Chapitre 14, Sansa I.


La belle rousse se sentait plus seule qu'elle ne l'aurait pensé. Robb était là, mais en tant que remplaçant de leur père pour diriger le Nord il était très occupé. Leur mère était inconsolable depuis la mort de Bran, Jon était parti au mur, Arya et Rickon étaient partis avec leur père. Sansa soupira profondément et posa son ouvrage, elle n'avait pas la tête à la broderie aujourd'hui. La jeune fille regarda donc par la fenêtre et vit un corbeau qui arrivait, se posant en haut d'une tour. Elle arqua un sourcil, peut-être que ce message venait de son père ! Elle se leva et courut à travers les couloirs, elle voulait savoir si les nouvelles étaient bonnes.


Sansa toqua à la porte de sa mère et entra avant même d'y être invitée. Catelyn tenait le message dans sa main, le visage à la fois impassible et las. La belle rousse demanda d'une petite voix :

- Ce sont des nouvelles de Père?

- Oui, il a envoyé Rickon comme pupille auprès de Lord Stannis à Peyredragon, et il nous renvoie Arya, accompagnée de Syrio Forel, la plus fine lame de Westeros et d'Essos. Il me demande de le rejoindre à Port-Réal.

L'adolescente fronça les sourcils :

- Vous jugez donc que les nouvelles ne sont pas bonnes ? Je pensais que le fait de savoir qu'Arya allait bientôt être de retour parmi nous allait vous redonner un peu de joie.

- Je ne vais pas la voir puisque je dois partir pour la capitale ! J'ai un très mauvais pressentiment concernant toute cette histoire. Je crois que quelque-chose de grave va arriver, qu'on nous cache de très importantes choses.

Sansa ne savait que répondre à cela, elle était totalement perdue. Catelyn se leva, redressa le menton et lissa sa jupe du plat de la main :

- Je compte sur toi pour bien accueillir ta sœur et pour être gentille avec elle lorsqu'elle arrivera.

- Vous resterez longtemps là-bas ?

- Les Dieux seuls le savent, mais j'espère que non, j'ai cette ville en horreur.

La rousse hocha la tête et sa mère s'approcha, posant sa main sur sa joue :

- En mon absence, ce sera toi la Dame de Winterfell, la maîtresse des lieux. Tu auras des responsabilités, une image à tenir.

- Oui Mère, je saurai vous faire honneur.

- Je n'en doute pas ma chérie.

Catelyn serra sa fille dans ses bras et étouffa un sanglot :

- Pourquoi y-a-t-il fallu que le roi Robert et toute sa stupide famille vienne nous voir ? Ils n'ont fait qu'apporter le malheur à notre famille !

Sansa sentit une larme couler sur sa joue, même si elle ne comprenait pas tout, elle sentait un mauvais présage. Elle avait l'impression que c'était la dernière fois qu'elle pourrait serrer sa mère dans ses bras, ce sentiment était né au fond de ses tripes et devenait de plus en plus fort. La jeune fille resserra donc ses bras autour de sa mère et la serra fort en pleurant :

- Je ne veux pas que vous partiez vous aussi, et si vous ne reveniez jamais ?!

Catelyn prit le visage de sa fille dans ses mains et essuya ses larmes avec ses pouces :

- Je reviendrai avec ton père et nous reprendrons une vie aussi normale que possible.

- J'ai peur Mère.

- Je sais, moi aussi, mais nous devons être fortes, c'est grâce à notre force que les hommes de notre famille peuvent être de si bon seigneurs, tu comprends ?

La jeune rousse hocha la tête pour toute réponse, elle comprenait, du moins elle en avait l'impression. Catelyn la serra à nouveau contre elle un long moment avant de reculer :

- Maintenant vas, il faut que je prépare mes malles.

- Oui Mère.

Sansa scruta sa mère, le sentiment qu'elle la voyait pour la dernière fois s'amplifiait un peu plus à chaque seconde. Finalement elle quitta la chambre, elle ne voulait pas se faire réprimander pour une stupide réaction d'enfant. Elle ne savait pas que sa mère lui avait caché la partie la plus importante de la lettre, celle où son père disait avoir fait une découverte primordiale et où il annonçait que leurs vies étaient probablement en danger à présent. Catelyn, en mère louve protectrice, voulait préserver ses enfants autant que possible, ils vivaient déjà des temps assez pénibles pour ne pas en rajouter.


Sansa alla voir Robb, se disant qu'il pourrait peut-être lui remonter le moral. Le brun était en train de lire des documents posés devant lui. La jeune louve demanda :

- Je te dérange ?

Robb releva la tête et lui sourit en se passant une main sur le visage :

- Non, au contraire, faire une pause me fera le plus grand bien. Que me vaut le plaisir ?

- Mère vient de recevoir un corbeau de Père. Il dit qu'il a envoyé Rickon comme pupille à Peyredragon auprès de Lord Stannis, qu'il nous renvoie Arya accompagné de son Maître à danser, et il demande à Mère de le rejoindre là-bas.

Robb fronça les sourcils, tout cela était de plus en plus étrange. Il se leva calmement mais son corps était soudainement tendu :

- Je dois aller parler à Mère.

Il quitta la pièce sans plus d'explication. Sansa soupira profondément, elle était seule, à nouveau. Il ne lui restait plus qu'une chose à faire, ça ne l'enchantait pas, mais elle n'avait pas le choix.


