Pour ceux qui ont lu mes bandes-annonces, voici la version complète du chapitre 0 de ma nouvelle histoire. Comme je vous l'ai dit, elle va plus loin et elle est plus détaillée donc, n'hésitez pas à lire.

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VORACITY I – New World

Arc 0

Chapitre 0

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« En cette année 2138, on pouvait trouver le terme DMMORPG dans le dictionnaire.

Abréviation de Dive Massively Multiplayer Online Role Playing Game, il consistait à allier un réseau de nano ordinateurs intracérébraux appelés Neuro Nano Interface, quintessence de la nano et de la cyber technologie avec une console personnelle.

L'expression désignait un jeu à expérience sensorielle, permettant de jouer dans un monde virtuel comme si l'on se trouvait dans le monde réel. En d'autres termes, il s'agissait d'un jeu vidéo qui donnait l'impression de pénétrer en chair et en os dans un monde imaginaire.

Parmi l'infinité de DMMORPG développés, un titre brillait plus que les autres :

YGGDRASIL

[…]

Cela dit, tout cela appartenait désormais au passé. »

(Overlord de Kugane Maruyama, Tome 1 Le Roi Mort Vivant, Chapitre 1)

0o0o0

La pièce était magnifique. De forme totalement circulaire, elle ne contenait qu'une immense table ronde avec, autour, quarante et une chaises luxueuses.

Le sol était fait de marbre noir recouvert d'un épais tapis composé de cercles concentriques verts et rouges. Des colonnes, du même minéral, s'élevaient élégamment à intervalle régulier, leur fut lisse reflétant la lumière. Elles servaient de support à la magnifique voûte en ogive qui surplombait la pièce à plus d'une dizaine de mètres. Les murs entre ces colonnes étaient faits de tuffeau d'un albâtre éclatant décoré de ferronneries scintillantes enchâssées dans la pierre. Il n'y avait que deux ouvertures sur tout ce blanc immaculé, l'une pour l'immense porte qui clôturait l'espace et l'autre, exactement en face, pour une vaste niche à l'intérieur de laquelle flottait un sceptre fait d'or pur.

La table elle-même était faite du même bois sombre que la porte, mais surmontée d'un plateau de marbre gris entrecoupé de morceaux de porphyre formant un colossal symbole en son centre. Les chaises, elles, étaient recouvertes de brocards cramoisis brodés de fils d'or. Elles étaient toutes les quarante et une vacantes à l'exception de deux.

Sur la première était posée une sorte de boue noirâtre aux reflets pétrolés. On aurait pu croire à un simple déchet si celui-ci ne se mouvait pas en changeant continuellement de forme.

Sur la seconde était assis un squelette. Lui aussi n'était pas un simple déchet ou un cadavre, car il bougeait les mains et hochait la tête. Il portait de lourdes robes sombres brodées de pourpre et d'or avec une capuche qui couvrait son crâne nu et des épaulières d'os extrêmement larges sur lesquels étaient incrustés de gros rubis. Elle était ouverte sur son torse ou plutôt sa cage thoracique dont on aurait pu compter chacune des côtes à découvert. Il ne possédait pas d'yeux, mais à la place deux étincelles rouges malveillantes qui scintillaient dans ses orbites. Des colliers à plus savoir qu'en faire pesaient sur ses vertèbres cervicales inférieures et des bagues ornaient chacune de ses phalanges. Un dernier bijou était visible sur sa personne, un orbe cramoisi avec un éclat malfaisant qui flottait dans l'espace entre son sternum démesuré et ses lombaires.

Le premier était une Viscosité Noire Antique, une Race de Slime parmi les plus puissante et reconnu pour son acidité. L'autre de son côté était un Overlord, le plus haut rang des Mages Morts-Vivants.

Tels étaient les avatars des Joueurs connus en YGGDRASIL sous les noms de Herohero et Momonga.

En effet, tout était possible dans ce jeu. Les Joueurs avaient le choix à la base entre de nombreuses Races classées en trois catégories : Humanoïdes, c'est-à-dire les Humains, les Nains ou encore les Elfes pour ne donner que quelques exemples ; les Semi-Humains, parmi lesquels les Gobelins, les Orcs ou les Hommes-Bêtes et enfin les Hétéromorphes des créatures monstrueuses et puissantes, qui progressent plus rapidement, mais qui ont également plus de pénalités.

Au total, les Joueurs avaient accès à plus d'une centaine de Races de Niveau inférieur qu'ils pouvaient faire évoluer de différentes façons en fonction de leurs choix et de leurs quêtes et acquérir d'autres Races de Niveau inférieur, mais aussi de Niveau intermédiaire et supérieur. En les comptant toute, on arrivait à un total de près sept cents. Le système était identique pour les Classes (les « métiers » des personnages) dont le nombre dépassait les mille.

Bien entendu, l'Overlord et la Viscosité Noire Antique étaient des Races de Niveau supérieur et évidemment des Hétéromorphes.

Cette évidence venait du fait que ces deux Joueurs appartenaient à Ainz Ooal Gown, l'une des Guildes les plus puissantes d'YGGDRASIL. Pas la meilleure, mais définitivement dans la tranche supérieure. Or, l'un des critères pour y entrer était de faire partie d'une Race Hétéromorphe. La Guilde était donc composée de quarante et un Hétéromorphe et bien sûr du plus haut Niveau, le Niveau 100.

Ce qu'il faut savoir c'était que le système de Niveau d'YGGDRASIL était très particulier. En effet, chaque Race et Classe ne pouvait obtenir qu'un nombre limité de Niveaux. Les inférieurs en avaient 15, les intermédiaires, 10, et les supérieurs, 5. Il fallait donc composer son personnage de manière à ce que les Niveaux cumulés de ses Races et Classes atteignent 100. Cependant, il n'était pas obligatoire de les monter toutes à leur maximum. Un Joueur pouvait très bien avoir envie de posséder 100 Classes et Races toutes de Niveau 1 s'il le désirait.

Grâce à cela, il n'existait aucun personnage identique à un autre. Et c'était valable également pour le visuel. Effectivement, en achetant le logiciel de création vendu séparément, il était possible de modifier l'apparence de l'avatar, celles des armes et armures et même modéliser son logement de A à Z.

Bien entendu, il y avait des limites à toute chose. Ainsi même le plus puissant des programmes ne pouvait pas rendre un élément en particulier : les mouvements de visage en simultané avec ceux du Joueur. Du moins pas de façon fluide. C'était la raison pour laquelle, malgré la discussion que les deux occupants de la pièce avaient, la mâchoire du squelette demeurait totalement inamovible alors même qu'on entendait sa voix. De temps en temps, un smiley apparaissait dans une bulle à côté du visage de l'un et de l'autre pour montrer ce qu'ils ressentaient.

Quant à leur conversation, les deux parlaient… travail. Tout comme deux employés de bureau ordinaires parleraient de leurs patrons et de leurs subordonnés autour d'une table sauf qu'ils ne ressemblaient pas à des employés de bureau ordinaires. En effet, le second critère pour faire partie d'Ainz Ooal Gown était d'être dans la vie active. Mes membres voulaient pouvoir discuter plus que du jeu, se connaître, échanger et même parfois se rencontrer à l'extérieur du domaine virtuel.

« Désolé Momonga, je n'arrête pas de me plaindre » dit Herohero après une longue tirade d'une vingtaine de minutes où il avait déversé tous les griefs possibles et imaginables. « C'est juste que je n'ai pas vraiment l'occasion de le faire de l'autre côté.

« Ce n'est pas grave, mon ami » le rassura Momonga en levant sa main squelettique. « Je suis content que tu aies répondu à mon invitation malgré la fatigue. Tu es bien le seul… »

La Viscosité s'agita un peu.

