Pairing principal : Stiles Stilinski et Derek Hale.
Disclaimer : Aucun des personnages mentionnés ici ne m'appartient, tout revient à Jeff Davis.
Crédit image : Benaya-Trash.
Résumé : [UA] Stiles est un garçon différent. Il le sait depuis longtemps. Les gens comme lui sont traqués, pourchassés et parqués dans des Zones pour jeunes aux pouvoirs particuliers. Alors qu'il tente de fuir pour échapper à ses bourreaux, il trouve refuge dans un camp de rebelles. Persuadé qu'il ne peut désormais faire confiance à personne, Stiles n'a qu'une idée : cacher son secret à tout prix.
Note :
Bonjour !
Ça me fait très plaisir de vous retrouver pour une toute nouvelle histoire ! Je dois quand même vous prévenir, ce monstre – car oui, avec une taille pareille, on peut dire qu'il s'agit d'un monstre – représente à lui tout seul 40 chapitres.
Oui.
40. Chapitres.
Enfin, 39 chapitres et un épilogue pour être exacte :D
Pour être honnête, c'est un projet qui me tient particulièrement à cœur. Cela fait quelques années déjà que j'ai l'idée d'une fic de ce type et malgré les fandoms auprès desquels je me suis intéressée, je ne m'étais jamais sentie capable de me lancer dans un travail aussi long.
Il s'agit d'un univers alternatif et il y aura donc quelques termes particuliers. J'ai tenté de les expliciter le plus possible mais n'hésitez pas à me prévenir si vous vous sentez perdus, je serais très heureuse de vous apporter d'autres explications.
Je tiens à prévenir d'avance celles/ceux qui ne sont pas très fans des O.C : il y en aura quelques-uns.
Voilà, j'espère ne pas vous avoir fait trop peur et prie sincèrement pour que cette histoire vous plaise. En tout cas, j'ai essayé d'y mettre toute mon énergie !
Comme d'habitude, la publication d'un nouveau chapitre se fera chaque semaine.
Bonne lecture :)
Phase 1 - Caché
Chapitre 1
La tête de Stiles dodelinait doucement, penchée en avant alors que le vieux wagon s'échauffait pour accélérer la cadence. Le crissement des roues sur les rails ne le dérangeait plus, comme une sorte de berceuse métallique et, les yeux fermés, il respirait profondément. La portière du long véhicule était rouillée et enfoncée dans un coin, l'empêchant d'être totalement close. La lumière du jour filtrait ainsi à travers la petite fente, pas suffisamment large pour amoindrir la chaleur étouffante dans laquelle il baignait. Autour de lui, des vieilles caisses en bois et des chariots en fer s'amoncelaient, menaçant de l'écraser au moindre virage trop serré pris par le train.
Installé dans un coin, cela faisait maintenant plus de quatre heures que Stiles était monté dans le wagon, son vieux sac en toile de jute accroché au bras. C'était tout ce qu'il lui restait. Tout ce qu'il possédait tenait dans une sacoche pas plus grosse qu'une taie d'oreiller. Il n'avait pas dormi depuis deux jours, ayant dû changer de localisation très vite en apprenant qu'un train de marchandises s'apprêtait à s'arrêter pour remplir le moteur en carburant. Ce n'était pas la première fois qu'il montait illégalement à l'arrière d'un engin dans l'espoir d'avancer toujours plus loin à l'intérieur du pays.
Les derniers wagons étaient bien souvent moins chargés et il était facile de s'installer en s'asseyant entre deux caisses. Malgré les conséquences que risquaient certains à aider des jeunes comme lui à passer les frontières, beaucoup de cheminots n'hésitaient pas à le faire contre une somme d'argent. Après tout, cette foutue guerre avait appauvri plus d'un ménage.
Observant ses baskets noires de boue et de poussière, Stiles songea à la dernière fois qu'il avait pu mettre la main sur des vêtements propres, constatant que cela faisait déjà plusieurs jours. Passant une main sur son front moite, il s'autorisa une minute durant laquelle il se laissa aller, durant laquelle il eut le droit de craquer, de se demander pourquoi tout ça lui était arrivé.
Cette minute lui permit de redevenir ce gamin chétif, sans aucune responsabilité, qui adorait courir avec ses amis dans la rue derrière une balle de baseball. Les yeux toujours clos, il imagina sentir l'odeur de la cuisine de ses parents flottant dans l'air de la maison. Il souhaitait par-dessus tout revoir le visage de ceux qu'il aimait, les voir lui sourire et lui souffler que désormais tout irait bien. Qu'il n'était plus seul.
Mais ce n'était pas réel.
Ces personnes ne lui souriraient plus. Il ne rentrerait plus jamais chez lui.
Il pensa alors à quel point il aurait aimé que les choses soient différentes. A quel point il aurait aimé être une personne différente. Si ça avait été le cas, il ne serait pas assis dans un wagon en essayant de ne pas être vu. Il n'aurait pas perdu tout ce qu'il avait en l'espace d'une nuit. Sa famille serait encore en vie et Stiles… Stiles serait encore l'enfant dont il lui arrivait de rêver parfois.
Une poigne forte l'agrippa par le haut du bras et Stiles s'éveilla en sursaut, les yeux alertes, s'emparant à son tour de la main étrangère qui le tenait toujours par l'épaule. Stiles et l'homme se regardèrent longuement, comme si ce dernier ne s'attendait pas à une telle réaction. Il contemplait Stiles comme une sorte de petit animal, son autre main levée en l'air en signe d'apaisement. Stiles devait probablement ressembler à une personne démente, son cœur battant la chamade alors que son cerveau peinait à abandonner son mode alerte.
