Bonjour à toutes et à tous !
Merci à toutes les personnes qui ont laissé une review, cela me va droit au cœur.
Au menu du jour : le NCIS joue dans la cour du SHIELD.
Bonne lecture !
De D.C. à Kandahar, et même un peu plus loin
Chapitre 13
Vingt-quatre heures après l'arrivée d'Agent MiB au Navy Yard, nous embarquâmes dans un avion dépêché par le SHIELD. A l'intérieur, nous découvrîmes un petit centre de commande, équipé d'une technologie qui fit briller des étoiles de geek dans les yeux de mon Bleu favori.
« Bienvenue dans notre Station de commande mobile aéroportée, que nous surnommons affectueusement le Bus, nous salua l'Agent Coulson qui n'était pas seul. Je vous présente deux de nos meilleurs agents, l'Agent Barton et l'Agent Romanoff, qui a insisté pour venir malgré une blessure récente. »
Il y avait du ressentiment dans sa dernière phrase, ce qui fit lever les yeux au ciel de la magnifique rousse qu'il nous présentait. Un sourire dragueur eut à peine le temps de naître sur mes lèvres, je me pris une taloche bien sentie derrière la tête.
« J'ai rien fait Boss ! m'insurgeai-je.
- Je te connais, DiNozzo. »
Cela me percuta de plein fouet. Gibbs était jaloux ! Je réfrénai un sourire victorieux. J'aurais dû m'en douter. Leroy Jethro Gibbs-deuxième-B-pour-Bâtard était évidemment du genre jaloux, ou possessif, ou simplement prudent face à tout ce qui pourrait capter mon attention de play-boy. Vraiment, pour ne pas sourire comme un imbécile, je dus me mordre l'intérieur de la joue.
Les deux autres agents du SHIELD étaient des espions (Vraiment ? Une espionne avec une couleur de cheveux pareille ? Ce n'était pas se tirer une balle dans le pied que d'être aussi remarquable ?), mais avaient des spécialisations militaires. Romanoff était une combattante de corps à corps et Barton était tireur d'élite, dont l'arme favorite sortait un peu de l'ordinaire, puisqu'il n'aimait rien de plus que le tir à l'arc. L'ouverture à la discussion aurait été facile, si Gibbs avait été autre chose que quasiment muet. Charge à moi, donc, de briser la glace et de faire ami-ami avec nos nouveaux alliés, en attendant que McGee se remette de son orgasme de geek.
« Je suis jaloux, dis-je avec désinvolture. Vous vivez totalement la vie de James Bond. Vous avez un matricule en double zéros ? »
Au moins cela fit rire Barton qui devint immédiatement mon Men in Black préféré.
« On a des noms de code, dit-il, pas des matricules. Hey, Boss ! Est-ce que l'antenne au Royaume-Uni fournit des matricules en double zéros à ses agents ? »
Coulson leva les yeux au ciel, mais le petit sourire en coin sur son visage entrait en contradiction avec sa posture rigide.
« Bien, nous avons un trajet de plusieurs heures, nous allons pouvoir en profiter pour faire un briefing, et nous reposer. Il y a des couchettes de ce côté-là du Bus. Romanoff, à toi l'honneur.
- Merci Coulson. La région de Gulmira n'est pas pacifiée. Elle grouille de sympathisants d'Al Qaeda et des Dix Anneaux. Les deux organisations ne sont pas alliées, mais elles ont un ennemi commun, nous. Il est donc difficile d'obtenir des informations par les uns sur les autres. Néanmoins, la coalition est entrée en contact avec un chef de guerre sur place, peu avant qu'il ne soit assassiné par des fidèles d'Al Qaeda pour traîtrise. Il a révélé que les montagnes sont le repère essentiellement des Dix Anneaux, et qu'Al Qaeda se cache plus au Nord. Les Dix Anneaux élargissent leur zone d'influence, année après année, et créent des camps de plus en plus proches des villes, pour entraîner leurs adeptes et stocker leurs armes. Dans les montagnes, c'est, d'après eux, le lieu idéal afin que les adeptes découvrent la Vraie Vie, loin de l'opulence et de la décadence induite par l'influence occidentale. On parle donc d'une vie spartiate, militaire, d'une ascèse fanatique propice à l'endoctrinement. Concernant maintenant les lieux. Gulmira semble être une ville centrale, où les camps d'entraînement se ravitaillent. La route entre Kandahar et Gulmira est particulièrement dangereuse, et depuis la disparition de Tony Stark, le 13 février dernier, la coalition ne peut plus s'y rendre sans essuyer des attaques d'envergure.
