Coucou, me revoilà avec un nouveau chapitre. Désolée pour le délai. Merci pour tous les commentaires, ça m'aide beaucoup lorsque j'ai des coups de mou.
Bonne lecture !
Chapitre 11 : Innocent
Dès la sonnerie Draco rassembla ses affaires et quitta la salle. Il lui sembla avoir entendu le professeure annoncer une interrogation pour la semaine suivante, mais Draco n'avait pas la tête aux révisions pour le moment. Cette fois, Herm- Granger ne chercha pas à l'intercepter. Il aurait bien été étonné que le contraire se produisît. À la fois soulagé et déçu, Draco se força à ne pas l'imaginer se rendre au bureau de la Directrice pour rapporter ses récentes accusations. La boule au ventre, il décida d'emprunter un détour pour rejoindre la Grande Salle, afin de croiser le moins de monde possible.
En ce début de soirée, Draco se sentait complètement engourdi, physiquement et mentalement. Depuis sa discussion avec la sorcière, il se forçait à ne pas repenser à ses mots, pour ne pas être affecté, pour ne pas réagir. Il savait qu'il avait été blessé, mais préférait ignorer ces sentiments d'impuissance, de trahison, de vexation, plutôt que de les confronter et de tomber dans la spirale de la remise en question sans fin qui aboutissait souvent sur une crise existentielle. Il fallait se rendre à l'évidence, il avait eu trop d'attente vis-à-vis de leur relation encore fébrile. Au final, il était déçu qu'elle ne lui accordât pas le bénéfice du doute dans une situation pareille. Mais elle n'était pas son ami et dans le meilleur des cas, Draco était son ex-bourreau.
Perdu dans ses pensées, il manqua de bousculer une élève à l'angle du couloir. Il parvint tout de même à l'esquiver à la dernière seconde. Et heureusement pour lui, parce qu'il ne savait pas si l'étudiante aurait survécu à la collision. Draco était lui-même fin et élancé, mais le déséquilibre du rapport de force était flagrant. Sa maigreur, ses joues creuses, ses yeux presque exorbités, son visage cireux et ses cheveux frisés très fins et abîmés hurlaient la maladie. Malgré le fait qu'elle fût emmitouflée dans sa robe de sorcier épaisse, et enroulée dans son écharpe aux couleurs Poufesouffle, Cynthia Belkheir-Khan ne pouvait dissimuler son état alarmant. Draco eût peine à croire qu'il réussit à la reconnaître sous cette apparence, si bien qu'une part de lui restait dubitative.
En le voyant apparaître, elle lâcha un petit hoquet de surprise. Elle s'appuya sur le mur en pierre du couloir, comme pour se remettre du choc avant de le dévisager d'un air indécis en plissant les yeux.
- Hééé mais ! Je te connais toi! S'exclama-t-elle d'une voix enrouée en agitant son index sous son nez.
A la fois perplexe et vexé qu'un de ses principaux bourreaux peinât à le reconnaître, Draco ne sut quoi répondre. Soit il s'agissait d'une nouvelle façon élaborée de se foutre de sa figure, soit il n'avait pas un physique aussi mémorable qu'il l'aurait cru. Malheureusement, comme ses détracteurs ne manquaient jamais de le repérer avec ses cheveux blonds platines, Draco douta que la deuxième option fut plausible. Adam, son propre frère, lui courait après. Par ailleurs, il fut tout de même fasciné par le fait que même au bord de la mort, comme cela semblait être le cas, Cynthia utilisait assidûment ses dernières forces pour lui lancer des piques, à travers une imitation assez fidèle d'une vieille bique complètement sénile.
- Tu es le petit Antoine, de la rue Prosper ! Celui qui venait toujours voir Baba pour avoir des glaces gratuites.
A moins qu'elle n'eût réellement perdu la mémoire ? Plus il y réfléchissait, plus Draco trouvait leur interaction étrange. Comment son apparence avait-elle pu changer aussi drastiquement en aussi peu de temps ? Bien qu'il ne la portât pas dans son cœur, son aspect dépérissant était plus que préoccupant. Son état était pire que la dernière fois qu'il l'avait aperçue, si c'était possible.
- Est-ce que tout va bien ? S'enquit Draco malgré lui en reculant d'un pas.
Elle fronça les sourcils semblant véritablement perturbée par la circonspection de Draco. Elle tendit la main vers lui puis s'arrêta juste avant de toucher son bras.
- Tu...tu ne me reconnais pas? Je suis la fille du glacier, celle qui t'ajoutais toujours une boule à la vanille-
- Cynthia ! Te voilà enfin !
Adam surgit à son tour en attrapant sa sœur par les épaules. Il haletait bruyamment et arborait une expression à mi-chemin entre l'angoisse et le soulagement. Il remarqua finalement la présence de Draco qu'il considéra avec un regard prudent. Son comportement n'avait rien à voir avec le personnage séducteur qu'il interprétait inlassablement en compagnie du Serpentard. Avec son air débraillé et son visage préoccupé, il était bien loin de l'image angélique habituelle qui faisait perdre à Draco tous ses moyens. C'était peut-être à cause de la pénombre, ou bien du contexte. En y réfléchissant bien, Draco se rendit compte que c'était la première fois qu'il croisait Adam dans les couloirs sans que ce dernier n'eût prémédité leur rencontre. Adam avait une allure bien différente lorsqu'il était pris au dépourvu.
- Oh Adam, regarde, regarde ! C'est Antoine de la rue Prosper. Il a bien grandit, mais il ne me reconnaît pas… c'est parce que je suis affreuse maintenant, regarde-moi !