Mais c'était devenu une seconde nature pour Stiles, de s'attendre à être attaqué à n'importe quel moment, le danger le surplombant à chaque pas. Et il ne faisait confiance à personne.
Acceptant enfin de libérer son passeur, Stiles lâcha son poignet et se leva, ne supportant pas d'être dans une position où il serait affaibli face à son voisin. Ses mains étaient fermées en poing contre ses flancs. Sa minute était terminée et Stiles avait retrouvé sa figure sévère et rigide, ne quittant pas le cheminot des yeux.
« On est arrivés, petit. » lui dit-il, d'une voix éraillée par le temps.
Observant son sac de fortune, Stiles se pencha pour le récupérer sur le sol, ignorant la douleur de ses membres engourdis. Sortant quelques billets froissés de la poche arrière de son pantalon, il les tendit vers le passeur. Celui-ci, après l'avoir regardé quelques secondes, secoua alors la tête, sa moustache grise frissonnant alors qu'il bougeait les lèvres.
« Pas de ça. » déclina-t-il. « Tu seras sûrement mort d'ici ce soir. Crois-moi, je ne t'ai pas rendu service. »
Stiles pensait plutôt le contraire. Ça faisait des semaines qu'il désirait arriver à Dante Squad. Il aurait été inutile d'envisager un passage par les routes. Il n'aurait pas fait un mètre que des dizaines de Manteaux Noirs se seraient jetés sur lui pour vérifier son identité. Il aurait fini dans une prison fédérale avant la fin de la journée et aurait été embarqué en direction d'une Zone dès le lendemain matin.
Haussant les épaules comme si cela lui importait peu, il replaça les billets au même endroit qu'il les avait trouvés, ne prenant pas la peine d'être plus délicat.
Suivant l'homme jusqu'à l'immense portière, Stiles l'observa l'ouvrir avec fracas, le son de l'extérieur venant soudainement les entourer. L'adolescent s'avança encore, jusqu'à se trouver au bord de la porte du wagon, s'y accrochant fermement. Il patienta, sentant le train ralentir sous ses pieds, connaissant désormais l'exact moment où il était le moins dangereux pour lui de sauter. Il avait dû apprendre. Les trains ne s'arrêtaient jamais. Pas avant d'avoir atteint leur destination finale. Encore quelques secondes et il serait temps pour lui de faire le grand saut. Le paysage défilait pourtant encore à vive allure et Stiles souffla de soulagement en constatant qu'il atterrirait dans l'herbe.
Il ne pensa pas à tous ceux qui, comme lui, avaient tenté de s'enfuir et s'étaient fracassés le crâne, leurs cadavres pourrissant parfois plusieurs jours avant qu'ils ne soient ramassés et jetés dans les fosses communes.
Prenant son élan, Stiles entendit son passeur lui souffler une dernière phrase :
« Fais attention à toi, gamin. »
Le remerciant une dernière fois d'un hochement de tête, Stiles agrippa la lanière de son sac plus fortement et sauta dans le vide.
O
Comme il s'y était attendu, la ville de Dante Squad était presque vide, alors qu'il longeait les rues d'un ancien quartier pavillonnaire. La capuche de son sweatshirt remontée sur la tête, Stiles marchait la tête baissée mais d'un pas lent et régulier. Même si l'endroit était désert, il ne désirait pas attirer l'attention d'un éventuel résidant en courant à en perdre haleine. Il détestait être à découvert, à la merci de n'importe qui présent dans les environs et préférait nettement être placé en hauteur, ayant un regard sur tout et tout le monde. Mais il n'avait pas le choix. Se précipiter en direction d'un abri serait signer son arrêt de mort, tant il s'agissait d'un comportement suspect. Il avait alors appris malgré la peur à paraître le plus serein possible, se déplaçant, si ce n'était avec assurance, avec calme comme l'aurait fait un individu ordinaire.
Son pied gauche le lançait depuis qu'il avait sauté du train, ne s'étant pas très bien réceptionné mais il ignora la douleur et continua à marcher. Il ne s'aventurait jamais dans le centre-ville, veillant à toujours rester dans les interstices de la ville, là où les gens comme lui étaient plus en sécurité, si jamais un tel endroit existait. Les mains fourrées dans ses poches, Stiles repéra quelques âmes mais aucune ne sembla faire attention à lui, continuant à se déplacer comme s'il n'existait pas mais il resta sur ses gardes. Le ciel gris n'empêchait pas une chaleur lourde de s'étendre dans l'espace et Stiles commençait à manquer d'air, l'environnement pesant et sa peur panique de se faire prendre menaçant de le paralyser.
Un grognement soudain et des voix, proches de lui, le firent bondir et il se précipita dans une vieille allée, s'appuyant contre le mur avant de jeter un coup d'œil hésitant. Deux femmes dont l'une conduisant une poussette, discutaient gentiment, leurs visages dénués de toute appréhension. Le grognement que Stiles avait entendu venait en réalité d'un chien, tenu en laisse par une des femmes. Ce dernier s'était d'ailleurs arrêté, ayant senti sa présence, caché dans la petite ruelle. Il fixait Stiles de ses yeux ronds et humides. Il resta ainsi un moment, sans bouger, la queue basse et les oreilles dressées. Puis, sans autre cérémonie, il tourna le museau, attiré par autre chose et Stiles reprit une respiration normale.
Il s'apprêtait à rebrousser chemin lorsque l'une des deux jeunes femmes, celle qui était de plus petite taille, prit la parole.
