Bonjour, ou Bonsoir, chers lectrices et lecteurs.

Je vous propose ici le prologue d'une petite histoire originale se déroulant dans le merveilleux univers de JK Rowling, que j'essaierais de mettre à jour le plus régulièrement possible…

Dans les rues de la capitale, le sous-sol bruisse de mille petits bruits de pattes, et le ciel bourdonne du battement de centaines d'ailes minuscules. Quelque chose se prépare.

La nuit tombant sur Paris, la rue de Broca pouvait enfin se révéler sous son véritable jour. La pleine lune éclairait de sa froide lumière l'église saint Médard, dont le parc s'emplissait déjà de ses habitants du soirs : des rongeurs plus civilisés aux rats et mulots des campagnes, et des piafs de la gare Montparnasse au corbeaux du père Lachaise, c'était toute la faune des recoins lugubre de la capitale qui se rassemblait. Lutins, lucioles, feux-follets Elfes, faunes et farfadets étaient également de sortie, car ce soir était important. Ce soir, on préparait l'inspection… et il serait fâcheux que l'inspection se passe mal.

Le rond point et la placette du marché mouffetard avaient été méticuleusement nettoyés pour l'occasion, et une confrérie de diablotins, ayant flairé l'occasion de se remplir les poches, avait déjà commencé la vente de divers amuses-gueules, bataillant pour le monopole avec un Lémurien dur en affaire.

Mais alors que le gang des corneilles se disputait la loge des jeux pour enfants avec un conglomérat de korrigans, un petit homme surgit au balcon de l'immeuble faisant face au square. La grande assemblée des minuscules de Paris se tu, fixant l'étrange personnage. Archibald allait parler, et quand Archibald parlait, mieux valait l'écouter. N'arrivant manifestement pas à faire fonctionner son gigantesque mégaphone cuivré, le petit être se mît à grogner dans sa grande barbe blanche. Redressant soigneusement ses petites lunettes, il entreprit de faire marcher l'engin à coup de pieds répétés. Un bruit tonitruant retenti, et un éclat de lumière bleue souffla la barbe du gnome. Remettant sa pilosité en ordre avec un air digne, et époussetant sa grande cape bleue nuit, l'orateur du soir se saisit du haut-parleur magique et s'adressa enfin à la foule, suivi de prêt par des milliers de petits yeux brillant.

- « Peuple des égouts et des cimetières, habitants des manoirs et des ruines, je tiens tout d'abord à vous remercier d'avoir une nouvelle fois fait le déplacement… et j'ai le plaisir de vous accueillir à cette deux-cent-trente-septième édition du grand ménage ! » - s'adressa-t-il, d'une petite voix grinçante, à la foule qui applaudie poliment - « Je constate une nouvelle fois qu'hélas les fées ne se sont pas jointes à nous… sans doute se pensent-elles trop bien pour nous autres... » - remarqua-t-il, avec un agacement non dissimulable, créant un bourdonnement agité dans le public, et quelques sifflements d'esprits en colère. « Mais nous n'avons guère de temps à accorder aux absents ce soir, passons donc immédiatement à la répartition des tâches ».

La foule se tût à nouveau, alors que le petit homme sortait deux immenses chapeaux haut de forme de sous sa robe. On pouvait néanmoins entendre quelques chats noirs grogner que non, cette année ils ne s'occuperaient pas encore des égouts. L'hôte de la soirée ressortit son haut parleur.

- « Vous connaissez les règles : chapeau noir, les tâches , chapeau blanc, les équipes » - reprit-il - « Bien, alors… première tâche... » - dit-il, plongeant son petit bras tout entier dans le premier couvre-chef.

La foule tout entière retint son souffle. Même les félins, cette fois-ci.

- « Camouflage des potions ! » - lâcha le gnome.

Fouillant cette fois-ci le second chapeau sous le regard attentif de son public, il en sortit un autre petit bout de parchemin. Alors que le petit homme ajustait ses lunettes pour l'examiner, le public compris rapidement quelle équipe venait d'être tirée…

- « Lanternes et flambeaux ! » - finit par déclarer le gnome, sans réelle réaction de la foule, déjà soulagée de ne pas avoir écoper de cette tâche ingrate.

