Samedi matin, les six femmes se levèrent tôt pour finaliser leur plan. Elles savaient que la shériffe commençait à neuf heures pour une demi-journée au poste jusqu'à treize heures. Quant à Regina, elle n'avait pas le choix que de se réveiller tôt pour Roland mais quittait rarement le manoir dans la matinée vu qu'Henry, comme tout adolescent qui se respecte, commençait à trainer de plus en plus au lit le week-end. Zelena avait donc prévu d'inviter sa sœur à pique-niquer au parc avec Robyn et Roland, Henry rejoignant généralement ses amis le samedi. Il ne resterait ensuite plus aux autres qu'à trouver des moyens d'attirer Emma dans la zone afin qu'elles se croisent. C'était la tâche attribuée à Ruby, Tink et Mary-Margaret, Belle devant s'occuper de la bibliothèque ce jour-là et Kathryn ayant finalement refusé de participer, arguant qu'elle se sentait mal à l'aise de se mêler de leur histoire.

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Vers midi, Zelena envoya un rapide message sur le groupe WhatsApp pour avertir qu'elle était en place et attendait Regina d'une minute à l'autre. Elle précisa qu'elle s'abstiendrait ensuite de participer à la conversation afin de ne pas éveiller la curiosité de sa sœur, sauf si elles devaient bouger.

LouvYétu : Bon, Mary, tu attends que le criquet sorte de son cabinet pour aller promener Ponge et tu l'arrêtes pour une conversation urgente.

MaryVière : Mais de quoi tu veux que je lui parle ?

LouvYétu : Rho mais je ne sais pas moi. De ton traumatisme d'avoir vu ta fille pratiquement se taper ton ex-belle-mère sur la place publique ?

MaryVière : Tais-toi ! Non, non, non, pas ces images à nouveau !

LouvYétu : Ben voilà, tu vois tu auras de quoi le retenir un petit bout. Tink, toi, tu en profiteras pour choper Pongo et l'emmener au parc.

FéeC : T'inquiète. Au pire, j'utiliserai ma baguette pour qu'il me suive.

LouvYétu : Et moi, j'appelle Emma pour lui dire que j'ai vu passer Pongo tout seul et qu'il courait en direction du parc. Allez, on y va !

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MaryVière : C'était une bonne idée, ça aurait pu marcher.

LouvYétu : Sûrement si ta fille avait autre chose que deux pieds gauches.

MaryVière : Hey, c'est de ton amie que tu parles !

LouvYétu : Ouais, ben justement, je la connais bien mais même moi je dois dire que là, elle s'est dépassée.

FéeC : Ce n'est pas sa faute si Pongo a foncé du parc droit vers le port.

LouvYétu : Non mais elle aurait quand même pu faire attention autour d'elle. Cela fait des années qu'elle vit ici. Elle sait très bien que de nombreux bateaux de pêche reviennent aux alentours de midi le samedi.

FééC : Oui, c'est vrai. Elle n'a pas de chance aussi de s'être pris les pieds dans cette corde et d'être tombée très exactement quand ce chalut ouvrait son filet au-dessus de l'endroit précis où elle était.

MaryVière : En attendant, quand je l'ai croisée vers deux heures, elle râlait de sentir encore le poisson après une heure de douche et trois shampoings…

LouvYétu : Bon, ce n'est pas grave, on va essayer autre chose.

MaryVière : Emma m'a dit qu'elle allait au centre commercial pour se racheter du shampoing et qu'elle en profiterait pour faire les courses. On peut avertir Zelena pour qu'elle aiguillonne Regina vers là-bas ?

LouvYétu : Ça roule. Je l'appelle.

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FéeC : C'est pas vrai, on est maudites. Peut-être que c'est un signe du destin pour nous dire de ne pas nous en mêler ?

MaryVière : Je commence à me le demander. En attendant, si ma fille pouvait avoir une chance de finir cette journée saine et sauve, j'avoue que j'apprécierais.

LouvYétu : Mais c'est sa faute aussi ! Qu'est-ce qu'elle avait besoin de se charger de quinze bouteilles de shampoing ? C'était sûr qu'elle allait en faire tomber.

FéeC : Je ne me doutais pas que ça glissait autant. C'était presque beau. On se serait cru à Holiday's on Ice.