« Je suis tellement rassurée que nous en soyons débarrassées. Ernie voulait déménager mais j'ai réussi à le convaincre de rester. » Elle tenait fermement le guidon de la poussette, comme si elle n'était pas certaine que tout soit rentré dans l'ordre.
« Tu te rends compte, » enchaîna l'autre, l'air plus revêche, « j'ai entendu dire que le petit Jimmy Bellard en était un aussi. »
« Jimmy ? » La première répéta, effarée. « Mais il était si gentil. Je l'ai laissé tondre la pelouse de mon jardin. Il avait l'air tout à fait normal. »
L'autre renifla, les bras croisés contre sa poitrine.
« Tu devrais le savoir, ces gens-là sont doués pour mentir et manipuler tous ceux qu'ils pourraient croiser. C'est un soulagement qu'ils aient été mis hors d'état de nuire. »
Stiles s'était figé à l'entente de leurs mots, conscient de ce qu'elles venaient de révéler. Il savait parfaitement ce qu'il était arrivé à ce Jimmy et des nausées vinrent lui secouer le ventre. Elles continuèrent à discuter, marchant tranquillement et il les regarda s'éloigner jusqu'à ce qu'elles disparaissent de l'autre côté de la rue.
Ces femmes, en apparence, n'avaient rien de dangereux. Plutôt banales, sympathiques même. Et pourtant, un seul coup de fil de leur part aux autorités et Stiles aurait pu dire adieu à sa liberté. Il resta quelques minutes de plus dans l'allée, même lorsqu'il n'entendit plus le bruit de leurs pas. Puis, il se remit en route, jetant un dernier coup d'œil autour de lui afin de s'assurer qu'il était seul. Sa priorité était de trouver de quoi se remplir l'estomac et surtout, repérer un lieu où passer la nuit.
Il marcha, longtemps, sans jamais s'arrêter, dépassant les belles maisons et les barrières blanches, avant de s'enfoncer dans des quartiers plus éloignés et moins bien tenus. Il continua à marcher même quand ses jambes ne semblèrent plus pouvoir le tenir, même lorsqu'il eut l'impression que ses pieds étaient en sang.
Il ne s'arrêta pas non plus lorsqu'une pluie fine et continue, s'échoua sur ses habits, le trempant jusqu'aux os. Alors qu'il tremblait de tout son long, il perçut enfin ce qu'il cherchait.
Le paysage n'avait plus rien à voir avec les quartiers qu'il venait de traverser. La plupart des maisons étaient en mauvais état. Les jardins et la végétation étaient, pour la plupart, asséchés par le manque d'entretien. Les volets, rendus noirs par la poussière et la crasse. Les tuiles anciennement rouges étaient devenues vertes par la mousse grignotant les toitures. Beaucoup de familles s'étaient enfuies après la guerre, laissant leurs maisons à l'abandon, n'ayant pas vraiment le temps de rassembler leurs affaires. Il porta son choix sur l'une d'entre elles, un peu plus à l'écart que les autres et passa par la porte arrière.
Choisissant de déroger à la règle qu'il s'était pourtant promis de respecter, Stiles posa sa main sur la serrure et se concentra. Une teinte verdâtre entoura sa paume quelques secondes, ses yeux se colorant également de la même lueur surnaturelle. Puis, il entendit un cliquetis, signe que la porte était désormais ouverte.
Il se faufila à l'intérieur de la maison, prenant soin de refermer derrière lui. Profitant du fait qu'il faisait encore jour, il fit le tour des pièces, ramassant ce qui pouvait lui être utile. Le salon n'était pas très grand, deux fauteuils installés au centre et un petit écran de télévision cassé. L'étape la plus importante fut sans doute celle de la cuisine et Stiles s'empressa de fouiller les placards à la recherche de denrées non périssables, n'ayant pas mangé depuis la veille. Ses recherches furent couronnées de succès lorsque Stiles mit la main sur deux boîtes de conserve de fruits au sirop.
Après en avoir avalé une, il choisit de garder la seconde pour plus tard et continua son tour de maison. Arrivé à l'étage, il découvrit trois chambres d'enfants qui, d'après les décorations visibles sur les murs, devaient être relativement jeunes. Il n'y resta pas très longtemps par peur de raviver de mauvais souvenirs. Lorsqu'il pénétra dans la suite parentale, Stiles manqua se prendre les pieds dans un sac laissé sur le sol. Intrigué, il s'en empara avant de s'asseoir au pied du lit. Il y découvrit quelques objets divers et une pochette épaisse qu'il déplia.
A l'intérieur se trouvait des papiers d'identité, ceux de deux adultes, George et Lilian Tobbler et de trois enfants. Comme Stiles se l'était imaginé, cette famille avait probablement tenté de fuir mais la présence des papiers qui devaient leur permettre de quitter l'état lui prouvait qu'ils n'y étaient finalement pas parvenus.
Stiles resta un moment dans la même position, les passeports toujours en main, n'ayant pas la force de verser une larme pour les membres de ce foyer probablement disparus. Il était entré dans tellement de maisons, avait mis le nez sur tellement de photos de famille qu'il s'était forgé une sorte de carapace, pour s'empêcher de hurler son sentiment d'injustice. Rangeant le reste dans le sac, il le plaça sous le lit et se remit sur ses pieds. Rangeant les noms dans un coin de sa tête, il tenta de rester détaché.
Une soudaine pensée lui vint à l'esprit lorsqu'il passa près de la table de nuit. Tentant d'ouvrir le tiroir, il s'aperçut que ce dernier était fermé à clé. Décidant à nouveau d'utiliser ce qu'il s'était pourtant interdit, il n'eut à nouveau aucun mal à débloquer la petite trappe. Priant à voix basse, il s'enquit de regarder l'intérieur du tiroir, espérant trouver ce dont il rêvait.
