Chapitre 6 – Maison de fous

Warnings : torture, violence typique du canon, dépression, pensées suicidaires. Sombre, avec une l'ambiance dans les sanatoriums des années 1900, si ça aide à visualiser quoique ce soit. Pour ceux qui ont vu le soldat de l'hiver, c'est pour vous ! Le chapitre est inspiré de la chanson des Little Mix (Madhouse)


La pièce était constituée essentiellement de teintes argentées. Équipement médical argenté, murs argentés. Des gens en manteaux blancs gravitaient autour de lui, vérifiant les moniteurs, sans faire attention à Anakin. Son regard était flou, mais lorsqu'il baissa sa tête, il vit qu'il était posé sur une sorte de chaise et que ses bras étaient attachés par des liens en métal. Son corps était toujours douloureux, de l'endroit où il avait été avant, et il lui était difficile de se concentrer. Il se sentait mal à l'aise.

Il ne sut pas combien de temps il resta conscient avant qu'on ne le remarque, mais il était trop léthargique, à cause des sédatifs que Dooku lui avait donné, pour qu'il ne s'inquiète. Et puis, franchement, il supposait que ce qu'ils lui feraient ne pourrait pas être pire que ce qu'il avait déjà enduré. Finalement, quelqu'un – ils ressemblaient tous à des docteurs – installa des électrodes sur sa poitrine et fixa un moniteur cardiaque à son doigt. Ils forcèrent l'ouverture de sa bouche et mirent un bout de tissu entre ses dents avant de tirer un objet vers le bas pour maintenir sa tête. Il était toujours groggy, mais suffisamment alerte pour savoir que quelque chose allait arriver, quelque chose qu'il voulait désespérément éviter, alors il laissa ses instincts animal prendre le contrôle et commença à se débattre faiblement contre ses liens dans une tentative inutile de s'échapper.

La machine s'alluma.

Ça fait mal, oh ça fait mal, douleur douleur douleur douleur douleur

Une seconde plus tard, ou peut-être plusieurs minutes, ou peut-être une heure, Anakin rouvrit ses yeux. Ses muscles étaient douloureux, comme s'il avait été battu, et sa tête pendait faiblement d'un côté, il y avait un vague gout de vomi dans sa bouche et sa gorge était sèche, alors il devait avoir hurlé, mais il ne pouvait pas s'en souvenir. Il n'était pas étranger à la torture par électrocution, il savait à quoi ressemblaient des convulsions mais ça – c'était au-dessus de tout ce qu'il avait expérimenté.

Ils - les, eh bien, docteurs ? – lui enlevèrent les attaches de ses bras et l'emmenèrent dans une autre pièce. Il n'avait pas l'énergie de se défendre. Ils le hissèrent sur une table, probablement censée servir de lit, et le laissèrent seul.


Ça se répéta et se répéta et se répéta et se répéta tous les jours. Convulsions, vomi, peut-être un peu ou beaucoup de pleurs, mais ce ne fut qu'au bout de - ce qu'il supposait - deux semaines qu'il réalisa qu'il ne pouvait pas se souvenir de la raison de sa présence ici.

Ne devrait-il pas être dehors pour se battre ? Qui l'avait capturé ? Il ne savait pas. Où étaient Obi-Wan et Ahsoka ? Avaient-ils été capturés également ? Et la 501ème, ses hommes… Il souhaitait pouvoir se souvenir et il n'était même pas sûr de savoir pourquoi ce n'était pas le cas, mais il savait que les gens qui le déplaçaient et l'électrocutaient chaque jour ne répondraient pas alors il ne gâcha pas son énergie en leur demandant.


Ce ne fut que lorsqu'Anakin réalisa qu'il ne pouvait pas se souvenir de sa rencontre avec Ahsoka qu'il comprit exactement ce qu'ils lui faisaient. Il y avait quelque chose à propose de cristaux bleus et d'une planète désertique, Tatooine… Obi-Wan était là et Rex riait de lui… et c'était tout. Ça le hantait jours et nuits (le temps n'existait même pas dans ce lieu, pas de fenêtres voulaient dire que la nuit était le jour et que la nuit était le matin) mais il n'arrivait pas à combler les trous.

Ça le terrifiait. Et si ça allait plus loin ? Et si Ahsoka et Obi-Wan le trouvait et qu'il ne pouvait pas se souvenir d'elle ? Ça le rendait malade, il voulait pleurer. Il s'en abstint, du moins quand il avait de la compagnie, et, au lieu de ça, ressembla son énergie pour se défendre, donnant des coups de pied et des coups de poings et se débattant. Ça n'avait pas vraiment d'impact. Ses coups de pieds manquaient leur cible et ses coups de poings n'avaient aucune force (et pas de Force non plus, combien de temps cela faisait-il depuis qu'il était privé de la Force ?) et même se débattre devint encore plus impossible. Il était trop faible. Trop pathétique. Il tenta de refuser de manger – parce qu'il préférait mourir de faim plutôt qu'oublier ses amis – mais ils l'attachèrent, lui insérèrent une aiguille dans le bras et lui mirent une sonde d'alimentation dans l'estomac pour le garder en vie.