- Ce qui complique les recherches, marmonnai-je.
- Exactement. Nous avons bien essayé d'envoyer des agents recrutés parmi la population afghane, mais poser trop de questions et fouiner partout n'est pas gage de survie dans ce coin-là. De fait, le camp de base se trouvera à Kandahar, dans la zone sécurisée par la coalition. C'est là que nous devons retrouver Amit Hadar, l'Agent qui doit venir faire la liaison entre nous et le Mossad. »
Je grimaçai en reconnaissant le nom, et Gibbs s'assombrit considérablement.
« Un problème ? demanda Coulson.
- Nous ne sommes pas les plus grands fans de l'Officier Hadar, admis-je. Mais c'est un professionnel. Il n'aura aucune raison de faire sauter un immeuble à Kandahar. »
Les sourcils de Barton sautèrent sur son front.
« Je sens l'histoire croustillante, fit-il avec curiosité.
- Je te la raconterai pour t'endormir, répondis-je avec humour.
- Concentration, râla Gibbs.
- Oui Boss ! Tout de suite, Boss ! fis-je de manière tout à fait pavlovienne.
- Nos relations avec Hadar ne seront pas un problème, promit Gibbs en direction de Coulson. Ce que nous lui reprochons ne concerne en rien cette mission, et n'a de valeur que sur le territoire américain. »
Coulson hocha la tête, satisfait. Il nous tendit à chacun un dossier identique, siglé du logo du SHIELD, un aigle stylisé entouré des cinquante étoiles du drapeau national.
« Un condensé de tout ce que nous savons, expliqua-t-il. Vous avez le temps de le parcourir, de prendre des notes et de vous reposer. Vous en aurez besoin, notre séjour n'est pas exactement touristique.
- Moi qui voulais visiter Chilzina, râla faussement Barton.
- Il y a plein de mosquées magnifiques où aller écouter les rumeurs, opposa immédiatement Romanoff.
- Mais c'est en intérieur ! Et Chilzina est un point de vue imprenable ! En hauteur !
- Désolée, moineau. Tu as entendu Coulson. Pas de grimpette ! »
Nous devinions que les deux espions qu'Agent MiB avait emmenés avec nous étaient des partenaires de longue date. Il n'y avait que des amis pour se taquiner de la sorte. Moi-même, je m'amusais souvent aux dépends de McGee, et celui-ci me le rendait bien, dès qu'il le pouvait.
« Il y a aussi un frigo, par là, nous indiqua Coulson qui secouait la tête face au comportement moins que juvénile de ses agents.
- Comment on va passer inaperçu dans une mosquée, si on doit aller glaner des informations ? demanda légitimement McGee.
- En se faisant passer pour des Russes, répondit Coulson. Romanoff et Barton ont l'habitude de se faire passer pour un couple. Romanoff est russe et Barton le parle parfaitement. Ils ne passeront pas inaperçus, mais ce n'est pas le but. Les russes sont mieux accueillis que les américains dans cette zone de l'Afghanistan.
- Je parle russe aussi, dit Gibbs.
- Parfait. Nous aurons de quoi étoffer nos scénarii en cas de besoin. »
Nous retrouvâmes le couple d'espions à boire des boissons chaudes dans une sorte de salon. Ils avaient cessé de se taquiner et discutaient plus sérieusement.
« Il y a une machine à café, juste-là, pointa Barton. C'est un système à capsule. Le mini-frigo est juste en dessous.
- Vous avez déjà été en Afghanistan ? demanda Romanoff pour ouvrir la conversation.
- Gibbs et moi, oui, dit DiNozzo. McGee, pas encore.