LouvYétu : J'avoue, elle m'a impressionnée. Elle a bien tenu trois minutes avant de s'exploser dans la gondole de lessive.

FéeC : Au moins, elle ne doit plus sentir le poisson vu comme elle a été recouverte de lessive en poudre. On aurait dit un petit elfe de Noël dans une boule de neige…

MarryVière : Et Regina n'était même pas là pour l'aider ! Elle est arrivée alors qu'Emma était déjà repartie, sans doute pour se prendre une nouvelle douche.

OzLena : Regina vient de me dire au revoir. Elle va aller ranger ses courses puis compte appeler Henry pour leur offrir un milk-shake chez Granny avec Roland.

LouvYétu : Ok, c'est tout bon pour nous là, il n'y a rien de plus facile que d'attirer Emma chez Granny.

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LouvYétu : D'accord, les filles, vous aviez raison, on arrête avant qu'il y ait des morts.

FéeC : Il va falloir que tu nous expliques comment Emma a failli cramer le restaurant de ta grand-mère.

LouvYétu : Oh, c'était du grand Swan ! Elle sortait des toilettes quand elle a vu arriver Regina et les garçons. Elle a plongé vers la cuisine. Granny s'apprêtait à sortir avec quelques panières de frites. D'après elle, elles ont décollées pour atterrir droit sur la plaque de cuisson des steaks. Le plastique a immédiatement commençait à fondre en répandant une grosse fumée noire. On a dû évacué pendant que Granny et Emma s'occupait de tout éteindre. Il n'y a jamais eu de réel danger mais il va falloir des jours avant que cette affreuse odeur s'en aille. Et autant pour arriver à nettoyer la plaque. Granny était furieuse. Elle a fait la leçon à Emma si longtemps que Regina et les garçons sont partis entretemps… Quant à notre petit boulet national, elle est repartie bien énervée en disant qu'elle n'allait pas pouvoir éviter sa troisième douche de la journée pour ôter l'odeur de brûlé de ses cheveux…

MaryVière : Définitivement, on arrête tout ! J'aime ma fille mais je préfère la voir foirer ses histoires d'amour qu'y perdre la vie. Et tant pis pour l'honneur des Charmant.

OzLena : T'inquiète, elle porte haut et fort le flambeau de l'idiotie familiale.

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SaviourOfTheDay : Regina ? Je sais que tu m'en veux sûrement. Ce n'était pas très cool de ma part de faire silence radio cette semaine mais j'ai sans doute eu la pire journée possible et tu me manques.

QueenMayor : En effet, Emma, tu n'as pas été très « cool »…

SaviourOfTheDay : C'est le bazar dans ma tête mais je ne pense pas que ça me soit très utile d'y réfléchir toute seule

QueenMayor : Tu veux qu'on en parle ?

SaviourOfTheDay : Oui, mais pas chez nous. J'ai plutôt envie d'être loin du quotidien, des souvenirs, de tout ce qui fait parasite

QueenMayor : Tu me fais confiance ?

SaviourOfTheDay : Toujours

QueenMayor : Je pense que j'ai l'endroit idéal. Je trouve où caser les garçons pour la nuit et je te retrouve chez toi à dix-huit heures. Et on prend ma voiture !

SaviorOfTheDay : Tu devrais prendre rendez-vous chez Archie, ce n'est pas normal un tel acharnement sur une pauvre voiture innocente

QueenMayor : C'est un danger public, elle est coupable par anticipation.

SaviorOfTheDay : Tu m'as vraiment manquée

QueenMayor : Toi, aussi, Emma

SaviorOfTheDay : Tu vas me rendre cinglée, je suis devenue obsédée par ta ponctuation

QueenMayor : Tu as toujours été cinglée, Emma

SaviorOfTheDay : Et tu adores ça

QueenMayor : Oui

SaviorOfTheDay : A très vite ?

QueenMayor : A très vite, Emma

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Comme il se doit, Regina se présenta à dix-huit heures pile devant la maison d'Emma. Celle-ci était prête depuis plus d'une demi-heure et nerveuse comme elle ne l'avait jamais été avant de retrouver son amie. Le trajet s'effectua dans un silence chargé de non-dits. Regina les emmena sur des petites routes à travers la forêt. Elles finirent par arriver dans un endroit dégagé près d'un petit lac aux eaux transparentes. Une minuscule maison de pin clair était nichée entre les arbres, l'entrée donnant sur la rive.