Les lanternes étaient de nouveaux arrivants, hantant le treizième arrondissement depuis peu… le grand apothicaire n'était pas familier de leur écriture, et tout le monde le savait bien, puisque chaque année il avait du mal à la lire. D'ailleurs, d'aucun se demandait comment ces esprits orientaux faisaient pour écrire : ça n'a pas de main une lanterne, ni même de bec, ou quoi que ce soit qui pourrait arranger les choses. Enfin, vous me direz que les feu-follets non plus, mais eux on était habitués au moins.

Lanternes, flambeaux et autres (ne soyons pas exclusifs !) s'en allèrent donc camoufler les sels de givres de l'entrepôt de la rue Mouffetard, sans trop broncher. Enfin… difficile de savoir, avec les lanternes, si elles sont contentes ou pas. Ça n'est pas très expressif une lanterne, voyez-vous.

La sorcière hantant le local était déjà morte depuis bien longtemps, mais l'endroit restait « the place to be » pour le trafic de potions toutes plus illégales les unes que les autres dans toute la région… et il ne fallait surtout pas que les inspecteurs tombent la dessus. N'allez pas là penser que tous nos petits compères et commères rassemblés pour le grand ménage, ou même le « grand » apothicaire Archibald lui même, étaient impliqués directement dans ce sombre trafic… non, disons simplement que si le monopole de ce genre d'activité était entre les mains des gobelins, tout le monde avait bien intérêt à ce que ça continue. Y compris notre gnome favoris, qui avait ses entrées à l'entrepôt pour toutes sortes de lotions intéressant les barbus attentionnés.

- « Deuxième tâche... » - annonça-t-il, se replongeant dans le premier chapeau - « Nettoyage des égouts ! » finit-il par lire. Après fouille du deuxième haut de forme, celui-ci en tira un papier, grimaçant - « Fées... » - lâcha-t-il, d'un ton agacé.

Des murmures de plaintes et de diverses ragots se mirent à circuler dans un bourdonnement général. Le gnome mettait toujours un papier à leur nom, au cas où, sachant qu'elle ne lui enverrait pas d'elle même… et chaque année le tirage venait rappeler leur absence. Bien que très largement respectées historiquement par les habitants de la nuit, les magiciennes du petit peuple avaient finies par se tailler une sale réputation. Hautaines, méprisantes… une véritable haine de classe était née à leur égard. Ne pas participer au grand nettoyage pouvait arriver à tout le monde : chacun a ses obligations. Mais la, ça faisait quand même cinq ans d'affilé ! Certain rats n'avaient jamais vu de fée de leur vie, vous rendez-vous compte ?! Rappelant la foule à l'ordre à coup de bâton contre sa balustrade, le gnome reprit enfin la parole :

- « Vous comprenez bien qu'il faut absolument que les égouts soit nettoyés… nous allons donc devoir tirer quelqu'un d'autre. » - dit-il, opérant une nouvelle plongée dans le deuxième chapeau. « Chats des rues et gouttières ! » - finit-il par annoncer.

La foule se remit à s'agiter, des elfes empêchant certains chats de quitter l'assemblée par protestation. Ceux-ci s'était en effet déjà occuper du nettoyage des égouts l'an passé, et les fiers créatures n'avait guère apprécier l'exercice. En particulier le clan des chats noirs de l'opéra, particulièrement capricieux. Il fallait dire que la tâche n'avait rien d'aisé : les « rats-deliers », rats chargés de tout le transport de contrebande gobeline par voie fluviale, étaient les seuls intermédiaires de confiance pour le transport de jour, et ils n'étaient pas réputés pour leur discrétion. Les traces magiques laissées pendant toute l'année par leur voyages s'accumulaient, et étaient du pain bénie pour les inspecteurs envoyés par le ministère… il fallait tout effacer, ce qui était long, difficile, et surtout salissant.

L'un des félins, un petit chat gris au grands yeux verts, monta sur une chaise et, par quelques toussotements, obtint le silence de la foule. Le gnome, heureux du retour au calme s'adressa à la créature :

- « Qu'à tu as dire, Alice ? Tu sais bien que la loi des chapeaux est indiscutable... »

Adoptant le ton malicieusement respectable que l'on connaît à son espèce, le petit félin pris la parole.

