Bonjour chers lecteurs, chères lectrices ! Je vous présente "Stay with me" un OS d'une longueur respectable de 14 000 mots ! (J'ai hésité à le diviser en chapitres pour faciliter sa lecture mais je me suis dit que ce serait comme couper en morceaux une tartelette ! Et je préfère manger ma tartelette entière. ;) Alors le voici tel quel, c'est un OS Tomarry pas très original (je le vends bien, non ?) qui traîne sur mon téléphone depuis un bout de temps (j'ai des tas d'one-shots ou de minis fanfic qui dorment dans les limbes de mon Google Drive), toujours est-il que l'autre jour je suis tombée sur cet OS et que j'ai passé quelques jours à le corriger et comme j'ai beaucoup travaillé dessus, je me suis décidée à tenter une publication. Je me dis que si cet OS (cliché) vous plaît, j'en ai plein d'autres en réserve !
Stay with me
Act I: He doesn't exist
Le corps de Tom Jedusor était gelé, refroidi par l'immobilité qu'il s'était imposée ces dernières minutes. Il attendait. Attendait depuis ce qui lui semblait déjà être des heures. Sa patience atteignait ses limites. Limites que cet étudiant transféré testait dangereusement. Son regard s'égara vers l'horloge du quai de la petite gare de Pré-au-Lard et il ne put empêcher un râle d'impatience de franchir ses lèvres en remarquant l'heure tardive.
Pourquoi n'avait-il pas pris le Poudlard Express comme tous les autres ? L'agacement de Tom se mélangeait à une curiosité liée à l'étrangeté de la situation. Un étudiant transféré qui ne sera là que pour un semestre. Un sorcier qui n'avait jamais mis les pieds à Poudlard et qui ne venait que six mois, ça ne s'était jamais vu. Pourquoi venir ici quelques mois seulement ? Il l'ignorait.
La seule chose dont il était certain était que le professeur Dumbledore connaissait cet étudiant et qu'il était intervenu en sa faveur devant Armando Dippet, le directeur de l'école de sorcellerie. C'était à sa demande que Tom se tenait là, à attendre un nouvel élève qui ne daignait pas se montrer.
Il y avait d'autres préfets, comme celui des Gryffondor, qui auraient pu se charger de cette tâche mais ce rôle lui avait été donné. Probablement par intérêt. Tom n'avait pas la moindre idée de ce qui se tramait dans l'esprit du professeur de Métamorphose mais il savait que si celui-ci prenait la peine de lui confier une tâche, c'était avec un but précis à l'esprit.
Peut-être était-il persuadé que son protégé serait réparti à Serpentard et qu'il souhaitait faciliter son intégration en les mettant en contact ?
Songer à de telles inepties était sans intérêt. Tom ne comptait jouer les baby-sitters pour personne. Même si cela pouvait lui permettre d'apaiser les craintes d'Albus Dumbledore à son sujet. Qu'il le craigne, il était bien le seul à le voir comme une menace.
Jedusor se força à se sortir de la tête son professeur de Métamorphose en se recentrant sur ses objectifs personnels. Il y en avait plusieurs qu'il comptait mener à bien cette année. Trouver l'identité de ses parents en était un, dénicher la Chambre des Secrets en était un autre. Avec elle, il aurait la preuve qu'il est l'héritier de Serpentard.
Le mage noir avait besoin de le savoir. Un besoin pressant qui tournait à l'obsession depuis quelques mois. Depuis qu'il savait que le fourchelang était une capacité unique, découlant directement de la lignée de Salazar Serpentard.
Il était rattaché à cette famille par le sang et c'était une question de temps avant qu'il en obtienne la preuve légitime. Une preuve qui ne pourrait être niée.
Tom était conscient du fait que ça ne changerait rien à son statut de sang-mêlé. Que cela n'effacerait pas les années passées à l'orphelinat et les difficultés qu'il avait eues pour se faire accepter de ses camarades de classe. Toutefois ce serait un début. Pour son futur, pour échapper à la médiocrité, pour survivre à cette guerre qui menaçait de réduire Londres à un tas de cendres et de gravats.
En étant l'héritier d'une famille de sorciers, il ne serait plus rattaché à la misère de l'orphelinat, à la ruine que lui réservait l'absence de nom d'origine magique.
Être né sans nom sorcier était sa plus grande honte. Sa plus grosse difficulté pour se faire une place dans ce monde où la suprématie du sang était reine. Tom savait qu'il lui faudrait changer d'identité pour s'intégrer mais il ignorait encore comment procéder.
