- La doyenne ? renifla de façon méprisante Mme Goyle. Dans son fauteuil.

Tonks regarda par-dessus l'épaule de la femme.

- On parle bien de ce fauteuil vide ?

Goyle se retourna.

- Certes. Il semblerait que la doyenne ne soit pas là.

- Sans rire. Où est-elle ?

- Que voulez-vous que j'en sache ? Chez elle j'imagine.

- À l'hôpital en vérité, intervint la nouvelle arrivée, Madame Shafiq. Elle fait partie des potionnistes qui fournissent Sainte Mangouste à bas prix.

- L'hôpital ? pâlit Tonks. Potionniste ?

- Un talent peu connu. Mais après tout, il s'agit de la mère d'Horace Slughorn, il est très réputé. Qui plus est, les Slughorn sont une lignée de potionnistes, ils ne marient pas n'importe qui. Elle a été choisi avec soin, il s'agissait d'un véritable honneur.

Madame Goyle fronça les sourcils, presque choquée qu'on s'intéresse au vase décoratif qu'était la doyenne. Mme Shafiq détourna le regard, légèrement gêné.

- J'ai révisé. C'est tout de même la créatrice du club et il possède de hauts standards.

À voir la tête ahurie de madame Goyle, Tonks se dit que cette réputation devait probablement être surfaite. Nymphadora s'éloigna et envoya un patronus prévenir Fol Œil.

- Vous êtes sûres qu'elle n'est pas chez elle ?

- Allez sonner si ça vous plaît, c'est juste à l'étage du dessus, la renvoya Mme Goyle.

OoO

Kingsley et Fol Oeil entrèrent dans l'aile des apothicaires, à la recherche « d'une masse de plis, des yeux au milieu mais vraiment beaucoup de plis », se demandant ce qu'ils devaient encore faire de cette description.

- Mme Slughorn ? demanda brusquement Alastor en interceptant un homme au profil sinistre, portant un carton de fioles.

- Notre doyenne ? Dans le Jacuzzi. C'est Noël.

Le nombre de gens qui croisaient sa route ces derniers temps avec des assertions dont seuls eux percevaient la logique devenait pharamineux. Cet individu-là eut la décence de lui désigner une porte, et il dirigea automatiquement son œil magique dans cette direction.

-Maillot de bain rouge, emplacement bord nord-ouest, entre individus maillot de bain à pois et maillot de bain à étoiles. Pas de piège détecté.

Kingsley s'autorisa alors à ouvrir la porte. Non pas qu'il craignait de tomber dans un piège, mais il valait mieux laisser Fol Œil laisser libre court à sa parano, s'évitant par-là nombre de sermons sur l'imprudence.

Le jacuzzi était un énorme chaudron, dans lequel une surréaliste soupe d'experts mijotait, champagne à la main et conversations intellectuelles aux lèvres. Ils repérèrent la masse de plis de l'aïeule Slughorn adossée au bord, visiblement relaxée.

- Nos salutations Mme Slughorn, dit Kingsley.

La vieille femme plissa des yeux.

- Le dévaliseur de cuisine…

- C'est moi. Adulte et présent ici du bon côté de la loi cette fois. Mon collègue et moi-même aurions quelques questions à vous poser, dans le cadre de l'enquête Rowles.

- Et pourquoi dans notre jacuzzi annuel, quand votre amusante fiancée vient déjà me voir presque tous les jours au club ?

- Pardon, ma fiancée ?

- On ne vient pas spécifiquement pour les Rowles, interrompit Maugrey. Vous connaissez bien les familles de la communauté sorcière de ce pays, j'aimerai votre aide sur l'ensemble des victimes. À commencer par ceux-ci.

Fol Œil sortit les photos de Stéréo et de Whisky Coca de sa poche. Kingsley, en bon faire-valoir observateur, chercha une quelconque réaction, mais elle ne fit qu'attraper ses lunettes, posées sur le rebord du Jacuzzi et enleva la buée d'un coup de baguette.

- Je dois avouer avoir un léger retard sur les jeunes générations, dit-elle.

- Ils étaient tous les deux atteints de lycantropie, ils ne fréquentaient pas les mêmes cercles que vous.

- On se demande bien pourquoi vous me les montrez dans ce cas.

- On ne sait jamais. Celui-ci.

Il montra cette fois la photo d'Herbert Carrow.

- Oui, un des innombrables Carrow. Moins détraqué mais plus lâche que la moyenne de sa famille.

- Les Carrow ne sont pas si innombrables que cela, dit doucement Maugrey, et celui-là est spécial. Eux trois.

Il lui passa cette fois les photos toutes fraiches de trois cadavres de l'étage.

- Vous avez une façon bien à vous d'annoncer la mort des gens.

Mais elle ne sourcilla pas plus qu'avant. Kingsley comprenait bien que le manège de Fol Œil n'était pas sans but et que pour une raison ou une autre, il la soupçonnait d'être impliquée dans les meurtres. Seulement jusqu'à maintenant, la vieille femme était insondable, pas particulièrement choquée, mais pas non plus dans le calcul, comme on pouvait l'attendre d'un coupable qui se prépare.