Draco fut alarmé de constater qu'elle était au bord des larmes. Elle se mit à frapper ses bras puis ses jambes comme pour flageller son apparence.
- Mais non, rassura Adam sur un ton affectueux, ce n'est pas Antoine, c'est Draco Malfoy, tu te souviens de lui ? On a mangé ensemble la dernière fois.
Le Poufesouffle consacra toute son attention sur sa sœur mal en point. Il semblait habitué à ses réactions car il attendit patiemment qu'elle se calmât d'elle-même. Cynthia examina de nouveau Draco avec une lueur dans les yeux, témoin d'un regain de lucidité. L'espace d'un court instant, elle sembla prendre conscience de la réalité de la situation avec embarras, avant de recouvrir une expression d'assurance insolente que Draco connaissait bien d'elle. C'était la posture qu'elle adoptait juste avant de lui infliger ses brimades.
- Ah. Malfoy. Ton petit copain Mangemort, dit-elle sur un ton plus maîtrisé.
Même si son apparence avait gardé la même vulnérabilité, Draco aurait juré qu'il s'agissait d'une autre personne. S'il n'avait pas été aussi ahuri par ce changement drastique de personnalité, Draco aurait fiché le camp à la seconde où il avait croisé son chemin. Toutefois, la perplexité mêlée à la surprise le laissait pantois et peu apte à user de sa répartie habituelle.
- Je ne suis pas son petit-copain.
- Bientôt, confirma-t-elle catégorique.
Elle braqua un regard intimidant sur Draco, calmant toute protestation qui aurait pu naître en lui. Malgré son allure fébrile, son regain d'assurance ne l'empêcherait pas de malmener le Serpentard si l'envie lui prenait. Amoureux ou pas, Adam se liguerait sûrement avec sa sœur. Pourquoi voulait-elle tant que leur idylle aboutît ? Pour satisfaire les désirs d'un frère capricieux qui ne semblait accepter aucun refus de la part de Draco ?
- N'est-ce pas, Adam ? Insista-t-elle sans regarder l'intéressé.
- Évidemment, confirma-t-il avec un visage fermé avant de se tourner vers Draco. On se dit samedi quatorze heure, aux Trois Balais ?
Comprenant viscéralement qu'il n'avait pas d'autre choix que d'accepter, Draco se contenta de hocher la tête lentement. En infériorité numérique, son instinct de survie n'avait pas tergiversé longtemps. Les stratégies de retraites et d'évitements pourraient être établies ultérieurement. Satisfaits de sa réponse, le frère et la sœur tournèrent finalement les talons sans rien ajouter. Draco les regarda rebrousser chemin pour s'assurer qu'il était effectivement hors de danger. Adam passa son bras autour des épaules de sa sœur et la guida dans le couloir qui menait à l'infirmerie.
Le Serpentard resta plusieurs secondes complètement déconcerté par les événements récents. Il avait l'impression d'avoir interagit avec deux parfaits inconnus, aux visages pourtant familiers. Ses doutes à l'égard d'Adam ne pouvait que s'amplifier. Même s'il était à présent sûr de la malhonnêteté du Poufsouffle, Draco suspectait que la mascarade s'établissait dans un contexte qui dépassait les limites d'un simple harcèlement élaboré.
Ce fut finalement le gargouillement de son estomac qui le sortit de sa torpeur.
Alors même qu'il avait pris l'habitude de clairsemer son temps de présence dans la Grande Salle afin de croiser le moins de monde possible dans sa journée, Draco ne pouvait éviter ses persécuteurs les plus motivés. Il n'y avait pas de trêve tacite, même au moment des repas. Si bien que Draco finit par manger ses pommes de terres écrasées sans sauce, ni viande. Il eut la chance de pouvoir attraper un pichet de jus de citrouille avant qu'il ne lui fût subtilisé. Bien qu'il fut frustré de ne pas avoir pu diversifier son alimentation, il s'estima tout de même heureux d'avoir pu conserver ses couverts jusqu'à la fin du repas. Il jetait des regards en direction de la table des professeurs, plus par habitude que par réel espoir qu'une âme charitable pût mettre un terme à ces agissements puérils. Il était invisible.
Ces complications logistiques abrégèrent quelque peu son dîner. Par ailleurs cela lui donna l'occasion de s'éclipser avant la majorité des élèves. Le peu de personnes qu'il croisa sur le chemin du dortoir ne lui accordèrent pas plus d'un regard. Il arriva rapidement dans la Salle Commune, sans accro. La pièce de vie était vide, mais la chaleur qui y était maintenue grâce à la cheminée qui crépitait constamment était agréable. L'énorme fauteuil près du foyer lui fit de l'œil, mais Draco jugea finalement qu'il était préférable d'aller se laver. Merlin savait qu'il en avait bien besoin. Le fait qu'il eût pu prendre son dîner malgré l'odeur récalcitrante de terreau, témoignait de l'urgence de la situation. Il ne fallait pas qu'il s'habituât à empester autant.
Il monta les escaliers deux à deux et longea le couloir du dortoir des garçons qui le mena jusqu'à sa chambre. Draco hésita quelques instants devant la porte, redoutant que quelqu'un attendît patiemment son retour. Il posa son oreille contre la surface en bois avant de se souvenir qu'aucun son n'était discernable de l'extérieur. Finalement agacé de devoir prendre autant de précaution pour entrer dans sa propre chambre, son havre de paix, le seul endroit où il ne courrait aucun risque dans l'entièreté du château, il ouvrit la porte d'un geste brusque pour ne pas laisser place au suspens.