« Allez, George, ne me déçois pas. » souffla-t-il dans sa barbe, sa main farfouillant derrière des papiers déchirés et des stylos usés.
Un énorme sourire vint orner ses lèvres lorsqu'il sentit une forme particulière se dessiner sous ses doigts. Ce n'était pas la première fois qu'il réussissait à mettre la main sur un garde-manger secret, conservé à l'abri des regards. Attrapant la barre de chocolat, il retira l'emballage et porta la friandise près de ses narines. Il inspira lentement, ne se souvenant pas de la dernière fois où il avait mangé quelque chose de chocolaté.
« Je savais que je pouvais compter sur toi, George. »
Stiles coupa un bout de la barre et garda le reste dans son sac. Ouvrant le dressing, il récupéra des vêtements propres et accéda à la salle de bain. Il retira sa veste à capuche et la laissa tomber sur le sol carrelé. Il s'arrêta devant le miroir et prit le temps de s'observer. Son visage n'avait rien d'attrayant, creux et pâle, ses grains de beauté ressortant encore plus que d'habitude. Le t-shirt désormais trempé qu'il portait sur le dos n'avait rien de flatteur, sale et large, laissant apercevoir son cou et le haut de sa clavicule. Il était maigre et bien qu'il n'eût jamais un corps d'athlète, se voir aussi efflanqué, aussi osseux le dégoûta. Se détournant, il pénétra dans la douche.
Il n'y avait évidemment pas d'eau chaude mais Stiles s'y était habitué depuis longtemps. Il profita de l'odeur du gel douche, frotta son corps à l'en rendre rouge et sensible et s'essuya à l'aide d'une serviette épaisse qu'il trouva sous le lavabo. Il s'habilla, enfila la chemise trop grande lui arrivant sur le haut des cuisses, un jean dont il dut retrousser l'ourlet et une veste en laine.
Lorsqu'il retourna dans le salon, la journée touchait à sa fin et Stiles s'installa sur le canapé, posant sa tête sur l'accoudoir. Bien entendu, il lui était impossible d'allumer la lumière, bien qu'il ait aperçu la présence d'un générateur dans le jardin. C'était trop dangereux et même si le quartier était désert, il n'était pas à l'abri d'être remarqué par un passant curieux. Il resta alors dans le noir, allongé sur le dos, observant le plafond.
La fatigue s'abattit sur lui comme une chappe de plomb. Stiles n'avait pas choisi ce mode de vie. Il n'avait pas choisi de passer son temps à fuir, allant de ville en ville, de gare en gare, à la recherche d'un refuge. Il n'avait pas choisi de vivre seul, toujours sur ses gardes. Mais il n'avait pas eu le choix. Et il n'avait pas été le seul.
Depuis toujours, les différentes créatures surnaturelles avaient appris à vivre ensemble, dans un même monde, malgré les différences de chacune des espèces. Aucune n'était à l'abri de querelles ou de conflits mais ce n'était pas nouveau. Le jour où tout avait basculé, Stiles ne s'en souvenait plus. Il avait fallu des années avant qu'il n'en apprenne la raison et surtout, qu'il ne comprenne ce que cela voulait dire.
Si loups-garous, banshee, druides ou vampires étaient parvenus à s'entendre, un groupe d'humains jaloux et apeurés face aux pouvoirs que les autres possédaient, décida de créer un parti mettant en avant leurs intérêts. Ces derniers se baptisèrent les Natifs. Ce groupe remporta rapidement du succès, d'autant plus qu'une série d'agressions de la part de créatures surnaturelles furent reportés, augmentant ainsi la méfiance des humains à leurs égards. Afin de garantir une égalité entre tous, le gouvernement décida d'obliger tous les êtres non humains à révéler leur identité auprès de leurs municipalités.
Puis, tout alla très vite. Les humains, ragaillardis par leur pouvoir politique, commencèrent à ratifier d'autres lois. Les créatures surnaturelles furent bientôt considérées comme des êtres inférieurs et seuls les humains, non contrôlés par des pouvoirs jugés dangereux, furent considérés aptes à prendre la tête du pays pour assurer un régime et une paix durables.
Mais la réalité était tout autre. Car si les Natifs n'avaient jamais vraiment caché leur méfiance envers ceux qui étaient différents d'eux, notamment les loups-garous qu'ils considéraient comme déviants, il y avait une espèce dont ils avaient particulièrement peur.
Les sorciers du monde étaient en effet divisés en deux catégories. Les Exposés, des personnes qui avaient développé un don dans un domaine particulier, étaient les plus répandus. Stiles en avait rencontré des centaines, certains étant capable de résister à des températures extrêmes, d'autres ayant la capacité de cicatriser des plaies et des blessures profondes. L'adolescent avait même vu une jeune fille traverser un mur en bêton une fois, sans aucune égratignure.
Mais l'autre catégorie était sans doute celle qui déclencha toutes ces tueries. Les Innés n'étaient pas des sorciers ordinaires. Reconnaissables par la couleur verte que prenait leurs iris lorsqu'ils faisaient usage de magie, la plupart d'entre eux étaient capables de maîtriser les éléments ainsi que la matière, rendant leurs pouvoirs presque illimités.