Sansa descendit dans la crypte, peut-être que se recueillir lui ferait du bien. Elle alla directement jusqu'à la statue de Bran et sentit ses yeux s'embuer. Elle le regarda, le sculpteur avait fait un travail remarquable, c'était comme si son petit frère se tenait debout devant elle. C'était la première fois que la rousse venait se recueillir depuis la mort de Bran. Elle lança d'une voix tremblante :

- Je ne sais pas si tu m'entends, j'espère en tout cas que nos Dieux s'occupent bien de toi. Ici tout part de travers. Père a été forcé de suivre le roi Robert à Port-Réal, Rickon est parti pour Peyredragon, Arya doit revenir, Jon est parti au Mur, Robb doit s'occuper du Nord en attendant que Père revienne, et Mère doit partir pour la capitale afin de le rejoindre. Je … j'ignore pourquoi mais j'ai l'impression que jamais plus je ne les verrai, j'ai comme l'intuition que jamais ils ne repartiront de la capitale. Si seulement nous savions qui t'as poussé, nous pourrions le punir ! Car tu ne tombais jamais, tu as commencé à escalader tout et n'importe quoi depuis que tu as fait tes premiers pas. Mère m'a dit qu'en son absence ce serait moi la Dame ici, que je devrai rester forte pour que Robb puisse continuer de l'être lui aussi. Elle m'a aussi demandé d'être gentille et accueillante avec cette peste d'Arya ! Mais étrangement, c'est vrai qu'elle me manque depuis qu'elle est partie. Toi aussi tu me manque terriblement.

Une crise de larmes l'empêcha de continuer. Elle posa une fleur blanche qu'elle avait pris dans un vase avant de descendre à la crypte. Elle vérifia également que les chandelles étaient encore allumées et en bon état. La rousse regarda de nouveau la statue de son petit frère :

- Je ne sais pas ce que je vais faire si Père et Mère meurent réellement là-bas. Que va-t-il advenir de nous ? Je crois qu'ils nous cachent des choses, Robb aussi a l'air de connaître certains secrets qu'il garde pour lui. Et si nous étions bannis ? Et si j'étais envoyée dans un bordel ? Et si ils tuaient Robb et qu'ils nous tuaient tous ? J'ai tellement peur ! Je t'envie presque, toi au moins tu es parti avant que tout ne parte n'importe comment. Je suis désolée de ne pas être venue plus tôt, mais c'était trop douloureux, et j'avais raison car le sculpteur est beaucoup trop habile, c'est comme si tu tenais réellement en face de moi.

Elle soupira, essuya ses joues pleines de larmes et lança :

- Je vais te laisser, j'aimerai voir Mère une dernière fois avant son départ.

La jeune fille se pencha et déposa un baiser sur la joue de la statue avant de partir.


Lorsqu'elle arriva dans la cour, Catelyn s'apprêtait à monter dans le carrosse. La rousse se jeta dans les bras de sa mère en pleurant de nouveau :

- Ne partez pas, je vous en supplie ! Je … j'ai l'impression que jamais vous ne reviendrez, que c'est votre perte qui vous attend dans la capitale !

La matriarche serra fort sa fille dans ses bras, déposa un baiser sur sa joue et recula :

- Quoi qu'il arrive garde la tête haute et fais honneur à ton nom dans tous tes actes. Nous reviendrons vite, ne t'en fait pas. Je dois partir maintenant, la route est longue et ton père m'attend au plus vite. Mais n'oublie jamais que nous t'aimons, nous vous aimons tous plus que nos propres vies, votre père et moi.

Sur ces derniers mots la louve monta dans le carrosse qui partit un instant après. Sansa regarda la scène, ne pouvant contenir ses larmes. Alors le sort funeste allait s'acharner sur eux ? Elle sentait que la mort était proche et que les souffrances n'étaient pas terminées pour eux. Un bras passa autour de ses épaules, puis elle entendit un reniflement. La rousse tourna la tête et vit Robb, les yeux brillants, luttant manifestement contre ses propres larmes :

- Tout se passera bien, je suis sûr qu'ils reviendront sous peu.

- Tu es un très mauvais menteur Robb, tu l'as toujours été.

Sansa avait lancé cette phrase avec froideur, car même si elle était encore jeune, elle n'était pas stupide, et elle savait que son frère pensait comme elle, que leur mère partait pour une destination d'où elle ne reviendrait jamais, et que leur père, ils ne le reverraient plus non plus et qu'ils n'avaient pas eu l'occasion de lui faire un adieu digne de ce nom. Sansa chassa ses larmes avec rage et se tourna vers son frère, le pointant d'un doigt accusateur :

- Tu aurais dû les retenir ! C'était une énorme erreur que Père suive cet ivrogne de Robert, et une erreur encore plus faramineuse que notre Mère parte le rejoindre. Tu connais des informations qui m'ont été cachées, pourtant tu n'as rien fait ! Tu n'as rien dit, tu n'as pas agi alors que tu sais qu'ils vont mourir ! Je te déteste !

Elle le poussa de toutes ses forces avant de courir pour rejoindre sa chambre. Sansa se sentait seule, abandonnée, et elle était en colère contre la terre entière et en particulier les Dieux qui les avaient abandonnés.