Il ne pouvait rester à jamais le pauvre orphelin de sang-mêlé, brillant mais condamné à un statut inférieur de par sa naissance. Les professeurs ne se gênaient pas pour palabrer à ce sujet dès qu'il avait le dos tourné. Déplorant la perte que sa basse naissance incarnait pour le prestige du monde sorcier. Horace Slughorn ne cessait de le répéter à qui voulait bien l'entendre.
Il aurait été promis à un grand avenir si seulement il était mieux né. Avec un tel nom, au mieux il pourra devenir professeur. Le monde de la politique, de la recherche et même les fonctions ayant trait au droit ou la médecine lui fermeront leurs portes. Quel gâchis.
Slughorn était un homme d'une hypocrisie odieuse, il critiquait Gellert Grindelwald pour le chaos qu'il créait mais demeurait en accord avec son idéologie. Il n'était pas le seul. Le monde sorcier dans son intégralité était ainsi, contre le Seigneur des Ténèbres mais incapable de défendre des causes allant en opposition avec les siennes et celles de ses partisans.
Un sorcier né de parents moldus était un cadeau, certes, mais il incarnait également une menace pour les familles de sang-pur qui ne les acceptaient qu'à condition qu'ils se fassent discrets. Quant aux sangs-mêlés, ils étaient la marque indélébile laissée par une décadence grandissante de la société sorcière. La chute de la pureté. Un sang sale mêlé à un sang honorable, mélange immoral et monstrueux.
Poudlard ne faisait pas exception. Jedusor savait qu'il avait quitté une cellule pour une autre, faite de magie et de possibilités mais autant étriquée et douloureuse. À l'orphelinat il avait le choix entre mourir de faim ou sous les bombardements et à Poudlard il se battait pour un respect qu'on lui avait retiré à la naissance. Il bataillait pour prouver une valeur qu'on verrait toujours par le prisme de la qualité de son sang. Impur.
Être l'héritier de Serpentard lui permettrait de prouver qu'une partie de ce sang qui était le sien était plus pure que le leur. Qu'il avait sa place ici. Tom ne se condamnerait pas à la misère et à la médiocrité à laquelle on oblige les sangs-mêlés ; forcés aux tâches les plus basses de la société.
Un sang-mêlé n'avait même pas le droit de vote. Il n'avait pas l'autorisation de participer à la vie politique de la nation, ne possédait aucun pouvoir.
Une injustice communément acceptée.
Ses pensées égarées lui rappelèrent le nom que portait l'étudiant qu'il attendait. Potter. L'une des plus prestigieuses familles sorcière d'Angleterre. La raison pour laquelle ce garçon n'était pas inscrit à Poudlard depuis sa naissance était un mystère. Peut-être était-il allé dans une autre école ? Ou la famille Potter était si sévère qu'elle refusait de le voir côtoyer des impurs… mais si cela avait été le cas, il n'aurait pas été transféré ici.
La théorie répandue était qu'il était né de faible constitution et avait une santé fragile. Cela expliquait pourquoi une famille noble aurait voulu garder leur fils auprès d'elle.
Tom pensait qu'il y avait une possibilité pour qu'il ait été élevé à domicile par des précepteurs puis envoyé ici pour enchérir ses relations avant d'hériter du titre de son père. Le premier né hérite traditionnellement du titre à ses dix-sept ans. Et Poudlard paraissait être le bon endroit pour développer des amitiés et alliances utiles à l'âge adulte.
Avec un nom comme le sien, Potter ne devrait pas être très différent des autres. Tom s'attendait à voir un fils à papa, similaire à l'héritier Malefoy, prétextant un contretemps quelconque pour excuser son manque flagrant de ponctualité. Cette pensée fit naître un goût âcre et écœurant sur sa langue. Elle aggrava son agacement et il dut se retenir de tourner les talons.
À la place, il posa son regard une énième fois sur le cadran de l'horloge et en constatant qu'il venait de manquer la cérémonie de répartition des nouveaux élèves, il prit la décision de faire demi-tour et d'annoncer au professeur Dumbledore que personne ne s'était présenté au point de rendez-vous.
Il venait de se détourner du quai lorsqu'il sentit l'air se déchirer derrière lui.
Transplanage. Potter venait de transplaner sans permis.
C'est la première pensée qui percuta son esprit, la seconde fut que Potter n'était en rien comme il l'avait imaginé.
Vêtements moldus, trébuchant sur ses pieds après son atterrissage, Potter s'ébroua comme pour chasser la sensation désagréable liée au sortilège d'apparition. Puis il attrapa une vieille malle tombée à ses pieds et se tourna vers lui.
Tom ne put s'empêcher de le dévisager.
