Mon regard posé sur son corps, je fond, uniquement éclairée par les reflets lunaires, son corps m'appelle. Elle est là, devant moi, allongée sur ce lit dont les draps froissés sont les seuls témoins des ébats précédents. Pourtant, à ce moment je réalise une chose importante, chaque secondes passées à ses côtés est différente des précédentes. Voilà douze ans que nous sommes ensemble et pourtant, chaque jour cette femme arrive à me surprendre. Elle est ma passerelle vers demain, mon second souffle. Chaque matin à ses côtés ressemble à une première matinée de printemps. Mais cette nuit, je réalise à quel point je suis heureuse, à quel point je l'aime et à quel point j'ai envie qu'elle soit mienne, chaque jour, chaque heure, chaque minute. Son corps contre le miens, parfaite symbiose, les dieux sont jaloux, ils pâlissent.
Pour la énième fois, ma main parcourt ses courbes, apprenant chaque millimètre de son corps que je connais pourtant par cœur. Chaque cicatrice, chaque aspérités, je sais où elles se situent et pourtant l'envie de les embrasser, de les parcourir à nouveau est plus que présente. Cette femme allongée dans mon lit, celle qui a porté notre enfant, qui m'a dis oui il y a sept ans ou encore qui m'a aidé pendant ma convalescence, cette nuit sera mienne une fois de plus. Eros n'a qu'à bien se tenir, ce soir lui aussi va blemir.
Ma main sur sa hanche, l'autre sous son mont de chaire, je la sens se crisper, sa respiration devient davantage saccadée au fur et à mesure que mes lèvres descendent. Son regard ancré dans le mien, la luxure trône, brille et m'enflamme. Après douze ans, il y a tout de même une chose qui ne change pas. Son regard, habité par la luxure et le désir profond dès lors où mes mains se posent sur son corps, me rend fébrile. Elle pense être sous mon contrôle mais elle se trompe, elle a les rennes sans même s'en rendre compte. Mes yeux happés par les reflets de la lune sur son corps, nos regards s'accrochent à nouveau. Les actes parlent, les mots se taisent.
Alors que mes lèvres s'approchent des siennes, qu'elles les frôlent, je la sens quémander ce baiser tant attendu, je recule. La frustration se lit dans son regard, elle s'entend à travers ses soupirs. Après un long chemin de caresses, ma main arrive là où son désir est prêt à exploser. Une caresse furtive, ses cordes vocales résonnent dans une mélodie à en faire pâlir Chopin ou même Bach. Dans un délicieux concert harmonieux de gémissements, je la regarde, l'observe, l'admire. Elle est belle. Je l'aime. Son corps cambré, sa peau diaphane recouverte d'une fine couche de transpiration, sa main accrochée au draps, l'autre à mon bras, cette femme n'a rien à envier à Aphrodite. Elle est mon Aphrodite. Mouvements intensifiés, ses gémissements suivent, pour le plus grand plaisir de mes oreilles. Mais si la vue est des plus passionnantes, je change d'angle. Désormais entre ses cuisses, je la fixe tout en laissant mon souffle s'écraser contre sa peau humide. Je sais que ça l'a rend dingue, j'en joue. Son regard dans le mien, elle me fait comprendre que je vais le regretter mais je n'en ai que faire. Mon premier coup de langue la fait chavirer en arrière, son corps entier m'est offert, j'aime. Je ne peux en détacher mon regard, pourtant je reste concentrée, j'écoute, j'agis.
Explosion d'émotions, de sensations et de désir, elle jouit. Ce gémissement rauque en partie étouffé par son bras semble prendre possession de mon corps et allumer un brasier intense. Je l'aide à revenir sur terre, l'admire quelques minutes avant de la prendre dans mes bras. Douce mélodie qu'est sa respiration avant qu'elle ne prenne les choses en mains, je suis sa chose. Dans son regard, l'amour, le désir, la passion. Comme au premier jour de printemps, celui de notre rencontre.
