Bonjour à toutes et à tous !

Après les aventures dans la grotte, il est temps de souffler un peu, de prendre une douche et de panser ses plaies.

Bonne lecture !


De D.C. à Kandahar, et même un peu plus loin

Chapitre 17

Avec le recul, sans doute aurai-je dû demander des explications, à propos de l'opération de sauvetage, à propos des Dix Anneaux, à propos du putain de mur de glace sorti de nulle-part, mais je ne le fis pas. J'étais bien trop heureux d'être enfin évacué loin de la grotte, de ses tortures, de sa froidure, et des terroristes. D'abord, nous fûmes emmenés sur la base américaine la plus proche, non loin de Kandahar, où le médecin sur place manqua de s'évanouir en découvrant le réacteur ARC miniature dans ma poitrine. Il discuta longuement avec Yinsen à ce propos, puis décréta que c'était bien au-delà de son champ de compétence, et qu'il fallait me transporter d'urgence à Landstuhl, en Allemagne.

Personne ne me demanda si j'étais d'accord. Rhodey ne m'avait pas encore rejoint, occupé qu'il était certainement à faire la liaison entre le camp et l'état-major sur le sol américain. Yinsen, qui avait été mon médecin attitré dans la grotte avait depuis longtemps appris à ne plus me demander mon consentement en matière médicale, surtout s'il s'agissait de ma survie. Il me donna des nouvelles de Ziva, qui allait elle aussi devoir être évacuée vers Landstuhl. Ses fractures guérissaient mal, et si elle voulait retrouver sa forme d'antan, elle allait devoir être opérée.

« Et vous Yinsen ? demandai-je.

- Je vais rester ici, répondit-il. Mon devoir est ici.

- Et votre famille.

- Ma famille est morte depuis longtemps, Stark, me dit-il doucement avec un sourire triste. »

Il n'avait jamais imaginé sortir vivant de la grotte et cela me rendit très malheureux pour lui.

« Venez aux États-Unis, offris-je brusquement. Vous pourrez vous reconstruire là-bas. Je peux même vous embaucher, comme mon médecin officiel, ou comme consultant pour Stark Industries.

- Je vous l'ai dit, Stark, me coupa-t-il. Ma place est ici. Mon peuple est ici. C'est ici que je peux aider d'autres personnes, comme je vous ai aidé vous. »

Je savais reconnaître un au-revoir quand j'en entendais un. Les mots de remerciements se bousculèrent dans ma bouche, mais aucun ne sortit correctement. Je balbutiai juste des choses plus ou moins incompréhensibles.

« De rien, Stark. »

Après ça, je fus laissé seul à mes pensées tourbillonnantes et envahissantes, jusqu'à ce que le personnel médical s'affaire à nouveau autour de moi, pour me préparer cette fois à un vol bien plus long. L'aiguille de la perfusion me démangeait, et je ne rêvais que de prendre une longue, une très longue douche, mais il me fallait encore attendre. Enfin, mon brancard fut mis en branle par deux infirmiers militaires et je fus conduit dans un avion médical, beaucoup trop high-tech pour être militaire. J'y retrouvais Ziva, elle aussi sur un brancard, qui pestait dans un nombre trop important de langues pour que je comprenne une seule phrase correctement, et la quasi-totalité des personnes qui étaient venues à notre secours.

« Stark, salua Ziva finalement, quand elle eut fini de fusiller tout le monde du regard. Je suppose que nous allons pouvoir faire les présentations maintenant. »

Le Man in Black, Agent Phil Coulson, était le chef d'équipe, qui comprenait la femme fatale, Natasha Romanoff, et l'un des lambdas, Clint Barton. L'homme camouflage, désormais habillé en treillis et à la coupe militaire, était l'Agent Spécial Gibbs, et lui était le patron de Tonio DiNozzo, et du second lambda, Tim McGee.

« Agent fédéral, hein ? ricanai-je doucement. Ton père doit être si fier.

- De ce que j'en sais, il n'est pas au courant, répondit mon ami d'enfance. La dernière fois que nous nous sommes parlés, il refusait catégoriquement de payer pour mes études. Il doit être persuadé que j'ai fini sous un pont.

- Sans doute que dans sa vision des choses, Agent fédéral est encore pire. »

Tonio éclata de rire.

« DiNozzo, aboya le chef Gibbs. Assieds-toi. On va décoller. Tu as remis tes sangles ? »

Avec un « Tout d'suite Boss ! » qui avait tout du réflexe pavlovien, Tonio se rapprocha des sièges contre les murs de l'appareil, avant que celui-ci se mette à vibrer. On m'expliqua que nous nous trouvions dans la cale, qui pouvait servir d'infirmerie ou de laboratoire, au bon vouloir des occupants de l'avion. Il y avait un étage au dessus de nous où se trouvaient des quartiers quasiment résidentiels. Une équipe de six personnes pouvait vivre confortablement dans l'appareil, en fonction des missions et des assignations.