- « L'an dernier Sire Archibald... » - commença-t-elle, avant de prendre le temps de gracieusement se lécher la patte, ce qui ne manqua pas de susciter de discrètes indignations - « l'an dernier, disais-je, il n'aura pas échapper à votre excellence que l'absence des miens du monde de la surface à éveiller des soupçons »

Le gnome fronça les sourcils.

- « Aurais-je besoin de vous rappeler les tenants de votre désagréable conversation avec les humains lors de la dernière inspection ? » - reprit le petit chat.

Archibald ne put retenir un toussotement irrité. L'éclat malicieux de son regard venait de laissé place à une expression mêlant agacement et inquiétude, que l'on pouvait aisément traduire par un bref et peu courtois « mais comment cette petite peste sait-elle autant de choses ? ». Se frottant la barbe, le gnome perdit son regard dans l'inconnu des astres. Le « grand » apothicaire réfléchissait.

La courte remarque d'Alice raviva la tension qui animait la petite réunion des habitants de la nuit. Ici, un jeune rat faisait remarquer que non, il ne tolérerait pas que les chats s'en sorte à si bon compte. Ailleurs, une vieille pie à la voix rocailleuse faisait savoir sa lassitude de ne pas être tenue au courant des affaires publiques… Bref, la cacophonie repartait de plus belle, et, la tension montant d'un cran, les chats formèrent un carré défensif autour de leur porte-parole miniature.

Arraché à ses pensées par ce nouveau brouhaha, le gnome rappela la foule au calme en se remettant à taper sur sa balustrade.

- « Il m'en coûte de l'admettre, mais Alice à raison » - lâcha le gnome, d'un ton sec, après avoir obtenu un silence approximatif - « l'an dernier, l'absence des chats des rues n'est pas passé inaperçue chez les moldus… et à fortiori chez nos amis sorcier, comme vous l'imaginez bien ».

- « Et que proposez vous, Archibald » - intervint une voix grave, venant du fond - « que les chats se la coule douce alors que les chapeaux les ont désignés ? »

La foule se retourna, pour découvrir un gros Geais des chênes à la mine renfrogné.

- « Écoutes, Georges... » - commença Archibald

- « Non, je ne vous écouterais pas, j'ai assez écouté » - l'interrompit le geais - « J'ai pas cotisé toute ma vie pour que ces glandus de félins... »

- « Georges, allons ! » - le rappela à l'ordre le gnome, d'un ton indigné.

Le corvidé se tut, le visage encore plus crisé par l'indignation qu'auparavant.

Alors qu'Archibald allait reprendre la parole, un immense corbeau au bec disproportionné vint se poser sur son épaule pour lui chuchoter dans l'oreille. Le gnome prit une mine sérieuse, hochant de la tête en l'écoutant. La foule fixait la scène, observant attentivement. Tout le monde connaissait la sagesse du vieux Camarsa et, surtout, tout le monde savait combien le gnome tenait en haute estime ses conseils. On disait le corbac vieux de plus de 50 ans, né sous la pleine lune… mais on le disait aussi spécialiste de droit du travail, ce qui en l'espèce était sans doute l'objet de son intervention auprès du petit humanoïde. Le corbeau, ayant finit d'entretenir le « grand » apothicaire de ses conseils, s'en alla rejoindre le sommet d'un grand arbre, où il ne tarda pas à piquer du nez.

- « Nous partagerons la tâche de nettoyage des égoûts » - annonça le gnome, triomphalement - « les chats se chargeront du nettoyage de nuit, nous tirerons d'autres candidats pour le jour… Cela vous convient-il, chères invités ? » - interrogea-t-il la foule.