- Oh, grande première alors. Ce n'est pas comme on voit à la télévision, si cela peut vous rassurer, Agent McGee, expliqua-t-elle. Il n'y a pas de mine à chaque carrefour, et globalement les gens sont moins hostiles que ce qu'on croit au début. Il ne faut pas croire que les afghans brûlent des drapeaux américains tous les matins. Les gens sont méfiants, c'est normal, ils vivent dans un pays en guerre, depuis leur naissance pour la plupart.
- Je ne suis pas un espion, de toute façon, bégaya McGee. »
Je le devinais troublé par la magnifique espionne. Mon Bleu préféré avait un faible important pour les petites femmes rousses, si bien que souvent, je me moquais en disant qu'il se transformait en Gibbs.
« Je suis plus doué pour la collecte de données informatiques. Je suis spécialisée dans l'écriture d'algorithmes de recherche de patterns dans les big data. »
Je lançai un regard vide à mon collègue et ami, mais miracle parmi les miracles, Romanoff sembla comprendre parfaitement ce dont il parlait.
« Intéressant ! fit-elle. Je n'ai pas l'utilité de telles compétences pendant mes missions. Très souvent, je n'ai besoin que de compétences de hacking brut, et je laisse la partie enquête et pattern aux analystes du SHIELD.
- Oh, en général, ce n'est pas compliqué, fit McGee par modestie. La plupart des algorithmes que je code sont des dérivés de l'algorithme de Kasai. Il est très utilisé pour la détection des anomalies. J'ai fait ma thèse dessus. »
Je riais sous cape. Mon petit Bleu tentait d'impressionner la belle espionne en parlant informatique, et cela semblait marcher !
« Vous non plus, vous captez rien ? glissa Barton plus ou moins discrètement alors que Romanoff posait une question affreusement pointue dont je ne compris pas la majorité des termes. »
Gibbs planqua son sourire dans sa tasse de café, et je ne pus m'empêcher de glousser.
« Laissez-moi deviner, Agent Barton. C'est elle le cerveau du couple.
- Même pas honte. Natasha est beaucoup trop intelligente pour moi. Elle sait même parler latin. C'est une langue morte ! Appelez-moi Clint, d'ailleurs.
- Tony, offris-je en retour. »
Nous discutâmes pendant un moment, Clint et moi. Gibbs intervenait parfois, et McGee continuait de parler informatique avec Romanoff, beaucoup moins sur le ton de celui qui veut se vanter, et beaucoup plus sur le ton de celui qui est réellement passionné par son sujet et qui rencontre, enfin (enfin !) quelqu'un pour en parler avec lui. Après un moment, d'un accord tacite, nous partîmes nous reposer dans les couchettes installées, et qui ressemblaient affreusement aux chambres-capsules japonaises qu'on voit à la télé. Les couchettes se faisaient face, deux à deux, comme des chambres de motel classiques, et je m'installai en face de celle de Gibbs.
Je regrettai à voix basse que les couchettes ne soient pas plus larges, car je me serais bien glissé discrètement avec lui. Je m'allongeai donc et commençais à somnoler, quand le rideau qui me coupait du reste de l'avion s'ouvrit.
« Fais-moi de la place, dit Gibbs en s'encastrant littéralement entre le bord rehaussé du lit et moi.
- Les autres vont poser des questions, protestai-je mollement en étant évidemment ravi qu'il me rejoigne comme si nous étions deux adolescents à faire le mur.
- Ils ont autre chose à foutre que de nous surveiller.
- Qu'est-ce qu'on fait, Gibbs ? murmurai-je alors que j'avais le visage de l'autre homme à quelques centimètres du mien. Qu'est-ce qu'il se passe ? »
J'avais l'intuition que Gibbs ne savait pas plus que moi vers quoi nous allions. Il m'avait certainement révélé qu'il tenait à moi ce fameux soir où tout avait basculé, sur un coup de tête. Je connaissais mon Boss. Je savais que sous la surface calme, une tempête s'agitait, et parfois, elle s'exprimait, surprenant tout le monde, Gibbs compris. Cependant, après l'aveu, après le rapprochement, après l'étreinte, il fallait se mettre d'accord sur une feuille de route, décider vers quoi nous allions, ce que nous voulions faire.
« Qu'est-ce qu'on fait ? répétai-je toujours très bas.
- Si seulement je le savais, répondit Gibbs sur le même ton.
