Osiris s'était posté devant la tente dès le départ du jeune homme. Il faisait les cent pas et une aura d'inquiétude l'entourait. Ce qui était plutôt inhabituel de sa part, lui, le sorcier confiant et savant.

Quand Harry transplana finalement dans la plaine, Osiris accourut à ses côtés, se fichant bien de briser la réputation qu'il s'était construite auprès du jeune homme. Il regarda le sang maculant presque l'entièreté de ses habits qui eux, s'étaient réparés d'eux-mêmes. Il s'agenouilla aux côtés du jeune homme semi-conscient. Il était étonnant qu'il ne se soit pas désartibulé lors de son transplanage.

«Oh Harry, souffla Osiris, la douleur transparaissant dans sa voix.Mais qu'est-ce que j'ai fait... »

Osiris lança un sort de lévitation sur le jeune homme, tentant de le bouger le moins possible pour ne pas ouvrir ses nombreuses plaies. Le jeune homme toussa, faisant saigner un peu plus ses blessures.

«Chut Harry, c'est fini. Je vais te soigner. Ça va aller, répétait Osiris en une litanie incessante, comme pour se convaincre lui-même.»

Il allongea le jeune homme blessé sur son lit et fit venir à lui tout un tas de potions. Avec une douceur infinie, il cala la tête du blessé sous un oreiller, pour faciliter l'ingurgitation des potions. Le problème avec leur uniforme, c'était qu'il était impossible d'enlever toute la partie haute. Ce qui rendait complexe la guérison des plaies. Osiris débarrassa délicatement le pantalon du jeune homme et contempla avec horreur les stries rouges qui parcouraient sa peau dorée.

La vue était insoutenable. Osiris voulait vomir. Mais il devait guérir Harry. C'était son devoir. Après tout c'était à cause de son incapacité à le protéger qu'il se retrouvait dans cette situation.

Osiris fit venir à lui un seau d'eau et un linge propre. Il entreprit alors de laver les jambes du jeune homme avec une douceur et une patience touchante. Il passa le tissu imbibé d'eau sur les plaies ouvertes, délestant la peau dorée de son sang, tout en sachant qu'il était incapable d'effacer les séquelles que ces dernières avaient ancrées bien plus profondément en lui.

Harry gémit doucement de douleur.

«Pardon, Harry. Je fais de mon mieux.

- Ce n'est pas mes plaies les plus douloureuses, souffla-t-il très faiblement. C'est mon coeur qui saigne.

- Je suis désolé Harry... Si désolé.»

Harry toussa.

«Ce n'est pas de ta faute Osiris.»

La phrase fit se sentir Osiris encore plus mal au lieu de le soulager. Harry ne le croyait pas responsable. Mais il avait tort. Il était le seul fautif.

Osiris prit un baume désinfectant et cicatrisant qu'il appliqua sur les jambes meurtries de Harry. Après sa tâche accomplie avec le plus grand des soins, il choisit de laisser le jeune homme ainsi dévêtu afin de pouvoir surveiller plus efficacement sa guérison. Il rabattit les couvertures sur la silhouette frêle et s'affala sur sa chaise avec un soupir affligé. Il avança sa main vers la tête de Harry, voulant passer une main rassurante sur son crâne. Cependant, la culpabilité arrêta son geste et son bras retomba mollement sur sa cuisse, estimant qu'il n'avait aucun droit de toucher le jeune homme de la sorte.

«Je le déteste, murmura Harry alors qu'il sombrait dans le sommeil.»

Osiris n'avait aucun besoin de demander l'identité de cette personne. Il le savait pertinemment. Et les paroles du jeune homme lui serrèrent le cœur de la plus atroce des façon. Tout était sa faute. Il avait gâché à Harry sa seule chance d'être heureux.

Une larme roula le long de sa joue.

OoOoOoO

Harry se réveilla quelques heures plus tard, alors que la lumière du soir emplissait la teinte d'une faible clarté.

Osiris se tenait à ses côtés, un bol de bouillon posé sur ses genoux.

«Osiris? Demanda-t-il la voix éraillée.

- Chut, il faut que tu ménages tes forces Harry. Je vais te donner à manger et ensuite je t'apporterai les potions propices à ta guérison.»

Harry hocha faiblement la tête. Osiris aida le jeune homme à s'adosser contre ses oreillers. Ensuite, avec une infinie précaution, il assista le jeune homme dans son dîner, prenant toujours garde à ce que la nourriture soit à la température adéquate afin de ne pas brûler la bouche du blessé.

