Elles furent réveillées par le soleil, le chant des oiseaux et le grondement du ventre d'Emma qui résonna dans l'oreille de Regina assoupie sur cette partie exacte de l'anatomie de son amante. La brune éclata d'un rire tellement libre et heureux que la blonde en fut réchauffée dans son intégralité. Connaissant l'appétit de sa compagne, Regina conjura à l'instant sur le lit un plateau contenant un petit-déjeuner digne d'un cinq étoiles qu'elles se partagèrent nues, se dévorant autant des yeux que les mets à leur disposition.

- Je crois que si l'on me demandait de choisir mon son préféré, ce serait celui de ton rire.

- J'hésite à répondre qu'en ce qui me concerne ce pourrait être celui que tes entrailles viennent de nous délivrer. Il n'est pas beau mais il est tellement toi.

- Méfiance, Majesté, vous allez finir par ressembler terriblement à ma mère.

- Je te fais confiance pour m'en préserver ou m'achever si cela venait à être le cas.

- Des idées particulières sur la forme que devrait prendre ta mise à mort ? susurra Emma séductrice.

- Je te fais aussi confiance pour faire preuve d'imagination… lui répondit Regina avec un sourire mutin et le regard chargé de désir, avant de débarrasser le lit des restes de leur festin d'un rapide mouvement du poignet et de s'y enfoncer en appelant à elle la blonde d'un petit geste de son index.

Ce fut au tour d'Emma d'éclater de rire avant de rejoindre son amante pour lui prouver qu'elle avait beau être son idiote, elle pouvait se révéler particulièrement vive d'esprit quand les circonstances le nécessitaient.

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Quand elles retournèrent en ville le lendemain après-midi, après un week-end à faire des folies de leurs corps, elles se figèrent sur place. Elles ne perdirent pas une seconde à garer la voiture sur le bord de la rue principale et sortirent pour regarder, hallucinées, ce qui les entouraient. Bien sûr, elles avaient remarqué que les bois avaient quelque peu changé quand elles s'étaient enfin décidées à quitter le lit vers midi pour profiter du soleil et des eaux claires du lac, où Emma avait d'ailleurs une nouvelle fois prouvé à Regina que l'imagination n'était définitivement pas une qualité qui lui faisait défaut. Ils leur étaient apparus plus majestueux, plus luxuriants, plus lumineux. Elles avaient même partagé une hallucination commune en pensant apercevoir une licorne derrière un chêne gigantesque. Mais elles avaient attribués cette impression au sentiment amoureux dans lequel elles baignaient. D'autant que, quand elles avaient été vérifier, l'animal avait disparu. Elles étaient donc tranquillement rentrées pour se rhabiller avant de prendre la route du retour. Mais là, arrêtées au milieu du centre-ville, elles n'eurent d'autre choix que de se rendre compte qu'un événement totalement anormal était survenu dans Storybrooke durant leur petite escapade. Elles avaient bien une idée de l'origine de tout cela, ayant senti la vague d'énergie impressionnante s'échapper d'elles, mais elles n'arrivaient pas à croire qu'elles aient pu créer un changement d'une telle ampleur et, surtout, d'un tel ordre.

- Putain, il s'est passé quoi ici ?

- Oh, bon sang, j'ai la nausée. On se croirait dans un univers parallèle rêvé par ta mère, c'est écœurant. Pitié, ne me dis pas que c'est nous qui sommes à l'origine de cela, gémit Regina. Je crois n'avoir jamais eu aussi honte de toute ma vie, je suis à la limite de l'autodafé avec mes propres boules de feu.

- Tu crois vraiment que ce que nous avons ressenti pendant que… enfin, tu sais quoi… que ça a créé ça ?

- Je le crains.

- Ah ben merde ! On n'aurait pas pu faire comme tous ceux partageant l'amour véritable et se contenter d'un putain de petit arc-en-ciel ? Oh, bordel, ma mère ne va plus nous lâcher !

