrément pu sentir les vibrations provenant du sol, peut être qu'il fallait qu'il se tienne debout sur ses pieds pour cela. Et puis le jeune sorcier grimaça en se rappelant l'odeur écœurante du professeur de potion. Des relents s'attardaient encore dans l'infirmerie, atténués par les produits nettoyants et les effluves du repas qu'il avait dévoré. Au moment où la porte s'ouvrit, Harry ne put s'empêcher de se pincer le nez pour éviter de revivre l'expérience de plus tôt.

Mais ce n'était ni le directeur de Poudlard, ni le maître des potions. Figés dans l'embrasure de la porte se tenaient Ron et Hermione dans leur uniforme scolaire, les yeux écarquillés de joie et d'incrédulité. Le sac d'Hermione glissa de son épaule et cela sembla la réveiller assez pour qu'elle se précipite en avant, deux sillons de larmes dévalant ses joues.

- Harry, s'écria-t-elle, merci Seigneur, tu es vivant !

Elle l'engloutit dans une étreinte écrasante, mi-riant, mi-sanglotant. Ron était derrière elle de quelques secondes, ses mains touchant ses épaules, son dos, ses cheveux, comme s'il ne pouvait pas croire qu'il était réellement là. Ses yeux bleus étaient rougis par l'émotion et un immense sourire barrait son visage constellé de tâches de rousseur.

- Ne me refais plus jamais une telle frayeur mon pote, gronda-t-il en les serrant tous les deux dans ses bras, ne prenant pas la peine de décaler la jeune fille.

Les sens d'Harry étaient complètement surchargés par l'abondance de stimuli différents mais il n'était ni paniqué, ni effrayé. Au contraire, le parfum combiné de ses deux meilleurs amis, leurs voix, la chaleur qu'ils dégageaient, les battements de leurs cœurs... c'était comme avoir enfin retrouvé sa place. Le garçon de douze ans n'eut alors plus aucun doute. Jamais Ron ou Hermione ne l'abandonneraient pour quelque chose d'aussi trivial que des changements physiques ou un langage maudit. C'était absurde, leur amitié était beaucoup plus forte que cela.

Toute timidité envolée, il s'accrocha à eux en retour et respira leurs odeurs, effleura leurs visages, essuya leurs larmes, caressa leurs cheveux et s'assura qu'ils étaient vivants et en bonne santé. Ron n'avait plus aucune égratignures causée par leur périple dans la Chambre des Secrets et Hermione aucune séquelle de sa longue pétrification. Jamais il n'avait eu l'occasion d'être aussi proche de quelqu'un d'autre. Harry était si heureux et soulagé qu'il éclata d'un grand rire et se détacha finalement des deux autres adolescents, ses mains froides enveloppées dans celles plus chaudes de ses amis. Sa poitrine bouillonnait d'une centaine de sentiments qu'il pouvait à peine commencer à nommer.

- Vous m'avez vraiment manqué tous les deux, souffla-t-il une fois que son rire s'estompa.

Les deux Gryffondor le regardèrent avec confusion et Hermione, précautionneusement, l'informa qu'il sifflait comme un serpent. Le jeune sorcier crachota d'agacement, montra sa bouche et tenta de leur expliquer la situation avec un mélange de mots et de gestes. Étonnement ce fut Ron qui saisit le premier.

- Tu n'arrives plus à parler anglais ?

Le petit brun hocha vigoureusement la tête.

- Je suis coincé avec le Fourchelang depuis que je me suis réveillé, expliqua-t-il même en sachant qu'ils ne le comprendraient pas.

Ron avait le front plissé comme s'il essayait sincèrement de déchiffrer les mots qu'il prononçait, tandis qu'Hermione réfléchissait manifestement à une solution à son problème. La poitrine d'Harry se réchauffa, et il se promit de ne plus jamais présumer de leurs réactions.

- Je crois que j'ai une idée pour nous aider à communiquer, déclara la seule fille du trio. Elle se leva du lit et partit récupérer son sac d'école oublié à l'entrée de l'infirmerie. Elle y dénicha son carnet de note et sa plume auto-encreuse qu'elle tendit à Harry. Essaie avec ça plutôt.