- C'est trop facile Gibbs, rétorquai-je. Qu'est-ce que tu veux ? »
Peut-être ne s'était-il jamais posé la question, peut-être avait-il peur de ma réaction (bien que l'idée soit risible en elle-même. Gibbs ? Peur ?). Peut-être tout simplement qu'il n'avait pas trouvé de réponse.
« Je veux ce que toi tu veux.
- Encore une réponse trop facile, râlai-je. »
J'essayai de m'écarter du corps chaud qui était collé contre moi, mais le mur m'empêchait de bouger de plus de quelques millimètres.
« Tu as fait le premier pas, soulignai-je. Tu m'as choisi, tu me l'as dit, tu as insisté là-dessus. Pourquoi ? Qu'est-ce que tu espères ? »
Une interrogation passa sur son visage, ce qui confirma ce que je pensais. Ses pensées, ses questionnements n'étaient jamais allés dans ce sens.
« Ecoute, dis-je patiemment. Je sais que se trouver tout à coup attiré par un autre homme n'est pas une chose aisée.
- Qui te dit que je n'ai jamais été attiré par un autre homme avant toi ? »
D'accord, la pique était facile, et ma remarque manquait singulièrement de doigté, mais comme je l'ai dit plus haut, je connaissais mon Boss. Le regard que nous échangeâmes fut lourd de sens, et il finit par céder et pousser un soupir contrarié.
« Tu as gagné, je n'ai jamais été attiré par un autre homme avant toi. Mais ce ne doit pas être si différent d'avec une femme, non ?
- Tu veux dire, à part les préjugés, la haine des autres et la haine de soi ? Les lois homophobes, le Don't Ask Don't Tell ? Ne pas pouvoir s'embrasser en public, ni même se tenir la main ? Risquer de se fâcher avec ses amis et sa famille ? Oui, c'est pareil. »
Ma tirade sortait littéralement du cœur, du plus profond de mon être. Elle était la première vanne à lâcher après des décennies de frustration, d'incompréhension et de rejet. Le regard de Gibbs se fit compatissant, comme s'il comprenait ce par quoi j'étais passé, et cela m'énerva alors que cela aurait dû m'apaiser. Du dos de son index, il effleura ma joue.
« Le Don't Ask Don't Tell n'est pas là pour rien, chuchota Gibbs. »
Je fronçai les sourcils. Sans savoir à quoi m'attendre, je ne m'attendais pourtant certainement pas à ça, et puis en y réfléchissant, la réaction de Gibbs était parfaitement justifiée. Il était un ancien Marine devenu Agent fédéral, évidemment, une attirance perçue comme déviante n'était bien accueillie. L'homme avait été marié quatre fois, que diable ! Il fallait que je me montre un peu plus empathique, et ne pas seulement écouter la lassitude qui m'habitait depuis trop longtemps.
Je réprimai l'envie que j'avais de crier au monde qu'il devait être un peu moins bigot et un peu plus tolérant, et je me forçai à sourire.
« Le monde n'est peut-être pas tolérant, Gibbs, dis-je dans un souffle. Mais il y a des endroits où nous pouvons être nous-mêmes. Regarde. Nous sommes sur ma couchette, à quelques pas d'amis et de parfaits inconnus. As-tu peur qu'ils le découvrent ? »
Ô Ironie ! Grande Ironie de la vie ! Je m'entendais essayer de rassurer Gibbs sur l'intolérance du monde, alors que les personnes qui connaissaient ma bisexualité se comptaient sur les doigts d'une main et qu'une de ces rares personnes avait disparu, après des années sans avoir pris de nouvelles. La main de Gibbs continuait de m'effleurer la joue. La caresse était tendre et distrayante. Si je me concentrais dessus, je pouvais presque oublier où nous nous trouvions, pourquoi et avec qui. Il n'y avait plus que nous, Gibbs et moi, dans une couchette trop petite, à respirer le même air, sans oser sceller notre relation.
Gibbs avait fait tous les premiers pas. Il avait parlé, avoué qu'il ressentait quelque chose, il s'était glissé avec moi au mépris de tout danger d'être découverts, il caressait ma joue. Il manquait ce dernier petit pas, le plus important peut-être, celui qui allait transformer l'attraction en synergie.