« Ne leur en veux pas trop. Personne ne veut assister à… ça. Moi-même il est l'heure que j'y aille. »

Momonga vit un tentacule boueux bouger dans les aires et toucher quelque chose d'invisible. Herohero manipulait le menu.

« C'est vrai… il se fait tard » dit le squelette sans parvenir à cacher sa déception.

« Je suis désolé, Momonga. J'aurais aimé pouvoir rester, mais…

« Non, tu as raison. Si tu es fatigué, tu dois y aller. »

« Et toi ? Qu'est-ce que tu vas faire ? Tu es le Maître de Guilde, alors… »

« Oui, je vais attendre ici. Jusqu'à la fin. »

Cette fin dont il parlait c'était celle d'YGGDRASIL.

En 2126, quand un développeur japonais anonyme avait lancé le jeu, cela avait été une vraie révolution. Les serveurs n'avaient, depuis, jamais désempli. C'est pour cela qu'aujourd'hui, 12 ans après, l'aventure se terminait à l'incompréhension générale. Certaines rumeurs sur le web disaient que c'était un coup de pub pour annoncer la deuxième version, YGGDRASIL II, mais peu y croyaient. Non, pour tout le monde, c'était fini. Ainsi les membres d'Ainz Ooal Gown s'étaient retirés un à un, ne laissant plus que le premier et le dernier d'entre eux, Momonga.

Pourtant il avait entretenu les lieux. Il voulait que leur base soit prête au cas où ses amis reviendraient. Mais ça n'avait pas été le cas. Au final, même Herohero était parti avant la fin alors que Momonga aurait tellement aimé ne pas être seul à cet instant.

« À la prochaine » avait dit Herohero.

« Ne te fous pas de moi ! » Cria alors Momonga en tapant du poing sur la table.

Un [0] apparut à l'endroit de l'impact. Le jeu avait considéré le geste comme une attaque. Si la table avait été un ennemi, peut-être que Momonga l'aurait brisée. Mais c'était une table d'Ainz Ooal Gown et la fonctionnalité « tir ami » était désactivée.

Momonga soupira et se leva de sa chaise. Puisque personne ne viendrait, il serait seul. Il devait donc se préparer. Il se retourna vers la niche qui se trouvait juste derrière son fauteuil. Le sceptre d'or flottait à l'intérieur et scintillait à la lumière de la pièce. Il était formé, à l'image du caducée d'Hermès, de sept serpents entrelacés, chacune tenant un orbe de couleur différente dans leur gueule. La poignée, elle était faite d'une matière nacrée et translucide.

Ce n'était pas n'importe quel sceptre, c'était l'arme de la Guilde, son symbole. Chacun des composants était le butin de quêtes épiques que Momonga et ses quarante compagnons avaient effectuées. Très puissante, elle n'avait pourtant jamais été utilisée. C'était inutile. Personne ne cherchait plus de noises à Ainz Ooal Gown depuis longtemps. De même, si elle venait à être détruite, cela voulait dire qu'ils avaient subi le même sort. Cet objet si important était censé être brandi par le Maître de la Guilde, c'est-à-dire, lui.

Contrairement à ce qu'on pouvait penser, le terme de Maître de Guilde était plus honorifique qu'autre chose. La tâche de Momonga était surtout de coordonner les activités de Guilde et parfois de régler certains litiges. Il n'avait en fait aucune autorité sur ses camarades. Chacun était libre.

Prenant le sceptre, Momonga continua à ruminer en contournant la table. Cela faisait déjà longtemps qu'Ainz Ooal Gown avait commencé à péricliter. Un à un, ses amis avaient cessé de venir pour finalement quitter complètement la Guilde. À cause de cela, leur placement tant estimé de 9e Guilde au classement (sur 800), avait chuté en 29e position.

Mais quelle importance à présent ? L'aventure était terminée donc jamais leur sceptre, pourtant une arme au pouvoir équivalent à celui d'un Artefact de Rang Monde, ne pourrait être utilisé.

Tout comme les Joueurs, les objets ou Artefacts avaient un rang en fonction de la taille des données qui le composaient. Cela comprenait les simples articles, les équipements, bijoux, vêtements, armures et armes, bien entendus. Ils étaient classés en huit catégories en fonction de leur Rang : Inférieur, Secondaire, Primaire, Supérieur, Héritage, Relique, Légendaire et enfin Divine.

Ce dernier était le rang officiel de l'artefact créé par la Guilde, car comme tout ici, les objets pouvaient être fabriqués en amassant des données. Pourtant, s'il est un Rang qui ne pouvait être atteint même si certains artefacts en avaient approché le Niveau, c'était ceux de Rang Monde. Au nombre de 200, ils étaient les pierres angulaires du jeu. Puissants parmi les puissants, ils ne pouvaient être conçus que par les programmeurs et seulement eux.

Arrivé à la porte, Momonga quitta enfin la Salle de la Table Ronde pour s'engager dans les couloirs somptueux du 9e Niveau de Nazarick.

De son nom complet Grand Tombeau de Nazarick, c'était le donjon d'Ainz Ooal Gown depuis des années. Ils l'avaient conquis de dure lutte à des Boss puissants et en avaient fait leur demeure. Au départ ne comptant que 6 Niveaux, la Guilde l'avait réaménagé totalement pour en faire une forteresse d'une dizaine, chacun avec des environnements différents. Les 3 premiers étaient occupés par un vaste réseau de cimetières et de catacombes, le 4e par un lac souterrain et les 5, 6, 7 et 8e respectivement par un glacier, une jungle, une terre volcanique et une autre dévastée. Le 9e, celui où se trouvait Momonga, était celui de la Suite Royale, c'est-à-dire les chambres personnelles et la salle de réunion qu'il venait de quitter. Quant au 10e, le plus profond, celui où il se rendait, c'était celui de la Salle du Trône de Nazarick.

C'était un endroit à la fois sombre et magnifique, plein des plus belles splendeurs et des pires horreurs. Certain, comme Momonga considérait même les lieux comme un foyer. C'était également une forteresse imprenable qui avait résisté aux assauts d'une alliance entre les huit premières Guildes au classement et des mercenaires. Ils étaient venus pour conquérir le donjon, mais avaient tous été anéantis.

Le rez-de-chaussée du Tombeau, lui, c'est-à-dire le Niveau le plus haut, s'ouvrait sur des marais putrides de Helheim. En vérité, le vaste espace de jeu d'YGGDRASIL comportait neuf mondes qui portaient le nom de ceux des légendes scandinaves d'où était issue la mythologie du jeu : Asgard, Vanaheim, Alfheim, Midgard, Jothunheim, Svartalafheim, Muspellheim et enfin, Helheim. Le récit fondateur était qu'au commencement, l'Arbre-Monde Yggdrasil était plein de feuilles qui étaient autant de mondes. Mais le Dragon Nidhöggr était venu et en avait dévoré une grande partie à l'exception de neuf qui étaient devenus les neuf mondes du jeu. De ceux qui avaient été perdus, il ne restait que des fragments dont le pouvoir avait été utilisé pour fabriquer les Objets de Rang Monde.

Mais Momonga n'avait plus le temps de repenser aux heures de gloire. Les minutes filaient. Il serait bientôt minuit. Il arriva finalement au bout du 9e Niveau, à un large escalier de marbre qu'il descendit rapidement. En bas, dans un vaste hall, se trouvaient déjà sept personnes, un vieil homme vêtu comme un Majordome et six jeunes femmes en tenues de soubrettes.