Or, cette capacité extraordinaire engendra très vite de l'envie et de la frayeur. Et, malheureusement, lorsque les hommes avaient peur, ils étaient alors capables de réaliser des actes abominables. Une guerre éclata alors, entre les Natifs, soutenus en particulier par certains chasseurs et les sorciers, jugés trop puissants. De nombreuses vies furent perdues, des deux côtés. En effet, si les Natifs étaient plus faibles, ils avaient réussi à construire des armes, composé du principal élément capable de blesser un Inné, de lui faire perdre ses pouvoirs : la Linaria, une plante aussi dangereuse pour un Inné que l'était l'Aconit pour un loup-garou.
Presque tous les Innés adultes furent exécutés durant cette affreuse période. Les années qui suivirent furent moins houleuses, malgré le fait qu'un véritable génocide venait d'avoir lieu. La guerre s'acheva et les Natifs s'emparèrent durablement du pouvoir, choisissant alors comme président le fils du créateur des Natifs, Atticus Caine.
Mais bientôt, de nouveaux enfants virent le jour et parmi eux, de nouveaux Innés. Afin de s'assurer qu'une nouvelle guerre ne recommence pas, le président fit voter une nouvelle et dernière loi. Tous les enfants sorciers devaient être raflés, enregistrés, puis dispersés dans des camps pour leur permettre de contrôler leurs pouvoirs. Ils seraient ensuite renvoyés auprès de leurs familles une fois qu'ils seraient en mesure de se contrôler.
Aucun enfant raflé n'était jamais revenu chez lui.
Plusieurs parents décidèrent de se rebeller, refusant d'être séparés et formèrent des groupes de résistance. Les parents de Stiles participèrent activement, prenant part à l'organisation de brigades chargées d'aller délivrer les enfants de ces Zones. Il s'agissait de missions bien souvent dangereuses et risquées mais l'amour d'un parent était bien souvent plus fort que tout.
Du moins, c'était ce qu'il avait entendu répéter autour de lui.
Le canapé sur lequel il était allongé était plutôt confortable, s'il le comparait avec ce qu'il avait connu jusque-là. Stiles se refusait toujours à dormir dans les chambres car il avait l'impression d'outrepasser ses droits. Etrange, quand on savait qu'il n'hésitait pas à voler la nourriture et les vêtements de personnes inconnues. Mais ce n'était pas comme si elles en avaient besoin. Calant son dos contre le dossier, Stiles plaça ses deux mains sous son visage et ferma les yeux. Le dernier souvenir qu'il eut en mémoire fut une voix féminine lui chuchotant quelques mots à l'oreille avant qu'il ne s'endorme.
Le lendemain, il se réveilla avec un sentiment d'être relativement reposé, ses muscles moins tendus qu'à l'accoutumée. Il était tôt et il préféra conserver ses rations alimentaires pour la fin d'après-midi, au moment où son estomac commencerait réellement à crier famine. Ce n'était pas qu'il s'était habitué à avoir faim, juste qu'il était plus simple pour lui de tenter d'oublier qu'il n'avait pas grand-chose dans le ventre.
Pour s'occuper l'esprit, il continua à jouer les aventuriers dans la maison. Mis à part son goût pour les friandises, George avait aussi une magnifique collection de CD vinyles. Stiles s'amusa avec en tentant de deviner les chanteurs, juste à l'aide des photographies de couverture, se sentant fier lorsqu'il parvint à en reconnaître plus de la moitié. Ce n'était pas vraiment très difficile mais il s'en félicita, changeant les pochettes chaque fois qu'il devina un groupe, des Bee Gees aux Rolling Stones, en passant par The Platters. Un peu plus tard, il trouva un jeu de cartes et il essaya de construire un château, lorsque le jeu de batailles devint bien trop ennuyant à réaliser seul. Il ne parvint jamais à placer la dernière carte au sommet mais recommença plusieurs fois, sans se fatiguer ou perdre patience.
En repassant par le salon, Stiles fouilla les tiroirs à la recherche d'une éventuelle lampe torche, quand son regard fut attiré par quelque chose. N'osant y croire, il récupéra l'objet avec lenteur avant de le placer devant son visage, une once d'espoir l'envahissant soudainement. Il porta l'appareil jusqu'au canapé où il s'installa, la radio sur les genoux. Il y avait de cela quelques années, il avait entendu parler de stations de radio pirates, émettant depuis des territoires non contrôlés par l'Etat. L'une d'entre elles était tenue par un groupe de rebelles, installé dans le nord du pays, non loin de la frontière avec le Canada. C'était là que Stiles souhaitait se rendre. Mais il ne pouvait pas. Pas encore.
Car parmi toutes les horreurs que cette fichue guerre avait engendrées, la pire de toute avait été de priver Stiles de quelque chose sans quoi il ne pouvait vivre. Il avait été naïf et négligent. Et n'avait désormais plus qu'un seul but. Retrouver ce qu'il avait perdu, en parcourant le pays d'état en état, quitte à y perdre la vie.
Remarquant le petit boîtier à l'arrière de la radio, Stiles sauta sur ses pieds, se souvenant avoir aperçu un paquet de piles quelque part. Lorsqu'il remit la main dessus, il installa les petits cylindres, priant pour que cela fonctionne.
Tournant les boutons de la machine sur la bande de fréquence qu'il connaissait par cœur, il tenta de capter un son, mais il n'entendit que le crépitement de la radio. Il savait que ces stations ne diffusaient pas à chaque heure, utilisant des horaires et des gammes différents pour ne pas se faire prendre par les autorités. Mais Stiles s'entêta, l'appareil collé à l'oreille. Les minutes s'écoulèrent et il n'obtint aucun résultat. Découragé, il s'appuya au fond du canapé et posa à nouveau la radio sur ses genoux.