Son regard balaya la pièce, il ne repéra personne. Draco ne put s'empêcher d'en conclure que le trio s'était immédiatement rendu au bureau de la Directrice pour témoigner contre lui. Non, ils devaient être encore entrain de dîner dans la Grande Salle. Le Seprpentard se rappela même avoir aperçu les trois Gryffondors conspirer en bout de table pendant qu'il bataillait pour se mettre quelque chose sous la dent. McGonagall avait été présente également, à sa place attitrée, au milieu des autres professeurs. Elle n'avait pas accordée plus d'attention que ça à Draco. Personne ne s'était soucié de lui. Comme d'habitude.
Il retira sa robe de sorcier qu'il examina et renifla avec insistance. Malgré les multiples couches de Recurvite, il pouvait discerner l'odeur âcre de l'engrais. Draco pouvait certifier que l'épandage était puissant. Le Serpentard hésita à se débarrasser directement de l'habit mais il n'avait pas d'autres alternatives pour se protéger du froid. Il jeta finalement la robe de sorcier dans le panier à linge sale, en espérant que les Elfes de Maison purent rattraper le fiasco.
Il sortit son nécessaire de toilettes de sa malle et attrapa son peignoir avant de se rendre dans les douches communes. Il fut soulagé de constater qu'il était seul. Draco retira son uniforme et trouva quelques grains de terre dissimulés sous son col. En passant sa main sur sa nuque, il en trouva également derrière son oreille. Il soupira bruyamment et se résigna à devoir faire un shampoing dans la foulée. Il enfouit ses vêtements sales dans un sac en tissu qu'il déposerait dans son panier à linge sale. Entre les attaques surprises de terreaux et les sabotages quotidiens, il n'aurait plus rien à se mettre sur le dos, avant la fin de l'hiver. A cause des restrictions dues à sa probation, il n'avait pas souvent l'occasion de faire des emplettes en dehors de Pré-au-Lard. Merlin savait que le village n'était pas réputé pour ses magasins de textile. Il lui restait tout de même un dernier ensemble avant d'arriver à court d'uniforme. Malgré tout, il serait plus tranquille après la prochaine lessive qui avait habituellement lieu en fin de la semaine, s'il se souvenait bien de l'emploi du temps des Elfes de Maison.
En se déshabillant, il aperçut son reflet près des lavabos. C'était peut-être à cause du manque de sommeil ou du manque de repas consistants et réguliers, mais il avait très mauvaise mine. Certes, il n'avait pas l'allure de Cynthia, mais il n'était pas si loin du compte. A cette distance, il pouvait se voir presque en entier. Ses cheveux blonds avaient perdu leur éclat, signe qu'il n'en prenait pas autant soin qu'il l'aurait voulu. Il saisit quelques mèches et examina les pointes. Aucune fourche n'était apparente, mais il n'aimait pas la texture sèche sous ses doigts. Son visage était morne, et marqué par la fatigue. La bosse sur son front n'était plus aussi visible que la veille, mais il pouvait tout de même la sentir au touché. Il tira la peau sous ses yeux dans l'espoir d'estomper ses cernes prononcées, en vain. Ses joues légèrement creusées et ses lèvres sèches n'arrangeaient guerre son apparence. Il avait bien remarqué depuis quelque jour que son visage s'affinait, ses traits anguleux s'accentuaient en conséquence. Alors qu'il faisait tout pour ne pas ressembler à son père, son corps ne manquait pas de lui rappeler ses origines.
Il passa ses mains sur sa clavicule saillante, sur son torse fin et cicatrisé, ses cotes visibles, le long de ses bras filiformes, en évitant précautionneusement son tatouage de la honte. A cet instant, Draco se trouva si repoussant qu'il en ressentit de la détresse. Il déglutit à plusieurs reprises, avec l'impression d'étouffer sous le poids de la réalité que lui renvoyait le miroir. Son corps était le reflet de sa misérable vie. Toutes ces marques qui parcouraient sa peau lui rappelaient sans cesse ses échecs, ses erreurs, ses crimes. Peu importait ses efforts, ce rôle de Mangemort repentant qu'il tentait désespérément d'interpréter, ses excuses pathétiques, le harcèlement qu'il recevait en compensation de ses actes passés, rien de tout cela ne pouvait changer le fait qu'il était déjà pourri de l'intérieur.
Il se répugnait. Qui voudrait de lui ? Qui voudrait d'un sorcier aussi vile, marqué à vie par la mort ?
Draco avait conscience qu'il avait une vision assez alarmiste de sa personne mais comment s'empêcher de penser ainsi lorsque tout le monde autour de lui confirmait cette haine, ce dégoût qu'ils avaient pour lui ? C'était un Mangemort, le voleur de la Grande Serre, l'agresseur du Sauveur.
Le Serpentard prit l'ensemble de ses affaires et s'enferma dans une cabine de douche. Depuis sa dernière altercation dans la salle d'eau, il avait décidé de tout garder avec lui, protégé par un charme d'imperméabilité. Il s'aspergea d'eau brûlante, comme dans l'espoir de se purifier de ses méfaits, de sortir de ce corps sali, irrécupérable. Sa peau se mit à rougir sous le jet, il frotta de toutes ses forces mais rien à faire, la Marque des Ténèbres demeurait, indélébile.