L'homme se tenait droit et semblait affûté comme une épée. Il avait des cheveux et une barbe blanche taillée avec soins et qui donnait à son visage caucasien un aspect dur adoucit cependant par les fines rides qui le parsemait. Les six servantes, elles étaient toutes différentes tant en forme, en taille, coiffure, couleur de cheveux et d'yeux et même leurs uniformes étaient suffisamment distincts pour que chacune d'elle soit unique.

Comme pour tous les personnages du jeu, leur expression était fixe. L'homme avait un air sérieux tandis que les jeunes filles arboraient un léger sourire. Cependant, cette fixité ne venait pas, à l'instar de Momonga, du fait qu'il était impossible au logiciel de retranscrire les mouvements du visage du Joueur puisqu'en effet ils n'étaient pas des Joueurs.

C'était ce qu'on appelait des PNJ pour Personnages Non Jouables. En clair, il s'agissait de pantins mus par une intelligence artificielle limitée. Momonga en avait d'ailleurs croisé certains dans les couloirs sous forme de soubrettes ordinaires. Tous ces personnages étaient néanmoins finement ouvragés pour la simple et bonne raison qu'ils étaient le produit de l'imagination des membres d'Ainz Ooal Gown eux-mêmes.

Bien sûr, il n'était pas donné à tout le monde de pouvoir créer des PNJ. C'était l'un des privilèges des Guildes qui possédaient une base d'une certaine taille. Celles-ci pouvaient disposer de PNJ de bas Niveau, inférieur à 30, appelés aussi POP, pour protéger les lieux qui apparaissaient automatiquement. Comme Nazarick était un tombeau, les POP étaient des Morts-Vivants. Ils étaient basiques et il était impossible de les personnaliser ou de les renforcer. C'était différent pour les autres. En effet, ces mêmes privilèges permettaient à la Guilde de créer complètement des personnages, leur aspect et surtout de déterminer leur force. Une faible Guilde avec un petit château pouvait repartir au moins 700 points de Niveau entre ses PNJ. Une Guilde comme Ainz Ooal Gown possédait des libertés bien plus importantes.

Pour ce qui était de l'attribution des Niveaux, le principe était le même que pour les Joueurs : un maximum de 100 en fonction des Races et Classes choisit. Leur apparence était également totalement individualisable ainsi que leurs équipements, leur histoire personnelle et leur Intelligence Artificielle, permettant de les placer à des points stratégiques.

Les PNJ que Momonga avait croisés auparavant étaient de simples servantes parmi les quarante et une que contenait Nazarick, une par membre de la Guilde. Mais ceux-là étaient différents.

L'homme se nommait Sebas Tian si Momonga se souvenait bien. C'était un Butler, un Majordome, capable de se battre autant que d'effectuer n'importe quelle tâche domestique. Les jeunes femmes, elles, étaient connues sous le nom des Pléiades, comme l'amas d'étoiles et des sept sœurs de la mythologie éponyme. Elles n'étaient que 6 au Niveau 10 et sous les ordres de Sebas. La septième et dernière, elle, se trouvait en un endroit tenu secret.

« Suivez-moi » leur ordonna alors Momonga en utilisant les commandes vocales appropriées.

Le rôle du Maître de la Guilde était de faire travailler les PNJ. De plus, il ne voulait pas être seul à la fin. Normalement, les PNJ ne devaient pas bouger de leur place, mais c'était le dernier jour, ses amis lui pardonneraient sûrement cette infraction aux règles.

Momonga reprit alors sa route jusqu'à une salle en forme de dôme éclairé par des cristaux multicolores au plafond. Les murs étaient creusés de 72 cavités dont seulement 67 étaient pourvus d'une statue de Démon. La salle s'appelait le Lemegeton, l'un des noms d'un célèbre grimoire occulte, la Petite Clé de Salomon. Il décrivait précisément 72 Démons que les membres d'Ainz Ooal Gown avaient essayé de reproduire pour décorer la pièce. Mais ils s'étaient lassés avant la fin.

Cette pièce était censée être la dernière ligne de défense du Tombeau. Inutile de dire que personne n'était jamais arrivé jusqu'ici. Elle séparait la Salle du Trône du reste du donjon grâce à d'immenses portes de pierre représentant une Déesse sur le battant de droite et un Diable sur l'autre. C'était tellement réaliste qu'on aurait pu penser qu'ils allaient attaquer tous ceux qui se présentaient devant eux.

Mais ce n'était pas le cas. Comme disait son grand ami Ulbert, il était inutile de protéger ainsi la toute dernière pièce du Tombeau, le Saint des Saints de Nazarick. Si des envahisseurs parvenaient à dépasser le Lemegeton, alors autant se poster derrière la porte pour les accueillir eux-mêmes.

D'ailleurs en parlant d'attendre, Momonga remarquait à présent que quelqu'un se trouvait juste devant la porte.

C'était une femme magnifique vêtue d'une robe d'un blanc éclatant et d'une finesse arachnéenne. Sa peau était pourtant plus pâle encore et faisait ressortir les formes voluptueuses de son corps. Elle avait un visage tout aussi sublime avec des lèvres pleines qui esquissent un sourire énigmatique et des yeux mordorés inhumains. Cependant, sa beauté n'était pas la seule chose qui l'excluait de l'espèce Humaine. Ses longs cheveux d'un noir de jais et brillant comme de la soie étaient retenus sur son front par deux cornes qui se recourbaient vers le devant de son visage. Elle possédait également deux ailes d'un noir profond à moitié repliées qui émergeaient de ses hanches.

Si l'avatar de Momonga avait été Humain, il aurait froncé les sourcils en voyant l'objet que la femme tenait entre ses mains. C'était un sceptre fait d'une matière sombre avec un orbe noir qui flottait au sommet en émettant une aura malsaine.

Cependant, ce n'était pas n'importe quel sceptre, il s'agissait de Ginnungagap, un Objet de Rang Monde qui aurait dû être enfermé avec les autres dans la Chambre Forte. La seule raison pour laquelle la femme possèderait cet objet était que son créateur, Tabula Smaragdina, le lui avait donné.

Momonga était un peu énervé par cet acte non réglementaire (ce qui était hypocrite compte tenu du fait qu'emmener Sebas et les Pléiades de leur poste était également non réglementaire), mais décida de lui laisser. Après tout, elle n'était pas n'importe qui.

Il s'agissait d'Albedo, la régente de tous les PNJ de Nazarick. C'était d'ailleurs son rang qui lui permettait de se tenir dans la Salle du Trône… sauf qu'elle ne s'y trouvait pas actuellement ce qui n'était pas, une nouvelle fois, normal.

Momonga approcha alors sa main de squelette de la femme et ouvrit son menu. Avant de regarder son historique de commandes, il s'attarda quelques instants sur son contexte personnel. Tabula Smaragdina avait plus que soigneusement décrit son personnage sous toutes les coutures. Après avoir lu en diagonal, le Maître de Guilde arriva à la fin où il n'y avait qu'une simple petite phrase.

« C'est une salope. »

Manifestement, Tabula avait manqué d'inspiration sur la fin. De ça et de classe.

« Je sais qu'il aime les contrastes, mais quand même » marmonna Momonga en parlant de son ancien partenaire de jeu.

Il trouvait ça aussi un peu méchant.

Il hésita quelques instants puis utilisa son sceptre et ses prérogatives de Maître de Guilde pour ouvrir l'éditeur du menu personnage d'Albedo avant d'hésiter à nouveau. Chacun des PNJ de Nazarick avait été créé avec le plus grand soin par ses amis. Ils étaient donc un peu comme leurs enfants. Avait-il le droit d'altérer les enfants de ses amis comme il le désirait ? Lui-même aurait horreur qu'ils fassent cela à son propre PNJ.

