« Écris-lui, lui ordonna Marlène qui était en train de passer un coup de torchon sur une table que des clients venaient de quitter.

- Pour quoi faire ? l'interrogea Lily en levant les yeux au ciel.

- Parce qu'il était cool et qu'il a l'air d'aimer les mêmes trucs que toi.

- Y compris les hommes ? plaisanta t-elle.

- Tu es toujours là dessus ? Il n'a pas mis son numéro dans ton portable par simple gentillesse, Lily, ajouta Benjy en ricanant.

- Peut-être que si.

- Envoie. Un. Message. À. Ce. Pauvre. Garçon, articula la jeune femme blonde en lui balançant son torchon au visage.

- Fais-le, toi. C'est toi qui voulais lui donner ton numéro à la base.

- Tu sais à combien d'autres personnes j'ai donné mon numéro depuis que je l'ai croisé ? Quatre, répondit-elle aussitôt. Crois-moi, j'ai déjà rebondi.

- Ce n'est pas comme si il ne te plaisait pas en plus, pointa Benjy.

- Ils ont raison. Si vous en avez envie, vous devriez lui écrire, intervint M. Abbot. »

Assis à sa table habituelle, un livre entre les mains, et son chapeau en équilibre sur le dossier de sa chaise, le vieil homme serra la main de Marlène avec un large sourire lorsqu'elle la lui tendit, comme s'ils venaient de conclure un accord.

« Vous savez Randy, je m'attendais à ça de leur part, mais pas de la vôtre, déclara Lily alors qu'elle était en train de préparer un jus d'orange frais pour une cliente qui était en terrasse

- Je dis ça seulement parce que je vous ai entendu dire que vous l'aviez trouvé charmant. Même s'il aime les hommes, cela vous fera un ami en plus, et on a toujours besoin d'amis, lui fit-il remarquer en haussant les épaules.

- Vous êtes une personne précieuse, monsieur Abbot, et si quelqu'un vous fait du mal un jour, prévenez-moi, je lui crèverai ses pneus, décréta Marlène avant de se mettre à nettoyer la machine à café.

- Tu sais que tu veux le faire, Lil', appuya Benjy. Je ne t'ai jamais vue guetter autant la porte que ces trois derniers jours. »

Bien sûr qu'elle avait envie de le faire. Il lui avait semblé sympathique, était passionné par le même jeu qu'elle, et avec un peu de chance, par d'autres, et en un coup d'oeil de sa part, tous ses neurones s'étaient fait la malle. Elle était assez adulte maintenant pour comprendre comment fonctionnait son corps. Elle traversait toujours un moment de brouillard intense lorsque quelqu'un lui plaisait. Cela se traduisait par quelques secondes de flottement, et un air bête sur son visage.

D'un autre côté, elle n'était pas sortie avec qui que ce soit depuis l'année précédente, et elle s'en portait très bien. Elle n'aimait pas particulièrement toute cette étape bizarre des rendez-vous, ce moment où il fallait apprendre à se connaître et où personne n'osait être vraiment soi même, et elle n'était définitivement pas sûre que c'était ce qu'il avait en tête lorsqu'il avait enregistré son numéro dans son téléphone, mais si toutefois Marlène et Benjy avaient raison, elle redoutait de se trouver une nouvelle fois en face de lui et qu'il constate qu'elle n'était pas aussi intéressante qu'il avait pu le penser.

Elle ignora ses deux collègues et les contourna pour aller servir le jus d'orange en terrasse, puis discuta rapidement du beau temps avec la cliente avant de retourner s'enfermer dans la cuisine où elle avait lancé une fournée de cookies quelques minutes plus tôt.

Benjy et Marlène semblaient être passés à autre chose, et M. Abbot était à présent plongé dans le roman qu'elle lui avait conseillé quelques semaines auparavant. Elle aimait bien le voir dans la boutique. Il était devenu une présence rassurante, presque un ami, ce qui pouvait paraître surprenant pour quiconque les voyait l'un à côté de l'autre, leur cinquantaine d'années d'écart ne passant pas inaperçue.

Elle relevait son courrier, nourrissait son chat et s'occupait de ses plantes lorsqu'il partait en vacances, et il insistait toujours pour la payer, bien qu'ils n'habitent qu'à cinq petites minutes à pied l'un de l'autre et qu'elle adorait passer du temps avec le vieux matou. Elle était sûre de toujours trouver des chocolats ou des bonbons à son intention sur la table de la cuisine, et un petit mot gentil lui intimant de se servir dans les placards si quelque chose lui faisait envie. Elle n'avait jamais connu ses grands-parents, et elle se demandait si c'était le genre de lien pur qu'elle aurait eu avec eux s'ils avaient encore été en vie.

Elle passa tout le début d'après-midi en cuisine à terminer ses cookies et à préparer un gâteau au chocolat qui devait passer la nuit au frais, puis elle donna un coup de main à Benjy avec les pâtisseries plus élaborées qu'ils mettraient le lendemain en vitrine. Elle poussa un juron lorsque Marlène lui demanda de venir l'aider en boutique alors qu'elle venait de retrousser ses manches et de plonger ses bras jusqu'aux coudes dans l'eau chaude pour faire la vaisselle.

