Bonjour à tous !
Je vous livre ici un petit one shot sur Stranger Things, mon premier écrit sur cette série que j'ai découvert tardivement, je l'admet, et que j'ai regardé sur les conseils d'une amie incroyable. J'ai placé cet OS après la saison 2, mais après ça elle peut être placée à peu prêt n'importe où, je n'y ai simplement pas évoqué les événements des saison 3 et 4.
Disclaimers : Le scénario de la série Stranger Things sur laquelle je me base a été écrit par les frères Duffer, elle ne m'appartient nullement. Seule l'histoire m'appartient, je ne touche pas d'argent pour mes écrits, ma seule récompense est le plaisir de lire vos reviews alors n'hésitez pas à prendre une minute pour me faire part de votre avis sur cette histoire.
Bonne lecture à tous !
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Steve Harrington avait tout pour lui. C'est ce que tout le monde pensait à Hawkins. Il était né dans une famille riche, il était beau garçon, il plaisait aux filles, il était bon au basket-ball et, s'il n'était certes pas un futur prix Nobel de physique, il n'était néanmoins pas plus bête qu'un autre. Le Roi Steve. Il ne se souvenait plus à quel moment ce surnom était apparu. Au début cela lui laissait, bien sûr. Sa fierté et son orgueil s'en trouvaient nourris, il était le Roi Steve.
Ce sobriquet ne résonnait plus de la même manière à ses oreilles, à présent. Il lui apparaissait creux, vide. Le vide. C'était une notion qu'il connaissait bien. Le vide et la solitude l'accompagnaient depuis de si longues années…
Steve Harrington avait tout pour lui. C'est ce que tout le monde pensait à Hawkins. Pourtant Steve se sentait vide et seul. Il semblait qu'un mur infranchissable se dressait entre lui et ses parents. Son père était un homme déterminé, doué dans les affaires et qui ne supportait pas les échecs. Malheureusement pour Steve, il semblait être un échec particulièrement décevant aux yeux de son père. Quoi qu'il fasse, ce dernier n'en était jamais satisfait. Toute sa vie Steve avait tenté de le rendre fier. Sans succès. Steve ne faisait jamais assez, il n'était jamais assez bien pour son père.
Il n'avait pas beaucoup plus de succès du côté de sa mère. Madame Harrington ne s'était jamais senti un instinct de mère ou même l'envie d'accéder à la maternité. Elle avait mis au monde un fils parce que c'était ce que l'on attendait d'une femme mariée, rien de plus. Elle ne ressentait pas cet élan d'amour infini dont toutes ses amies parlaient à propos de leurs enfants. Elle avait toujours trouvé que son fils était beau et elle en tirait un certain orgueil, mais elle ne parvenait pas à l'aimer, malgré ses tentatives. Voir ce besoin d'attention et d'amour dans les yeux de Steve la mettait mal à l'aise et elle préférait l'éviter autant que possible. Comme elle s'en sentait coupable, elle tentait de compenser ce manque d'amour par une abondance d'argent et de biens matériels.
Cela ne compensait pas et Steve se sentait vide.
Quand ses parents étaient à Hawkins, Steve se contentait donc de les éviter au maximum, pour ne pas croiser le regard fuyant et coupable de sa mère, et pour ne pas entendre les reproches incessants de son père qui le faisaient se sentir si nul, si incapable.
Quand Monsieur et Madame Harrington n'étaient pas là, c'est-à-dire la grande majorité du temps, Steve étouffait dans sa grande maison chic, désespérément vide.
Enfant il s'y était senti bien, pendant quelques mois. Ses parents avaient engagé une femme pour qu'elle leur serve à la fois de femme de ménage et de nourrice. Elle s'appelait Maria et venait du Mexique. Steve se souvenait bien de Maria, de sa peau dorée, de ses cheveux noirs tirés en un chignon strict, de son sourire, de ses yeux bruns doux et de son accent chantant. Elle s'occupait de lui, avec une patience et une douceur qui lui étaient jusqu'alors inconnues. Maria allait le chercher à l'école, lui préparait son goûter en lui demandant de lui raconter sa journée. Et elle écoutait. Elle écoutait son babillage d'enfant, le félicitait s'il avait eu une bonne note, l'encourageait à persévérer quand il en ramenait une moins bonne. Quand il pleurait, les genoux et les paumes des mains en sang, après être tombé de son vélo, elle désinfectait et soignait ses bobos en lui chantonnant un air de son pays, puis elle séchait ses larmes avant de poser un baiser magique sur son front.