Pourtant même s'il le faisait, jamais Tabula ne s'en rendrait compte puisque c'était bientôt la fin. Une modification aussi mineure n'allait pas changer la face du monde… et surtout pas pour lui.

Il effaça les trois mots infamants puis hésita quelques instants avant d'en mettre trois autres.

« Elle aime Momonga »

La honte, pensa-t-il en son fort antérieur en se cachant le visage derrière une main. Mais bon, c'était fait, il n'allait pas y revenir dessus.

Il se mit à naviguer sur le menu et arriva enfin sur l'historique des commandes. Il y avait les automatiques, bien sûr, celles qui avaient été décidées par avance pour optimiser ses mouvements, mais aussi celles données par les Joueurs. Il regarda la dernière et écarquilla (métaphoriquement parlant puisque ses orbites ne pouvaient pas bouger) les yeux. Ce n'était pas tant le nom de la personne qui avait donné l'ordre que l'heure à laquelle il avait été donné qui provoqua cette réaction.

« Suis-moi » commanda-t-il donc à Albedo.

Puis il s'avança vers les portes massives et les ouvrit, révélant derrière elles la Salle du Trône. Si les autres pièces étaient impressionnantes alors, ce n'était rien à côté de celle-ci.

Sa longueur lui donnait des allures de cathédrale de même que sa hauteur qui semblait s'étirer à l'infini et se perdre dans les ombres. Même les lustres garnis de cristaux irisés ne parvenaient pas à l'éclairer alors qu'ils jetaient alentour des reflets fantastiques. De gigantesques colonnes d'obsidienne parées d'argent s'étendaient de part et d'autre avec, entre elles, quarante et une bannières pourpres chacune avec un symbole différent, pendaient presque jusqu'au sol. Celui-ci, fait d'un bloc unique de marbre gris, était recouvert d'un tapis écarlate qui menait à une estrade tout au fond de la salle.

Au sommet de celle-ci se trouvait un immense trône fait d'une pierre noire sculpté d'un seul bloc, récompense de ceux qui avaient conquis le donjon qu'était auparavant Nazarick. Derrière, sur une étoffe cramoisie s'étendait le blason de la Guilde.

Cet endroit était le plus magnifique de tout le Tombeau. C'était aussi le bout du bout du chemin, la dernière épreuve et également la Salle du Trône, le Saint des Saints. Un lieu parfait où se tenir pour finir l'aventure qui était la sienne. C'était ce qu'il avait pensé en venant ici et manifestement, il n'était pas le seul à avoir eu l'idée.

En effet, ce qu'il avait vu dans l'historique d'Albedo était que l'un de ses frères de la Guilde lui avait ordonné de demeurer devant les portes, et ce, à peine cinq minutes avant l'arrivée de Momonga. Celui-ci avait espéré de tout son cœur que la personne qui avait donné cette commande soit encore présente et ses prières avaient été entendues.

À côté du trône se trouvait un homme magnifique à la peau pâle. Son corps finement musclé avait quelque chose de très féminin à la fois dans son allure que dans son attitude. Son visage était également d'une beauté androgyne incommensurable. D'une forme ovale, il était pourvu de lèvres fines et bien ourlées, d'un nez droit qu'on aurait pu dire aristocratique et d'immenses yeux aux cils recourbés. Leur couleur était aussi fantastique. Momonga n'avait jamais vu un tel camaïeu de verts d'une richesse à couper le souffle. On voyait qu'on était dans un jeu, car aucune personne réelle ne pouvait posséder des yeux pareils.

Une très longue chevelure d'un noir profond et aux reflets soyeux coulait dans son dos jusqu'à ses pieds et était coiffée en très lâche tresse. Deux cornes de bélier partaient de ses tempes et s'enroulaient élégamment autour de ses oreilles avant de pointer vers l'avant, au-dessous de son menton. Il portait également au niveau de sa taille une paire d'ailes d'un noir si intense qu'il semblait aspirer la lumière.

Sa ressemblance avec Albedo était grande. Et pour cause, non seulement les deux partageaient la même Race, celle des Succubes, des Démons sexuels, mais l'homme avait servi de modèle à la création de la PNJ. Momonga se souvenait des longues plaintes de Tabula se désespérant toujours que la beauté de son collègue Joueur soit assortie d'attributs masculins. Il avait donc assouvi son fantasme avec Albedo.

Cependant, les ressemblances s'arrêtaient là. En effet, l'homme était habillé d'un ensemble d'armures de métal doré composé d'un pectoral à col haut ouvert sur la gorge, d'une large ceinture de plaques retenant une jupe blanche fendue sur le devant et décorée de fils d'or formant des symboles magiques ainsi que des brassards et des bottes remontants jusqu'à mi-bras et à mi-cuisse et découvrant mains et pieds. Tout comme Momonga, il portait énormément de bijoux : des colliers, des bagues à chaque doigt et le dessus de sa tête était orné d'un filet doré.

Il s'agissait de l'un des plus anciens membres de la Guilde et aussi de l'un des plus secrets : Harddyn Emeryas.

Il était déjà présent quand Momonga avait rejoint leur groupe et, de plus, contrairement aux autres, il ne l'avait jamais rencontré dans la vraie vie. En effet, il ne s'était jamais rendu aux réunions que donnaient ses frères dans le monde réel en prétextant une santé fragile qui l'empêchait de sortir et l'obligeait à travailler depuis chez lui. Il refusait également les visites, disant qu'il ne voulait pas que ses amis le voient dans son état.

Dans le jeu, Harddyn était un métis Viscosité Noire Antique et Arch-Incube, les deux Races de Niveau supérieur des Slimes et des Incubes (le masculin de Succube).

Son cas était rare, car généralement pour créer un avatar, on choisissait une Race principale puis quelques Niveaux de Races secondaires. Par exemple, Momonga était un Mage Squelette, c'était sa Race de base, celle qu'il avait adoptée au début du jeu. Par la suite, il était devenu une Liche Antique puis un Overlord, ce qui était une suite logique pour incarner un Sorcier Mort-Vivant Nécromancien. Il possédait également 10 Niveaux d'autres Races mineurs qui lui donnaient des attributs supplémentaires ce qui amenait son Niveau de Race à 40. Il pouvait alors avoir un Niveau de Classe de 60 ce qui lui avait permis d'obtenir les Classes Sorcier, Nécromancien, Maître Mort-Vivant, etc.

Harddyn, lui, se partageait entre deux Races principales. Il avait choisi comme Races inférieures Diablotin et Slime puis comme intermédiaire Incube et Slime Prédateur avant de choisir ses deux supérieurs. Son Niveau de Race était donc de 60 ce qui ne lui laissait que 40 Niveaux pour ses Classes. Pourtant cela avait suffi pour devenir le meilleur artisan de la Guilde.

Au départ simple Mage d'Esprit et Explorateur, ses compétences lui avaient permis d'acquérir des Classes d'Artisan, de Forgeron et d'Alchimiste au Niveau Génie, c'est-à-dire que ces Classes (normalement de Niveau Inférieur et intermédiaire) étaient de Niveau supérieur. Compléter ces trois Classes lui avaient permis d'obtenir celle de Grand Sage, ce qui le mettait bien au-dessus des autres en matière de fabrication d'objets, de potions et d'armes et armures. Il était l'un des responsables de la grandeur de la Guilde, ses créations étant supérieures à la moyenne.

C'était lui qui, au final, avait forgé le sceptre que Momonga avait entre les mains, lui donnant des bonus de puissance qui en faisait une arme si particulière.

