Road trip à Alexandria

Résumé :
Quand Tifa a une idée derrière la tête, il vaut mieux s'écarter de son chemin, surtout si ça concerne deux amis d'enfance disparus.
Et quand Aérith lui donne la direction dans laquelle chercher les jumeaux, il vaut VRAIMENT mieux lui laisser le champ libre.
Elle ne dira s'il vous plait qu'une seule fois.

Chronologie :
Se situe après la fuite des jumeaux de Sin (voir Boules de neige 1), six mois avant la création d'Avalanche.

Personnages :
Tifa, Barret, Marlène, Aérith, les Turks, Cloud et Zack (FF7), Auron, Tidus, Jecht, Yuna (FFX)

Tags spécifique au chapitre :
Tifa, oui oui, Tifa ! , amitié, solidarité féminine, Tifa&Aérith, le monde est perdu, les Turks aussi, à la recherche des jumeaux Strife, de l'art de remuer ciel, terre et bureaucratie militaire, violence envers les turks, violence envers les Strifes


Tifa poussa la porte de derrière et referma derrière elle, peut-être un peu plus fort que prévu.
Elle avait espéré que rentrer à pied la calmerait suffisamment, mais ça n'était pas le cas.
Elle retira sa veste et son écharpe, les suspendant aux crochets prévus là pour tous les habitants du bar.
Même ceux de Yuna et Tidus étaient occupés. Tout le monde devait être là.
Elle vit Auron arriver, son tablier autour de la taille, en train de s'essuyer les mains, la regardant par-dessus ses lunettes de soleil.
"Alors ? "
"Ils m'ont encore fait courir des heures d'un bureau à l'autre," soupira Tifa en retirant ses gants, les rangeant dans le meuble qu'ils consacraient à leurs armes.
Depuis que Marlène savait bien marcher, ils avaient décidé qu'il serait plus prudent de mettre leurs armes hors de portée de ses petits doigts curieux. Auron et Jecht avaient accrochées leurs épées sur les murs du bar, à portée de main au cas où un client se sentirait bagarreur, mais Barret et Tifa rangeaient les leurs, et ni Tidus, ni Yuna, n'étaient autorisés à utiliser leurs armes hors de la MGU.
"Qu'est-ce que j'ai raté ? "
"Rien. Le Lieutenant vient de revenir du travail, il est sous la douche."
"Et le dîner ? "
"Ça mijote."
"Merci d'avoir pris mon tour de cuisine," déclara Tifa en se mettant sur la pointe des pieds pour déposer un baiser sur la joue d'Auron, lequel se contenta d'hausser les épaules d'un air désinvolte. Tant qu'il n'était pas confronté à Jecht, Auron était toujours d'un calme serein.
Tifa suivit Auron dans la salle principale du bar, humant les effluves du plat du jour par le passe-plat. Jecht était au bar, en train de servir un habitué et la salua. Yuna avait Marlène sur la hanche et lui parlait d'une voix douce, pendant que Tidus balayait, nettoyant un peu la pièce avant le début du service du soir.
"Tifa ! " glapit Marlène en tendant les mains vers elle.
"Oooh, je ne suis plus sa favorite," soupira Yuna avec un petit rire, amenant la petite à Tifa.
"Tout le monde est le favori de Marlène, mais chacun son tour," rétorqua Tifa en serrant l'adolescente contre elle d'un bras, prenant Marlène de l'autre.
"Tu as du nouveau ? " fit Yuna.
Tifa soupira, laissant Marlène serrer ses petits bras autour de son cou.
"Toujours rien. Ils ne veulent même pas me confirmer s'ils sont sur la liste des disparus…"
"C'est peut-être pas une bonne chose qu'ils soient sur la liste des disparus," intervint Jecht, "on sait tous comment reviennent ceux-là."
"Jecht ! " gronda Auron en se penchant par le passe-plat.
"Papa ! " renchérit Tidus.
Et les trois hommes recommencèrent à se disputer. Tifa soupira. Les choses s'étaient grandement améliorées depuis la première fois où elle avait passé le seuil du bar, mais visiblement, empêcher Auron, Jecht et Tidus de se chamailler dépassait ses compétences.