Les convulsions étaient ce qu'il y avait de pire. Non, ce n'était pas vraiment le pire (tout était horrible, rien n'était bien, il était un objet.) mais les convulsions étaient définitivement dans le top cinq. Il se réveillait toujours avec un gout de vomi et de sang, les gens graviteraient autour de lui mais personne ne lui dirait ce qu'il s'était passé, il savait seulement qu'il y avait des convulsions parce que c'était le mot qu'ils utilisaient le plus souvent. Tout était confus, rien n'avait de sens. Il ne savait pas où il était, mais il voulait rentrer à la maison. Qu'importe ce qu'était la maison. Ses amis. Pas qu'il en ait beaucoup. Il y avait Obi-Wan, et Padmé, le Chancelier et… Quel était son nom…


Quand il était seul, il s'allongeait sur la table, fixait le plafond et tentait de se souvenir des choses.

Son esprit était amas de souvenirs, flashs de choses qui auraient pu se passer hier comme il y a trois ans. Il pouvait être là depuis des mois comme des semaines ou des années. Il ne savait même pas clairement quel âge il avait. Vingt, peut-être, ou vingt-et-un. Peut-être plus. Pas plus jeune cependant, parce qu'il se souvenait avoir été un adolescent, donc ces jours étaient derrière lui.

Il avait beaucoup de temps. Il pouvait se focaliser sur un souvenir, et quand il était sûr qu'il ne pouvait plus rien en tirer, il tenterait de penser à quelque chose d'autre. Le sable rougeâtre d'une planète avec beaucoup de morts, la Force qui hurlait…Sa mère, s'affaissant… Obi-Wan, ses bras autour de son torse alors qu'il soufflait des choses qui n'auraient pas d'importance le lendemain…Padmé, dans une robe blanche sur le balcon d'une maison près d'un lac… Des clones, des millions d'hommes au même visage, mourant à chaque tournant alors qu'Anakin respirait toujours…Oui, c'est vrai, il y avait une guerre dehors, combattant dans des milliers de planète alors qu'il était coincé ici, dans une pièce en argent, tentant de comprendre pourquoi il avait une main métallique au lieu d'une vraie.

Des larmes coulèrent de ses yeux, encore une fois. Il se tourna dans son lit et les laissa sortir, silencieux et tremblant. Qu'était ce lieu même ? Est-ce que Padmé allait bien ? Où était Obi-Wan ? Allait-il bien ? Était-il capturé lui aussi ? Où était-il ? Est-ce que ça lui arrivait aussi ? Non, Anakin était certain qu'il le saurait si c'était le cas… Est-ce qu'Obi-Wan était dehors, se battant pour la paix, ou cherchait-il son Padawan disparu comme si sa vie en dépendait ? Est-ce que quoique ce soit était même réel, en-dehors de cette mystérieuse zone de torture délaissée de la Force ? Est-ce qu'il y avait de la vie en dehors de cette maison de fous ? Allait-il un jour le découvrir ?


La majorité du temps, il se conformait – ou, au moins, ne se débattait pas, même s'il ne coopérait pas activement non plus. Il détestait ça, évidemment qu'il détestait ça, mais faire ce qu'il voulait était beaucoup moins douloureux que résister et, à ce stade, échapper à un extra de souffrance faisait la différence. Parfois, cependant, il ne pouvait pas s'empêcher de se battre, quand la rage avait crû pendant plusieurs jours et qu'il ne supportait plus d'être leur jouet (esclave, animal, sujet). Dans l'un de ces moments, sa main métallique avait atterri directement dans le ventre d'un docteur et il l'avait cloué au sol, parce que, hey, s'il avait une pièce de métal attachée à son corps, il pouvait l'utiliser. Pendant plusieurs jours (était-ce vraiment des jours ?), ils gardèrent ses bras attachés et le clouèrent à une chaise. Bien, qu'ils le fassent. Il ne plongerait pas sans se battre.


Il pensait beaucoup à Padmé. Ça avait toujours été le cas, depuis la première et la dernière fois qu'il l'avait vue, et maintenant, il tentait de s'accrocher à n'importe quel souvenir, tant qu'il le pouvait encore. Padmé était une reine merveilleuse et tout le peuple de Naboo l'aimait. Il l'aimait lui aussi, il en était sûr, parce que rêver d'elle et penser tout le temps à elle devait vouloir dire qu'il l'aimait. Elle était gentille et compatissante, comme sa mère, et elle lui avait parlé et s'était intéressée à lui, alors même qu'elle était une reine de la République et qu'il était un esclave de la Bordure extérieur.

Maintenant, c'était comme s'il était à nouveau un esclave, même s'il n'était obligé de travailler, soumis aux caprices de ses maîtres. Il se languissait de son maître. Il espérait – non, il savait – qu'Obi-Wan ne se reposerait pas tant qu'il n'aurait pas trouvé son Padawan. Puis, il ramènerait Anakin à la maison, et tout irait bien et peut-être qu'il serait capable de revoir sa mère et Padmé. Il n'y avait plus beaucoup (ou pas du tout) d'espoirs en lui, mais ça ne voulait pas dire qu'il ne pouvait pas rêver. Rêver était probablement la seule chose qui l'aidait à avancer.