- C'est sûrement très cliché de ma part de dire cela, surtout ici, mais on dirait une maison de conte de fée.

- Ha, ha, oui, sans doute un peu. Cela a longtemps été mon refuge dans les moments trop difficiles avec Henry entre autres. J'y passais quelques heures ou quelques jours selon le besoin. Viens, je vais faire visiter.

Regina eut vite fait de lui montrer l'intérieur qui se résumait à une seule pièce avec un petit coin cuisine à droite de l'entrée et une minuscule salle de bain au fond à droite. Tout était en bois clair. Il y avait beaucoup de livres un peu partout et quelques objets qu'on pouvait deviner porteurs d'histoire. Un grand lit était situé face à la porte et un poêle en fonte sur la gauche avec un grand fauteuil-club à ses côtés.

- C'est assez spartiate mais c'est surtout la tranquillité de l'endroit et la nature autour que je venais chercher. J'ai pensé que ça conviendrait bien.

- C'est parfait. Je me trompe où il n'y a jamais eu que toi à venir ici.

- En effet.

- Merci, alors, de m'y accepter. J'ai l'impression de faire intrusion dans ton jardin secret.

- Cela ne me coûte rien, Emma, c'est toi, la rassura Regina. Tu veux un verre ? J'ai quelques bouteilles en réserve.

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Une fois qu'elles furent confortablement installées sur le lit, seul endroit qui pouvait accueillir deux personnes, adossées à la tête de lit au milieu d'une nuée de coussins, Emma se lança.

- Tu m'excuses encore pour cette semaine ? Je ne voulais pas te blesser, je ne savais juste plus du tout où j'en étais. Avec ce foutu sort, je ne savais plus ce qui venait de nous ou de ses effets… Et j'avais réfléchi, tu sais, à ce que tu m'avais dit… Et je ne voulais pas, je ne veux pas, te perdre comme amie… Et j'ai eu peur que le sort n'ait fonctionné sur nous que parce que nous étions les personnes visées et pas parce qu'il y avait autre chose entre nous que de l'amitié ou que, même s'il y avait autre chose, tu n'en voudrais peut-être plus une fois le sort brisé…

- Parce que toi, tu l'aurais encore voulu ?

- Je ne sais pas. Peut-être.

- Quand Gold a demandé plus de détails pour savoir si nous avions partagé un baiser d'amour vrai et que j'ai réalisé que ce n'était pas le cas, cela m'a terriblement attristée. Je ne l'aurais pas été si je n'avais pas voulu plus que de l'amitié, non ? J'y ai réfléchi depuis et je me suis dit que je me fichais pas mal de l'amour véritable, l'amour tout court, c'est parfait aussi, c'est ce que partage la plupart des gens et ça leur va très bien. Toujours est-il que le sort est rompu et que tout ce qui arrivera désormais ne viendra que de nous.

- Et si jamais ce n'est finalement que platonique entre nous ? questionna Emma, la voix prise par l'inquiétude.

Regina posa son verre sur la table de chevet et prit celui d'Emma pour en faire de même. Elle en voulait toujours un peu à la Sauveuse de l'avoir ignorée toute la semaine et décida de la taquiner un peu en compensation.

- Eh bien, Emma, murmura-t-elle de sa voix la plus enjôleuse en plongeant ses yeux dans ceux de la blonde, si jamais ce n'est vraiment que « platonique » entre nous, ça ne devrait rien te faire si je t'embrasse, non ?

- Heu.. Non… Mais… Ce n'est pas toi qui disait qu'on ne devrait pas ?

- Tant qu'il y avait le sort mais il est rompu…

- Oh… Heu… D'accord alors…

Regina eut un petit rire devant l'embarras d'Emma mais il prit vite fin tant elle se sentait tout aussi nerveuse qu'elle sous son masque de séductrice. Elle avait tellement envie qu'il se passe quelque chose et tellement peur qu'il ne se passe rien. Elle s'avança et posa ses lèvres sur celles de son amie.