Des murmures de réflexions et d'interrogations se mirent à circuler, ce plan quelque peu simpliste ne faisant pas vraiment l'unanimité. Au delà des protestations de Georges, qui de toute façon n'était jamais vraiment content, les chats en particulier semblaient indécis. Fallait-il accepter un tel compromis alors qu'il pourrait être totalement exempté du sale boulot ? Quelques musaraignes furent également aperçues en train de comploter sous le toboggan, sans trop que l'on sache trop de quoi il en retournait…car, comme vous le savez sans doute lecteur, une musaraigne cause d'absolument tout et rien, dit tout sans ne rien dire, et peut réaliser l'exploit de ne rien raconter en vous parlant trois heures durant. Mais comme à l'accoutumée, bien que personne n'ait vraiment compris l'objet de leur discussion, l'un des petits insectivores se permit tout de même de vérifier qu'aucun malotru ne daignait épier leur conversation secrète d'un rapide coup d'œil en arrière.

Archibald observait les conciliabules en tapant de son pied. Il finit par sortir sa montre de gousset, pour observer avec stupeur que cela faisait déjà plus d'une heures que l'assemblée avait commencé. Son attente fût interrompue par une nouvelle intervention du petit chat gris que ses semblables nommait Alice.

- « Nous ferons comme vous l'entendez, Archibald » - dit-elle, s'interrompant comme pour réfléchir… sans reprendre la parole, ce qui eut le don une nouvelle fois d'agacer une bonne partie de l'assemblée.

Le gnome ne pût retenir un soupir de soulagement : connaissant la nature digne de la gente féline, il avait sans doute envisagé que la soirée puisse finir en guerre civile. D'autant que si Alice avait véritablement eut vent des tractations lors de la dernières inspections, elle était en mesure de demander bien plus… Cette réflexion amena le gnome à être à nouveau saisi d'inquiétude. Pourquoi le laisser s'en sortir à si bon compte ? Quel plan ces maudits petits carnivores avaient-ils derrière la tête ? Peu importe, dans l'immédiat le temps était au tirage.

- « Bien ! » - reprit-il dans son mégaphone - « Nous tirerons donc une seconde fois dans le chapeau blanc... » - dit-il, liant l'acte à ses paroles. Ressortant avec difficulté son petit bras du fond de l'immense couvre-chef, le gnome finit par annoncer l'équipe élue avec soulagement - « Elfes ».

Les intéressés soupirèrent, prenant leur balluchon et partant au travail. Archibald sourit. Difficile de ne pas comprendre son soulagement : les astres soient loués, on était pas tombé sur une énième communauté à problème. Les Elfes libres de la capitale formaient un syndicat bien peu farouche lors des grands ménages, si habitués au travail maisonnier qu'un nettoyage de plus ou de moins ne changeait pas grand-chose à leur existence. En effet, qui dit Elfe libre ne dit pas Elfe inactif, mais simplement Elfe contractuel. Les tâches ménagères sont si engrainées dans leur mode de vie qu'instinctivement la grande majorité des elfes de maisons libérés trouveront vite du travail en free lance auprès du petit peuple. Et, pour tout dire, si vous demandiez son avis au « grand » apothicaire, il vous dirait sans doute que c'est très bien ainsi, vous citant quelques maximes pseudo-philosophiques sur la valeur du travail dans un latin fort approximatif.

La longue soirée d'ouverture pût ainsi reprendre son cours, sans accrocs, chaque équipe se voyant attribuer une tâche semblant lui convenir, ou alors se montrant trop fier pour piquer une crise digne d'un jeune félin en crise d'adolescence. Les étourneaux furent épargnés par le tirage, leur secrétaire général, le camarade Frelin, payant à cette occasion une tournée générale à son escadrille, clientèle obtenue par les diablotins suite à une âpre enchère au moins offrant avec le lémurien taciturne qui leur servait de concurrent.

La cérémonie touchant à sa fin, le gnome regagna son sinistre grenier, tandis que le reste du petit peuple s'en allait progressivement vaquer à ses tâches.

La semaine prochaine, le travail du plus grand de tous les petits de Paris pourra commencer, et il faudra que tout soit propre.

Mais pourquoi ce grand nettoyage ? Qui sont ces inspecteurs ? Et surtout, comment avoir une barbe aussi stylée que celle d'Archibald ? Ne vous inquiétez pas chers lecteurs, ça arrive très bientôt (en tout cas on va essayer).