Osiris amena ensuite diverses potions à Harry tel que des antidouleurs, des potions de régénération sanguine ainsi que de cicatrisation. Le médecin improvisé inspecta ensuite l'état des jambes de son patient. Il soupira de soulagement en voyant que les plaies avaient arrêté de saigner et qu'elles commençaient tout doucement à cicatriser. Alors qu'il replaçait les couvertures sur le corps de Harry, ce dernier attrapa sa main avec fébrilité, contractant de douleur les muscles de son bras.

«Osiris... Tu ne me laisseras pas toi, hein? S'il te plaît, dis-moi que tu ne me quitteras pas. Jamais.»

Une torsion de douleur contracta la poitrine d'Osiris tandis qu'il s'asseyait auprès de Harry, sa main toujours dans la sienne. Il murmura avec douceur:

«Je suis là Harry. Tant que tu en auras besoin, je serais là. Toujours.»

Et Harry sombra à nouveau dans un sommeil cotonneux.

Osiris veilla sur lui toute la nuit, s'interdisant le sommeil. Il estimait ne pas être digne de repos après tout ce que Harry avait subi. C'était un bien maigre prix en comparaison de la torture infligée à son jeune compagnon. Osiris passa la nuit à le regarder dormir, caressant avec une certaine prudence le dos de sa main toujours entre les siennes, comme si son simple contact pouvait le briser en un millier de fragments irrémédiablement détruits. Le sorcier ne cessait de ressasser ses sombres pensées, s'enfonçant toujours plus loin dans une culpabilité mortelle.

Finalement, Harry se réveilla vers ce qu'Osiris estimait être 8 heures du matin. Il avait déjà repris quelques forces mais restait très faible malgré tout. Osiris lui apporta un petit-déjeuner et l'assista pour manger. Pendant ce temps, Harry déclara d'une voix suppliante:

«Je ne veux pas y aller Osiris, je ne veux pas. Tu ne peux pas faire quelque chose pour que je reste là? Emmène-moi loin, là où je ne pourrais plus penser à lui.

-Je ne peux pas Harry... Je suis désolé. Si je le pouvais, je t'assure que je le ferais. Je suis désolé de ce que tu as du subir.

- Je le hais. Mais je l'aime si fort. Je suis incapable de le haïr correctement même après ce qu'il m'a infligé, tu te rends compte? Je suis pathétique.

- Ne dis pas ça Harry, tu es loin d'être pathétique, tu es le jeune homme le plus fort que j'ai jamais connu.

- Je ne veux plus aimer, Osiris. Sais-tu à quel point c'est douloureux? Je préférerais m'arracher le cur à pleine main plutôt que continuer à ressentir ce putain d'amour pour lui.

- Je sais Harry... Je sais.

- Je ne veux pas, je ne veux pas, je ne veux pas, sanglota-t-il. Prends-moi dans tes bras Osiris. Serre-moi si fort qu'il ne pourra m'arracher à toi. Je n'ai pas la force de lui faire face.»

Osiris n'eut d'autre choix que de s'exécuter tant la détresse du jeune home était un crève-coeur pour lui. Il s'installa aux côtés de Harry avec précaution, et avec toute la douceur qu'il possédait, il le prit dans ses bras. Il enfouit son visage sur le crâne du jeune homme, humant son odeur avec un besoin douloureux. Il le serra contre lui, prenant garde à ne pas blesser Harry.

Mais bien vite, la brume blanche entoura le corps de Harry. Osiris l'observa l'arracher à lui, tandis que le jeune homme tentait de s'accrocher désespérément à Osiris. Finalement les volutes furent plus fortes et Osiris regarda Harry disparaître avec impuissance.

Il était parti. Livré à une souffrance qu'il ne voulait affronter.

OoOoOoO

Quand Harry se matérialisa dans la pièce, c'était comme si son corps était transpercé de milliers d'aiguilles enflammées. Il se serait étalé sur le sol si deux bras forts ne l'avaient pas rattrapé. Au contact, Harry tressaillit et se dégagea avec brusquerie, tombant sur le sol par la même occasion.

«Ne me touche pas. Plus jamais, tu m'entends. Comment oses-tu poser tes ignobles mains sur moi après tout ce que tu m'as infligé.»