Il continuait à changer de stations, un peu au hasard, ne remarquant pas qu'il s'était arrêté sur une chanson qu'il connaissait. Ce ne fut que lorsque le refrain s'enchaîna que Stiles se concentra sur l'appareil, les sourcils froncés. Il connaissait cette musique, pour l'avoir entendu passer une vingtaine de fois dans la cuisine de ses parents, tandis que sa mère se déhanchait sur le rythme des notes. Il la voyait clairement, debout devant l'évier, une chemise blanche et les manches relevées sur ses avant-bras alors qu'elle dansait sur Chubby Checker. Avec un énorme sourire, elle tendit les bras vers Stiles qui n'était alors pas plus grand que la table de la cuisine. Avec ses ballerines aux pieds, elle paraissait ne plus toucher le sol tandis que Stiles tentait de caler ses pas aux siens.
La langue dépassant du coin de ses lèvres, il était concentré sur sa tâche mais elle le fit tournoyer dans tous les sens, le poussant à se laisser porter par la musique. Il rit à en perdre haleine, ce jour-là, attrapant la main de son père quand celui-ci vint voir ce qui se passait dans la pièce. Ils continuèrent à danser tous les trois, la lumière du soleil traversant la fenêtre et venant s'échouer sur leurs visages radieux.
Doucement, Stiles vint augmenter légèrement le son de la radio. Sa tête commença à remuer de haut en bas, puis de droite à gauche, sa main tapant le rythme contre le haut de sa cuisse. Il murmurait les paroles, les yeux clos, se mouvant de plus en plus, emporté par une vague de fébrilité. Il ne parvint pas à s'arrêter, sans doute parce qu'il en avait besoin. Parce qu'il avait vu trop de choses horribles pour une vie entière et qu'il lui était nécessaire de lâcher prise, même pour un court instant. Déposant la radio sur la table basse, il se mit debout et tenta de répéter les mêmes pas que sa mère lui avait montrés, ayant probablement l'air d'un dégénéré. Attrapant le manche d'un balai qui se trouvait non loin, il fit semblant de l'utiliser comme micro et se transforma alors en chanteur de rock'n'roll de Caroline du Sud.
Il avait le tournis, l'ensemble de la pièce virevoltant autour de lui. C'était comme s'il était libre à nouveau, libre d'éprouver de la joie et de la candeur pour des choses aussi futiles que de chanter à tue-tête les paroles d'une vieille chanson. Il se laissa entraîner par les sons de la musique jusqu'à ce qu'il soit à bout de souffle et finisse par s'avachir d'un coup dans le fauteuil, son balai toujours en main. Le truc avec l'euphorie, c'était qu'elle s'évanouissait aussi vite qu'elle était arrivée, comparable à une drogue qui perdait déjà ses effets.
A l'heure du dîner, Stiles dévora un paquet d'amandes, la radio toujours allumée, ne se levant plus quand il percevait les notes d'une chanson qu'il connaissait.
Le lendemain fut une routine similaire. Stiles se leva, tenta de s'occuper l'esprit et les mains, mangea ce qu'il parvenait à trouver et s'allongea sur le canapé. Cette nuit, alors qu'il avait les mains posées sur sa poitrine, le sommeil ne parvenait pas à l'atteindre. Ses pensées étaient occupées par autre chose. Tournant la tête, il observa sa vieille sacoche posée sur le sol, près du buffet et se leva pour la récupérer. Il l'ouvrit et fouilla jusqu'à atteindre la poche intérieure. Il en sortit une affiche, pliée en huit, qu'il gardait constamment cachée, comme un bien précieux.
Il la déplia et la coucha lentement par terre, dévoilant des lieux, des visages et des morceaux de journaux qu'il avait soigneusement agencés et organisés. C'était son plan, dessiné sur un bout de papier.
Parce que si Stiles avait effectivement perdu quelque chose qui lui était cher, rien ni personne ne l'empêcherait de le retrouver, quoi qu'il lui en coûtât. Il était doué pour ça. Pour planifier, pour préparer, pour orchestrer. Il savait faire des plans, méthodiques et efficaces. Celui-là était peut-être plus difficile et presque suicidaire mais ça n'avait pas d'importance. Alors, progressivement, il s'était mis à noter les endroits dans lesquels il avait fait escale, traçant son périple à l'aide de feutres et de ficelles rouges. Il ajoutait des annotations chaque fois qu'un passeur l'avertissait d'une ville particulièrement contrôlée par les Manteaux Noirs. Il avait réalisé ce qu'il savait faire le mieux, s'abandonnant dans des recherches pour retourner à l'endroit exact où il l'avait perdu.
Il savait qu'il y arriverait. Tout simplement car il n'avait pas d'autre choix.
Rangeant l'affiche, il récupéra une feuille de papier dans la poche avant et vérifia peut-être pour la vingtième fois de la journée les informations qu'elle contenait. Le train qu'il devait prendre ne passait que dans trois jours. Il s'agissait d'une escapade un peu plus risquée que d'ordinaire. Il devrait cette fois passer en gare, laissant derrière lui l'idée de traverser illégalement. Les contrôles étaient beaucoup trop nombreux dans l'ouest du pays.
Il n'avait pas pour habitude de le faire mais cette nuit, il pria sa bonne étoile bien qu'elle n'ait jamais choisi d'écouter ses sollicitations jusque-là.