Affalé sur une chaise dans la pièce dans laquelle ils le gardaient quand ils ne le battaient pas, Anakin fixa d'un air hébété son propre corps. Tous les muscles qu'il avait se fanaient, à cause d'une inutilisation, laissant une peau étrange et défigurée dans leur sillage. Ses os semblaient tous pointus, et nombreuses côtes pouvaient être comptés. Il ne pouvait plus vraiment tenir debout tout seul et la nourriture qu'ils lui donnaient avait un goût de peinture. Son bras en métal était toujours un mystère.

Ce qui le troublait le plus, cependant, était la question sur la durée qu'il avait passée ici. Ses souvenirs les plus récents et les plus clairs dataient d'une mission diplomatique qui avait été tellement ennuyante à cette époque (il donnerait n'importe quoi dans l'univers pour une éternité de mission diplomatiques ennuyantes, si ça voulait dire s'échapper de cet enfer-prison), et il avait… quatorze ans, sans doute. Dans sa tête, ça semblait dater d'il y a un mois, mais la logique lui disait que ça devait au moins faire plusieurs années. Mais il ne savait pas. Il ne savait plus rien.

Il soupira bruyamment. Il souhaitait savoir ce qu'il allait advenir de lui une fois qu'ils en auraient fini de lui, quand son esprit et son corps auront été réduits à rien. Le jour allait se lever, et rapidement, et il n'était pas sûr que ce qui faisait de lui Anakin serait toujours là.


En chemin vers la chaise, Anakin se débattit, gémissant absurdement et tentant de les envoyer au sol dans une dernière tentative désespéré, parce qu'il restait si peu et que tous ses souvenirs semblaient lui être enlevés et que la seule chose, la seule personne en-dehors de sa vie sur Tatooine, qu'il pourrait accepter dans son esprit avec lucidité était Obi-Wan et pitié pitié pitié ne lui enlevez pas –

« Non, pitié…Maître…Je veux mon maître…Obi-Wan, pitié…aidez-moi… »

Ils l'attachèrent et il se débattit contre les liens, gémissant, « Pitié, pitié n'enlevez pas mon maître, pitié, ne prenez pas mon maître, pitié - »

- Et ça fait mal mal mal et quand il se réveilla le jour suivant, il ne put se souvenir qui était censée être 'Maître'.


Tout était presque parti. Tatooine était presque parti. Sa mère était presque partie. Il était presque parti. Il n'y avait rien qu'il pouvait faire. C'était terminé. Ils avaient gagné.


Il cessa de se débattre, pour de bon. Il n'avait plus aucune raison, plus maintenant. Tout faisait toujours mal, ses muscles après une crise, sa tête durant le traitement, le moignon de son bras où le métal rencontrait la chaire, sa poitrine quand il luttait pour respirer parce que quelque chose le faisait paniquer. Tout était confus. Rien ne faisait sens. Il y avait si peu de choses qu'ils pouvaient encore lui faire. Il ne pouvait se souvenir de rien, ni d'où il venait, ni de comment il était arrivé ici ou même de son nom. Il était une coquille vide. Si quelqu'un lui avait dit qu'il avait vécu une vie avant cet endroit, il n'aurait rien eu pour réfuter l'affirmation.

Il passa des jours à fixer le vide. Quand ils mettaient de la nourriture en face de lui, il la mangeait. Il ne pouvait pas vraiment tenir debout et il pouvait difficilement s'assoir, alors il laissait les docteurs graviter autour de lui comme un chien. Il les laissait le nettoyer sans objection et il ne ressentait même plus le besoin de pleurer. Quel en serait l'intérêt ? Ce qui allait lui arriver allait arriver. À ce stade, il n'y avait aucune raison de lutter.


Disclaimer : Si ce chapitre contient des images d'anciens asiles et du mauvais traitement des patients, la science derrière ce chapitre est complétement fictive. Par exemple, même si j'ai été en partie inspiré.e par le portrait de la TEC dans des films comme One Flew Over the Cuckoo's Nest, dans la réalité, TEC (thérapie électroconvulsive) est très utile et bénéfique quand on l'utile dans les bonnes circonstances, et non pas en méthode de torture. C'est une idée fausse et je veux que tout le monde sache que je ne tente pas de dire que la TEC est inhumaine.

Bref, comme toujours, un grand merci pour tous les love ! je ne pas décrire à quel point c'est important pour moi ! j'ai seulement répondu à quelques reviews mais elles me rendent toutes heureuses alors merci merci merci ! Et maintenant que vous êtes entrés dans le monde de la souffrance et du lavage de cerveau, je suis reconnaissant.e envers quiconque lit. Restez connecté parce que la lutte continue pour Padmé qui doit jongler avec sa carrière et le poids écrasant de sa culpabilité auto-imposée.