Elle ne se fit toutefois pas prier, et Benjy roula les yeux quand elle lui jeta un regard d'excuse, comme si elle était vraiment navrée de devoir abandonner l'une des tâches qu'elle détestait le plus. Quoi qu'avec un peu de musique, elle pouvait tolérer de nettoyer une quantité raisonnable d'assiettes, mais son patron n'était pas dupe, il savait que si l'occasion d'y échapper se présentait, elle ne la laissait pas passer.

« Lily ! appela une deuxième fois Marlène.

- J'arrive ! »

Elle s'essuya rapidement les mains sur son tablier et traversa la cuisine, puis poussa la porte avec ses fesses et remarqua aussitôt que le salon de thé s'était rempli. Marlène était en train d'installer les derniers arrivés dehors, et dès qu'elle eut terminé, elle se posta devant elle avec un large sourire, et agita sa main en direction du bar accolé à la baie vitrée.

« Je te laisse t'occuper de la terrasse et de ces deux là, dit-elle. »

Lily le reconnut dès qu'elle posa les yeux sur son dos, et elle eut envie de tuer Marlène lorsqu'elle traversa le salon de thé pour débarrasser d'autres clients de leurs petites assiettes sans lui laisser le temps de protester. Elle se tourna et se retourna deux fois de suite avant de prendre une profonde inspiration et de se diriger vers lui et son ami.

Elle avait espéré qu'il se pointerait de nouveau, et maintenant qu'il était là, elle avait envie de mourir parce qu'elle ne lui avait pas écrit, et qu'il savait qu'elle ne lui avait pas écrit alors qu'il lui avait laissé son numéro, et il était évident qu'il savait aussi qu'elle savait qu'il lui avait laissé son numéro. Bref, il en savait trop.

« Bonjour, vous avez fait votre choix ? les interrogea t-elle sur le ton le plus naturel possible en sortant un petit carnet et un crayon de la poche de son tablier. »

Les deux jeunes hommes se tournèrent simultanément vers elle, et un sourire se plaqua aussitôt sur le visage de Thé à la rose. C'était son prénom maintenant. Enfin, c'était de cette façon qu'elle l'appelait dans sa tête parce que c'était de cette façon qu'il s'était lui même appelé dans son répertoire, et quelque part, elle refusait de penser qu'il pouvait s'appeler autrement.

« Ylil ! s'exclama t-il. Regarde-toi, avec ton badge à l'endroit !

- Je progresse tous les jours, répondit-elle en essayant de contenir son amusement avant de poursuivre en posant les yeux sur son acolyte. C'est Lily, en fait.

- Oh je sais très bien, lui assura t-il avec un sourire espiègle. J'ai une dalle infernale et mon goûter est le moment le plus précieux de ma journée, qu'est-ce que vous me conseillez, Lily ?

- Hmm... Le cheesecake vanille caramel de Benjy est délicieux, les muffins à la myrtille calent bien, et je ne veux pas trop me vanter mais mes cookies sont les meilleurs de la ville, énuméra t-elle après s'être esclaffée devant sa familiarité. Mais globalement, il n'y a aucun mauvais choix. Benjy fait tout lui même, les ingrédients qu'il utilise sont naturels, et tous ses gâteaux sont à tomber par terre.

- Vous étiez supposée m'aider à faire un choix, pas me convaincre de tout prendre, pointa t-il en esquissant une moue indécise qui la fit sourire. Vous avez de la chance, je suis influençable, alors mettez moi un double expresso, un cheesecake, un cookie, et un muffin. On va partager.

- Et...

- Un thé à la rose, compléta l'autre. »

Évidemment.

Elle croisa son regard à ce moment là, et elle sentit ses joues commencer à chauffer. Sa seule alternative pour ne pas passer pour une absolue godiche fut de baisser les yeux sur son calepin pour noter leur commande.

« Je vous ramène tout ça dans une minute, bredouilla t-elle avant d'aller vérifier que les clients qui étaient assis à l'extérieur ne manquaient de rien. »

Dès qu'elle se fut occupée d'eux, elle prépara la commande des deux garçons, jetant des coups d'oeil réguliers dans leur direction. Ils étaient en train de discuter, et à un moment, celui aux cheveux longs passa son bras autour des épaules de Thé à la rose, et elle se demanda s'il s'agissait de ce Sirius qui lui avait envoyé un message pendant qu'elle jouait sur son téléphone.

« C'est lui, n'est-ce pas ? s'enquit M. Abbot qui occupait la table la plus proche du comptoir.

- C'est exactement lui, répondit Marlène à sa place en surgissant de nulle part, un sourire ravi figé sur le visage.

- Est-ce qu'il se coiffe avec une essoreuse à salade ?

- Randy ! le sermonna gentiment Lily sans pouvoir réprimer un rire.