Étouffant un sanglot, il prit sa bouteille à moitié vide de gel lavant et en appliqua sur son corps. Dès le premier contact, il se sentit se relaxer. En plus de son odeur agréable, la baie de sureau parvenait à le détendre quel que furent les situations. C'était peut-être les propriétés thérapeutiques du fruit ou tout simplement le fait que l'on se sentit toujours mieux une fois douché. Draco prit son temps pour nettoyer ses membres, ses doigts, ses orteils, son dos et ses zones intimes. Il passa ensuite à sa chevelure qu'il aspergea d'un shampoing également parfumé aux baies de sureau, mais moins concentré que son gel lavant. Il passa plusieurs minutes à se masser le cuire chevelu à ratisser chaque mèche avec ses doigts, à la recherche du moindre résidu. Il voulait être sûr de se débarrasser du moindre grain de terre.
En outre, se nettoyer des pieds à la tête était une façon thérapeutique pour lui de faire peau neuve. Si ce n'était pas pour les autres, au moins pour lui. Il sortit son peigne en bambou qu'il passa méticuleusement dans sa chevelure mouillée, retirant patiemment chacun des nœuds. Il avait l'impression de revivre. Dans une espèce de béatitude, il en oublia presque qu'il où il était, c'était comme si ce moment de relaxation était devenu un moyen pour lui de s'évader de cette réalité cruelle et décevante.
Il fut tout de même sortit de sa rêverie lorsqu'il entendit plusieurs personnes entrer dans les douches communes. Il ne savait pas depuis combien de temps il était dans sa cabine, mais le dîner devait déjà être terminé. Les douches n'allaient pas tarder à se remplir. Il se rinça rapidement et avec regret, préférant déguerpir afin d'éviter toute altercation. Il attendit que les nouveaux venus s'enfermèrent à leur tour dans leur propre cabine, avant de jeter un coup d'œil à l'extérieur. Assuré que la voie était libre, il enfila son peignoir et s'en alla précipitamment, tout trempé et avec ses affaires sous le coude. Parcourant le couloir froid et vide, il entendit des voix provenir de la Salle Commune. Draco se précipita jusqu'à sa chambre où il s'enferma.
Il mit le reste de ses affaires au sale et entreprit de se sécher. Il ne savait pas si Potter allait passer la nuit dans la chambre ou s'il avait décidé de le fuir comme la dragoncelle, mais Draco préféra prévenir l'éventualité d'une confrontation en se dissimulant derrière ses rideaux en baldaquin. De toute façon, Granger ne laisserait plus jamais son meilleur ami approcher un ex-Mangemort en probation, paria de la société, cible favorite de harcèlement récréatif et récemment objet d'accusations de viol.
Dans la pénombre de son refuge, assis en tailleur, face à la tête de lit, il lança un sort de ventilation assez bruyant pour couvrir les pensées sombres qui commençaient à survenir. En attendant que ses cheveux séchassent, il appliqua consciencieusement sa crème hydratante sans odeur et sans résidus sur son visage. Il n'utilisa pas de miroir pour vérifier son entreprise, il en avait assez de voir son reflet. Il couvrit ensuite chaque parcelle de son corps avec sa lotion tonifiante à l'odeur fruitée. Ce rituel de soin post douche lui permit de libérer quelque peu son esprit encombré. Il ferma les yeux pour se concentrer sur les sensations et inspira profondément le parfum des baies de sureau. Malgré l'omniprésence de cette fragrance dans ses produits, il ne pouvait s'en lasser, c'était comme un remède pour lui, sa source d'énergie, physiquement et mentalement. Il se sentait toujours mieux, enveloppé dans cette odeur apaisante.
Il cessa la ventilation et appliqua quelques gouttes d'une huile protectrice sur ses cheveux. Il y passa ensuite sa brosse à poil doux, presque paresseusement. La tête penchée en avant sur ses jambes en tailleur, il faillit s'assoupir bercé par le frottement de la brosse sur ses mèches blondes, et par le rythme de sa respiration. Apaisé par cette bulle réconfortante, il décida d'abréger sa routine et de s'allonger quelques secondes. Il avait des devoirs à faire pour le lendemain, mais il estima qu'avec tous les événements de la journée, il avait bien mérité une petite sieste de quelques minutes. Il se réveillerait pour compléter quelques travaux un peu plus tard. Il avait juste besoin de reposer ses yeux. Il n'avait même pas la force de troquer son peignoir avec son pyjama.
Lorsqu'il décida finalement de se glisser sous ses draps, il comprit que le sommeil allait l'emporter plus longtemps que les vingt minutes initialement prévues. Il ne fut pas plus déranger que ça.
Flottant entre le réveil et l'inconscience, Draco se demandait si les chuchotements qu'il entendait était biens réels ou un simple produit de son esprit exténué. Il était au chaud, enveloppé sous son épaisse couette qui lui recouvrait presque entièrement la tête, ces perturbations sonores étaient le cadet de ses soucis. Il était beaucoup trop bien pour laisser la place à l'inquiétude. Il se soucierait des problème à son réveil, qui n'arriverait pas avant un long moment. Il enfonça son visage contre son oreiller et se recroquevilla sur lui-même. Il se laissa ensuite emporté par le sommeil-
- Je pense que l'on devrait mûrement en discuter, dans un premier temps.
- Qu'est-ce qu'une discussion de plus va nous apporter ? On a déjà parlé de tous qu'on savait sur la situation.
- Je sais bien ! Mais peut-être...peut-être qu'il nous faut un avis extérieur avant de se lancer. On devrait s'adresser au professeure McGonagall, elle pourrait nous conseiller-
- En appelant les Aurors ?