"Ils sont peut-être très occupés à cause d'Alexandria," offrit Yuna, "quand tout sera calmé là-bas, les employés de la Shinra seront peut être disponible ? "
Tifa haussa les épaules. Même avant l'attaque de la ville, les employés de Shinra n'avaient jamais été très coopératifs. Cela faisait presque deux ans que Tifa venait régulièrement assiéger leurs bureaux à la Sécurité Publique et ils ne lui avaient toujours pas confirmé si Cloud et Zack étaient bien morts à Winhill, ou juste disparus.
Elle commençait à désespérer de les revoir un jour. Et il devenait de plus en plus tentant de retourner à Nibelheim, comme son père le lui demandait régulièrement, que ce soit par courrier ou par PHS.
"VOS GUEULES ! " tonna soudain l'ordre du Lieutenant, stoppant net la dispute des trois autres.
"Barret ! " Protesta Tifa.
Le colosse grimaça en réalisant que sa fille l'avait entendu. Il sortit de l'escalier et approcha des deux jeunes filles, prenant Marlène dans son bras.
"Ah, mince, Marlène est réveillée ? Elle dormait quand je suis rentré…"
"Papa ! "
"Tu vois, on ne peut pas lutter contre Barret," déclara Tifa à Yuna.
"Comment ça s'est passé ? " demanda-t-il.
Tifa fit un geste d'impuissance.
"J'y retourne bientôt. J'ai un rendez-vous avec quelqu'un qui pourra peut-être me renseigner."
La porte s'ouvrit soudain avec fracas et tout le monde se tourna vers l'entrée, Barret s'interposant entre sa fille et la porte.
Une jeune fille en robe rose et blouson rouge se tenait sur le pas de la porte, un panier rempli de fleurs fraîches au bras.
Ce fut ce qui frappa Tifa en premier.
Des fleurs ?
Dans les Taudis ?
La jeune fille tenta de reprendre son souffle, penchée en avant, et parvint enfin à inspirer suffisamment pour se redresser, rabattant sa natte en arrière
"Où est la fille de Nibelheim ? ! "
Un grand silence retomba sur le bar.
Ce n'était pas une demande rare, même si la plupart du temps, c'était de la part d'hommes éméchés qui avaient entendu parler des jambes et des seins de Tifa, et ceux ci se retrouvaient sommairement raccompagnés à la porte par Auron, Barret ou Jecht, histoire que Tifa ne se salisse pas les mains à les leurs mettre dans la tronche.
Mais la jeune fille sur le pas de leur porte n'avait pas l'air saoule.
Agitée, à bout de souffle, sa natte ébouriffée et les fleurs dans son panier avaient perdu plusieurs pétales.
Ah. Probablement une jeune fille qui avait été agressée et avait entendu parler de Tifa et de sa faible tolérance envers les porcs qui peuplaient les rues de Midgar. Tifa se redressa, carrant les épaules avant d'approcher avec un petit sourire.
"C'est moi, venez, asseyez-vous, vous êtes en sécurité ici…"
Elle se tourna vers elle et Tifa admira les yeux les plus verts qu'elle ait jamais vu.
"Oh... Vous êtes exactement comme ils l'avaient dit ! "
"Qui ça ? " demanda Tifa en la guidant vers une table.
"Les jumeaux ! "
Tifa la dévisagea, la mâchoire pendante.
"Qu... quoi ? "
"Il faut que vous m'aidiez ! " s'exclama la jeune fille.
"A... attendez, les jumeaux ? "
"Cloud et Zack ! Strife ! Nos jumeaux ! Je veux dire… Le vôtre et... et le mien ! "
"Vous les avez vu ? ! "
"Oui ! Non ! " corrigea la jeune femme en secouant la tête, "oh, vous n'allez pas me croire…"
"Mais... mais qui êtes-vous ? "
La jeune fille cligna deux ou trois fois des yeux, confuse, avant de réaliser qu'elle ne s'était pas présentée.
"Je suis Aérith ! La… enfin… J'étais la petite amie de Zack quand ils étaient en camp d'entraînement à Midgar ! Avant qu'ils soient déployés à Winhill ! "