- Je n'ai pas dit que cela ne lui allait pas, se justifia t-il aussitôt. Il est très beau garçon. Les deux le sont, ajouta t-il lorsqu'il vit Marlène fixer l'autre.

- Et vous savez ce qu'ils sont probablement aussi ? En couple, ajouta t-elle aussitôt.

- Qu'est-ce que tu peux être étroite d'esprit parfois, souffla Marlène en levant les yeux au ciel. Deux garçons ont le droit d'être tactiles l'un avec l'autre sans pour autant que...

- Je sais, la coupa Lily en déposant les gâteaux sur son plateau où les boissons se trouvaient déjà. Il y a seulement une accumulation d'indices et je serais stupide si je les ignorais. »

Elle traversa de nouveau la pièce pour servir les deux garçons qui la remercièrent simultanément, puis elle se hâta vers la terrasse où un groupe de clientes semblaient la chercher des yeux. Elle les débarrassa de leurs tasses vides et récupéra l'argent qu'elles n'osaient pas laisser sur la table sans surveillance, puis retourna derrière le comptoir pour aider Marlène avec sa commande.

Elles passèrent bien une heure et demie à jongler entre les tables avant que le salon de thé ne commence à se vider. Elle ne savait même pas comment M. Abbot arrivait à se concentrer sur son roman avec toutes ces allées et venues. Elle en était incapable. Elle ne lisait jamais autre part que dans sa chambre, quand tout était calme et que rien ne pouvait la distraire. A la limite, elle pouvait venir à bout d'une ou deux pages dans le bus si elle mettait sa musique assez fort pour couvrir les conversations des autres voyageurs, mais elle finissait souvent par relire quinze fois la même phrase sans pour autant l'imprimer.

Elle était en train d'encaisser un client lorsqu'elle vit Marlène déposer un pichet d'eau fraîche à une table, puis bifurquer vers Thé à la rose et son ami qui ne se trouvaient définitivement pas sur son chemin. Elle tendit le terminal de paiement électronique à l'homme qui se tenait devant elle, mais garda les yeux vissés sur sa collègue.

Elle la connaissait depuis trop longtemps pour ne pas avoir peur de ce qu'elle était en train de leur raconter, mais d'un autre côté, elle voulait voir comment Thé à la rose se comporterait avec elle. Son dernier petit ami ne s'entendait que vaguement avec ses amis. Non pas qu'elle considérait Thé à la rose comme un potentiel petit-ami. Il était attirant, c'était tout, et il y avait une infinité d'autres personnes sur terre qu'elle trouvait attirantes. Cependant, elle était curieuse de savoir comment il gérerait Marlène.

Elle les regarda discuter un peu, rire ensemble, constata que ses deux mains restaient autour de sa tasse de café, et ses yeux dans ceux de sa collègue lorsqu'ils n'étaient pas vissés sur la rue passante, et il semblait l'écouter quand elle parlait, ce qui allait de soi, selon elle, mais n'avait pas semblé être une évidence pour d'autres garçons qu'elle avait fréquentés.

« Qu'est-ce qui vous retient ? lui demanda M. Abbot qui avait surpris son regard sur eux.

- Rien, répondit-elle automatiquement avant de reprendre avec un peu plus d'hésitation. Je suis en pleine phase d'observation.

- Et qu'est-ce que ça donne, pour l'instant ?

- Il a l'air respectueux, dit-elle en haussant les épaules avant de s'asseoir avec le vieux monsieur, priant pour que Benjy ne sorte pas de la cuisine à ce moment là. Alors, que pensez-vous de cette lecture ?

- Palpitant, déclara t-il avec un sourire. Les polars sont toujours mon pêché mignon.

- Moi aussi. Le problème, c'est que si j'en lis après vingt-et-une heure, je suis tétanisée dans mon lit et je ne peux pas dormir, lui confia t-elle en lâchant un rire.

- C'est pour cette raison qu'il faut toujours se garder une bande dessinée sous la main. Ou un chat.

- Oh ne me tentez pas, Randy, sinon je vous vole Oscar la prochaine fois que vous partez en vacances, plaisanta t-elle, et le vieux monsieur éclata de rire. »

Ils échangèrent un coup d'oeil complice avant que le tintement du carillon de l'entrée n'attire son attention vers un groupe d'étudiantes, et elle s'empressa de quitter sa table pour servir les quatre filles qui passèrent un long moment dans le salon de thé, relevant le niveau sonore.

Elles étaient toutefois particulièrement gentilles, et elles complimentèrent ses cookies à chaque fois qu'elle passa devant elles. Elle retint un rire lorsqu'elle entendit l'une d'entre elles commenter le physique des deux garçons qui discutaient toujours avec Marlène, et que les trois autres se penchèrent pour les reluquer de façon si peu discrète que l'ami de Thé à la rose leur adressa un signe de main. Elles se retournèrent aussitôt, mortifiées. Lily sentit son portable vibrer dans sa poche à ce moment là.

Pétunia : Salut ! Je vais manger chez les parents dimanche midi, tu seras là ?