De plus, ses connaissances tenaient du miracle. Il semblait tout savoir du jeu ce qui lui avait permis d'obtenir cette combinaison incroyable de Classes Supérieures, mais aussi de conseiller ses frères de la Guilde pour créer leur personnage ou leur PNJ, pour les combats, les évènements… C'était comme s'il avait lu intégralement tout ce qui se disait sur YGGDRASIL, les astuces et les solutions proposées par les Joueurs au fil des 12 années où il avait été en ligne.

« Tu as donc répondu à mon appel, Harddyn » dit Momonga.

« Oui. Je n'aurais raté ça pour rien au monde » dit l'autre homme.

Sa phrase, dite d'une voix monocorde, fut suivie après quelques secondes d'un émoji sourire. C'était une autre bizarrerie d'Harddyn. Sa voix paraissait toujours sans émotion et quand il utilisait les icônes d'expressions, il le faisait avec un temps de retard, comme s'il ne connaissait pas bien les émotions Humaines et qu'il peinait à en choisir une. Très étrange.

« J'ai croisé Herohero » reprit Momonga. « Il est venu dans la Salle de la Table Ronde, là où j'avais fixé le rendez-vous. »

« Désolé, mais c'était trop dur de leur dire au revoir de cette façon. »

« Tu avais donc prévu de rester jusqu'à la fin ici. »

« Oui » dit Harddyn. « Mais je savais que tu viendrais. Je te connais Momonga. C'est pour ça que j'ai laissé le trône vacant. »

En disant ces mots, il désigna le siège vide. Momonga allait bouger, mais à ce moment-là, il se rendit compte que les PNJ le suivaient toujours.

« À genoux » dit-il à Sebas et aux Pléiades.

Il s'avança ensuite vers le trône puis ordonna à Albedo de se tenir debout juste à côté, à l'opposé d'Harddyn, là où elle devait être auparavant.

« J'espère que ça ne te gêne pas que je les aie amenés » dit Momonga en s'asseyant.

« Non. Ça nous fera de la compagnie. »

Le squelette fit alors apparaître son menu et afficha l'heure.

23 : 55 : 48

Il était arrivé à temps.

Le silence s'installa entre les deux amis avant que Momonga ne reprenne la parole.

« Ils me manquent tous » dit-il.

Il pointa son doigt osseux sur la première bannière.

« Moi » dit-il en désignant le symbole représenté dessus et qui était le sien.

Il montra le suivant.

« Touch Me »

Puis le troisième.

« Moi » intervins Harddyn.

« Shijûten Suzaku » dit Momonga en continuant de désigner les symboles.

« Ankoro Mochi Mochi » dit Harddyn par la suite.

Et ainsi de suite, chacun à son tour, les deux derniers Joueurs énoncèrent les noms de leurs amis disparus : Herohero, Peroroncino, Bukubukuchagama, Tabula Smaragdina, Bujin Takemikazuchi, Variable Talisman, Genjiro, Ulbert Alain Odle…

« C'était amusant » conclut Momonga.

« Oui, ça l'était » ajouta Harddyn.

Et pour la première fois, le squelette crut entendre des sentiments dans la voix de son camarade, comme de la tristesse ou du regret.

23 : 57 : 21

C'était bientôt l'heure. Mais Momonga ne voulait pas partir comme ça, il voulait encore une fois partager quelque chose avec l'un de ses compagnons. Et Harddyn était le seul ici.

« Suzuki Satoru » dit-il soudain.

Harddyn tourna alors son visage à l'expression figé vers lui.

« On ne s'est jamais rencontré en vrai donc je n'ai jamais été présenté à toi correctement. »

23 : 58 : 54

Il se tourna légèrement vers l'autre Joueur et lui tendit la main.

« Bonjour, mon nom est Suzuki Satoru. »

23 : 59 : 21

Harddyn regarda alors quelques instants puis serra la main squelettique.

« Harry Potter »

Une sonnerie retentit alors et se répandit dans l'immense espace de la Salle du Trône.

« Qu'est-ce que c'est que ça ? » Demanda Momonga en regardant autour de lui avec surprise.

« C'est l'alarme que j'ai installé pour… »

Mais Harddyn ne termina pas sa phrase. Momonga tourna alors son attention vers l'heure.

00 : 00 : 38

Ce n'était pas normal. Minuit était passé. Il aurait déjà dû être éjecté de force du jeu et se retrouver dans la matrice de sa Nano Neuro Interface.

Est-ce que la fermeture avait été ajournée ? Ou alors est-ce que la rumeur sur un deuxième opus d'YGGDRASIL était vraie ? Il devait en avoir le cœur net. Quelle que soit la réponse, les Administrateurs devaient avoir fait une annonce.

Il leva la main et pointa la phalange distale de son index dans les airs.

« Qu'est-ce que ça veut dire ? » S'exclama-t-il.

Le menu n'apparaissait pas. Impossible d'accéder au réseau. Il essaya d'autres fonctions comme la déconnexion forcée, la messagerie, l'appel aux Administrateurs, la fermeture forcée du jeu. Rien ne fonctionnait.

Pourtant, et à sa plus grande surprise, Momonga gardait son calme, un calme olympien. Il se sentait d'ailleurs plus calme qu'il ne l'avait jamais été malgré la situation.

« Harddyn » dit-il à son ami en se tournant vers lui. « Est-ce que tu sais ce qui… »

Mais Harddyn n'écoutait pas. Il était trop occupé à toucher son visage, le plus étrange étant qu'il y arrivait. Il caressait ses lèvres, enfonçait ses doigts dans ses joues, palpait le bout de son nez et sa peau répondait comme si elle était réelle. De plus, il ouvrait et fermait la bouche, bougeait sa mâchoire, claquait ses dents, clignait des paupières, fronçait les sourcils et respirait. Il respirait. Il lui suffisait d'aspirer l'air et à ce moment-là, ses poumons se gonflaient.

C'est alors que Momonga se rendit compte de quelque chose. Il n'y avait pas fait attention, mais lui avait arrêté de respirer. Cela faisait à présent plus de deux minutes qu'il ne respirait plus et cela ne lui faisait rien. Il n'était même pas paniqué.

« Tu penses que ce sont de nouvelles fonctions du jeu » demanda alors Momonga à Harddyn en interrompant sa gymnastique. « Tu penses que nous sommes dans YGGDRASIL II et que les moteurs graphiques sont boostés. »

« Impossible ! » S'écria Harddyn.

Deux choses surprirent l'Overlord dans cette simple affirmation. Tout d'abord, Harddyn avait parlé avec véhémence ce qui constituait le ton le plus expressif qu'il n'ait jamais utilisé. De plus, il semblait totalement catégorique sur le fait que ce qui leur arrivait n'avait rien à voir avec le jeu. Comme s'il avait des informations que Momonga ne possédait pas.

Soudain, une voix cristalline s'éleva juste à côté d'eux.

« Vous avez un souci, Seigneur Momonga ? Seigneur Harddyn ? » Dit-elle.

Les deux hommes tournèrent alors la tête et leur regard croisa une paire d'iris couleur ambre. C'étaient ceux d'Albedo. Non seulement elle semblait s'être approchée d'eux de son propre chef, mais elle avait parlé et ses yeux exprimaient quelque chose : de l'inquiétude.

Elle les fixa pendant quelques instants avant de répéter sa question. Se faisant, elle se rapprocha un peu plus de Momonga. Un parfum suave vint alors titiller les fosses nasales du squelette. Encore une impossibilité. Le jeu ne permettait pas de numériser ou de rendre des odeurs.

Elle sent bon, se dit intérieurement Momonga.