Oui, effectivement. Elle se souvenait que Cloud lui avait parlé d'une des conquêtes de Zack portant ce nom dans ses lettres. Elle avait suivi l'évolution de leur romance par lettre interposée, mais elle ne l'avait jamais rencontrée. Elle n'avait pas eu son nom de famille, juste un prénom, et tout ce qu'elle savait, c'est qu'elle vivait dans les Taudis. Ça n'avait pas été assez pour la retrouver quand elle était arrivée à Midgar, deux ans plus tôt et elle devait bien avouer que ça n'avait pas été sa priorité.
"Calmez-vous, s'il vous plaît…"
"Non, vous ne comprenez pas ! Ils sont vivants ! "
"Comment savez-vous ? Où sont-ils ? "
A ces mots, la jeune fille sembla hésiter et baissa les yeux, murmurant pour elle-même avant de les fermer.
Elle inspira profondément puis tendit une main dans une direction.
"Par là. Ils sont par-là."
Elle rouvrit les yeux et croisa le regard incrédule de Tifa.
Elle tourna la tête autour d'elle, ne voyant que la même chose dans les yeux des autres occupants de la pièce.
"Vous ne me croyez pas," gémit-t-elle.
"Je n'aime pas ce genre de blague," rétorqua Tifa d'une voix calme, mais ferme.
"Moi non plus, Miss," déclara Jecht en montrant la porte, "du vent ! "
"Je vous jure… s'il vous plaît, croyez-moi, ils sont en vie ! "
"Aérith."
La jeune fille sursauta et se tourna vers la porte. Un Wutan venait d'entrer, suivi d'un homme aux cheveux rouge. Ils portaient tous les deux un costume noir, complet avec la cravate, même si celui du Wutan semblait plus net et mieux ajusté que celui du roux.
"Tseng ! "
"Je t'ai déjà dit de ne pas t'enfuir comme ça," déclara le Wutan.
"Ouais, me refais pas ce coup-là, Princesse," marmonna le roux.
"Tseng, s'il te plaît ! " reprit Aérith en se précipitant vers lui, lui prenant le bras, "il faut que je sorte de Midgar ! "
"Je vous remercie de l'avoir retrouvée," déclara Tseng avec un petit signe de tête à Barret. "Aérith, vient."
"Non ! Tseng, Zack est en vie ! "
Le Wutan inspira longuement avant de prendre la jeune fille par le coude, l'entrainant après lui.
"Zack est mort, Aérith. Il est temps que tu l'acceptes."
"Il est vivant ! Je... je l'ai senti cette nuit ! Il voyait la lune ! "
"Reno, ramène-la à l'Église."
"Tout de suite, Boss," répondit le roux en prenant le panier d'Aérith avant de l'entraîner par la main.
"Reno ! "
"Faut que tu rentres, ta mère est en panique," grommela le roux en la faisant sortir.
"Vous l'emmenez où ? " demanda Tifa.
La jeune fille semblait… un peu dérangée, mais elle n'aimait pas laisser une si jeune femme seule avec deux hommes inconnus.
Surtout un qui portait une arme sous sa veste.
"Nous la ramenons chez elle, je vous remercie encore de votre intervention," commença-t-il en sortant son portefeuille.
"Nous ne voulons pas d'argent," l'interrompit Barret.
L'homme hocha la tête et sortit une carte de visite qu'il donna à Barret.
"Si jamais elle revenait. Voici mon numéro. Appelez-moi aussitôt. Mesdames. Messieurs."
Il sortit sans un mot supplémentaire.
"Ça, c'est un larbin de Shinra," nota Jecht de derrière le bar.
"Opération spéciale je dirais," ajouta Auron, accoudé au passe-plat.
"On les appelle Turk, ici," corrigea Barret.
"Oublie ça Tifa," suggéra Jecht en retournant à ses verres. "Ce devait être une pauvre fille avec des ennuis."
"Comment pouvait-elle savoir pour les jumeaux ? "
"Tout le monde le sait, Tif', " déclara Jecht, "ça fait deux ans qu'on t'entend les chercher partout.".
"Cette église, elle est où ? "
"C'est pas compliqué," expliqua Tidus, "c'est celle des Taudis du secteur 5, y'en a qu'une de toute façon."
"Tifa," reprit Auron, "tu ne vas pas faire quelque chose de stupide, n'est-ce pas ? "
"Selon mon père, c'était déjà le cas quand je suis partie pour Midgar."