Draco eut comme une piqûre de rappel sur la réalité de sa situation. Ses yeux s'ouvrirent subitement et toute trace de sommeil fut remplacé par une angoisse intense qui le prit aux tripes. « McGonagall »? « Aurors »? C'était l'heure de son arrestation ? Complètement déboussolé, il resta paralysé sous ses draps à l'idée de devoir confronter Granger et Weasley qui avait décidé de se disputer en plein milieu de la nuit, dans la chambre du Serpentard.
- Ça ne veut pas dire que ton idée est plus raisonnable ! Critiqua-t-elle sur un ton sec
- Peut-être pas raisonnable, mais c'est la plus pragmatique ! Tu ne veux pas qu'on l'interroge sous Veritaserum, répliqua le roux sur un ton agacé.
- C'est illégal-
- On n'a pas de pensine sous la main et tu ne veux pas non plus qu'Harry lise dans son esprit.
- Ce n'est pas éthique-
- Dans ce cas, on n'avancera jamais si on t'écoute !
Il y eut un silence pendant plusieurs instants. Même derrière son rideau en baldaquin, Draco devinait que la tension était palpable. Qu'allait-il faire de lui ? Apparemment Granger était d'avis de le dénoncer aux autorités. Même s'il s'y attendait déjà, il ne put s'empêcher d'être offensé. Quelques belles discussions n'effaceraient jamais toute la rancœur qu'elle ressentait à son égard. Étonnamment, Weasley semblait contre l'idée d'ébruiter l'affaire auprès de la Directrice. Draco ne savait pas s'il devait s'en estimer heureux, car cela signifiait que le Gryffondor voulait régler la situation par ses propres moyens. En s'introduisant dans sa chambre. En plein milieux de la nuit.
Draco tâtonna discrètement son matelas à la recherche de sa baguette.
- Comment peux-tu dire ça ? Reprit finalement la sorcière visiblement blessée.
- Hermione-
- Tout ce que je veux c'est briser cette satanée malédiction. Toutes nos recherches mènent à des culs-de-sac, mais ça ne veut pas dire qu'on doit mettre Harry en danger pour trouver un indice qui ne mènera peut-être nulle part ! Il faut qu'on en parle à McGonagall, on n'a besoin de toute l'aide qu'on peut recevoir.
- Justement Hermione, c'est l'aide dont on a besoin ! S'écria le rouquin exaspéré, tu ne veux peut-être pas l'entendre, mais Malfoy nous permet d'avoir une nouvelle piste.
- Tu penses vraiment qu'il ne s'est rien passé cette nuit là, demanda-t-elle sidérée, qu'Harry s'est miraculeusement endormi sans détruite la moitié du château ?
- C'est ce qu'il nous a dit, non ?
- Mais Harry était inconscient ! On ne peut pas se fier à sa version des faits !
- Ni à celle de Malfoy, je te rejoins sur ce point, acquiesça Weasley sur un ton patient. C'est bien pour ça qu'il faut qu'on assiste à la scène pour en juger de nos propres yeux, il n'y a pas d'autres solutions.
- Et si ça ne fonctionne pas, hein ? Les conditions sont complètement différentes, Harry n'avait pas dormi depuis plusieurs jours, son état de fatigue n'est pas comparable, on perd notre temps !
- Hermione, tu es en train de paniquer. Tu ne vois pas que c'est peut-être la clé qui nous permettra de lever la malédiction ?
Nouveau silence. Draco avait finalement mis la main sur sa baguette. Weasley avait pour intention de réitérer l'expérience traumatisante qu'avait vécu le Serpentard la veille. Si c'était ce qu'il devait risquer pour s'innocenter, Draco trouva que c'était une meilleure alternative que de finir à Azkaban pour un crime qu'il n'avait pas commis. Toutefois, il doutait que ce plan ce déroulât comme prévu lorsqu'ils s'apercevraient que Draco n'était vêtu que d'un peignoir qui peinait à dissimuler les zones stratégiques de son anatomie. Faute de pouvoir se changer sans les alerter, il tira sur les pans pour couvrir son entrejambe. Malheureusement, la majorité du tissu était coincé sous sons dos. Une goutte de sueur glissa sur sa tempe. La moindre erreur dans cette tentative de recouvrir son innocence lui serait fatale.
- Ça n'a pas de sens, qu'est-ce qu'il a de plus ? Pourquoi ce serait lui qui sauverait Harry ? Ça ne te dérange pas de savoir que le destin de notre meilleur ami est entre les mains de Draco Malfoy ? Je pensais que tu le détestais !
Draco sentit son cœur se serrer. Apparemment, les langues avaient tendance à se délier dans les moments compliqués. Elle n'avait jamais été son alliée, juste une simple observatrice de sa « prétendue rédemption ».
Pourquoi avoir engagé des conversations avec lui ? Parce qu'il avait été, malgré lui, impliqué dans un incident qui mêlait son meilleur ami.
Pourquoi l'avoir invité à jouer au jeu de carte moldu ? Pour l'empêcher de déranger Potter pendant qu'il faisait ses affaires avec Delcourt.
Elle ne lui avait jamais fait confiance, j'avais vraiment accordé de seconde chance. Elle avait juste été décente avec lui, comme elle l'aurait été avec n'importe quel autre inconnu. Elle n'avait jamais mentionné une quelconque amitié. Pourquoi était-il déçu ? Pourtant il savait qu'il ne fallait pas chercher sa propre valeur dans le jugement d'autrui. Il n'avait rien trouvé du côté de son père, il ne la trouverait jamais du côté des personnes qu'il avait persécuté pendant sept ans.