Le jeune Gryffondor lui fit un grand sourire et écrivit soigneusement : "Tu es géniale Hermione. " Les joues de la fille se tintèrent de rose et Ron essaya de masquer son ricanement avec une toux fort peu convaincante. Hermione lui donna un coup de coude en représailles et les trois se retrouvèrent à rire bêtement comme seuls les adolescents le pouvaient. "Alors comment va tout le monde ? Ginny s'est-elle remise ? Avez-vous vu Hagrid ? Comment se sont passés vos examens ?" Il allait écrire plus, mais les deux commencèrent à lui répondre tandis qu'il formulait encore la dernière question.

- Tout le monde va bien, Ginny se remet à la maison avec Papa et Maman. Dumbledore a examiné lui-même son esprit pour vérifier tout dommage que la possession de Tu Sais Qui aurait causé. Heureusement, il a affirmé que rien n'était permanent et que Poudlard s'engageait à payer toute aide dont elle aurait besoin pour guérir. Je crois que Maman l'emmène à une sorte de thérapie trois fois par semaine. D'après ses lettres elle va de mieux en mieux et souhaite revenir à l'école mais connaissant nos parents, ils ne la laisseront pas partir avant l'automne prochain.

Malgré le sourire amusé du rouquin, Harry pouvait voir qu'il était encore inquiet pour sa petite sœur. Ce qui était arrivé à Ginny était grave, elle avait non seulement frôlé la mort, mais avait, en plus, été au contact d'une magie noire puissante pendant des mois...

- Sinon, tous les pétrifiés se sont réveillés comme si de rien n'était, enchaîna Hermione. Un instant je regardais le miroir de Pénélope à l'angle du couloir et la seconde suivante, j'étais à l'infirmerie avec Madame Pomfresh qui m'examinait. J'étais choquée de découvrir qu'un mois s'était écoulé et lorsque Ron m'a raconté tout ce qui s'était passé, je n'en revenais pas ! Vous auriez pu mourir une dizaine de fois entre les Acromentules, le Basilic, le journal maudit, Lockhart et la Chambre des Secrets... Ses yeux noisettes se remplirent de larmes. Nous avons cru... pendant quelques jours nous étions terrifiés que... les professeurs ne voulaient rien nous dire et même Fred et George ne parvenaient pas à te trouver... sa voix s'étrangla dans un sanglot réprimé et la sorcière de treize ans baissa la tête pour cacher ses larmes.

Harry comprit sans mal ce qu'elle ne parvenait pas à exprimer. Il lut la même peur dans le regard bleu clair de Ron et s'en voulut de les avoir tant inquiétés. Néanmoins, une grande partie de lui était simplement émerveillé que deux personnes se soucient autant de lui. Sa résolution à les protéger se transforma en un brasier brûlant que jamais rien n'éteindrait. Ils étaient précieux au-delà de tout entendement. Le jeune Gryffondor lâcha le petit carnet et s'empara de leurs deux mains, les serrant dans les siennes pour les rassurer. Dans un sifflement doux, il leur murmura des paroles apaisantes et la promesse qu'il était vivant et en bonne santé et qu'il n'aurait plus jamais à s'inquiéter pour lui. Même si ses deux amis ne parlaient pas Fourchelang, ils comprirent en substance son message et se relaxèrent pour de bon. Les pleurs d'Hermione se tarirent et ce fut ainsi que Madame Pomfresh les trouva, tous trois blottis les uns contre les autres.

- Maintenant que vous avez constaté que Mr. Potter est hors de tout danger, il est l'heure d'aller en cours, vous allez être en retard, les prévint-elle gentiment mais avec une nette autorité.

- S'il vous plaît Madame Pomfresh, laissez nous rester encore un peu, pria Ron.

- Le professeur Flitwick nous permet de jouer aux cartes, renchérit Hermione. Nous ne raterons aucune leçon importante.