Brun, les cheveux en bataille, des habits trop larges et des lunettes rafistolées. Son apparence était négligée, ni noble ni pure, presque comme s'il sortait tout droit d'une course poursuite face à une meute de chiens errants.
Il finit par le remarquer, planta ses yeux trop verts dans les siens et se figea. Comme un cerf pris dans les phares d'une voiture.
Jedusor s'immobilisa aussi, incrédule. Potter le détailla du regard un instant puis il affermit la prise qu'il avait sur sa baguette magique. Les traits de son visage étaient déformés par la même stupéfaction. Puis il se renfrogna, grogna une phrase inintelligible pleine de grossièretés et lâcha dans le silence devenu éprouvant.
— C'est Dumbledore qui t'envoie ?
De sa voix suintait une méfiance incompréhensible. Sa question n'en était pas une, c'était une affirmation, à laquelle Tom ne prit pas la peine de répondre.
Après un instant supplémentaire, son interlocuteur lâcha un soupir vaincu et lui adressa un sourire forcé qui n'était qu'une horrible grimace.
— Je suis Harry Potter, enchanté.
Il n'était pas enchanté. Il paraissait furieux et Jedusor se demanda brièvement ce que ce Potter avait contre lui. Il conclut que Dumbledore s'était permis de lui dire trois mots à son sujet. Orphelin de sang-mêlé. C'était suffisant pour que Potter le méprise sans même le connaître.
Tom tenta de se persuader que l'inimitié de l'autre garçon venait de là mais quelque chose lui souffla qu'une réaction aussi violente ne pouvait être due à ses origines.
L'héritier Potter passa très près de lui pour emprunter le chemin qui menait aux calèches et Tom aperçut une cicatrice gravée sur son front. Une cicatrice affreuse en forme d'éclair, camouflée par quelques mèches de cheveux trop courts.
Très vite, il se força à le détester. Parce qu'il était l'antithèse de l'image qu'il s'était faite de lui. Parce que la cicatrice sur son front le mettait profondément mal à l'aise.
Parce qu'ils le déroutaient. Lui et ses vêtements moldus, ses cheveux noirs hirsutes et l'aura étrange, hybride entre maladresse et détermination qui se dégageait de son comportement. Tom n'avait ni l'envie ni le temps d'être distrait par lui. Il avait l'impression de devoir s'éloigner à tout prix de sa présence. Avant qu'elle ne devienne une idée fixe.
Il avait la vague impression de le connaître. Pas réellement comme s'ils s'étaient déjà rencontrés mais plutôt comme une reconnaissance plus profonde.
Intemporelle.
Comme s'ils s'étaient déjà croisés dans plusieurs autres vies.
Il délirait, il en était conscient. Il rangea ces pensées dans une boîte fermée à clé et se concentra sur l'observation du sol pour trier ses émotions. Il ne put stopper la voix intérieure qui lui hurlait de se ressaisir, qu'il ne devait pas paraître faible ou perturbé, pas devant lui.
Lui, déjà son esprit lui avait donné un titre que les autres n'avaient pas. Tom sut qu'il représentait un danger pour ses projets dès cet instant car avant lui, il n'avait éprouvé ni curiosité ni intérêt pour personne. Cette nouveauté le rendait fébrile, il avait envie de le fuir et de le suivre tout à la fois.
Harry Potter n'avait rien d'un sang-pur, rien d'un Serpentard. Il ne ressemblait à aucun sorcier qu'il avait pu croiser ces dernières années. Pourquoi portait-il des vêtements moldus alors qu'il était l'héritier d'une famille noble ? Était-il réellement un sang-pur au même titre que les Black et les Lestrange, les Malefoy et les Nott ?
Potter s'était présenté sans attendre qu'il n'en fasse de même, comme s'il savait qui il était ou qu'il n'y prêtait pas attention. Celui-ci prit les devants sans problème et Tom fut obligé de le suivre. Il semblait connaître le chemin jusqu'aux calèches. L'ignorant complètement.
Arrivé devant l'une d'elles, il caressa la tête d'un Sombral en souriant lorsque l'animal colla ses naseaux humides contre la paume de sa main, heureux que quelqu'un prête attention à son existence.
Le nouveau pouvait voir les Sombral. Il ne semblait pas en avoir peur non plus. Jedusor avait toujours pu les voir cependant ce n'était pas le cas de la majorité des résidents de Poudlard alors il avait pris l'habitude de les ignorer. Seuls les enfants confrontés à la mort de leurs proches pouvaient les voir.