Effectivement, il n'y en avait qu'une.
C'était un très vieux bâtiment, datant visiblement d'avant la Plaque, pourtant en relativement bon état.
Relativement étant le mot clef. Un des clochers s'était effondré et il y avait quelques vitraux cassés, mais elle tenait quand même debout.
Tifa n'avait jamais vu une église. Elle avait vaguement entendu parler de leur existence, dédiée à la mémoire de l'Ancienne Morte, mais en bonne native de Nibelheim, ses prières et ses remerciements allaient à l'Ancien de la Montagne, Fenrir.
Elle lui adressa donc une petite prière d'excuses avant de pousser la porte.
L'intérieur n'était pas en meilleur état. Le plancher était fracassé, dévoilant le sol en dessous, il y avait un grand trou dans le toit et dans l'arrière du bâtiment, et tout était parsemé de débris.
Toutefois, une grande zone avait été volontairement dégagée au centre du bâtiment, les planches arrachées et de la terre entassée, dans laquelle poussaient les premières fleurs que Tifa ait pu voir depuis son arrivée à Midgar.
C'était tellement beau, tellement paisible que pendant quelques secondes, elle en oublia presque la raison de sa venue.
Et devant les fleurs, de dos, elle reconnut la silhouette d'Aérith, avec sa veste rouge et sa robe rose.
Elle était agenouillée, semblant prier, mais ses mains descendaient régulièrement vers les fleurs, touchant délicatement les pétales.
Tifa était persuadée de bouger aussi silencieusement que possible, mais elle vit Aérith sursauter, puis se redresser, se tournant vers elle.
"Oh ! "
Une sourire soulagé se peignit sur son visage.
"Vous êtes là ! "
Tifa approcha d'un bon pas, décidée à demander des explications, mais Aérith vint précipitamment à sa rencontre, levant un doigt à ses lèvres.
"Chut ! Les Turks sont peut-être dehors…"
"Prouvez-moi que vous dites la vérité," déclara Tifa sans lui laisser en placer une.
La jeune fille s'arrêta, se mordillant les lèvres.
"Je…"
"Dites-moi une chose que seuls les jumeaux pourraient vous avoir dit…"
"La cicatrice de Zack lui a été faite par leur père."
Tifa sursauta.
Elle… l'avait ignoré. Les jumeaux ne parlaient jamais de leur père sans vouer ses os à la boue et cracher au sol.
"Ils ont suivi Maduin pendant un an avec leur mère, de Gongaga à Nibelheim," continua Aérith.
Ça, elle le savait, ne serait-ce que par les visiteurs étranges qui venaient chez Sky, récupérant les enfants qu'elle recueillait à longueur d'année, et ce même avant que ses fils ne disparaissent.
"Avant qu'ils ne partent, vous avez retrouvé Cloud sur le château d'eau du village et il vous a promis de revenir vous protéger si vous aviez des ennuis un jour."
Et ça, personne d'autre que Cloud et elle ne le savait.
"Où sont-t-ils ? "
"Je ne sais pas," admit Aérith d'un air défait, "j'ai... j'ai juste des intuitions, des éclairs… Mais cette nuit… J'ai senti Zack, comme s'il était près de moi et que… qu'il me montrait la lune."
Tifa avait grandi dans la maison à côté de celle des jumeaux. Elle les connaissait aussi bien que des frères, au point que parfois, à Nibelheim, on les avait surnommés les triplés.
Elle connaissait donc très bien Zack.
"Pitié, dites-moi que vous parlez de celle..."
"Du ciel ! Celle du ciel ! " protesta Aérith avant de laisser échapper un rire. "Oh, ce serait tellement lui d'apparaître dans mes intuitions pour me montrer son cul ! "
Tifa se mit à rire aussi. Effectivement, ce serait un truc de Zack.
"Il faut qu'on les trouve. Donnez-moi la direction."
"Aérith, je suis Aérith et vous allez me tutoyer, parce qu'un jour, nous serons belle-sœur ! "
"Et moi c'est Tifa. Enchantée Aérith."