- Bien sûr que ça me fait chier ! Je ne supporte pas ce connard arrogant, mais il ne s'agit pas de moi. S'il y a une chance qu'Harry puisse enfin dormir tranquille grâce à un stupide Serpentard, ainsi soit-il ! Qu'est-ce que tu en penses Harry ? Tu ne dis rien depuis tout à l'heure.
- Oh j'ai le droit de parler maintenant ? Vous m'incluez finalement dans la conversation ?
Draco fut surpris d'entendre Potter. Il était persuadé qu'il n'était pas présent. Mais en y réfléchissant bien, c'était logique, puisque le couple n'aurait pas pu pénétrer dans la chambre sans l'empreinte magique du Sauveur. A moins que Draco les eût invité, ce qu'il se gardait de faire en général.
- Oui bon désolé. On est tous à cran à cause des nuits courtes-
- Ouais, m'en parle pas, bougonna Potter.
Weasley lâcha un grognement exaspéré, si bien que Granger reprit le fil.
- Harry, serais-tu d'accord de dormir avec Draco ce soir, oui ou non ?
- Que je sois d'accord ou pas, qu'est-ce que ça va changer ? On ne peut pas forcer Malfoy-
- Bien sûr que je peux.
- Ronald.
- Il me hait, reprit Potter. Si sa vie n'avait pas été en danger, il n'aurait jamais levé le petit doigt.
Draco s'offusqua. Il n'haïssait pas Potter. Malheureusement. Cela lui aurait bien évité des soucis.
- Il ne voudra jamais retenter l'expérience-
- On n'a qu'à lui demander alors, proposa Weasley sur un ton détaché.
Draco n'eut même pas le temps de faire semblant de dormir. Le rideau fut brusquement tiré et le Serpentard fut immédiatement aveuglé par un lumos. Il gémit pathétiquement en s'abritant derrière son oreiller.
- Alors on écoute aux portes ? Railla le rouquin avec un sourire satisfait. Ce n'est pas très polie ça.
- Vous êtes littéralement venu conspirer dans ma chambre ? Donc il faudrait revoir ta conception de la politesse-
- Ouais, ouais, peu importe, interrompit le rouquin avec désinvolture avant de se racler la gorge. On ne va pas tourner autour du pot, hein. Tu vas aider Harry, n'est-ce pas ?
- Tu as l'air bien dédaigneux pour quelqu'un qui demande un service, fit remarquer Draco en grinçant des dents, ça motive vachement à donner de sa personne.
- Malfoy.
Le Serpentard leva les yeux au ciel. Si Weasley pensait que son air faussement menaçant allait l'effrayer un jour dans cette vie, il était beaucoup trop naïf. Juste à cause de son culot, Draco songea un instant à le rembarrer. Il pouvait déjà imaginer la satisfaction que sa rage lui procurerait. Toutefois, lorsqu'il croisa le regard de Granger juste derrière, il se calma quelque peu. En retrait elle le dévisageait avec scepticisme, semblant analyser le moindre geste, le moindre mot de Draco. Se sentant scruté, Draco se détourna et posa ensuite les yeux sur Potter, assis sur son lit, qui évitait précautionneusement de regarder dans sa direction. Du moins, c'était l'impression qu'avait le Serpentard en voyant le Gryffondor examiner la qualité du parquet avec insistance plutôt que de le confronter comme Weasley, qui semblait être le seul à porter fièrement les idéaux de leur Maison de cœur.
- J'imagine que je n'ai pas le choix, concéda-t-il finalement. L'alternative serait bien plus incommodante.
- Laisser Harry dans sa misère ? Lança Granger avec une pointe de sarcasme.
- Ou me faire arrêter pour présomption de viol.
La sorcière n'ajouta rien, mais l'intensité de son regard lui fit comprendre qu'elle n'en démordait pas. Draco essaya de ne pas être touché. Il se dit que son manque total de considération envers sa personne était entièrement dû à son inquiétude pour son ami.
- Harry, tu as ta réponse. Quand dis-tu ?
Potter se contenta de hocher la tête. Il était déjà vêtu de son pyjama délavé. Sans préambule, il se dirigea vers le lit de Draco. Lorsqu'il souleva soudainement la couette, Draco ne put s'empêcher d'émettre un couinement de surprise en sentant le courant d'air sur sa peau nue. Tous les yeux se braquèrent sur lui. Heureusement pour le Serpentard, Potter ne tira pas davantage sur la couverture.
- Un problème Malfoy ? Demanda Weasley en plissant les yeux.
- Pas du tout, répliqua Draco en arborant une expression neutre.
Potter poursuivit alors son installation, tout en lui jetant des regards curieux. Il passa sa main sur la surface du matelas comme pour vérifier que Draco ne préparait pas un mauvais coup. Ce dernier tenta d'afficher l'expression la plus innocente possible, avec les yeux grands ouverts, les sourcils relevés et le sourire figé. Il fit tout pour paraître naturel, tout pour détourner l'attention de sa presque nudité. Le Gryffondor se glissa sous la couette, retira ses lunettes qu'il posa sur la table de nuit avant de s'allonger sur le dos. Aussi tendu qu'un banc de vestiaire.
La nuit allait être longue.
- Bien installé ? S'enquit Draco pour faire bonne mesure devant les deux autres Gryffondors.
- C'est parfait-
Il s'interrompit brusquement.