Lily : Je peux être là si tu veux.

Pétunia : Ok. Alors à dimanche.

Elle s'accouda au comptoir et observa pensivement leurs derniers messages. Leurs échanges étaient devenus froids à partir du moment où sa sœur avait commencé à sortir avec Vernon Dursley et que Lily s'était mise à ne plus la reconnaître. Elle n'avait aucune idée qu'une seule personne pouvait avoir autant d'influence sur une autre, mais c'était pourtant de cette façon que les choses s'étaient déroulées. Elle était tombée amoureuse de ce garçon détestable, s'était mise à boire ses paroles, et à prendre tout ce qu'il disait pour argent comptant. Il était vendeur de perceuses, mais il n'avait rien à envier aux plus grands gourous de sectes. Elle exagérait certainement, mais c'était de cette façon qu'elle le voyait parce qu'il lui avait un peu volé sa sœur.

Elles n'avaient pas arrêté de se parler pour autant, leurs échanges étaient simplement tendus dès que le sujet Vernon venait sur le tapis, ou dès que Vernon lui même apparaissait sur le paillasson de chez leurs parents. Ils n'appréciaient pas beaucoup le jeune homme non plus, mais ils n'en disaient rien. Pétunia semblait heureuse, et c'était le principal. Lily aurait aimé pouvoir s'en réjouir aussi, mais elle détestait trop Vernon pour y parvenir.

« J'ai l'impression que quelque chose vous tracasse, pointa M. Abbot, et Lily pivota légèrement vers lui.

- Ma sœur m'a envoyé un message. On doit se voir dimanche.

- Je suis certain que tout ira pour le mieux, lui assura t-il. Vous ne l'avez pas vue depuis un moment, elle sera probablement contente de vous retrouver, non ?

- Je préfère ne pas trop m'avancer là dessus... Mais elle avait l'air d'avoir envie de me voir, répondit-elle en se saisissant rapidement d'un torchon pour faire mine d'essuyer le comptoir lorsque Benjy émergea de la cuisine pour jeter un coup d'oeil dans le salon de thé avant de repartir aussitôt. À tous les coups, elle va venir avec Vernon.

- Voyez le bon côté, vous allez encore en apprendre tout un tas sur les perceuses, plaisanta t-il, et elle pouffa en secouant la tête de dépit. »

Elle suivit Marlène du regard lorsqu'elle la vit quitter les garçons pour aller débarrasser une table, et quand elle passa devant elle, elle lui adressa un clin d'oeil. Lily fronça les sourcils, soupçonneuse, et elle se figea quand elle constata que Thé à la rose s'était levé et qu'il se dirigeait droit vers elle.

« Bon, qu'est-ce qu'elle a dit ? l'interrogea Lily après avoir soupiré lorsqu'il arriva à sa hauteur, et son rire libéra une énorme dose d'adrénaline dans son cerveau qu'elle ressentit jusque dans son ventre.

- Vraiment rien de compromettant, je viens juste régler notre note, lui confia t-il. Ça a l'air d'être une chouette personne, et je crois que Sirius, mon meilleur ami, s'en est aperçu. »

Meilleur ami. C'était son meilleur ami. Juste son meilleur ami.

Elle soutint son regard pendant un instant en se demandant si la précision avait un quelconque rapport avec ce que Marlène avait pu lui raconter, mais son visage resta totalement impassible, alors elle commença à taper sur l'écran tactile de sa caisse.

« Ça a été, pour te retrouver sur ta base ? demanda t-il tout en sortant son portefeuille de la poche arrière de son jean.

- Pour être honnête, j'ai mis quelques minutes, mais ouah, cette défense ! s'exclama t-elle. Je crois que je n'ai jamais été aussi peu assiégée. Merci.

- Aucun problème.

- Comment vont tes réserves d'or ?

- Très mal, si je dois être honnête, avoua t-il sans détour, et elle s'esclaffa.

- Je t'arrangerai ça la prochaine fois que tu viendras.

- Je... commença t-il avant de se gratter l'arrière du crâne. Je pars au Canada demain pour le travail. - Vraiment ? Génial.

- C'est plutôt cool, oui, mais je risque de ne pas être dans le coin avant l'été prochain.

- Oh. Eh bien j'imagine qu'il doit y avoir des vidéos sur internet qui expliquent comment ne pas claquer son or inutilement, le taquina t-elle. »

Elle essaya de ne pas montrer sa déception, mais elle l'entendit dans le ton de sa voix et elle se maudit intérieurement tout en acceptant son argent, notant le généreux pourboire qu'il glissa dans le bocal à cet effet qui traînait sur le comptoir. L'instant d'après, il se baissa tant qu'il disparut derrière.

Elle crut pendant l'espace d'une seconde qu'il avait fait tomber quelque chose, mais lorsqu'elle se mit sur la pointe des pieds, elle constata qu'il s'était juste agenouillé pour caresser Alastor qui se frottait à lui.

Et voilà qu'il aimait les chats. Le coup de grâce.