Et Merlin savait combien cette requête était difficile quand son corps réclamait tout le contraire. Sa voix était pleine d'une colère vive qui toucha Severus en plein cœur. Harry toussa et rampa avec difficulté jusqu'au canapé. Il s'y affaissa en tremblant de douleur, tournant le dos à Severus.

«Harry...

- Ah, parce que c'est Harry maintenant? Plus de «Taisez-vous Potter»? cracha-t-il avec une affliction acérée.

- Je-

- Tais-toi Severus, tais-toi, sanglota-t-il en couvrant ses oreilles de ses mains, faisant souffrir ses muscles au passage.»

Severus regardait Harry recroquevillé sur le canapé, du sang maculant ses bras de ses plaies rouvertes. Il était la cause de la souffrance du jeune homme. Et Severus avait l'impression d'avoir planté le poignard qui avait blessé Harry, celui-là même qu'il tenait entre ses doigts la veille, dans son propre coeur.

Une chaise apparut à côté du canapé et Severus s'y installa en silence. Il observa la souffrance de Harry, sans pouvoir toucher ni parler au jeune homme. Il était condamné à contempler le tableau de sa douleur, tout en ayant conscience qu'il était l'origine du malheur chez cet être dont il n'avait souhaité que le bonheur. L'impuissance et le culpabilité étreignaient l'âme de Severus dans un étau de douleur insoutenable.

Tandis que Harry tremblait sur le canapé, Severus repassait les événements de la veille dans sa tête. Il se revoyait, s'acharnant sur la masse impuissante sous lui. Ses cris de douleur étaient insoutenables. Severus voulait vomir. Il se haïssait d'infliger une telle souffrance au jeune homme, tout en sachant que jamais il ne le pardonnerait. Alors il déversa sa rage contre lui-même sur le corps entravé de son amant. Il se déchaîna sur l'être qu'il aimait pourtant avec une puissance involontaire. Tandis que le sang maculait sa dague, il savait que chaque entaille supplémentaire ne serait qu'une douleur en plus, pour Harry comme pour lui. Mais Severus était inarrêtable. Sa haine contre lui-même dirigeait chacune de ses pensées. Ce n'était qu'après un long moment qu'il avait été capable d'arrêter le massacre. Horrifié, il avait alors libéré Harry de ses entraves. Et le jeune homme s'était évaporé sans demander son reste.

Son Maître était si satisfait par la torture infligée à Harry qu'il ne blâma même pas Severus pour avoir congédié le jeune homme à sa place. Ce qui avait rendu le malaise de Severus encore pire. Après cela, il s'était retiré dans sa salle de bain et avait vomi longuement, l'acide brûlant sa gorge aussi sûrement que le poids qui écrasait son être tout entier. Après cela, Severus n'avait pas dormi de la nuit, repassant en boucle les hurlements de douleur de Harry. Il s'était senti et se sentait encore si misérable. Plus misérable qu'il ne l'avait été de toute sa vie.

Et malgré tout le mal qu'il avait fait subir à Harry, il ne pouvait s'empêcher de le désirer ardemment. Il était ignoble. Il se dégoûtait.

Après tout, les gens avaient raison: Severus était un monstre. C'était déjà une chose abominable que de torturer et tuer des âmes innocentes mais inconnues. C'en était une autre de faire sciemment du mal à l'être pour lequel on donnerait sa vie dans l'espoir de voir briller une étincelle de bonheur dans ses prunelles aimées.

Severus ne savait pas combien de temps il était resté assis à contempler le corps meurtri de Harry. Il voulait lui dire qu'il était désolé, le prendre dans ses bras, le serrer fort contre lui en lui répétant que tout irait bien. Mais il en était indigne. Et il respectait le vu de silence de son jeune amant. Si Severus avait eu des doutes quant à ses sentiments envers le jeune homme, il était maintenant limpide que son attachement pour Harry dépassait la simple affection tant ils étaient puissants et douloureux.

Quand la brume enveloppa leur corps, signe de leur retour imminent, Severus put entendre Harry chuchoter d'une voix cassée:

«Je te hais Severus.»

Severus ferma les yeux sous la souffrance que cela provoqua en lui. Bien qu'il en avait conscience, l'entendre de la bouche de Harry faisait plus mal encore. Avant qu'ils ne soient emportés loin l'un de l'autre, Severus eut le temps de souffler d'une voix rauque:

«Je sais Harry. Et je me hais encore plus fort.»