- Deux sont mes cousins, germain pour celui du milieu, plus remué avec celui de gauche, de deux côtés différents de ma famille de toutes façons, et bien plus jeunes que moi. Le troisième est un dérivé des Weasley.

- Sans plus de détails ?

Elle fit la moue.

- Shacklebolt ici présent vous le dirait. Les familles de sang purs fonctionnent comme des familles royales. Nous avons la branche principale, basé sur l'ainé des enfants qui devient une sorte de prince, puis roi à la démission volontaire ou involontaire de ce titre par ses parents. Les branches secondaires, tant que le prince vit, se perdent plus ou moins rapidement dans l'oubli, en fonction de leur ordre de passage dans la succession. Je ne vous apprends rien jusque-là.

- Non, confirma Fol Œil. Mais continuez.

- Les princes, chuchota Héléna, ne se marie qu'à des princesses, ou à des sœurs de princesse, rarement plus qu'à des cousines de princesse. Les branches secondaires ne sont pas souvent invitées dans les affaires des branches principales, sauf problèmes internes.

- Et vous étiez une princesse, qui a épousé un prince, compléta Kingsley, et vos cousins éloignés ne vous concernaient pas.

- Assez peu.

Fol Œil se passa la main sur sa joue scarifiée.

- Vous êtes rattachée maintenant à la branche principale des Slughorn, dit-il brusquement. Mais quelle était votre branche principale avant ça.

Et cette fois ci, la doyenne tourna la tête de façon mécanique. Une tension dans la nuque qui ne semblait pas être là avant et que la doyenne semblait utiliser pour gagner du temps.

- Il nous suffit de vérifier à l'état civil, dit-il.

- Je n'ai ni honte, ni amour particulier au sujet de ma famille. J'étais justement la descendante directe des Rowles. En me mariant à un Slughorn, j'ai passé l'honneur à un cousin, mort depuis belle lurette. Avec la mort de Cétus et de Podarge, c'est Thorfinn le « prince » à présent…au grand dam de beaucoup, ajouta-t-elle avec un petit sourire.

- Vous avez l'air d'aimer le fait que votre famille de naissance soit régentée par un abruti, dit Fol Œil.

- Très. Vous comprendriez si vous aviez été élevé comme j'ai été élevée.

- Rowle vous dites ? tiqua Kingsley. Pharamond Rowle vous dit-il quelque chose ?

- Un secret de famille le petit Pharamond. Il se prétendait bâtard de mon père. Il est mort. Il y a plus de cent ans.

- Pharamond est mort, dit lentement Maugrey. Mais il y a seulement une heure.

Ce fut décidément bien plus qu'une tension dans la nuque qui fit frissonner la doyenne. C'était un blocage entier du corps, une boule de stress invisible, bien que Kingsley se demandait s'il n'était pas en train de surinterpréter complétement, étant donné qu'elle n'avait en apparence toujours pas bougé d'un pli.

- Vous n'avez pas de photos pour celui-là ? Comprenez, je suis curieuse.

Fol Œil sortit une nouvelle image de sa poche. Un éclair de haine et d'étonnement passa dans les yeux de la doyenne. Fugace, mais cette fois Kingsley en était sûr. L'atmosphère changea, son cœur se mit à battre plus fort.

Elena regardait fixement la photo du vieux, mains reposant sur l'estomac et visage paisible dans un apparent trépas.

- Elle vient d'être prise par un de nos agents.

- Pourquoi une photo moldue ? le coupa-t-elle d'une voix plus morte que son demi-frère.

Mais les bulles du Jacuzzi commencèrent à craquer à un rythme démentiel. Elle précisa :

- Rien ne bouge.

Maugrey reprit la photographie.

- C'est une photo sorcière. S'il n'y a plus de mouvement, c'est qu' il n'y a plus de vie.

Kingsley recula d'instinct, l'eau du Jacuzzi jaillit de toute part. Certains potionnistes furent expulsés violemment du chaudron tandis que la doyenne disparut par le siphon. Il se reprit rapidement et sauta le rebord pour partir à sa poursuite dans la tuyauterie de l'hôpital.

- C'est bien ce que je pensais, grogna doucement Alastor, avant de tourner les talons.

OoO

Kingsley émergea dans un nouveau jacuzzi, sous les cris de ses occupants.

- Mme Slughorn ? demanda-t-il en recrachant un peu d'eau. Enquête du bureau des aurors.

Un gamin, surement un enfant d'un des personnels de va savoir dans quel étage il avait atterri, lui désigna la porte, le visage rayonnant d'admiration. Il sortit du chaudron en dégoulinant, se sécha d'un coup de baguette et se mit à courir.

Dans le couloir, il aperçut l'ombre de la doyenne déambuler fugitivement à travers une nouvelle porte. Il s'élança à sa poursuite et fit irruption dans la nouvelle pièce où une série de flammes vertes s'évaporaient déjà de la cheminée.

- Non ! ragea-t-il.