Nous fonctionnions en synchronisation depuis tellement longtemps. Nous étions déjà un couple professionnel. Il ne tenait qu'à nous, à moi, de combler le vide, le faible espace qui nous séparait, pour faire de nous un couple complet.
En miroir, j'avançai mes doigts vers le visage de Gibbs. Je fantasmais depuis si longtemps sur cet homme que j'en étais pris de vertige. Soudainement, l'absurdité de la situation me figea dans mon mouvement. Que faisions-nous ? La question restait en suspens. Que faisais-je, la pulpe des doigts à quelques millimètres des lèvres de mon patron, prêt à succomber à un désir ancien ? Que faisais-je à envisager une relation clandestine avec mon supérieur direct, une relation clandestine homosexuelle, alors qu'une partie de moi s'étiolait à ne pas pouvoir s'exprimer ? Que faisais-je à considérer une relation avec un cinquantenaire, crachant en même temps sur le rêve de la parfaite famille, un papa, une maman, deux enfants, un chien, un chat et une jolie maison proprette que j'imaginais être mon futur le plus probable et le plus enviable ? N'aurait-il pas été plus simple que j'admette avoir des sentiments pour Ziva, pour ne pas succomber à l'attraction qui m'attirait inexorablement vers Gibbs ?
Gibbs sentit mon hésitation et éloigna sa main de mon visage. C'était idiot, mais sa chaleur me manqua immédiatement. Comment exprimer cela sans tomber dans le cliché, le déjà dit, ou la guimauve la plus totale ? Le froid ressentit n'avait rien à voir avec la température, ce fut le manque de contact physique qui glaça ma peau et me donna le courage de faire le dernier pas. Mes propres doigts effleurèrent la joue rasée de près de Gibbs. La chaleur se transmit de la pulpe de mon index et de mon majeur tout le long de mon bras jusqu'au reste de mon corps. D'un seul mouvement, nos visages se rapprochèrent l'un de l'autre, jusqu'à fusionner.
Nous ne restâmes pas indéfiniment dans la chaleur de notre embrassade. Il nous fallut admettre que si nous ne voulions pas être surpris (et ce n'était définitivement pas une manière admissible de sortir du placard), il fallait que Gibbs retourne sur sa couchette.
Je rêvassais longtemps en fixant le plafond de mon box, l'esprit tourmenté par l'évolution de notre relation. La question posée à Gibbs restait en suspens. Comment en était-on arrivés là ? Y avait-il eu des signes avant-coureurs ? Quand notre solide amitié s'était-elle métamorphosée en cette attirance charnelle et sentimentale ? Pour ma part, je savais que mes regards n'avaient pas toujours été platoniques, mais heureusement, cela ne durait jamais bien longtemps. Comment pourrais-je faire correctement mon travail si mon esprit était pollué par des images de Gibbs dans des positions impossibles ? Gagné. Gibbs se trémoussait derrière mes paupières closes, et un début de réaction fort inconvenante gonflait dans mon pantalon.
Reprend-toi, DiNozzo !
Il ne me semblait pas non plus que Gibbs (ne pense pas à ses fesses, arrête ça!) ait été plus attiré par moi, que moi par lui. J'étais devenu maître dans la capacité de lire les réactions faciales de mon supérieur hiérarchique, et je pouvais dire qu'il ne me regardait pas du tout comme il avait pu regarder Jenny Shepard, ou n'importe quelle autre rousse (bien que ce ne soit plus un critère si important ces derniers temps) au tempérament fougueux qui avait croisé la route du MCRT. Heureusement. J'aurais certainement détesté être sous ce regard à la fois concupiscent et agressif de celui qui se hait déjà de désirer une autre personne que celle qu'il a perdu.