"Barret ! Barret ouvre ! "
"Tif', Titans, tu as vu l'heure ? " marmonna Barret en ouvrant la porte arrière du bar.
Il cligna des yeux en voyant sa jeune barmaid sur le pas de la porte, bras dessus bras dessous avec la folle de tout à l'heure.
"Tif ? "
"J'ai pas le temps, Barret, je suis désolée, je dois trouver un moyen de quitter Midgar, on doit aller chercher les jumeaux ! "
"Et il nous faut des laissez-passer ! " ajouta l'autre jeune fille.
"Tu sais où je peux en 'trouver' ? " demanda Tifa en faisant des guillemets avec ses doigts.
"Il est deux heures du matin," protesta Barret.
"Tu veux qu'on repasse à l'ouverture ? "
"Je veux que vous alliez me faire un café pendant que je m'habille," marmonna Barret en les faisant entrer.


"Comment il a fait pour trouver des laissez-passer aussi vite ? "
"Il a eu… de mauvaises fréquentations," déclara Tifa en remontant son sac sur son dos, "mais il s'est calmé depuis qu'il a adopté Marlène."
Elles se regardèrent quelques secondes avant de se tourner vers les portes du secteur 5 par lesquelles transitaient une file de véhicules et de voyageurs, ralentis par les vérifications d'identités des troopers qui montaient la garde.
"C'est la première fois que je sors de Midgar en presque dix ans," avoua Aérith, les mains serrées sur son sceptre.
"Deux ans pour moi," ajouta Tifa avant de se tourner à nouveau vers son amie. "Quelle direction ? "
Aérith ferma les yeux. Elle tendit le bras vers le sud-est.
"En avant alors."


Les premiers jours de marche furent pénibles.
Aérith n'avait pas l'habitude de marcher autant et Tifa dû admettre que malgré ses années de guide de randonnée à Nibelheim, elle avait perdu cette même habitude. Heureusement qu'elle avait son entraînement au combat pour compenser. Mais Aérith ne l'avait pas.
Pas plus que de dormir sous une tente.
Mais elle ne se plaignit pas une seule fois, suivant le rythme de Tifa sans dire un mot, aussi déterminée que la brune à retrouver les jumeaux.
Et pendant quelques jours, le voyage fut calme, les laissant prendre le rythme.


"Il faut que je les aime les louveteaux pour camper à la belle étoile par cette température," grommela Tifa en ajoutant de la viande de loups des plaines au ragoût qui mijotait.
"Louveteaux ? "
"Oui, c'était leur surnom à Nibelheim."
Aérith laissa échapper un petit rire avant de retourner au raccommodage de sa chaussette.
"Zack était plutôt un jeune chien tout fou…"
"Ne m'en parle pas, toujours à faire des bêtises celui-là. Le nombre de fois qu'il a failli les tuer tous les deux avec ses idées."
Aérith posa son ouvrage sur ses genoux, la regardant quelques secondes cuisiner sur leur feu de camp avant de se lancer.
"Est-ce que c'est vrai qu'il a essayé de sauter du château d'eau avec un drap en guise de parachute ?"
"Tes intuitions te l'ont dit ? "
"Non, Cloud ! "
"Ah, mais ça c'est rien, écoute bien ce qu'ils ont fait quand ils avaient douze ans…"


"Ah."
"Je n'avais pas prévu ça, " admit Aérith.
La direction qu'elles avaient voulu suivre pour rejoindre les jumeaux étaient barrées par une chaîne de montagne qui s'étendait des deux côtés, à perte de vue.
"Prochain village, on achète une carte," déclara Tifa.
"On aurait peut-être dû commencer par-là."
"Si jamais les jumeaux nous demandent comment s'est passé le voyage, ça n'est jamais arrivé, d'accord ? "
"Pourquoi ? "
"J'ai ma fierté."


Le premier camion qui voulut les prendre en stop était rempli de pervers.
Aérith suggéra de leur voler leur véhicule une fois que Tifa les avait tous bien rossés.
"Aérith ! "
"Quoi ? On en a besoin, on leur laissera au prochain village, ils pourront le récupérer. L'exercice physique fera du bien à leur fibre morale."
"Oh, Fenrir, Zack a été une mauvaise influence sur toi…" gémit Tifa en se prenant le front dans la main.
Le petit sourire mutin d'Aérith était en effet similaire aux sourires pré-conneries de son meilleur ami.
"Tu parles, Cloud m'accusait régulièrement d'être la plus mauvaise influence des deux."
Tifa resta quelques secondes silencieuse, les deux mains sur la bouche, horrifiée.
"Tu imagines nos futurs enfants, n'est-ce pas ? "
"Je refuse de baby-sitter," déclara Tifa avant d'exploser de rire.