La cloche annonçant le début des classes retentit alors dans tout le château et Harry s'empressa de griffonner une demande à son encontre. "Je vais beaucoup mieux Madame, pourrai-je aller en classe avec eux ?" Les trois Gryffondor la regardèrent avec des visages emplis d'espoir et elle ne put résister plus longtemps. Weasley et Granger étaient venus trois fois par jour dans son infirmerie pour la supplier de les laisser voir le petit brun. Harry lui-même avait l'air plus en forme avec ces amis autour de lui. C'était bientôt la fin de l'année, elle pouvait bien faire une exception, elle était sûre que Filius n'y verrait aucun inconvénient.

- Mr. Potter doit absolument rester en observation à l'infirmerie jusqu'à demain, les mines des trois enfants s'assombrirent à ces mots. Mais si vous me promettez de rester calme et d'être à l'heure pour vos prochains cours de la journée, je vous autorise à rester encore un peu.

Cette déclaration fut saluée par un concert de promesse et de remerciement, le trio souriait comme si c'était Noël avant l'heure. La médicomage secoua la tête et regagna son bureau au fond de la pièce. Elle avait un visuel sur le lit du jeune Potter et toutes les alarmes qu'elle avait placées tout à l'heure étaient encore actives. Malgré ses paroles réconfortantes de plus tôt, l'état du garçon demeurait inquiétant et inédit. Elle replongea dans ses notes et analyses du corps d'Harry, tentant de déterminer si les changements étaient réversibles ou non. L'enfant était seulement en deuxième année et son dossier médical faisait déjà partie des plus épais qu'elle possédait. À ce rythme, il lui faudrait tout un tiroir lorsqu'il atteindrait sa septième année. Pompom soupira, espérant de tout cœur que Harry Potter, tout Survivant et Pourfendeur de Basilic qu'il était, vivrait au moins jusqu'à sa majorité.

Pendant ce temps là, inconscient des pensées lugubres de l'infirmière, Harry racontait -écrivait vraiment- à ses amis ce qui s'était passé dans la Chambre des Secrets et comment il s'était retrouvé affublé d'une armure et de l'épée de Godric Gryffondor. Les deux étaient sidérés de lire que c'était le Fondateur en personne qui lui avait prêté ses compétences pour triompher du Basilic et de Jedusor. Lorsqu'ils lurent le passage où il s'était évanoui après s'être fait mordre, tous deux pâlirent et se rapprochèrent encore plus de lui. À ce stade, ils étaient tous trois assis sur le lit, Harry au milieu, Ron et Hermione lisant au fur et à mesure qu'il écrivait. Une telle proximité le gênerait normalement, mais entouré ainsi, il n'avait plus du tout froid et se sentait aussi à l'aise qu'un oiseau dans les airs.

Il continua son histoire avec le récit de son stratagème pour libérer Dobby puis son réveil ce matin dans une pièce reculée du château. Il dessina approximativement les symboles dont il se souvenait et Hermione leur indiqua que c'étaient des runes et que le professeur Babbling les enseignait. Harry hocha la tête et sauta l'épisode embarrassant où il courait nu dans les couloirs sombres pour échapper à Rogue et se heurter à Dumbledore. A la place il leur décrivit ses changements physique et comment la combinaison du Venin de Basilic, des Larmes de Phénix, de "l'amour de sa mère" et du rituel l'avait transformé en une sorte de mutant incapable de parler anglais.

- Trop cool, souffla le rouquin, le fixant avec admiration.

Harry haussa les épaules, il ignorait quelle réaction adopter par rapport à toutes ces choses. Il ne savait toujours pas si c'était réversible et si jamais un jour il redeviendrait normal.

- À ce propos, les interrompit Hermione, je pense avoir une idée pour t'aider avec l'anglais.

Le sorcier brun la regarda avec espoir et intérêt. Si quelqu'un pouvait trouver une solution aussi rapidement, c'était bien elle. Hermione était la personne la plus intelligente qu'il connaissait.

- Ferme les yeux et détends toi, ne pense à rien de particulier et répète juste après moi.

Le garçon opina et obéit aux consignes de son amie. Elle commença par des mots à une syllabe mais invariablement Harry les traduisait en Fourchelang, alors elle changea de stratégie et débita des mots dans d'autres langues. Comme il ignorait totalement leurs significations, le Gryffondor se concentra uniquement sur la prononciation et se mit à répéter bêtement ce qu'il entendait.