« N... non » répondit-il finalement. « Rassurez-v… rassure-toi, ça va. »

Il était perturbé, mais pas au point de vouvoyer une poupée. Il ne savait pas que penser. Tout se brouillait dans son crâne, mais il était en même temps si serein que ça en était effrayant. Il se posait encore des questions quand une voix surgit dans sa tête.

« Ressaisît-toi Momonga » dit-elle. « Et ne te presse pas. Rappelle-toi que l'impatience est la graine de l'échec. Un raisonnement calme et logique est toujours nécessaire. Apaise ton cœur et ouvre ton esprit. Il faut laisser libre cours à ses pensées sans en être prisonnier. »

C'était une phrase qu'avait dite Harddyn auparavant. Ce n'était pas le stratège de la Guilde pour rien. C'était amusant cependant. Il ne l'avait jamais prononcé avec autant… d'émotion.

S'il avait été Humain, il aurait écarquillé les yeux en se rendant compte que les mots qu'il venait d'entendre n'étaient pas un souvenir. Il les avait vraiment entendus résonner dans sa tête avec la voix d'Harddyn.

« Comment… » Dit-il en se tournant vers son ami.

« Ne me parle pas. Pas à voix haute. »

À nouveau, sa voix résonna dans sa tête, mais ses lèvres ne bougeaient pas.

« Je… je crois que ça vient de ma capacité [Télépathie] de ma Classe Mage d'Esprit. Je t'ai entendu dans ma tête ce que tu pensais du parfum d'Albedo. Après que tu as répondu, j'ai voulu te prévenir de faire attention à ce que tu disais, mais on dirait que ma pensée a été plus rapide que les paroles et qu'elle t'a atteinte. »

Donc les capacités fonctionnaient ici ?

« Si tu veux me parler, essaie de penser fort à tes paroles, je l'intercepterai. »

« D'ACCORD ! » essaya de penser Momonga aussi fort qu'il le pouvait.

« Inutile de crier » dit Harddyn en grimaçant. « Fait comme si tu parlais, mais dans ta tête. »

« D'accord » répondit Momonga plus doucement. « Mais pourquoi il ne faut rien dire à voix haute ? »

« On ne sait pas ce qui se passe. Gardons nos conversations pour nous pour le moment. »

« Mes Seigneurs ? » Demanda à nouveau Albedo. « Vous êtes sûr que tout va bien ? »

Momonga se tourna vers Albedo et fut perturbé par son magnifique visage si proche du sien et de la vision qu'il avait de son décolleté. Ses contacts avec le sexe opposé avaient toujours été très réduits et il avait du mal à se concentrer.

« Je n'arrive pas à faire d'appel Admin » dit-il en faisant référence au nom usuel que les Joueurs donnaient à l'interface qui permettait de contacter les Administrateurs.

« Bonjour la discrétion » commenta Harddyn.

Mais Albedo se mit à secouer la tête avec un air triste.

« Je suis désolé de mon ignorance » dit-elle. « Mais je n'ai aucune information à propos de ce "D'Min" ou de cet appel que vous voulez lui faire. J'ai été incapable de satisfaire vos attentes, cependant si vous me donniez l'occasion de réparer cette offense, rien ne me ferait plus plaisir. J'obéirai à tout ordre émanant de vous, Seigneur Momonga. »

« C'est… c'est une vraie conversation n'est-ce pas ? » Demanda Momonga à Harddyn. « J'ai une vraie conversation avec Albedo, n'est-ce pas ? »

« On dirait bien » répondit son ami. « Mais je la trouve vachement empressée de te complaire, tu ne penses pas ? »

Momonga se détourna pour cacher une gêne qui, de toute façon, ne se voyait pas. Après tout, les squelettes n'avaient pas de sang pour rougir. Le problème c'est qu'en faisant ce geste il retomba sur Albedo qui le fixait. Il lui fit donc signe de reculer pour reprendre contenance.

« J'avoue que je suis soulagé que [Télépathie] marche sur les Morts-Vivants » soupira Momonga avec soulagement.

« C'est parce que cela fonctionne sur le même principe que le Sort Message. Si tu peux recevoir Message malgré le fait que tu sois un Mort-Vivant, alors c'est pareil pour [Télépathie]. »

« Mmm… Je n'y avais jamais réfléchi. »

« Malheureusement, ce n'est pas très pratique » soupira alors Harddyn. « Il faudrait que nous parlions seul à seul. »

« Très bien, mais d'abord… Sebas ! Servantes ! » Continua-t-il à voix haute.

« Seigneur ? » Demandèrent ceux-ci d'une même voix.

« Approchez du trône ! »

En un bel ensemble, les sept serviteurs se relevèrent, s'avancèrent puis se posèrent à nouveau un genou à terre dans une posture parfaite.

« Tu m'expliques ? » Lui demanda Harddyn.

« J'ai fait exprès de ne pas utiliser une commande et ils m'ont compris et ont exécuté mon ordre. Et je voulais voir si eux aussi parlaient. »

« Intéressante expérience, mais… »

« Tu as bien dit qu'on ne savait pas ce qui se passait, non ? Il nous faut donc rassembler autant d'information que possible. Relève-toi, Sebas. »

L'homme s'exécuta. Selon Momonga, il était le plus à même d'accomplir ce qu'il attendait de lui. De plus, il voulait savoir s'il pouvait obéir à des ordres complexes.

« Sort du Grands Tombeau et analyse la topographie des environs. Si tu rencontres un organisme intelligent, négocie avec lui et amène-le amicalement ici. Au cours des négociations, je t'autorise à accepter toutes les conditions. Ton champ d'action se limitera à un kilomètre. Éviter les combats autant que faire se peut. »

« À vos ordres, Seigneur Momonga » dit Sebas en s'inclinant. « Je m'exécute immédiatement. »

« Emmène l'une des Pléiades avec toi. Si tu es obligé de te battre, envoie-la me faire son rapport aussitôt. »

Sebas s'inclina à nouveau.

« Que les autres retournent veiller sur le 9e Niveau » reprit l'Overlord.

« Suis-les, Albedo » ajouta alors Harddyn. « Momonga et moi allons nous rendre dans sa chambre pour discuter, je veux que tu gardes la porte. »

« La porte du Seigneur Momonga ? Avec plaisir, Seigneur Harddyn ! » S'exclama Albedo avec une joie plus qu'évidente.

« De… de rien » dit Harddyn, étonné par sa réaction. « Allez, à présent, exécutez vos ordres. »

« Oui, Seigneur » dirent tous les PNJ d'une seule voix.

Ce n'est que quand ils furent seuls qu'Harddyn s'adressa à nouveau à Momonga.

« Je t'attends dans ta chambre » dit-il avant de disparaître soudainement.

Momonga resta un instant figé avant de regarder son majeur droit qui était orné d'une grosse bague en or serti d'un cabochon de rubis ovale à travers duquel on pouvait voir le sceau d'Ainz Ooal Gown. Il s'agissait d'un anneau spécial que chaque membre de la Guilde possédait. Il permettait de se téléporter n'importe où à l'intérieur du Grand Tombeau de Nazarick. Voilà comment Harddyn avait disparu.

Se demandant comment le faire fonctionner à présent, Momonga décida de concentrer sur lui tout en imaginant sa chambre au 9e Niveau. Aussitôt, il sentit quelque chose d'étrange le traverser et son champ de vision se modifia brusquement. Il y était arrivé. Il s'était téléporté.

Le problème, c'était qu'au départ il était assis sur un trône et que son corps avait gardé la même position. Il s'effondra alors sur le tapis avec un léger cri tout en lâchant le sceptre d'Ainz Ooal Gown qui se mit à flotter à quelques centimètres du sol, toujours à la verticale.