Steve aimait Maria, la maison semblait plus jolie lorsque sa voix chantante y résonnait et elle faisait naître une petite boule chaude et réconfortante dans sa poitrine d'enfant. Il l'aidait à améliorer son anglais et en échange elle lui apprenait l'espagnol, elle lui apprenait à faire rouler ses « r » sur sa langue et à mettre de la musique dans sa voix. Oui, Steve aimait beaucoup Maria. Mais Monsieur Harrington s'en était aperçu et il avait vu d'un très mauvais œil l'attachement du petit garçon envers la domestique. C'est ainsi qu'un matin, Steve, étonné de ne pas voir Maria en descendant prendre son petit-déjeuner, avait appris sans ménagement que Maria avait été renvoyée la veille au soir et que, faute d'un emploi, elle allait être renvoyée au Mexique. On ne lui avait même pas laissé la possibilité de lui dire au revoir ou merci. Merci d'avoir été là. Merci de t'être occupée de moi. Merci pour tout. Et juste comme ça, au milieu de ses larmes salées, petit Steve était à nouveau vide et seul.
Les années avaient passé, Steve grandissait et tentait de remplir ce vide au fond de lui par tous les moyens : des jouets, de l'argent de poche, des vêtements, puis des cigarettes, de l'alcool, une voiture. Il se sentait vide, et nul, et incapable, un échec. Il tentait d'effacer la solitude, tout le monde voulait fréquenter le Roi Steve. Il traînait avec Tommy et Carol, disait partout qu'ils étaient ses amis. Mais cela sonnait faux et Steve savait qu'il se mentait. Ils n'étaient pas de vrais amis, ils ne se souciaient pas réellement de lui, de qui il était. Ils voulaient le Roi Steve, celui qui avait une confiance absolue en lui, qui paradait et qui se comportait comme si le monde lui appartenait. Pas le Steve qui doutait, le Steve qui se sentait dévoré par ce vide glacial dans son ventre, pas le Steve qui complexait sur son intelligence après des années à être rabaissé par son père.
Et puis il y avait eu Nancy. La sage, studieuse, Nancy Wheeler. Steve était tombé amoureux. Pour la première fois de sa vie, il était sincèrement amoureux. Elle était différente des autres filles qu'il avait fréquentées. Il ne se sentait plus aussi seul, avec elle il espérait pouvoir être Steve, juste Steve. Elle était douce, et timide et elle avait tendance à le faire se sentir stupide mais il avait l'habitude, n'est-ce pas ? Et puis Nancy avait ce petit côté maîtresse d'école qui tenait toujours à tout expliquer aux autres, un peu exaspérant parfois mais chez elle il trouvait ça mignon et peut-être qu'avec elle il serait moins bête ?
Il était amoureux et voulait vivre sur son petit nuage mais tout ne s'était pas passé comme il l'avait imaginé. Le petit Will Byers avait disparu, Barbara aussi, et il avait découvert l'existence des monstres. Des monstres sortis des pires cauchemars. Sauf que ce n'était pas un cauchemar : il existaient des monstres, venus d'un monde miroir, d'un monde à l'envers. L'Upside Down.
Après avoir combattu un monstre avec Nancy et Jonathan dans la maison des Byers, après le retour de Will, Steve avait espéré que tout rentrerait dans l'ordre. Ce ne fut pas le cas.