Trois jours plus tard, Stiles se tenait devant la gare, le cœur au bord des lèvres. La place n'était pas bondée mais il y avait beaucoup plus de monde que ce qu'il avait imaginé. Tentant de ne pas perdre son sang-froid, il pénétra dans le bâtiment, jeta quelques coups d'œil alentours et compta la présence d'au moins cinq Manteaux Noirs. Il y avait dû y avoir des fuites pour qu'ils soient aussi nombreux. Comme d'ordinaire, les membres de la police des Natifs étaient vêtus d'un bas de treillis et d'un blouson doublé noir. Bien sûr, ils étaient aussi armés jusqu'aux dents.
Stiles essaya d'ignorer l'un d'entre eux dont le regard s'était posé sur lui avant qu'il ne détourne les yeux. Il fallait absolument qu'il se détende. S'ajoutant dans la queue face au guichet, il attendit son tour, en ayant l'impression d'avoir une inscription dévoilant ses intentions sur la figure. Lorsque son tour arriva, il fit face à un homme répondant parfaitement à l'image du bon fonctionnaire, les cheveux coupés en brosse et des lunettes rectangulaires sur le nez. Seul élément intriguant, la cravate jaune et marron qu'il portait autour du cou.
S'accoudant contre le comptoir, Stiles lui envoya le sourire le plus innocent qu'il avait en stock.
« Joli cravate. » lança-t-il joyeusement même si un peu fébrile, jetant un nouveau regard au vêtement tape-à-l'œil.
L'homme ne fit pas mine de relever sa remarque, lui demandant les horaires de la réservation qu'il souhaitait faire avant de lui réclamer ses papiers. Stiles s'exécuta, récupéra le faux passeport qu'il avait fait faire il y avait de cela plusieurs mois par un truand et le tendit vers l'homme. Ce dernier s'en empara et examina l'objet avec attention, si longtemps que Stiles sentit les premières gouttes de sueur perler sur son front.
« Ne vous moquez pas. » Stiles sourit faussement, pointant la photographie qui se trouvait sur le passeport du bout du doigt. « On a tous une tête qu'on préférerait oublier sur ce genre de documents, pas vrai ? »
L'autre ne rit pas et Stiles comprit que quelque chose clochait.
« Ces papiers ne sont plus valables depuis plusieurs semaines, jeune homme. Vous devriez le savoir, le gouvernement ne cesse de faire des annonces à ce sujet. »
« Oui... » Il acquiesça rapidement. « Je suis désolé, je devais avoir l'esprit ailleurs quand j'ai fait mon sac, ce matin. »
Bon Dieu, Stiles sentait la panique commencer à l'envahir.
« J'aurais besoin de votre carte d'identité et d'un justificatif de domicile pour remplir le nouveau formulaire. » L'homme lui demanda comme s'il s'agissait de la chose la plus simple du monde.
Mais Stiles n'en avait évidemment pas. Toutes ces informations étaient méticuleusement consignées dans un registre, avec celles d'autres enfants comme lui et la terreur dut se lire sur son visage car l'employé plissa les yeux, l'observant avec suspicion.
« Ecoutez, » Stiles prit une profonde inspiration et tenta sa dernière chance. « Je dois vraiment prendre ce train et je… Je n'ai pas ces papiers sur moi. » Puis, il s'avança davantage vers la vitre le séparant de l'homme et chuchota « Je vous en prie. »
Il n'avait pas prévu de supplier. Mais la cravate que le salarié portait l'avait poussé à le faire, bien avant que Stiles ne voie le cadre photo posé sur son bureau. Un vêtement pareil n'avait pu lui être offert que par ses enfants. Et si cet homme était père, peut-être… peut-être qu'il éprouverait un peu de compassion pour lui. Du moins, c'était ce que Stiles espérait.
Le regard dur que lui lança l'employé fut la preuve évidente que Stiles ne s'en sortirait pas.
« Je suis désolé, mais si vous n'avez pas de documents prouvant votre identité, je vais devoir en référer à ma hiérarchie. » L'homme l'informa, sa voix sombre et sans appel.
Stiles perçut le bref hochement de tête qu'il lança vers l'un des Manteaux Noirs posté derrière eux, près de l'entrée.
Ce dernier posa alors ses yeux sur Stiles dont le corps se figea sur place. Le militaire commença à s'avancer vers lui et ce fut comme si l'adolescent sentit le dernier espoir qu'il possédait se dérober au loin.
« Monsieur, vous allez devoir nous suivre. » Le soldat n'était désormais plus très loin de lui et sa main gantée s'avançait dangereusement près de son épaule, comme pour le diriger de force vers les postes de sécurité.
Stiles eut alors une idée profondément stupide, la pire sans doute dans un tel cas.
Sans réfléchir aux conséquences, il récupéra rapidement le passeport que le bureaucrate avait toujours en main et s'enfuit en courant dans la direction opposée. Ce fut comme s'il avait déclenché une avalanche, percevant les cris des différents agents hurler derrière lui de s'arrêter. Il bouscula des passants, ignorant leurs airs scandalisés et détala aussi vite qu'il le put. Il traversa la route, sauta les marches qui le séparait du haut de la place et tourna à droite vers la sortie de la ville. Mais deux autres militaires l'attendaient déjà alors il tourna les talons, vers la gauche, en direction des bois.
Stiles percevait le bruit des bottes de ses assaillants alors qu'ils continuaient à crier pour qu'il ne bouge plus et mette ses mains derrière la tête. Mais Stiles était comme traversé d'une nouvelle vigueur, courant à en perdre haleine. Bientôt, d'autres sons, plus effrayants vinrent s'échouer au creux de ses oreilles alors que les hommes commencèrent à tirer dans sa direction. Il entendit les balles s'échouer contre les troncs des arbres qu'il venait de passer, un sifflement vif et aiguë, l'adrénaline l'obligeant à courir toujours plus vite. Mais alors qu'il aperçut un arbuste derrière lequel se cacher, une douleur vive et soudaine le percuta de plein fouet. Il trébucha avant de poser une main sur sa clavicule. Il sentit un liquide chaud s'en échapper aussitôt et il jura, se forçant à ne pas gémir pour ne pas trahir sa position.