Les Turks les retrouvèrent deux villages plus loin, alors qu'elles décidaient de s'offrir la première nuit à l'auberge depuis qu'elles avaient quitté Midgar.
Tifa avait été réveillée par les cris d'Aérith quand un homme chauve en costume la tira du lit.
Elle avait peut-être réagi un peu brutalement, mais les derniers jours avaient été légèrement stressant, entre les pervers, les attaques de monstres, l'inquiétude pour les jumeaux et être réveillée en pleine nuit par des cris de peur.
Sa limite avait jailli de ses poings, sans lui laisser le temps d'essayer de se calmer avant de frapper. Elle avait repris le contrôle d'elle-même en plein milieu de l'enchaînement, évitant des blessures graves à l'homme qu'elle bourrait de coups.
"Oups," déclara-t-elle en le voyant inconscient sur le sol de la chambre.
"Tu as réussi à tabasser Rude ? " s'étonna Aérith, cachée derrière elle.
"Je ne l'ai pas fait exprès ! Je te croyais en danger ! "
"Là c'est sa réputation qui est en danger," ricana Aérith avant de se pencher sur lui.
"J… je ne l'ai pas…"
"Oh, il va se réveiller avec un sacré mal de tête, mais il n'a rien de cassé," annonça Aérith avant de se relever, "aide-moi à le mettre sur le lit.
Tifa obéit, aidant la jeune fille à installer le blessé sur le lit d'Aérith. Celle-ci lui retira ses chaussures, puis inspecta les bosses et les bleus sur lui avant de poser la main sur son front.
Une lueur verte s'éleva de ses doigts et les bleus s'estompèrent, sous le regard stupéfait de Tifa.
"Tu as une matéria de soin ? "
"Non, je… je suis mage native. Guérisseuse," précisa Aérith.
Elle s'assura que Rude respirait correctement puis, sans faire de manière, fouilla ses poches. Elle sortit une paire de menottes, des clefs de voiture, un PHS et un portefeuille.
"Que fais-tu ? "
"Quelque chose pour lequel il m'en voudra longtemps," répondit Aérith.
Et elle l'attacha au lit à l'aide des menottes.


La voiture empruntée à Rude leur facilita le voyage. Elles purent voyager plus vite, en sécurité, ce qui leur permit d'économiser leurs forces, leur argent (ainsi que celui de Rude), et de faire plus ample connaissance.
Malheureusement, elles durent l'abandonner en arrivant aux marais.
Elles trouvèrent un autre groupe de voyageurs à qui se joindre pour la traversée des mines de Mythril. Le projet de tunnel traversant la chaîne de montagne avait été abandonné lors de la guerre des Sorcières, et n'avait jamais été repris, ni Esthar, ni Alexandria ne souhaitant rendre l'accès à l'autre ville plus facile.
La mine restait le seul moyen de traverser les montagnes pour arriver sur les terres d'Alexandria.
"Qu'est-ce que deux jolies filles comme vous vont faire de l'autre côté ? " demanda un des guides lors d'un campements, alors que Tifa s'échinait à rendre un rampeur comestible et qu'Aérith soignait les petits bobos du groupe.
"On vient chercher nos hommes par la peau des fesses," répondit Aérith.
"Vous êtes au courant qu'il y a eu une bataille y'a pas longtemps ? "
Aérith et Tifa échangèrent un regard par-dessus le feu de camp.
Aérith ne savait toujours pas où se trouvaient les jumeaux, expliquant que les indications de ses intuitions restaient vagues et que les noms d'endroit avaient visiblement peu d'importance, mais au fur et à mesure, en recoupant les différentes directions que la guérisseuse avait indiqué pendant le grand détour, Tifa avait déduit que les jumeaux se trouvaient bien dans la région d'Alexandria.
Ils avaient disparu à Winhill, sur un autre continent.
Comment auraient-ils pu arriver là ?
Comment étaient-ils passés d'une bataille à une autre ?
Et la question que Tifa se posaient le plus était surtout :
Étaient-ils toujours eux-mêmes ?
Où étaient-t-ils maintenant des Bienheureux ?