Le lit des dortoirs n'était pas très large, d'où leur attribution individuelle. Évidemment, avec un tel arrangement entre Potter et Draco, il était inévitable qu'ils finissent par se toucher. Potter retint sa respiration tandis que Draco pinça nerveusement les lèvres lorsqu'il sentit la main du Gryffondor frôler sa cuisse nue. Le Serpentard ne put contrôler le frisson qui suivit le contact, mais il se recula discrètement jusqu'au bord de matelas, près du mur.
- Tout va bien Harry ? S'enquit Hermione les sourcils froncés.
- Euh oui, oui. Tout va bien.
Potter garda les yeux fixés sur le plafond, un comportement très suspect qui ne manqua pas d'interpeller son amie. Alors qu'elle était sur le point d'insister, Weasley, éternel Gryffondor, vint à leur rescousse en se plaignant qu'il était épuisé. Ils allaient passer la nuit dans la chambre, avec eux, pour les garder à l'œil, mais dans le confort du lit de Potter. Les deux Gryffondors se glissèrent dans l'autre couche alors que le rouquin s'allongea décidé à accueillir le sommeil à bras ouvert, Granger s'adossa à la tête de lit, le corps orienté dans leur direction afin d'inspecter le moindre de leur mouvement.
Les lumos s'interrompirent et la pénombre s'installa de nouveau. Complètement réveillé, Draco resta quelques instants à observer autour de lui. Il ne voyait pas à plus d'un mètre, mais tout près de lui, la silhouette de Potter se distingua. Il n'avait pas bougé d'un poil et continuait à regarder droit devant lui complètement tendu. Après quelques minutes, les ronflements de Weasley brisèrent le silence. Le rouquin était un peu trop confortable pour quelqu'un censé surveiller les effets ou non effets de la malédiction de son meilleur ami. Comment allaient-ils pouvoir s'endormir dans ces conditions ? Ce n'était pas plus mal pour Granger dont il pouvait sentir le regard. Si Potter ne dormait pas, Draco ne pourrait pas prouver son innocence, donc direction Azkaban.
Excédé par la bizarrerie de la situation et par l'épée de Damoclès au dessus de sa tête, Draco décida de bien profiter de sa potentielle dernière nuit au château. Il se tourna face au mur, déterminé à tourner le dos à tous ses problèmes et d'invoquer le sommeil. Il prit soin d'accompagner son mouvement en tirant les pans de son peignoir. Il s'enroula dans sa couette jusqu'à couvrir sa tête.
- Ne prends pas toute la couverture ! Chuchota Potter en tirant la couette d'un coup sec.
Draco lâcha un hoquet de surprise lorsque ses jambes furent soudainement découvertes. Si quelqu'un avait le malheur d'éclairer la pièce, Draco serait arrêté pour exhibitionnisme. Le Serpentard répliqua en tirant à son tour.
- J'en ai plus besoin que toi ! Et puis c'est mon lit.
A peine eut-il pu recouvrir ses parties intimes frigorifiées que le Gryffondor emporta presque la totalité de la couette de son côté du lit.
- Arrêtez vos enfantillages ! Gronda Granger agacée. Donnez-moi cette couette, je vais la dupliquer.
Son sang se glaça lorsqu'il l'entendit se lever et se diriger vers eux. La panique qu'il ressentit se refléta dans la tension de Potter qui se pétrifia instantanément. Réagissant comme un seul homme, Draco se rapprocha précipitamment de Potter, en même temps que ce dernier le pressa contre lui. Avant que le Serpentard pût s'alarmer de leur proximité subite, le Gryffondor enroula la couette autour d'eux. Lorsque Granger se pencha vers eux ils étaient nez à nez, respirant le même air.
- C'est bon Hermione, on a trouvé un compromis, rassura Potter en veillant à ce que leurs lèvres ne se touchassent pas.
Draco, aussi pathétique qu'il se trouvait, dut retenir un frisson lorsqu'il sentit son souffle sur son visage. Son peignoir, complètement défait, avait perdu toute son utilité. Ses bras étaient plaquées contre son torse et leurs jambes entremêlées. Enlacé par le bras de Potter, Draco eut chaud. Très chaud. Il recula discrètement son bassin pour empêcher d'exacerber la gêne de la situation.
- Vous avez l'air à l'étroit, continua-t-elle en les observant dans la pénombre. Peut-être qu'un sort d'extension est nécessaire-
- Non, t'embête pas, on sera au chaud comme ça.
Draco pouvait quasiment entendre les suspicions résonner dans son esprit, elle n'était pas du tout sereine de les laisser ainsi, mais elle n'insista pas et retourna près du Weasley ronflant, avec une réluctance palpable. Ils restèrent immobiles le temps qu'elle finît de s'installer. Lorsque le silence revint, il fut temps de prendre conscience de la position dans laquelle ils étaient. Grâce à la pénombre, Draco devina que ses joues enflammées n'étaient pas visibles, mais son embarras était indéniable. Potter, semblant tout aussi gêné, recula sa tête pour réduire les chances d'un baiser inopportun. Il tenta d'extraire sa jambe piégée entre les deux cuisses de Draco, mais le mouvement causa un contact accidentel entre son genoux et les bourses de Draco qui retint de justesse un gémissement. Pour réaliser cette retenue surhumaine pour lui, il pencha sa tête en avant par réflexe et cogna son front contre le nez de Potter. Assez fortement.
- Putain, se plaignit Potter un peu trop fort.
- Harry ?
- C'est rien Hermione, je...je me suis juste cogné, rien de grave tu peux t'endormir.
- Pas avant que tu ne fermes l'œil.