« Tu en as mis du temps » dit Harddyn en l'aidant à se relever.

« Toi par contre on dirait que tu t'habitues assez vite à utiliser ça pour de vrai. »

Harddyn haussa les épaules. Momonga n'insista pas.

« De quoi voulais-tu parler ? »

« Je voudrais qu'on fasse le point sur ce qui arrive et qu'on se mette d'accord sur quoi faire ensuite. »

« Très bien »

« Alors, fais n° 1 » dit-il en commençant à compter sur ses doigts, « quand minuit est arrivé, nous n'avons pas été éjectés comme cela aurait dû se produire. Fais n° 2 : après minuit, des choses telles que les expressions faciales, le contact du visage et la respiration sont devenus possibles alors que cela ne l'était pas avant. Fait n° 3 : au niveau de nos sens, rien n'a changé en ce qui concerne de la vue ou de l'ouïe, le sens du toucher a été augmenté et les sens non exploitables de l'odorat et du goût fonctionnent à présent. »

Pour la vue et l'ouïe Momonga était d'accord, le toucher, Momonga ne pouvait pas vraiment dire. Quoique… il toucha ses propres mains et sentit la dureté et la porosité de l'os. Auparavant de tels Niveaux de détails n'auraient pas été permis. Il avait personnellement testé l'odorat, mais en ce qui concernait le goût…

« Il faudrait manger quelque chose pour avoir confirmation, mais ce serait bizarre que ce soit le seul sens qui nous soit inaccessible » dit Harddyn. « Tu veux qu'on prenne un repas ? Ce serait une première pour moi depuis une centaine d'années. »

C'était une chose étrange à dire, mais après tout pourquoi pas.

« De ces trois faits, j'en retire une hypothèse, même si elle semble invraisemblable. Nous nous sommes en quelque sorte "incarnés" dans nos avatars. »

« Quoi ? Non, mais ça va pas ? Tu débloques ! » Commença à s'exciter Momonga, sa mâchoire squelettique s'ouvrant et se fermant compulsivement.

Soudain, il se figea et sa mandibule remonta lentement. Il avait l'air plus calme tout à coup.

« Qu'est-ce qui s'est passé ? » Demanda Harddyn.

« Je… je ne suis pas sûr. Tout d'un coup, c'est comme si mes sentiments avaient été… restreints. »

« Ça rendrait à confirmer ce que je dis. Tu es un Mort-Vivant, tu ne peux donc pas être sujet à des émotions aussi vives. Ton… corps te calme alors automatiquement. »

« Ça se tient… » Finit par accepter Momonga. « Mais je ne peux pas m'empêcher de me demander si ce n'est pas en fait dû à de nouvelles fonctionnalités… »

« Non. Impossible » dit Harddyn.

Encore ce ton péremptoire. Cette fois, il sembla s'en rendre compte et tenta de se justifier.

« Je veux dire, de telles avancées auraient déjà dû fuiter à un moment ou à un autre hors personne n'en a jamais parlé nulle part, tu peux me croire. »

Oui, Momonga pouvait le croire. En effet, l'une des rares choses que lui et ses camarades savaient à propos d'Harddyn, ou plutôt d'Harry Potter, était que son travail était celui de programmeur. Il devait donc être au courant de ce qui se passait dans le milieu de la technologie de pointe. Pourtant son hypothèse était dure à admettre.

Harddyn, voyant son ami hésiter, soupira.

« Je ne sais pas quoi te dire. Moi j'ai senti dès le début que quelque chose clochait. Dès que je me suis mis à respirer après minuit par exemple… »

« Respirer ? » demanda l'Overlord, incrédule.

Harddyn écarquilla légèrement les yeux avant de se reprendre.

« Oui » dit-il. « Quand j'ai respiré. L'air de la Salle du Trône est plus froid que celui de ma chambre, j'ai tout de suite senti la différence. »

« Je vois… »

« Tu veux d'autres preuves ? Très bien. Albedo, entre je te prie ! »

La porte s'ouvrit et Albedo pénétra dans la pièce.

« Que puis-je pour vous servir, Seigneur Harddyn ? » Demanda la femme en s'inclinant.

« Laisse Momonga te toucher »

« Quoi ? » S'exclama ce dernier.

« Comme il plaira à mon Seigneur ! » Dit Albedo au même moment.

Avec empressement, elle s'approcha de Momonga.

« Euh… tends-moi la main » dit-il sur un ton gêné.

« Comme il vous plaira Seigneur Momonga » dit Albedo en rougissant.

Momonga avança l'index et effleura le dos de sa main. À ce moment-là, Albedo fit une grimace et poussa un petit cri. Momonga se mit à paniquer. Trouvait-elle son geste inconvenant ? Puis il se souvient que parmi les aptitudes de la Liche Ancestrale, il y avait celle qui permettait d'infliger des dégâts par simple contact.

« Je t'ai fait mal ? » Demanda-t-il.

« Si… si peu, Monseigneur » dit Albedo en respirant lourdement. « Ces dégâts ne sont rien pour moi. Et je peux supporter bien plus de douleur si ça vient de vous. »

« Je suis quand même désolé » dit Momonga. « J'ai oublié de désactiver [Toucher Négatif]. »

Il se demandait comment il allait faire pour accéder à sa Compétence quand il se rendit compte que cela lui était extrêmement facile. Presque comme respirer. Il avait eu un peu de mal au début avec l'anneau d'Ainz Ooal Gown, mais à présent il savait qu'il pouvait la contrôler.

« Cette fois, ça ira mieux » dit-il. « Je vais te toucher. »

Avançant sa main, il ne se consacra pas seulement à admirer la finesse et la blancheur de cette main ni la douceur de sa peau, mais chercha quelque chose de bien particulier. Un pouls.

Elle en avait un.

Il savait qu'il devait faire un autre test, mais il n'osait pas passer cette barrière. Il osait d'autant moins que les battements de cœur d'Albedo avaient augmenté et que ses joues étaient rouges et sa respiration lourde.

« Allons, Momonga » ronronna alors Harddyn. « Ne sois pas si prude. »

Il s'approcha du squelette et prit sa main. Un sourire diabolique s'esquissa sur son visage puis il la posa directement sur le sein d'Albedo.

« Ah ! Seigneur Momonga ! » Gémit la femme d'une petite voix.

Momonga, lui, était totalement figé sur place. Il sentait le tissu de la robe et par-dessous quelque chose de mou et délicat, une sensation qu'il n'avait jamais connut encore. Il voulut retirer sa main, mais Harddyn le tenait fermement. Cependant, quand il se mit à le forcer à malaxer la poitrine opulente d'Albedo, il réussit à se libérer.

« Ça… ça suffira » dit-il.

« Dommage » roucoula Harddyn.

La Succube, de son côté, était encore plus rouge et sa respiration était forte et gémissante.

« Je… je suis désolé de t'avoir touché sans ta permission, Albedo » dit Momonga.

« Ce… ce n'est rien, Seigneur » balbutia la femme. « Inutile de me la demander. Mon corps vous appartient tout comme mon cœur. »

« Nous te remercions, Albedo » l'interrompit Harddyn. « Tu as été parfaite et tu as répondu à toutes nos interrogations. »

« Je ne vis que pour vous servir, Mes Seigneurs. »

« À présent, j'aimerais que tu retournes à l'extérieur, je te prie. »

Encore tremblante, Albedo s'inclina avant de sortir.

« Mais pourquoi as-tu fait ça ? » S'exclama Momonga.