Le décollage se déroula dans le calme. L'appareil ne fit pas un énorme boucan, comme les cargos militaires pouvaient le faire, pourtant personne ne dit un mot jusqu'à ce que nous soyons stabilisés en l'air. Tous purent se détacher, mais Ziva et moi n'avions pas l'autorisation de nous lever de nos brancards, solidement amarrés au sol. Le deuxième lambda, McGee s'approcha de moi, l'air indécis.

« Je peux vous aider, Agent McGee ? demandai-je fatigué.

- Oui. Je veux dire, non. Enfin-

- McGee est un immense fan, l'interrompit Tonio. Genre, vraiment immense fan. »

L'Agent McGee, qui avait l'air plus jeune que Tonio, piqua un fard monstrueux.

« Je suis très admiratif de votre travail sur l'informatique neuromorphique et les avancées que vous avez permises dans le machine learning et RPA.

- Je te l'avais dit, ricana Tonio. Grand, grand fan. »

McGee finit par retrouver une contenance et rétorqua quelque chose qui finit en bataille verbale amicale avec Tonio. Sur son brancard, Ziva les regardait avec un sourire.

« Ils sont toujours comme ça ? demandai-je.

- Oui, fit-elle. De manière surprenante, cela m'avait manqué. »

Landstuhl, ou plutôt la base aérienne de Ramstein était un énorme complexe militarisé américain, en plein territoire allemand, à quelques kilomètres de la Belgique et de la France. Les médecins sur place firent exactement la même tête que celui de Kandahar, ce qui était hilarant, de mon point de vue. Les milliers de tests qu'ils me firent passer furent moins marrants, cela dit. Après des heures écoulées sous différentes loupes et microscopes, j'eus enfin le droit de prendre une douche. D'abord horrifié par le réacteur ARC, ils avaient fini par conclure que je ne courrais pas de danger immédiat, et que je pouvais donc me laver à grandes eaux, et avec du savon, du vrai savon, qui sentait le propre et tout.

Alors que j'en avais tellement envie, cette familiarité perdue avec le contact de l'eau me fit d'abord profondément angoisser. Il me fallut un effort conscient et particulièrement dur pour mettre ma main sous le jet chaud. La vapeur envahissait la petite salle de bain typique des hôpitaux, et je n'arrivais pas à avancer plus que la main sans que mon souffle ne se coupe dans ma poitrine et que l'impression de me noyer ne m'étourdisse les sens.

Soudain, une montée de courage m'inonda et je m'élançai dans la douche. Je refermai précipitamment la porte derrière moi et y collai mon front, le souffle court. Le jet frappait pile entre mes omoplates et l'eau ruisselait sur mon dos, sans encore toucher mon torse et mon ventre. Je tremblais de tout mon traumatisme. Progressivement, toujours collé à la porte de la douche, je me tournai pour faire face à toute cette eau chaude, absolument pas réconfortante, tout du moins pas pendant cette première douche. Je parvins néanmoins à me laver les cheveux et le visage, rapidement, puis, quand l'eau qui s'écoulait par la bonde fut complètement claire, et non plus tintée de sable, de poussières et de plusieurs semaines de crasse, je coupai les robinets et pu reprendre mon souffle.

J'avais pris une douche. C'était tout ce qu'il y avait à savoir.

Avant de pouvoir sortir de ma chambre d'hôpital, et de vagabonder comme je l'entendais, j'eus le droit à une séance de débriefing en bonne et due forme, menée par l'Agent Coulson. Le Man in Black ne semblait pas réellement intéressé, d'un point de vue professionnel, à nos conditions de détention, mais revenait régulièrement sur le fonctionnement des Dix Anneaux, et en particulier ce que Raza disait, faisait, comment il respirait, bordel, même si je l'avais su, ce qu'il mangeait.

Honnêtement, je n'étais pas d'un grand secours pour le SHIELD. Je ne connaissais pas les langues dans lesquelles les terroristes parlaient, et avant d'y avoir été confronté, les Dix Anneaux était pour moi une organisation dont le nom me disait quelque chose et dont la menace ne semblait pas réelle (au contraire d'Al Qaeda, qui elle était bien connue et très menaçante).

Je finis par envoyer l'Agent C bouler, frustré de ne pas pouvoir répondre à ses questions, et je sortis dans les couloirs de l'hôpital allemand. Rapidement, je tombai sur une salle d'attente où je retrouvai le reste de l'équipe de secours. J'étais bien conscient d'être en tenue d'hôpital, heureusement, je portais un pantalon en papier et un t-shirt similaire, et pas une blouse ouverte à l'arrière. D'ailleurs, j'attendais qu'on trouvât de quoi m'habiller, j'avais donné comme consigne qu'on incinère les vêtements qui m'avait servi pendant toute ma détention.