« On a un clan, si tu veux, reprit-il tout en levant la tête vers elle. Les Maraudeurs. Tu devrais le trouver directement si tu tapes le nom dans la barre de recherche. Notre fanion est rouge et or.

- Est-ce que c'est une invitation ?

- Soit ça, soit un guet-apens, tu te feras ton propre avis quand tu rencontreras les autres... Si tu décides de venir, répondit-il en esquissant un sourire en coin avant de brandir son pouce par dessus son épaule pour montrer son meilleur ami et de reprendre. Sirius est dedans.

- Je vais y réfléchir, dit-elle en lui rendant son sourire. Alors...

- Alors peut-être à l'année prochaine ? »

Elle hocha lentement la tête, les yeux rivés dans les siens, et pendant un moment, elle crut qu'il allait ajouter quelque chose, mais il se redressa, lui adressa un dernier sourire et rejoignit son meilleur ami qui agita sa main dans sa direction. Elle fit de même, et sortit son téléphone dès que les deux garçons eurent passé la porte, une moue ennuyée figée sur le visage.

Lily : Thé à la rose était là aujourd'hui.

Frank : NON ?!

Lily : Sirius est seulement son meilleur ami.

Lily : Mais il part au Canada demain pour toute l'année.

Lily : Qu'est-ce que j'ai fait pour être aussi maudite ?

Mary : Tu avais raison.

Mary : Tu es en train de vivre ta propre comédie romantique.

Mary : Tu dois courir après son avion demain.

Elle pouffa et envoya trois émojis qui riaient. Mary savait toujours comment tourner une situation désagréable en quelque chose de drôle, et Lily lui enviait largement ce pouvoir.

Frank : Je suis en train de pleurer dans mon lit.

Frank : Littéralement.

Frank : Je croyais en cette relation.

Lily : Pourquoi est-ce que tu étais déjà plus investi que moi ?

Mary : Frank, il faut que tu arrêtes de projeter tes espoirs sentimentaux sur nous.

Mary : Allez, je paye les pizzas ce soir.

Elle s'apprêtait à répondre quelque chose lorsqu'elle entendit Benjy se racler la gorge dans son dos, et elle s'empressa de fourrer son portable dans sa poche, de lui adresser un large sourire, et d'aller débarrasser la table que les deux garçons venaient de quitter. Sous la tasse de thé était calé un petit papier plié en deux. Elle l'ouvrit et se félicita instantanément d'avoir posé son plateau sur le bar. Elle était sûre qu'il aurait fini à ses pieds sinon.

« Tu étais vraiment jolie aujourd'hui. »

Cinq mots. Cinq mots qui n'avaient pas du tout le même effet en fonction de la personne qui les prononçaient, ou du ton sur lequel ils étaient prononcés. Cinq mots qui la mettaient mal à l'aise la plupart du temps, mais qui cette fois-ci, simplement griffonnés sur un papier sans rien demander en échange, lui firent trembler les genoux.

Il partait au Canada. Il ne fallait pas qu'elle tremble des genoux. Elle inspira profondément, et rangea la note dans sa poche, non sans avoir souligné la finesse de son écriture au passage, puis elle rassembla la vaisselle que lui et Sirius avaient abandonné là. Parfois, le départ de certains clients la rendait un peu nostalgique. Souvent quand il s'agissait de M. Abbot. Pour une fois, il partagea la place de « grand regretté » avec Thé à la rose.

« Tout va bien, Lily ? se moqua Marlène, adossée au mur à côté de Randy.

- Parfait, répondit-elle tout en allant déposer son plateau derrière le comptoir avant de pivoter vers elle. Est-ce que c'est toi qui lui as donné l'idée ?

- Non. Il était déjà en train d'écrire quand je suis arrivée à leur table. A quel point est-ce que c'est mignon ?

- Très, déclara Lily. C'est très mignon. »

Elle ne voulait pas vraiment y penser, alors après avoir constaté que la plupart des clients étaient partis et que Marlène n'avait plus besoin d'elle en salle, elle retourna faire la vaisselle dans les cuisines, n'en émergeant que lorsque sa collègue la prévint que M. Abbot partait. Elle passa la tête par la porte pour le saluer, et retourna se cacher dans la montagne de mousse qu'elle avait créé dans l'évier.


Il était presque vingt et une heure lorsqu'elle quitta le salon de thé ce soir là. Frank était seul à l'appartement parce que Mary avait finalement sacrifié leur soirée pizza pour une soirée étudiante, et qu'il n'était pas tellement du genre fêtard, alors ils commandèrent à manger et se posèrent tous les deux devant une série.

Elle n'était pas particulièrement attentive parce qu'elle devait rattraper son retard de la journée sur tous ses jeux, et que Frank ne cessait de lui montrer les photos de la soirée que Mary lui envoyaient, toutes plus abracadabrantesques les unes que les autres alors qu'il était encore beaucoup trop tôt pour qu'elle puisse blâmer l'alcool.

« Où est-ce qu'elle a trouvé un âne à Camden ? s'étonna Lily en voyant sa meilleure amie complètement allongée sur l'animal qui avait l'air particulièrement docile.