Ils avaient essayé, tous, de reprendre une vie normale. Ce n'était pas un franc succès. Il sentait Nancy s'éloigner, peu-à-peu, il avait espéré, prié, pour que les choses s'améliorent entre eux. Mais il n'avait pas réussi. Comme d'habitude. Un échec. « C'est de la merde. Nous, c'est rien que de la merde ». Désinhibée par l'alcool, Nancy avait finalement avoué. Elle ne l'aimait plus. Steve savait qu'ils étaient jeunes et qu'à leur âge les couples se faisaient et se défaisaient. Mais il était amoureux. Il avait essayé d'être lui-même. Nancy avait commencé à sortir avec le Roi Steve et il l'aimait tellement, il avait pensé que c'était bon, qu'il pouvait être juste Steve. Et maintenant elle le quittait. Il avait mal, il avait envie de vomir et de pleurer, il avait froid, il était seul et il était si désespérément vide. En voyant à quelle vitesse Nancy avait trouvé les bras de Jonathan, Steve avait envie de se rouler en boule dans le noir. C'était lui le problème, n'est-ce pas ? Nancy avait aimé le Roi Steve, mais n'aimait plus Steve, juste Steve. Donc c'était bien lui, Steve, juste Steve, Steve et ses doutes, Steve et ses complexes, le problème. Peut-être que son père avait raison : il n'était jamais assez bien, il était un échec.
Cependant Steve ne pouvait guère se permettre de disparaître, reclus dans sa maison aussi vide que lui. Le surnaturel n'en avait manifestement pas fini avec Hawkins et il s'était à nouveau retrouvé embarqué dans des histoires de monstres par le petit Henderson. Il n'aurait jamais cru dire ça un jour, pourtant, ce moment fut un tournant dans sa vie, un tournant vers quelque chose de positif.
Jusqu'alors il ne pouvait pas dire qu'il connaissait très bien le groupe de collégiens. Ils étaient tous liés, les enfants, Hopper, Joyce, Jonathan, Nancy et lui, par l'Upside Down. Pour autant, Steve ne les fréquentait pas suffisamment pour prétendre les connaître réellement. Cela avait changé, grâce à Dustin. Et à Dart.
Cela faisait déjà plusieurs heures que Steve aidait Dustin à chercher la bestiole qui avait dévoré son chat lorsqu'il s'en était aperçu : au cours de ce temps passé avec le gamin il s'était senti mieux. Dire qu'il se sentait bien aurait été exagéré, sa rupture avec Nancy était encore trop vive, trop brûlante, et il était en train de semer des bouts de viande dans la forêt en compagnie d'un collégien pour attirer un monstre dimensionnel bouffeur de chat. Il n'appelait pas ça « se sentir bien ». Mais sa vie était devenue suffisamment étrange pour que cela lui permette de se sentir un peu mieux.
S'il était absolument honnête avec lui-même, et dans le secret de ses pensées il pouvait bien se l'autoriser, il avait parfois été jaloux du groupe formé par les enfants. Ils étaient de vrais amis, prêts à sauter tête la première dans les ennuis pour venir en aide à l'un d'eux. Steve n'avait jamais eu d'amis comme cela. Il était envieux et plus étonnant, admiratif. Au collège ils étaient les nerds, bizarres, enfantins, ils étaient loin d'être populaires. Ils auraient pu faire comme tout le monde, se forcer à changer, pour rentrer dans le moule. Mais non. Ce n'était pas facile tous les jours, mais ils restaient eux-mêmes, malgré les critiques et les moqueries.
Steve n'avait pas eu cette force-là. Il était devenu le Roi Steve.
Le Roi Steve avait l'habitude d'être regardé avec envie, il en avait été flatté, puis il s'était aperçu de la futilité de sa popularité et cela l'avait lassé. Il s'était senti vide, encore. Toujours.
Seuls dans la forêt, jouant à une version gore du Petit Poucet, une étrange amitié avait vu le jour. Dustin regardait Steve avec une admiration si différente de ce qu'il avait connu par le passé. Son regard était sincère, pur, enfantin. Cela lui serra agréablement le cœur. Il écouta, patiemment, les doutes de l'enfant aux cheveux bouclés qui voulait savoir comment plaire aux filles, il écouta ses explications passionnées à propos de Dart, la raison qui l'avait poussé à cacher la créature à ses amis et à quel point il s'en mordait les doigts.
Il y avait quelque chose de profondément attachant chez ce préadolescent.
Cela avait commencé avec Dustin, mais rapidement Steve s'était retrouvé à s'occuper de tous les enfants de la petite bande. Il avait pour mission de les surveiller et, plus largement, de les garder en vie, ce qu'il n'était guère aisé à Hawkins. Il avait été jusqu'à se battre (se faire massacrer, selon Dustin) avec Billy Hargrove pour protéger Lucas et Max, et à faire brûler des tunnels abritant des lianes démoniaques et des démodogs tout aussi infernaux.