Potter se contenta de soupirer, envoyant de nouveau son souffle mentholé sur le visage de Draco. Potter revint dans sa position initiale, très lentement pour ne pas causer davantage de stimulations. Le cœur de Draco battait à cent à l'heure, tellement qu'il ne serait pas étonné si Potter l'entendait aussi. Il dut maintenir ses paupières clauses pour empêcher que sa vision ne s'adaptât à la pénombre.
- Ça va ? Murmura Potter sur un ton presque inaudible.
- Hmm hmm, fit Draco qui n'avait plus confiance en ses capacités orales.
La main de Potter, à plat contre son dos, tressaillit un instant, mais resta en place. Le côté optimiste de Draco imagina même qu'il pressa davantage. Toutefois, à cause de l'excitation latente dans laquelle il s'enlisait, ses pensées n'étaient plus tout à fait cohérentes. Il n'allait pas pouvoir fermer l'œil de la nuit dans ces conditions, surtout avec son entre-jambe qui s'éveillait.
Plus personne de ne parla. Seule leur respiration synchronisée raisonna dans le silence de la chambre. Ça et quelques ronflement ponctuel de Weasley. Le rythme cardiaque de Draco redescendit à un niveau raisonnable, mais l'inconfort de son bas-ventre demeurait persistant. Il tenta de débander par la force de son mental, en imaginant quelque chose de beaucoup moins suggestif que la position dans laquelle il se trouvait, sans succès. L'odeur caractéristique de Potter avait envahit leur espace cloîtrée et se mariait à merveille avec le léger parfum de baie de sureau, vestige de sa récente douche. A plusieurs reprises, Draco inspira profondément pour s'imprégner de son parfum. Il savait qu'il était pathétique, à devoir se contenter des quelques miettes plutôt que de confronter directement ses fantasmes et ses désirs enfouis. Avec cette proximité, le Serpentard en oubliait presque le fait que Potter le détestait. A ses yeux, Draco n'était qu'un opportuniste indécent et un profiteur égocentrique.
Cependant, dans le noir complet, dans le calme de la nuit, tout était possible. Les inhibitions disparaissaient et Draco osa profiter de sa simple présence. Avec hésitation, il rouvrit les yeux et attendit que sa vue s'habituât de nouveau à l'obscurité. Il put finalement distinguer les traits du visage situé à quelques millimètres du sien. Il se dit que Potter ne pourrait pas le voir le dévisager avec insistance, sans ses lunettes le pauvre bougre était complètement aveugle. Dans le noir, sa chevelure abondante constituait une masse informe et quelque peu inquiétante, mais ça ne calma pas l'envie presque irrésistible de Draco de passer ses doigts dans sa tignasse. Si ses mains n'avaient pas été bloquées contre son torse, il l'aurait sûrement fait. Il observa du mieux qu'il put ses pommettes, ses joues, son nez, sa bouche en mourant d'envie de les caresser. Il en oubliait presque Granger qui guettait le moindre faux pas, non loin.
Soudainement, des tintements se firent entendre. Très rapidement cela fut suivit d'un grincement, puis du tremblement du lit. Sentant la panique le saisir, Draco se prépara à un nouveau chaos. Il entendit Granger retirer sa couette en jurant et se lever du lit, quand tout s'arrêta subitement et le silence revint. La sorcière ne dit pas un mot, semblant être à l'affût de la moindre perturbation. Draco, également aux aguets, tendit l'oreille et garda les yeux grands ouverts, faute de mieux, avec ses mains piégées.
Tout à coup, Potter prit une grande inspiration et réduisit la distance entre eux. Il enroula une jambe autour de sa taille, ses deux bras encerclèrent les épaules du Serpentard et son visage s'enfouit dans son cou. Potter s'accrochait à Draco, l'enfermant davantage dans son étreinte solide. Comme la dernière fois.
Ça avait fonctionné. Draco Malfoy avait bien un pouvoir soporifique. Il était le seul à pouvoir faire s'endormir le Sauveur sans sexe. Il ne put empêcher le sourire de triomphe qui étira ses lèvres. Il entendit Granger s'approcher. Elle murmura un sort et un lumos tamisé jailli de sa baguette et aveugla Draco. Décidément, elle ne l'aimait pas beaucoup. Il ferma les yeux, résigné à devoir se laisser inspecter par l'enquêtrice autoproclamée de l'affaire en cours contre lui. Il s'estima tout de même heureux d'être dissimulé par sa couette. Elle dirigea ensuite la lumière vers Potter, dont Draco put voir qu'elle examina le pouls et la température. Elle troqua ensuite son lumos avec un sort de détection digne de ceux qu'employait Madame Pompresh. Après plusieurs minutes à ausculter son meilleur ami, elle lâcha un soupir.
- Bonne nuit, Draco, dit-elle finalement dans un murmure avant de tirer le rideau en baldaquin pour les couper du reste de la chambre.
Il l'entendit s'éloigner et retourner près de Weasley. Un grincement de rideau, puis plus rien.
Le Serpentard cligna des yeux plusieurs fois pour assimiler la situation. Était-il finalement innocenté ? Cette fois-ci, il n'essaya même pas de couvrir son sourire niais. Après tout, personne n'en fut témoin. Pour la première fois depuis l'arrivée intempestive du trio de Gryffondors, il soupira de soulagement. Il changea la position de ses bras qu'il enroula autour du torse du Gryffondor. Si on l'interrogeait, il jurerait que c'était par simple confort. Évidemment.
Il enfouit son visage dans la chevelure hirsute de son camarade de chambre et se laissa emporter à son tour par le sommeil.