- C'est Mary, répondit simplement Frank en haussant les épaules. »

Lily lui concéda bien volontiers ce point là, et elle reporta de nouveau son attention sur son portable. Elle ferma un jeu pour en ouvrir un autre, celui sur lequel Thé à la rose l'avait aidé à consolider sa défense, et elle constata avec satisfaction que sa base était encore intacte. Elle comprenait la façon dont il l'avait réorganisée, et elle aurait aimé y penser avant. Il avait juste formé un carré avec quatre points de garde renforcés qui formaient des espèces d'extensions, et des remparts tout autour de ses défenses. C'était simplissime, mais c'était du génie.

Elle se mordit la lèvre et fit distraitement tapoter ses doigts sur le bras du canapé, se demandant à quel point elle pourrait le regretter si elle lui écrivait maintenant. Elle jeta un coup d'oeil vers Frank, complètement avachi à côté d'elle, et elle s'enfonça un peu plus dans le canapé tout en gardant son portable assez proche d'elle pour qu'il ne puisse pas voir ce qu'elle était en train de faire pour deux simples raisons.

Premièrement, il le répéterait à Mary, et ils seraient intenables. Deuxièmement, dès que l'un d'eux commençait à montrer de l'intérêt autre qu'amical pour quelqu'un, ils avaient un rituel qui consistait à avoir chacun le droit de poser une question à la personne concernée. C'était une sorte de détecteur de toxicité. Ils l'avaient mis en place après que Mary soit sortie avec une fille complètement mythomane qui lui avait brisé le cœur.

Souvent, il s'agissait juste de poser une question piège, qui était sujette à débat, du genre « Est-ce que tu mettrais de l'ananas sur une pizza ? » ou « Qu'est-ce que tu penses des gens qui font « puits » à Shifumi ? », mais parfois, ils rentraient dans les classiques « Pour ou contre la peine de mort ? » ou « Qu'est-ce que tu penses du droit à l'avortement ? » qui mettaient une ambiance inégalable dans la conversation.

Lily avait toujours adoré ce petit jeu à partir du moment où elle était celle qui posait les questions, mais l'enthousiasme de Frank et Mary concernant Thé à la rose l'effrayait. Elle remonta ses genoux contre sa poitrine, dissimulant son téléphone du mieux qu'elle le put, et ouvrit la conversation.

Lily : Je me demandais...

Lily : Ton prénom, c'est Thé à la rose, ou juste Thé ?

Elle envoya le message, puis le fixa en se maudissant pour cette entrée en matière qui laissait largement à désirer. Elle était meilleure que ça, normalement. Du moins elle se souvenait l'avoir été.

« Je vais me faire une tisane, tu en veux une ? proposa t-elle à Frank qui esquissa une moue en secouant la tête de droite à gauche.

- Par contre, je ne suis pas contre un petit Call of Duty.

- En duo ?

- Évidemment. Il est hors de question que je rejoue contre toi. »

Elle pouffa tout en se sortant un mug. Elle l'avait exterminé la seule fois où ils avaient joué l'un contre l'autre, et il avait encore du mal à s'en remettre. Le fait qu'elle lui ait rappelé sa défaite pendant tout le mois qui avait suivi n'avait pas dû l'aider à la digérer.

Elle était en train de fixer la bouilloire d'un air absent lorsque son portable vibra dans la poche arrière de son jean, la faisant légèrement sursauter. Elle l'attrapa et esquissa un sourire.

Thé à la rose : Ylil !

Lily : Ouah. Même pas l'once d'une hésitation.

Thé à la rose : Est-ce que j'ai l'air de rentrer mon nom dans assez de téléphones pour ne plus savoir à qui je m'adresse ?

Thé à la rose : A vrai dire, ne réponds pas à cette question, ça pourrait être blessant.

Elle esquissa un sourire en songeant que c'était une sage décision de sa part, parce que sa réponse aurait définitivement été celle à laquelle il avait eu l'air de s'attendre.

Lily : Donc c'est bien ton nom.

Lily : Original.

Thé à la rose : Est-ce que tu es déjà en train de critiquer les choix de mes parents après seulement une minute d'échange ?

Elle laissa échapper un rire et se maudit lorsque le regard de Frank se braqua sur elle. Elle lâcha aussitôt son téléphone sur le plan de travail. Il avait cette espèce de sixième sens qui faisait qu'il savait toujours lorsque Mary ou elle discutaient avec quelqu'un qui leur plaisait. C'était ridicule à quel point il était doué avec ça, plus efficace qu'un détecteur de fumée en début d'incendie.

« Qu'est-ce que tu fais ? s'enquit-il en lui lançant un coup d'oeil soupçonneux.

- Juste un th... »

Elle s'arrêta avant même d'avoir lâché la dernière lettre du mot, réalisant son erreur, puis déglutit en espérant que ce petit cafouillage ne lui serait pas fatal, avant de reprendre en essayant du mieux qu'elle le put de soutenir son regard et d'avoir l'air détachée.