- Qui êtes-vous ? dit une voix sévère derrière lui qui l'attrapa par l'épaule. Ah oui… un des aurors.

- Les communications de l'hôpital devaient être coupées ! Qui a permis à ce feu de rester ouvert ?

- Mais vous ! Votre chef l'a directement demandé, en guise de sortie de secours.

- Mon chef ? Alastor Maugrey vous a demandé de laisser passer la doyenne ?

- Non, il m'a demandé de surveiller l'accès de secours, qui se trouve justement dans mon bureau.

- Et par surveillance, vous entendez donc laisser la suspecte s'enfuir ?

- Suspecte ? La doyenne ? Il s'agit presque autant de son hôpital que du mien !

- Où est-elle partie ?

- À son club.

Le patronus de Maugrey apparu.

- Shacklebolt, ramène toi avec Slughorn ou non à l'infirmerie du trafic. Sans traîner.

Merde. Club ou trafic ?

OoO

Alastor secoua son agent infiltré.

- Réveille-toi Lupin, c'est pas le moment de tirer au flanc.

- Hein ? 722.

- 722 quoi ?

- Cernes. 722 ans.

Remus se redressa difficilement, il s'étira la colonne vertébrale et se stoppa net.

-Oh ! Fol Œil tu es fou ? chuchota-t-il furieusement. Tu viens à l'intérieur du bâtiment maintenant ? Je te rappelle que Greyback est à Londres, et il ne t'aime pas !

-J'ai des hommes qui surveillent la grille.

- Nymphadora et Shacklebolt ?

- Non. Tonks est planquée à proximité. On va bientôt avoir de la visite, viens là-dessous, dit-il en lui désignant sa cape d'invisibilité.

Kinsgley entra à bout de souffle. Fol Œil l'attrapa immédiatement par la manche et le ramena sous la cape, qui se révéla trop courte pour trois hommes adultes. Ils s'assirent au sol et se serrèrent les uns aux autres.

- La doyenne s'est échappée de l'hôpital via poudre de cheminette. Je suis passé au club, elle s'est enfermée dans ses appartements, impossible d'ouvrir la porte. C'est du travail pour un briseur de sort.

- La doyenne ? demanda Remus sans comprendre. La vieille dame du club ?

- Je suis venu sous tes ordres Maugrey, mais comme la suspecte est à l'autre bout de la ville, qui plus est, libre et sans surveillance, on se planque en attente de qui au juste ?

- De elle. On attend qu'elle sorte, comme les lapins. En parlant de lapin, Lupin, comment va le mort ?

- Il dort toujours. Mais pas éternellement . C'est quoi cette histoire avec la doyenne ?

- Est-on sûrs qu'elle va sortir ? Elle le pense mort.

- Pas tant qu'elle n'a pas vérifié par elle-même, réaffirma Maugrey.

Remus fronça les sourcils.

- C'était pour ça la photo moldu ? Tu as de la chance que j'ai pu dénicher un appareil aussi vite. Tu peux remercier Silence et sa passion pour les photos de cha…

Fol Œil lui flanqua sa main devant la bouche, et le bruit d'une porte qui s'ouvre se fit entendre.

La vieille dame tant attendue se glissa dans la pièce et avança courbaturée jusqu'aux lits, sous le bruit des ronflements des autres résidents de l'infirmerie. Au grand étonnement des planqués, elle fut suivi de la haute silhouette de Thorfinn Rowle.

Elle se pencha vers le corps en tremblant et l'étudia cliniquement.

- Evidemment, murmura-t-elle. Thorfinn mon petit, procède.

Rowle sortit un tube à essai de sa poche. La doyenne se redressa et scruta avec attention la salle, posant ses yeux partout et Remus pensa, bien trop souvent sur leur emplacement.

Qu'allaient-il faire avec ce tube ?

- Portoloin, souffla Maugrey, à peine audible. Apprêtez-vous à suivre.

Ils commencèrent à se relever, doucement.

- Portus, énonça Thorffin. Il devrait partir dans une minute. Et comme je suis un fonctionnaire efficace, je me suis bien entendu déjà occupé des papiers.

- Merci, merci mon grand, dit la doyenne d'un ton affable.

- On aide son sang, n'est-ce pas ? Que votre retraite soit longue et prospère.

- Mais bien sûr ! Et si elle ne l'est pas, je partirai au moins en sachant mon héritage bien gardé.

Elle lui tapota la joue puis sorti un pistolet de son chemisier d'une main, braquant son petit neveu, et le tube à essai et la chemise du vieux de l'autre. Fol Œil n'attendit pas qu'elle tue son témoin et projeta d'un sort l'imbécile et cupide Thorfinn sur le mur. La doyenne tourna rapidement la tête en leur direction. Kingsley lui attrapa le poignet et l'arme tomba au sol. Remus et un loup garou réveillé des lits voisins s'ajoutèrent à la boule de gens, que le tube emporta en un clignement d'œil.

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C'est gentil Katymyny. Les gens apprécient souvent mon humour .

J'ai un carton entier de lettres de menace pour le prouver.