Il s'était senti utile. Il n'arrivait pas à se souvenir de la dernière fois qu'il s'était senti utile.
Au début Steve avait protesté, bien que faiblement, lorsqu'il s'était fait surnommer « le baby-sitter » par Nancy et Jonathan. Mais finalement, il aimait ce qu'impliquait ce surnom, si éloigné de celui du Roi Steve. Il aimait s'occuper de tous ces jeunes ados, il aimait qu'on lui fasse confiance pour s'occuper d'eux. Il se souciait d'eux, il était toujours prêt à les aider, qu'il s'agisse de démodogs ou juste de les emmener à la salle d'arcade. Il les appréciait tous.
Mais Dustin était différent. Steve se sentait utile avec les enfants. Avec Dustin il se sentait important, sincèrement apprécié, plus que jamais dans sa vie depuis le départ de Maria, il y a si longtemps.
Avec Dustin il pouvait être lui-même, juste Steve, et avec le babillage du gamin dans les oreilles la solitude s'estompait. Sa maison devenait moins inhospitalière lorsque Dustin venait squatter chez lui. Il aimait tellement ces moments, lorsqu'ils regardaient un film en grignotant des sucreries et en commentant chaque scène, lorsque Steve apprenait à Dustin comment s'occuper de ses cheveux pour mettre en valeur ses boucles, ou lorsque Dustin s'amusait à sauter à pieds joints sur le grand lit de Steve jusqu'à ce que celui-ci lui lance un oreiller en pleine figure, déclenchant une bataille de polochons épique et mémorable qui s'achevait dans les rires et les cheveux décoiffés. Dustin était comme une lumière qui venait éclairer les recoins sombres de la grande maison vide et froide des Harrigton. Steve ne sentait plus ce vide dévorant lorsque le rire communicatif de ce gamin résonnait entre les murs de cette maison qui n'avait jamais connue de tels éclats de rire, si sincères, si heureux.
Peu à peu, des sentiments inconnus avaient fleuri dans son ventre et dans son cœur. Un attachement profond, une amitié sincère, une loyauté inégalable, une confiance inébranlable. De l'amour. Un amour qu'il n'avait jamais ressenti pour quiconque : l'amour d'un frère. Steve était enfant unique. Il avait toujours été seul. Enfant il avait rêvé d'avoir un grand frère ou une grande sœur, une personne qui l'aimerait et avec qui partager son temps pour ne plus être seul. Mais il était enfant unique. Ou plutôt, il l'avait été. Car à présent, il avait Dustin, cet exaspérant et ô combien adorable petit frère. Ils n'avaient pas le moindre lien génétique, mais ils étaient liés par bien plus que de l'ADN. Dustin était son petit frère. Il le sentait au plus profond de lui. Dustin était son petit frère.
Steve Harrington avait tout pour lui. C'est ce que tout le monde pensait à Hawkins. Il était né dans une famille riche, il était beau garçon, il plaisait aux filles, il était bon au basket-ball et, s'il n'était certes pas un futur prix Nobel de physique, il n'était néanmoins pas plus bête qu'un autre. Il avait des parents perpétuellement absents et peu soucieux de leur fils. Il n'avait pas autant confiance en lui que ce qu'il faisait croire au reste du monde. Steve se sentait vide et seul.
Puis Dustin avait débarqué dans sa vie avec son sourire d'enfant et ses cheveux bouclés. A présent il avait un petit frère sur qui veiller, un petit frère qui avait fait disparaître le vide et la solitude à grand renfort de références geeks et de rires. Alors Steve se disait qu'il n'avait peut-être pas tout pour lui, comme le pensait tout le monde à Hawkins, mais il avait une étrange famille, éclectique et bancale, il avait un petit frère génial, et finalement c'était tout ce qui comptait.
Fin
J'espère que vous avez passé un agréable moment de lecture. Je me permets de rappeler que les reviews sont toujours un plaisir à recevoir, alors n'hésitez pas à m'en laisser une pour me dire ce que vous avez pensé de ce petit texte, je vous répondrai avec le plus grand plaisir !
Au fil de ma plume