« Une tisane. »

Frank la fixa, et elle le maudit de ne pas détourner les yeux. Elle sentait son visage commencer à chauffer, et il n'y avait pas moyen qu'il passe à côté. Elle ne s'attendait pas à se faire trahir par son téléphone lui même, qui vibra sur le plan de travail et attira aussitôt les deux paires d'yeux sur lui.

Le jeune homme bondit du canapé et s'avança dans la cuisine au moment où la bouilloire se mit à siffler. Lily retourna l'écran de son portable avant de remplir son mug, faisant mine d'ignorer son colocataire qui était à présent penché sur la table et la regardait avec un large sourire.

« Tu écris à Thé à la rose.

- Je n'écris pas à Thé à la rose, mentit-elle en se renfrognant. »

Il arqua un sourcil, et elle souffla sur sa tisane, essayant de lutter contre son envie de lire son message alors même qu'elle savait que Frank était déjà sur son dos. Après quelques secondes à mener une bataille de regard particulièrement intense, elle leva les yeux au ciel et lui tendit son téléphone.

« Très bien, vas-y. Une question, soupira t-elle, résolue.

- Mais avec plaisir. »

Elle jura qu'elle avait rarement vu une telle satisfaction sur son visage. Elle l'observa en se mordant la lèvre, peu rassurée qu'il se soit tout de suite mis à taper sur son clavier tactile comme si la question qu'il était en train de poser coulait de source, et lorsqu'il lui rendit son téléphone avec l'air de quelqu'un qui était particulièrement fier de son coup, elle imagina le pire. Elle baissa les yeux sur son écran, lisant le message de Thé à la rose qu'elle avait manqué avant de se résoudre à regarder celui que Frank avait envoyé.

Thé à la rose : Et dire que ma mère t'avait trouvée polie et agréable.

Lily : Est-ce que tu veux m'épouser ?

Elle écarquilla les yeux, laissa tomber son portable sur la table devant elle, se félicita de ne pas avoir bu une gorgée de tisane parce qu'elle se serait étouffée avec, et se mit à courser Frank dans tout l'appartement. Le jeune homme, hilare, finit par s'enfermer à clé dans la salle de bain et elle tapa contre la porte pendant une bonne minute, proférant des menaces sans queue ni tête, avant de s'immobiliser lorsque son téléphone vibra une nouvelle fois. Elle s'empressa d'aller le chercher tout en conseillant à Frank de ne pas sortir avant une bonne heure s'il ne voulait pas mourir avant ses trente ans, et elle pouffa quand elle vit la réponse de Thé à la rose.

Thé à la rose : Tu veux que je prenne ton nom parce que tu détestes le mien, c'est ça ?

Lily : Désolée. C'était Frank, mon colocataire.

Thé à la rose : Est-ce qu'il met ses céréales avant, ou après le lait ?

Elle fronça les sourcils, interloquée, avant de répondre sans aucune hésitation. Elle habitait avec Mary et lui depuis deux ans, chacun connaissait par cœur les habitudes des autres, et pour une raison qui lui échappait, elle aimait savoir toutes ces petites choses absolument inutiles sur eux.

Lily : Avant.

Thé à la rose : Alors dis-lui que j'accepte sa proposition.

Thé à la rose : Et que je m'occupe de trouver le traiteur.

Thé à la rose : Mes parents aimeraient sûrement le rencontrer avant.

Thé à la rose : Ps : s'il comptait offrir des fleurs à ma mère et une bouteille à mon père, qu'il fasse l'inverse. Mon père adore les myosotis, et ma mère, le vin blanc.

Elle s'esclaffa, les doigts suspendus au dessus de son clavier, et lorsque Frank passa la tête par l'encadrement de la porte, toute haine avait disparu. Elle lui fit signe de s'approcher, et il se méfia un peu, mais tendit le cou lorsqu'elle tourna son portable vers lui.

« Oh, jolie pirouette, Thé à la rose. Bien joué. Je suis désolé Lil', mais je crois que je vais vraiment finir par l'épouser, plaisanta t-il, et elle sourit tout en se saisissant de son mug pour boire une gorgée de tisane.

- J'espère que tu es prêt à déménager au Canada.

- J'avais oublié ça, grimaça t-il. »

Elle hocha mécaniquement la tête et traversa la pièce pour retourner s'asseoir dans le canapé, balançant ses pieds sur la table basse au passage.

Lily : Il est ravi, mais je crains que le mariage ne doive attendre.

Lily : Il n'est pas prêt à t'accompagner au Canada.

Thé à la rose : J'espère qu'il sait qu'il me brise le cœur.

Lily : Est-ce que je peux faire quoi que ce soit ?

Lily : Oh, attends, je sais.

Lily : Va sur ta base.

Elle ferma sa messagerie et lança le jeu auquel ils jouaient tout les deux, puis chercha « Les Maraudeurs » dans la barre de recherche. Elle trouva directement, et appuya sur « confirmer » lorsqu'une petite fenêtre s'ouvrit lui demandant si elle voulait vraiment rejoindre ce clan.