Les terres d'Alexandria étaient dévastées.
Mais la ville était toujours là, intacte, ses hautes tours et murailles bâties sur Alexander lui-même, n'avaient pas bougé.
Le déferlement des squames d'un côté et de centaines d'invocations de l'autre avait ravagé le paysage, déracinant les forêts autour de la ville.
Il y avait des endroits où la Rivière de la Vie avait fait surface, là où le sol avait été suffisamment labouré par les sorts et les invocations.
Aérith en pleura pendant des heures, incapables d'expliquer à Tifa ce qui lui arrivait.
Tout ce que Tifa avait réussi à comprendre, entre deux sanglots, c'était que la planète pleurait de ces blessures. Qu'il faudrait des siècles pour que tout rentre dans l'ordre.
Mais, une fois ses sanglots calmés, ses yeux essuyés et son nez mouché, la guérisseuse se releva et annonça que les jumeaux n'étaient pas loin.


Entrer dans l'hôpital militaire fut étonnement simple.
Déjà, il y avait beaucoup de monde.
Beaucoup de blessés.
La bataille avait eu lieu plusieurs semaines auparavant et l'hôpital était encore empli des blessés et de leurs familles. Deux jeunes filles à l'air affligées passèrent donc presque inaperçues.
Le fait qu'Aérith ai volé une blouse d'infirmière et couvert les bras de Tifa de pansements aida aussi.
"Où as-tu appris à faire ce genre de chose ? " murmura Tifa, comme Aérith la guidait dans les couloirs de l'hôpital, s'arrêtant régulièrement pour faire mine de consoler Tifa, dès que quelqu'un les voyait.
"Afterwork des Turks."
"Vraiment ? ! "
"Disons que… Tseng… est un ami d'enfance ? "
"Toi et Zack êtes des agents du chaos."
"C'est pour ça qu'on va bien ensemble ! " rétorqua Aérith avant de se figer.
"Aérith ? " s'inquiéta Tifa.
"Deuxième porte à droite," murmura Aérith, les yeux brillant.
Tifa resserra la main sur la sienne et avança.
Dix mètres.
Elles passèrent la première porte.
Un médecin sortit de la seconde.
Tifa fit semblant de pleurer sur l'épaule d'Aérith, cachant son visage de sa tête.
Cinq mètres.
Elle entendit quelqu'un crier de douleur, derrière elles. Les mains d'Aérith brillèrent de vert et elle dû les cacher dans les poches de sa blouse.
Trois mètres.
Est-ce que les jumeaux étaient vraiment là ?
Un mètre.
Tifa leva la main, la posant sur la poignée.
Elle poussa la porte ouverte.
Aérith entra en premier.
Tifa la suivit, refermant derrière elle.
Et elle leva les yeux.
Elle ne le reconnut pas.
Il était tellement grand maintenant. La chaise d'hôpital dans laquelle il était assis était trop petite pour lui, ses jambes trop longues, ses épaules trop larges.
Il était trop maigre.
Elle voyait ses os, les tendons de ses mains, l'angle de ses mâchoires.
Il avait toujours la cicatrice sur sa joue.
Ses cheveux étaient ras, ils avaient été coupés très récemment visiblement, il n'y avait qu'un léger duvet sur son crâne.
Et ses yeux.
Elle n'avait jamais vu un éclat mako aussi puissant.
Et il les regardait toutes les deux, alternativement, sans ouvrir la bouche.
Sur le lit, si petit à côté de lui, Cloud était étendu, les yeux dans le vague, relié à une quantité de machines impressionnante.
Et sans leurs cheveux à tous les deux, on voyait bien qu'ils étaient vraiment jumeaux.
Même maigre à faire peur comme ils étaient tous les deux.
Même avec les yeux comme des flammes de gaz dans la nuit.
Même avec ce tatouage noir sur le poignet.
"Zack ? " murmura Aérith.
Il ferma les yeux, se tournant sur sa chaise pour faire face au lit.
"Putain Cloud, les hallucinations recommencent. Je croyais que c'était fini…"
Tifa lui cassa deux dents en lui mettant une gifle.