Lorsque les hommes arrivèrent à son niveau, Stiles arrêta de respirer. Ils le dépassèrent, continuant de leurs pas pressés et il les entendit se disputer et se rejeter les uns aux autres la faute de sa disparition. Agenouillé derrière son buisson, Stiles avait toujours sa main plaquée contre sa blessure, percevant les pulsations de son cœur à mesure que le sang s'écoulait. Lorsque les voix s'éloignèrent suffisamment, il se leva tant bien que mal et reprit sa course.
Il savait qu'il n'avait pas le droit de s'arrêter. Renoncer signifierait sa perte.
Il lui sembla qu'il courait depuis des heures lorsque ses jambes flanchèrent, le faisant s'écrouler sur le sol. Il ne voyait plus très clair et sa chemise était trempée. Il avait perdu beaucoup de sang et sut qu'il ne s'en sortirait pas. Cette constatation ne le déprima pas comme il l'aurait pensé. Bien sûr, mourir au fond des bois n'avait rien d'attrayant. Mais il éprouva surtout de la colère parce qu'il n'avait finalement pas réussi à faire ce qu'il s'était pourtant promis.
Alors que Stiles sentait ses membres s'engourdir, de nouveaux bruits de pas résonnèrent tout près et il sursauta, ramassant un bout de bois qui se trouvait non loin de lui. Rassemblant ses dernières forces, il se leva, des brindilles craquant sous ses pieds. Il les maudit avant de se retourner, s'apprêtant à faire face à ses poursuivants lorsqu'il aperçut deux jeunes femmes. Elles s'étaient arrêtées net face à lui et Stiles se demanda si elles étaient aussi apeurées que lui.
Probablement. Avec ses vêtements rouges de sang, son visage pâle et en sueur et le bâton qu'il levait au-dessus de sa tête, prêt à assener un coup, elles avaient des raisons suffisantes d'en être effrayées.
Mais alors qu'il les observait avec méfiance, l'une d'elle s'avança lentement vers lui, les mains en l'air comme si elle espérait le rassurer.
« Est-ce que tout va bien ? » Elle lui demanda, ses yeux rivés sur sa blessure et Stiles continua de la regarder sans comprendre.
L'autre en revanche, examinait leur échange avec effarouchement, n'ayant pas bougé de son poste.
« Laura ? Laura, qu'est-ce que tu fiches, bon sang ? » siffla-t-elle à la jeune femme située à quelques mètres de Stiles.
« Arrête de hurler, Cora. » Laura répondit, sans quitter l'adolescent du regard.
« Tu as perdu la tête ? Et si c'était un Manteau Noir ? »
« Bien sûr Cora, un Manteau Noir, seul, blessé au milieu de la forêt ? Regarde-le. Il ne doit pas avoir plus de quinze ans. » Laura le pointa du doigt et Stiles aurait pu se sentir vexé s'il n'était pas aussi affaibli. Il avait dix-sept ans et approchait grandement de ses dix-huit.
Ce fut d'ailleurs le dernier sentiment que Stiles ressentit, celui d'une femme inconnue le prenant pour un gamin lorsqu'il s'effondra sur le sol, pris de vertiges. Presque aussitôt, il sentit des mains lui soulever la tête. La femme se tenait au-dessus de lui, le contemplant avec un regard inquiet. Stiles se trouvait dans un état d'inconscience, les écoutant parler comme si elles se situaient à plusieurs dizaines de mètres de là.
« Qu'est-ce que ça change ? Les Natifs ne sont pas idiots, ils les engagent pratiquement au berceau maintenant. Qu'est-ce qui nous dit qu'il n'est pas l'un d'entre eux ? » Cora mentionna, agacée, absolument pas convaincue par les propos de l'autre jeune femme.
« Je te dis que ce n'est pas le cas. »
« Comment peux-tu le savoir ? »
« Je le sais, c'est tout. » Laura affirma d'un ton ferme, comme seule réponse et Cora renifla, dédaigneuse.
« Oh, tu le sais et c'est tout ? Me voilà rassurée, je n'ai qu'à crier au reste de la meute que nous avons ramené un parfait inconnu simplement parce que tu es persuadée qu'il n'est pas dangereux. Combien de temps l'as-tu observé déjà ? Trois foutues minutes ? »
Laura se détourna de l'adolescent dans ses bras et accorda à Cora une expression sévère, comme si elle n'était plus vraiment amusée par les propos de l'adolescente.
« Et si c'était Jonah qui s'était perdu ? Tu n'aurais pas voulu que quelqu'un lui vienne en aide ? »
Cora grimaça mais Laura garda la même expression et la jeune adolescente soupira, reconnaissant sa défaite. Utiliser leur petit frère était vraiment un moyen imparable pour la faire changer d'avis.
« Qu'est-ce qu'on fait alors ? »
Laura contempla le jeune homme, toujours inconscient et posa une main sur son visage, constatant qu'il était brûlant.
« On le ramène au camp. »
Voilà pour ce premier chapitre, qui est particulièrement centré sur Stiles et sur l'univers qui l'entoure, en posant un peu les bases. J'espère que ce début vous aura plu, ou au moins intrigué !
N'hésitez pas à laisser un petit mot pour me dire ce que vous en avez pensé !
Merci à vous d'avoir lu :)
La bise !