Il y avait trois autres personnes en plus d'eux, mais elle était était incapable de dire qui était Sirius, et qui était Thé à la rose parce qu'ils avaient tous des surnoms bizarres qui lui firent lâcher un rire perplexe, mais qui était-elle pour juger quand son pseudonyme sur ce jeu là était « Hasard » ?

Hasard : Salut !

Cornedrue : Ylil ?

Patmol : Non ?

Lunard : Bienvenue Lily !

Hasard : Merci Lunard !

Hasard : Alors... Cornedrue, Patmol, Queudver, et Lunard ?

Cornedrue : Bon, tu sais qui je suis.

Cornedrue : Patmol, c'est Sirius.

Cornedrue : Queudver, c'est Peter.

Cornedrue : Lunard, c'est Rémus.

Patmol : Pourquoi est-ce que tu lui as dit ? Je voulais l'embrouiller.

Queudver : Je crois que c'est exactement pour ça qu'il lui a dit.

Hasard: Ça m'apprendra à ne pas avoir craché dans ton café cet après-midi.

Hasard : Sache que je ne referai pas l'erreur deux fois de suite.

Elle ajouta un sourire en coin à la fin de sa phrase, et Cornedrue, Queudver, et Lunard envoyèrent tous des émojis qui pleuraient de rire.

Patmol : Je ne reviendrai jamais.

Hasard : Tu reviendras pour mes cookies, et tu le sais.

Patmol : …

Patmol : C'était vraiment le meilleur cookie de la ville.

Hasard : Je te l'avais dit.

Patmol : D'accord. Tu as gagné.

Patmol : Je boirai ton crachat.

Lunard : Elle est à peine arrivée et tu es déjà répugnant.

Queudver : Est-ce qu'il a battu son record ?

Elle éclata de rire. Frank, qui venait de s'asseoir à côté d'elle, lui adressa un large sourire. Elle savait qu'il était déjà en train de tout raconter à Mary parce qu'il avait son portable entre les mains et qu'il écrivait à toute vitesse, et elle appréciait la distraction que les quatre garçons lui fournissaient sans le savoir.

Hasard : Je l'ai cherché.

Patmol : Enfin quelqu'un qui prend ses responsabilités.

Queudver : C'est quoi la référence derrière ton pseudo, Lily ?

Hasard : Ah ! Attends, tu vas comprendre.

Elle ouvrit la base de Queudver et appuya sur « Attaquer » après avoir vérifié qu'elle possédait assez de troupes, et observé un peu son camp pour trouver l'angle qui lui permettrait de le raser totalement. Deux minutes plus tard, la discussion était parsemée d'émojis choqués. Elle venait d'atomiser Peter, et elle était sûre qu'il venait de lire sur son écran : « Votre base vient d'être détruite par Hasard ».

Patmol : C'EST DU GENIE !

Lunard : Clairement.

Elle s'apprêtait à répondre lorsque Frank se racla la gorge à côté d'elle, faisant un signe de tête vers la Playstation. Elle se rappela à ce moment là qu'elle lui avait promis une partie, alors elle écourta sa conversation avec les garçons.

Hasard : Je dois y aller.

Hasard : Mon coloc m'attend pour un Call Of.

Hasard : Merci pour l'accueil en tout cas. Et désolée pour ta base, Peter.

Patmol : Attends attends !

Patmol : Tu joues sur quoi ?

Hasard : Heu... Playstation, et Frank sur son PC.

Hasard : Vous jouez aussi ?

Cornedrue : Sirius et moi, oui.

Hasard : Vous voulez faire une partie avec nous ?

Cornedrue : Il faut absolument que je fasse mes valises.

Cornedrue : Mais dès que je suis installé à Toronto, on s'en fait une.

Lunard : Que tu fasses tes valises ?

Lunard : Sous-entendu que tu n'as pas commencé ?

Elle quitta le jeu sur son téléphone et ouvrit sa conversation avec Thé à la rose, faisant fuir Frank d'un signe de main lorsqu'il lui lança un regard appuyé qui signifiait juste « Bon, quand est-ce qu'on s'y met ? ».

Lily : Toujours le cœur brisé ?

Thé à la rose : C'est un peu plus supportable maintenant, mais Frank me manquera au Canada.

Lily : Tu ne penses pas ce que tu dis.

Lily : Il ne referme jamais les paquets de chips.

Thé à la rose : Quelle horreur.

Thé à la rose : Au fait, c'est James, mon prénom.

Thé à la rose : C'est moins exotique, j'avais peur de passer inaperçu dans ton répertoire.

Lily : Je doute que ça te sois déjà arrivé.

Thé à la rose : ?

Lily : De passer inaperçu.

Il ne répondit pas à son dernier message, et elle délaissa son téléphone en ayant envie de s'étouffer dans les coussins du canapé. A la place, elle alluma la Playstation, ignorant le tonitruant « ENFIN ! » que Frank, installé dans sa chambre devant son ordinateur, laissa délibérément échapper.