- C'est très bien Harry, l'encouragea la jeune fille en lui tapotant le bras. Ne réfléchis pas au sens des mots, répète juste ce que tu entends : perro... carro... manzana... naranja...

Et ainsi de suite jusqu'à ce qu'il se désintéresse complètement de l'exercice et prête plus d'attention à la texture du drap sous lui ou à l'odeur de la plume qui était toujours entre ses doigts ou aux battements de cœur de ses amis qu'il pouvait percevoir lorsqu'il se concentrait dessus. Trop bien, pensa-t-il, impressionné, même si c'était pour le coup assez déconcertant. Sa bouche continuait à prononcer les mots inconnus automatiquement, sans que son esprit ne leur prête la moindre attention.

- Pa... bou... ni... lu... dadou... rumi... bateau...mur... chien... voiture... pomme... orange... À quoi tu penses pour plisser le front comme ça ?

- À quoi tu penses pour plisser le front comme ça ? répéta-t-il distraitement en tentant de démêler la fragrance d'Hermione.

Son shampoing sentait les fleurs, mais son gel douche était celui que l'école fournissait. Au-dessus de cela il y avait bien sûr la lessive de Poudlard et l'odeur de l'encre et du parchemin. Mais ce n'était pas tout, il y avait une senteur en plus qu'il ne parvenait pas à nommer. Curieux, il se pencha vers son amie et inspira à plein poumon.

- Idiot, rigola Ron. Elle te demandait vraiment à quoi tu pensais.

Rose et jasmin et une fleur bleue dont il avait oublié le nom. Savon et bois de santal, plus une lotion pour la peau. Linge frais et... ah oui, la question de Ron

- Hum... Je pensais au fait qu'Hermione sentait vraiment bon, je ne l'avais jamais remarqué.

Linge frais, livre, encre, parchemin et quelque chose d'autre, de plus subtile mais qu'Harry ne pouvait toujours pas identifier. Puis son cerveau rattrapa sa bouche lorsque le rouquin s'esclaffa à plein poumon et fut vite interrompu par une gifle sur son épaule. Le jeune adolescent rouvrit les yeux, empourpré et penaud pour se retrouver face à ses deux amis qui lui souriait brillamment.

- Je savais que ça allait fonctionner, se réjouit Hermione. Tu comprenais et écrivais l'anglais sans mal, alors j'étais persuadée que le problème était plus psychologique que magique.

Le sorcier brun leur sourit en retour.

- Tu es géniale Hermione, la complimenta-t-il mais il fronça les sourcils en se rendant compte cette fois-ci des sifflements qu'il émettait.

Il pouvait sentir la différence maintenant, sa bouche ne bougeait pas de la même manière, les sons sortaient différemment. Il se concentra sur les divergences, prononça quelques syllabes sans signification pour bien se rendre compte et puis il réessaya à nouveau. Encore et encore jusqu'à ce que Ron et Hermione hochent la tête avec enthousiasme.

- Mer..ssssi pour vo..tre ai..de, prononça-t-il laborieusement.

- Derien mon pote, tu deviens à chaque fois plus fluide !

- Il sssssu..fit que je me con...cen..tre sur cha...que sssson, expliqua-t-il de manière hachée. Si je vais trop vite, je me retrouve à siffler. Dé..solé pour ma len..teur, termina-t-il, un brin frustré.

Maintenant qu'il réussissait à percevoir la différence, cela lui sautait aux oreilles. C'était comme si sa bouche devait réapprendre à parler comme un humain. Les mots étaient familiers mais il devait se concentrer fort pour les prononcer correctement et pas simplement les siffler. Néanmoins, il n'était rien d'autre que déterminé, aussi, lorsqu'il fut temps pour Ron et Hermione d'aller en métamorphose, il continua à s'entraîner tout seul. Il ne laisserait pas les autres le traiter de monstre.


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Y'ouf, qu'avez-vous pensé de ce nouveau Harry ? Pas trop déçu malgré cette longue attente ? En tout cas je n'ai que des vagues idées sur ce que la suite peut contenir alors je suis ouverte à toutes les suggestions que vous pourriez me faire :3

Une bonne et heureuse année pleine de santé pour vous tous !

Boulouakoulouzek