« C'est bien ce que tu voulais faire non ? Vérifier si les interactions interdites aux mineurs étaient possibles. »

En effet dans le jeu, certains gestes ou attitudes relevant de la plus pure intimité voire même de la pornographie, étaient formellement bannis même entre personnes consentantes. Tout contrevenant voyait son compte supprimé et son nom affiché sur le forum.

« Tu as donc vu que c'était possible et je suis sûr que tout à l'heure, tu as senti un pouls ? »

« Oui » répondit Momonga.

« Elle parle, marche et exprime des émotions par elle-même, elle obéit également aux ordres qui ne sont pas des commandes, elle a un pouls et il est possible de la toucher à des endroits PG-18. À mon avis, ça suffit à dire qu'elle est vivante. Et on peut même aller plus loin et supposer que tous les PNJ le sont. Après tout, tu as envoyé Sebas à l'extérieur ce qui devrait être impossible. »

« Mais tout de même, une Intelligence Artificielle… »

« Ne pourrait pas atteindre ce niveau. Pas maintenant en tout cas. Non, la seule explication c'est qu'elle et les autres sont… vivants. »

« C'est aller un peu loin, non ? »

« Non, pourquoi ? Après tout, que veux dire vraiment être vivant ? »

Momonga n'avait pas vraiment de réponse à cela.

« Qu'elle soit vivante nous permet raisonnablement de valider mon hypothèse selon laquelle nous aussi nous sommes "vivant". Dans nos avatars, je veux dire. Et même je pourrais ajouter que cela confirme que nous ne sommes plus vraiment dans le jeu… »

À nouveau, Momonga n'avait rien à dire à cela.

« De plus, accidentellement, tes petites expérimentations nous ont appris autre chose » reprit Harddyn. « Quand tu l'as blessé avec Toucher Négatif. »

« Elle a ressenti de la douleur. Un autre point qui permet de dire qu'elle est vivante ? »

« Oui, aussi. Mais surtout le fait qu'elle a été blessée alors qu'elle appartient à la Guilde. »

« Le tir ami serait activé ? »

« Je pense en fait que cette notion n'existe plus et que nous pouvons parfaitement nous blesser entre nous. »

À ce moment-là, Momonga réussit à suivre le cheminement d'Harddyn et comprit là où il voulait en venir. Sils pouvaient blesser les PNJ alors ceux-ci pouvaient les blesser.

Pour le moment, leur loyauté semblait définitive et irrévocable. Mais qu'est-ce qui leur certifiait qu'elle ne pouvait pas changer ? Dans le monde réel, un supérieur qui prenait de mauvaises décisions perdait vite la confiance de ses subordonnés. Peut-être était-ce également vrai pour les PNJ. Allaient-ils se cantonner à leur programmation ou alors avaient-ils les moyens d'évoluer.

« Déjà, ils semblent différents d'avant » dit Harddyn après que Momonga ait partagé ses pensées avec lui. « L'attitude d'Albedo ne correspond pas du tout à sa personnalité. On dirait qu'en devant vivante, elle a développé des sentiments pour toi. »

Momonga sursauta. Une nouvelle fois, s'il avait eu du sang, il aurait rougi. En fait, son visage entier aurait été totalement rouge.

« Euh, tu vois… ce qui s'est passé… » Commença-t-il à balbutier.

Il raconta à la hâte l'abus de pouvoir qu'il avait commis à Albedo. Il crut qu'Harddyn allait se mettre en colère, mais celui-ci éclata de rire.

« Je comprends mieux maintenant » dit-il entre deux hoquets. « Je ne vais pas t'en vouloir surtout que je suis sûr que ça va te retomber rapidement dessus. »

Il finit par se calmer et reprit son souffle.

« Au moins, cela dissipe certaines craintes » dit-il finalement. « Ils sont encore soumis à leur programmation. »

« Mais est-ce que ça va durer ? » Demanda Momonga. « Est-ce qu'on ne devrait pas, je ne sais pas, les payer ou leur montrer notre supériorité ? »

« Sans doute… » Dit pensivement Harddyn. « On devrait au moins leur déclarer qui commande. Pour ce qui est de les payer… ce sont nos créations, pas nos employés. Ils pourraient peut-être mal le prendre… »

« Tu penses ? »

« Et puis à quoi de l'argent leur servirait ? À la rigueur des trésors et encore… Mais peut-être que c'est un peu tôt pour penser à ça. »

« Tu veux d'abord leur montrer notre supériorité ? » Demanda Momonga. « Il pourrait y avoir un problème. Je n'arrive à accéder à aucun menu. Je ne sais pas si je pourrais lancer des sorts. »

« Tu es bien arrivé à désactiver le Toucher Négatif tout à l'heure ? Et à utiliser ton anneau de transport. »

« Je serais quand même rassuré si je pouvais m'entraîner. »

« Peut-être l'amphithéâtre du 6e Niveau ? »

« Mm… » Dit pensivement Momonga. « Oui, cela pourrait marcher, de plus si je veux impressionner au moins les Gardiens, je pourrais le faire là-bas. »

Il se tourna vers la porte.

a

« Albedo » appela-t-il.

La femme entra alors à nouveau. Elle ne semblait pas s'être calmée.

« En quoi puis-je vous servir, Seigneur Momonga ? » Demanda-t-elle. « Avez-vous encore besoin de mon corps ? »

« Ton… corps ? »

« Est-ce que le temps de ma première fois est arrivé ? Dois-je enlever mes vêtements ? »

« Tes vet… » Balbutia Momonga avant que l'information ne percute son cerveau. « Voyons Albedo, ce n'est pas le moment. »

« Je suis désolé Seigneur Momonga ! » S'exclama précipitamment la femme en s'inclinant.

Momonga se racla la gorge, gêne alors qu'Harddyn gloussait dans son coin. Décidément, il ne l'avait jamais connu aussi expressif.

« Je te charge d'aller prévenir les autres gardiens de la situation et de leur dire de nous rejoindre à l'amphithéâtre du 6e Niveau. »

« Dois-je prévenir tous les Gardiens ? » Demanda Albedo qui avait repris son sérieux. « Même… »

Momonga réfléchit. Elle devait parler de ceux des 4e et 8e Niveaux.

« Non, fais juste le point avec Victim, mais qu'il reste en poste. Ne te préoccupe pas de Gargantua. Inutile également de t'occuper d'Aura et Mare. Comme nous nous rendons à l'Amphithéâtre, nous les préviendrons nous-même. »

« Comme il vous plaira Seigneur Momonga » dit Albedo.

Elle s'inclina à nouveau et sortit de la pièce.

« Tu iras seul là-bas » intervint Harddyn après son départ. « J'ai quelque chose à faire avant et je te rejoindrais. »

« Quoi donc ? »

« Rien… rien d'important… je t'assure… »

Momonga sentit qu'il ne lui disait pas tout. Il semblait également très agité. En fait, il avait montré des signes de nervosité depuis quelque temps déjà. Depuis qu'Albedo était sorti la première fois. Est-ce que lui aussi était gêné par les corps féminins ?

Il décida néanmoins de laisser tomber et disparut de sa chambre en se téléportant. Il ne vit pas après son départ Harddyn tomber à genoux, le visage rouge et la respiration haletante alors qu'il tenait son ventre.

À suivre…

Et voilà, j'espère que ça vous a plu. Pour le moment on est du point de vue de Momonga, mais ne vous inquiétez pas, dès le prochain chapitre on sera totalement focalisé sur Harddyn.

Au début, je voulais appeler ça un prologue… mais j'ai vu qu'il faisait 19 pages… donc ben c'est le chapitre 0.

N'hésitez pas à me faire des commentaires pour me dire ce que vous pensez de l'histoire. Comme d'habitude, elle sera publiée le jeudi toutes les 2 semaines.