- Avec la puissance de nos deux magies, on aurait dû s'attendre à des retombées plus exceptionnelles que celle du commun des mortels, soupira la sorcière brune. Et, vraiment, Emma, tu es obligée de sortir un juron toutes les trois secondes ?

- Oh, Madame fais la fine bouche maintenant. Mais quand j'utilise ces mots-là dans certaines circonstances, tu n'as rien contre, hein ? se moqua Emma en se rapprochant d'elle.

- Absolument pas, affirma Regina, dont les paroles furent pourtant fortement démenties par la teinte cramoisie qui envahit ses joues, avant de se laisser embrasser passionnément par sa Sauveuse.

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Quelques minutes après, averties de la présence et de l'évolution de la relation des deux amantes par Ruby qui les avaient aperçues de la vitrine du restaurant chez Granny, le groupe de copines les rejoignit avec des sourires indiquant très clairement leur disposition d'esprit. Gênée, les mains dans les poches, Emma sautillait sur ses pieds en se mordant la lèvre supérieure. Regina, elle, chercha vainement un trou où elle aurait pu disparaître avant de se redresser de toute sa hauteur d'ancienne reine, prête à faire front. Il était hors de question de leur laisser voir à quel point cette manifestation extravagante de leur amour la faisait mourir d'humiliation.

- Coucou, sœurette, une idée de ce qui a pu se passer pour qu'on ait l'impression qu'une licorne a vomi sur Strorybrooke ? ironisa Zelena.

- Vous nous aviez caché cette passion débordante pour les tons pastel, renchérit Tink.

- Vous voulez qu'on vous trouve des petits noms plus en accord avec vos nouvelles tendances stylistiques ? Genre poussin ou chaton ? ricana Ruby.

- Personnellement, j'ai une préférence pour ma puce ou mon petit cœur d'amour, gloussa Belle.

- Mon sucre d'orge ? Mon petit pain d'épice ? proposa à son tour Kathryn, narquoise.

- Ah non, Kathryn, pas toi aussi, couina Regina.

- Oh, mon Dieu, on a fait couiner Regina ! hurla Ruby. Mary, tu veux l'achever ?

- Mon bébé, ma Gigi ? osa Mary-Margaret, se retenant difficilement d'exploser de rire.

A son mérite, Regina resta stoïque. Seules la trahirent ses mâchoires serrées à faire mal, une teinte qui virait de plus en plus au rouge violacé et une larme unique qui descendit lentement le long d'une de ses joues. Pleine de compassion pour le martyre de son amour, Emma se colla à elle et glissa un bras autour de sa taille. Elle essuya la goutte d'eau salée d'un baiser tendre avant de se retourner vers la petite troupe hilare.

- Ok, ok, vous ne pouviez pas rater l'occasion, c'était trop beau, je suis d'accord, leur déclara-t-elle. Mais on peut passer à autre chose, maintenant ? Parce que je l'aime vraiment, la petite brune qui est en train de faire une rupture totale là, et que je voudrais avoir une chance d'en profiter quelques décennies au lieu de la voir exploser en milliers de petits morceaux dans la minute.

Les autres femmes grommelèrent quelques secondes de se voir si vite privées de la rare et merveilleuse occasion de faire tourner Regina en bourrique mais se précipitèrent finalement sur elles pour un câlin collectif et des félicitations enthousiastes. La brune protesta un peu, pour la forme, avant de se laisser engloutir avec Emma. Au bout de quelques minutes, elle se désengagea.

- Bon, ce n'est pas tout ça mais j'ai intérêt à m'y mettre rapidement si je veux pouvoir à nouveau traverser ma ville sans avoir perpétuellement le cœur au bord des lèvres.

- Quoi ? s'écria Mary-Margaret, les yeux humides. Oh, non, tu ne vas rien changer ! C'est trop beau !

- Ta réaction est très exactement ce pourquoi je dois le faire sans perdre une seconde, confirma l'ancienne reine avant de lever les yeux au ciel à la vue de Mary-Margaret qui fondait en larmes.