Je préférais définitivement le regard qu'il portait sur moi ces derniers temps. Il était sans doute plus doux, en tout cas moins belliqueux, comme si chaque relation sentimentale devait être un combat, contre l'autre et contre soi. Évidemment, en se battant sur deux fronts à la fois, il ne pouvait y avoir de victoire. Il y avait quelque chose de plus prosaïque quand Gibbs posait ses yeux sur moi, une sorte d'acceptation évidente, de celui qui a fini de se battre contre lui-même. A contrario, j'en étais toujours au stade du conflit intérieur. La culpabilité que je ressentais vis-à-vis du départ de Ziva, et du choix que Gibbs avait été forcé de faire ne m'aidait pas à apprécier pleinement ce qui se jouait entre lui et moi. D'autant que la mission de secours dans laquelle nous nous jetions à corps perdus était dangereuse et rien ne garantissait que nous en revenions tous vivants.
Je n'avais pas envie d'être de ceux qui embrassait une mort possible en criant YOLO, et en consumant le plus vite possible la flammèche des sentiments naissant qui tremblotait et qui aurait pu se transformer en belle flambée vigoureuse. Je ne voulais pas me transformer en un personnage cliché de film catastrophe.
Je décidai de me secouer et je me levai pour compulser le dossier qui mettait en commun les informations du SHIELD et du NCIS. Je voulais me familiariser avec les noms de personnes et de lieux. La barrière de la langue allait être un problème. Je ne parlais aucune des langues usitées dans la région de Gulmira et cela allait être un handicap sur le terrain. Je ne souhaitais pas être mis sur le banc de touche, mais je sentais que je n'allais pas être l'engrenage le plus utile de la machine cette fois-ci.
Le reste du voyage fut sans histoire. Nous plaisantâmes entre agents, tandis que nos deux superviseurs nous surveillaient du coin de l'œil. L'arrivée à Kandahar fut un peu plus mouvementée. Nous atterrîmes sur la base américaine, et fûmes accueilli par le Colonel Kurtz (John Kurtz, rien à voir avec le personnage joué par Marlon Brando à mon grand désespoir). Aussitôt, il nous dirigea vers un baraquement qui serait notre base d'opération, où nous attendait déjà Amit Hadar. Les présentations faites, nous pûmes nous mettre au travail.
L'ambiance était tendue mais productive. Il était évident que Hadar n'avait pas chômé, et que le Mossad avait déjà des informateurs sur place. C'était difficile à admettre, vu l'inimitié que nous ressentions pour lui, mais Hadar était un allié précieux. Nous nous mîmes d'accord sur un plan d'action. Gulmira semblait être le centre névralgiques des opérations des Dix Anneaux, cependant, l'organisation terroriste était maline et n'avait pas fait de Gulmira un camp retranché. La guerre, les rivalités entre les nombreux chefs qui écartelaient la région, et, soyons honnête, la présence de l'armée américaine toujours imposante, avaient rendu la population très perméable à toutes sortes de promesses et elle semblait plutôt favorable aux Dix Anneaux. Les étrangers étaient regardés avec méfiance, et les américains n'étaient qu'à peine tolérés, et étaient plus souvent méprisés. Les russes en revanche, comme l'avait souligné l'Agent Coulson pendant son briefing dans l'avion, étaient bien mieux acceptés, non pas par la population, qui n'en avait que faire, mais par les différentes factions armées, car un russe dans cette région de l'Afghanistan avait forcément quelque chose à vendre, d'ordre militaire et à bas prix.
L'idée était de faire passer Gibbs et Romanoff pour des trafiquants d'armes russes. Allez savoir comment, le SHIELD possédait réellement des armes soviétiques, jamais sorties de leur papier d'emballage pour ainsi dire. Hadar prit tout le monde par surprise en commençant à parler très vite en russe, et je compris vite qu'il s'agissait d'un test pour vérifier que la couverture de trafic d'armes serait solide. Romanoff susurra une réponse qui le fit sourire, et Gibbs rétorqua quelque chose qui semblait être sinon une insulte, au moins une remarque peu flatteuse, et Hadar se déclara satisfait. La stratégie la plus intelligente était d'envoyer Gibbs et Romanoff sous couverture, sans plus aucun contact physique avec l'armée américaine, tandis que le reste d'entre nous s'occupait de toute la logistique et de l'approfondissement de l'enquête.
C'est donc le cœur serré que je regardai Gibbs quitter la base militaire le soir-même, sans moi pour surveiller ses arrières.
Pauvre Tony, séparé de Gibbs, et pauvre Tony (l'autre), séparé de sa technologie.
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