Je compris vite que notre retour aux USA allait prendre quelques jours. Ziva n'allait pas être transportable avant au moins 24h après son opération, et des tractations politiques avaient lieu en sous-main pour l'autoriser à revenir aux États-Unis. Incapable d'aider en quoique ce soit, je m'assis donc avec l'équipe du NCIS et l'équipe du SHIELD, à côté de Tonio qui était agité de gestes nerveux.

« Détends-toi, DiNozzo, lui intima son chef. On l'a retrouvée, elle va bien. »

Tonio n'avait pas tellement changé en 10 ans, et évidemment, il échoua misérablement à stopper ses agitations multiples.

« Raconte-moi, fit-je pour lui changer l'esprit. La dernière fois qu'on s'est parlé, tu venais de faire une croix sur ta carrière de basketteur pro, et l'avenir ne te semblait pas particulièrement brillant.

- Oh. Ouais. J'ai passé un sacré bout de temps en rééducation. Heureusement, le contrat semi-pro avec l'Université couvrait les frais médicaux, mais après ça, le contrat est devenu caduc et j'ai perdu ma bourse. Les camarades de fraternité ne m'ont pas laissé tomber, cela dit, et m'ont fait crédit du loyer jusqu'à ce que j'arrive à trouver un boulot.

- Pourquoi t'es pas venu me voir ? me scandalisai-je. Je t'aurais aidé ! »

Je savais évidemment que la fierté masculine faisait faire des choix plus que discutables. J'en suis la preuve vivante.

« J'ai fini par trouver un oncle maternel qui a accepté de me prêter de l'argent, de quoi finir mon diplôme.

- Tu as demandé de l'aide à un Paddington ? m'étonnai-je un peu plus. Lequel ?

- Clive. Tu sais, il venait souvent l'été, avec un cousin. Ensuite, j'ai hésité un moment entre pompier et flic, et j'ai choisi flic. J'avais sans doute une image un peu romantique du métier.

- Les films de flics, c'est pas la réalité, tu sais, le taquinai-je.

- Et pourtant ! s'enthousiasma-t-il. J'ai gravi les échelons, et je me suis spécialisé dans les missions longues sous couvertures, notamment auprès de la mafia.

- Très Les Infiltrés, sifflai-je d'admiration amusée.

- Puis, à Philly, j'ai mis une droite à Gibbs qui m'a embauché.

- Logique. »

Nous rîmes comme les deux ados que nous avions un jour été.

« Et toi ? demanda Tonio après un moment. Pas facile d'ignorer ta carrière, ni aucun de tes exploits, mais les tabloïds ont tendance à être un poil partiaux.

- Jusque-là, j'étais la vitrine de SI. C'est Obadiah qui dirige la boîte pour de vrai. Tu te souviens d'Obi ? Il est toujours aussi chauve, mais il a la barbe grise maintenant. Mais après ce que j'ai vu là-bas, dans la grotte… Bordel ! Ils avaient tellement d'armes de Stark Industries qu'ils auraient pu monter un magasin spécialisé sur place ! Des armes toutes neuves ! Pas des restes abandonnés par nos forces, ou quoi, des trucs encore sous blister ! Je me dis que je devrais liquider Stark Industries. »

J'avais encore pensé tout haut, et évidemment ma déclaration choqua autour de moi. C'était certainement un avant goût des réactions que j'allais déclencher en rentrant aux États-Unis.

« Tu n'as pas peur que cela ait un impact sur nos forces armées, risqua Tonio après avoir jeté un œil vers son patron.

- Mes armes tuent des civils innocents. Des terroristes les portent, putain, ils les achètent pour ce que j'en sais ! »

Je me tus brusquement. Je n'allais pas avoir une crise existentielle en public, et encore moins devant des inconnus, tous sauveurs qu'ils étaient.

L'Agente Romanoff me sauva la mise, en faisant irruption dans la salle d'attente et en nous informant très professionnellement (pour ne pas dire froidement) que nous allions être logés à l'hôtel dans la ville, en attendant que Ziva soit transportable.

« Mais sentez-vous libre d'appeler votre jet, Monsieur Stark, ajouta-t-elle.

- Vous rigolez ? m'insurgeai-je. Il est hors de question que je parte sans Ziva. Nous étions ensemble dans cette grotte, c'est ensemble que nous rentrerons aux États-Unis ! »

Tonio posa une main sur mon épaule pour me calmer, et je crus voir pour la première fois une lueur d'appréciation dans le regard de son patron.


Tony, Tony, tu parles trop vite ! Pendant ce temps, Gibbs ne dit rien mais n'en pense pas moins.

Avez-vous des théories sur ce que ce mur de glace pourrait bien être ?

A bientôt !