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Quelques jours plus tard, les rues de Storybrooke avaient retrouvé une apparence plus normale. Regina ne les avait pas totalement rendues à leur aspect originel cependant. Même si elle ne l'avouerait pas sous la pire des tortures, une semaine de vacances avec Mary-Margaret par exemple, elle appréciait que la ville garde des traces de sa transformation magique. Pour une part parce qu'il fallait reconnaître que cela embellissait ce petit bourg auparavant un peu morose mais surtout parce qu'elle aimait à contempler quotidiennement les preuves concrètes de ce qu'elle partageait avec Emma. Confrontée, elle aurait laissé entendre que cela flattait son orgueil de se savoir capable d'une telle prouesse magique alors qu'à la vérité, elle se réjouissait juste de voir des preuves de l'amour que la blonde lui portait aux quatre coins de la petite ville. Elle avait donc conservé les lampadaires, les fontaines et les bacs de fleurs, même si elle les avait rendus un peu plus sobres. Elle avait aussi fait passer quelques édits à la mairie pour protéger les créatures merveilleuses apparues dans les bois et les eaux de la ville, interdisant à quiconque d'y porter atteinte de quelque manière que ce soit à moins d'être définitivement banni de Storybrooke. Cela lui avait valu un sourire moqueur de sa compagne qui avait fait référence à une étape supplémentaire vers sa transformation définitive en son ancienne belle-fille. A la suite de quoi, pour son plus grand plaisir, Regina s'était appliqué à lui montrer toute la nuit durant qu'elle pouvait se montrer beaucoup plus semblable à la Méchante Reine si l'envie lui en prenait.

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A la fin de la semaine suivant leur échappée dans les bois, Emma avait mis sa maison en vente et s'était définitivement installée chez Regina. Elles se moquaient éperdument que ce que tout un chacun pouvait en penser, que c'était trop rapide, qu'elles venaient juste de divorcer et autres billevesées que lancent tous les frileux à la recherche d'excuses pour faire trainer. Avec leurs vécus et la profonde amitié qui les unissait depuis des années, elles n'en avaient aucune envie et nul besoin. Elles savaient que ce qui les unissaient n'aurait d'autre fin que la leur. Cela faisait déjà bien trop longtemps qu'elles attendaient de pouvoir vivre un vrai bonheur et le grand amour en famille et elles n'allaient pas en perdre une seule minute. Et puis, de toute façon, quand avaient-elles jamais écouté les conseils de qui que ce soit quand elles avaient quelque chose en tête ? D'autant que les deux garçons qui partageaient leur vie quotidienne étaient ravis de l'évolution de leurs rapports. Henry était pratiquement aussi extatique que ses mères et sa joie déteignait sur Roland. Et puis, avec ce qui les unissaient désormais, les deux femmes avaient largement pardonné leurs époux et Robin, ne craignant plus pour son intégrité physique, passait plus régulièrement récupérer son petit bonhomme pour des week-ends avec lui dans les bois.

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Quant aux copines, même si elles ne perdaient pas une occasion de lancer quelques piques relatives à leur lien d'amour véritable et à la transformation de la ville, elles étaient absolument enchantées pour elles, même Mary-Margaret. Celle-ci avait cependant émit la condition expresse que les amoureuses évitent de trop s'étendre sur leurs prouesses sexuelles respectives en sa présence, Emma était tout de même sa fille. Ce à quoi Regina prenait évidemment un plaisir extrême à faire allusion autant que faire ce peut. Au point qu'elle en avait quasiment traumatisé sa future belle-mère qui s'inquiéta un après-midi de savoir s'il y avait un sous-entendu coquin qui lui échappait quand la brune demanda à sa fille de penser à racheter de la farine afin qu'elle puisse faire une tarte aux pommes à apporter lors de leur prochain vendredi. La brune n'avait plus désormais qu'à ouvrir la bouche avec un œil farceur pour que Mary-Margaret vire au blanc et cherche la porte de sortie la plus proche.