Tom supposait que la mort de sa mère le jour de sa naissance était la raison pour laquelle il les percevait. Pourtant il n'avait aucun souvenir précis de sa naissance, seulement celui d'un manque de quelqu'un d'important durant sa petite enfance. Sa pauvre et stupide mère était morte en couches, s'il avait du sang sorcier alors celui-ci ne pouvait pas venir d'elle. Il ne pouvait venir que de son père. Or Tom avait beau chercher, il n'avait trouvé aucun descendant de Serpentard ayant fréquenté Poudlard ces dernières décennies. L'identité de son père lui était inconnue et sa mère ne pouvait être qu'une moldue.
Peut-être que Potter pouvait voir les Sombral après avoir perdu un membre de sa famille lui aussi ? Est-ce que la famille Potter avait subi des pertes durant le conflit contre Grindelwald ? C'était probable, certains Potter étaient Aurors et les Aurors étaient en première ligne face aux assauts du mage noir.
Lorsque celui-ci remarqua qu'il le regardait, il cessa brusquement de sourire ce qui eut le don de provoquer chez Tom un profond sentiment d'injustice et de colère. Que lui avait-il fait ? Il était évident qu'il avait une dent contre lui mais il ignorait la raison qui motivait son comportement. Jedusor n'était pas de nature impulsive mais la question lui brûla les lèvres un long moment.
Qu'est-ce que je t'ai fait ?
Harry grimpa dans la calèche et attendit qu'il en fasse de même. Lorsqu'ils furent face à face, Tom hésita entre l'ignorer complètement ou tenter une nouvelle approche. Il aurait voulu l'ignorer. Sauf que quand il ne le regardait pas, c'est lui qui le faisait. Potter détournait le regard lorsque Jedusor le lui rendait mais chaque fois que Tom regardait ailleurs, ses yeux verts parés de ridicules lunettes rondes revenaient le hanter.
Ce petit manège dura jusqu'à ce que Tom prenne la décision de se présenter. Pour se convaincre que l'autre garçon n'avait rien d'extraordinaire, il voulut tenter d'asseoir une certaine supériorité sur lui. En lui indiquant le rôle qu'il avait parmi les élèves.
— Mon nom est Tom Jedusor, je suis le préfet de Serpentard.
Tom s'attendait à une réaction, parce qu'il s'appelait Jedusor et qu'il était préfet, il aurait dû réagir. Avoir l'air dégoûté ou au contraire être impressionné. Cela n'arriva pas. Potter le regarda avec intensité et déclara, avec évidence.
— Je sais.
Puis il désigna l'écusson sur sa poitrine et ajouta.
— Je connais deux trois trucs sur le fonctionnement de Poudlard. Ton écusson montre que tu es préfet et ton uniforme est celui de Serpentard. Je sais qui tu es.
Sa dernière phrase résonna un moment dans l'esprit du Serpentard en question. Je sais qui tu es. Cela sonnait comme un aveu, quelque chose que Tom aurait dû comprendre mais il ne le comprenait pas, il ne comprenait rien alors il préféra répliquer.
— Le professeur Dumbledore t'a parlé de moi ?
Jedusor reconnut la colère dans sa propre voix à l'idée que le directeur de Gryffondor propage des rumeurs à son sujet. Dumbledore n'était pas du genre à mentir ou à calomnier mais l'homme et lui s'entendaient plutôt mal depuis que celui-ci était venu le chercher à l'orphelinat. Il savait qu'il était fourchelang et connaissait de lui un passé qu'il préférait éluder, alors Tom le craignait. Comme on craint un adulte lorsqu'il se mêle un peu trop de ce qui ne le regarde pas.
Potter secoua la tête négativement. Se redressa et détacha ses yeux de lui pour les coller au château sans rien ajouter jusqu'à que la calèche s'immobilise et, à ce moment-là, il lui dit, avec un air cryptique.
— Je préfère me faire mon propre avis.
Il lui adressa un sourire encore un peu difficile, se retourna et le laissa une fois de plus derrière. Sa déclaration semblait signifier que peu importe ce que Dumbledore avait pu lui dire à son sujet, il ne faisait confiance qu'à ses propres ressentis. Or il ne semblait pas l'apprécier.
Tom s'était convaincu que ce devait être un trait de caractère et que Potter se méfiait tout simplement des gens. Cette conclusion lui paraissait plus agréable que l'idée d'être le problème.
Il le suivait, Harry semblait pouvoir se diriger seul que ce soit à l'extérieur ou un l'intérieur du château. Ce n'était pas tâche aisée et Jedusor se souvenait s'être perdu fréquemment le premier mois. Ce qui rendait Harry Potter encore plus suspect. Il se déplaçait dans Poudlard aussi facilement que s'il y avait passé son enfance alors que ce devait être la première fois qu'il mettait les pieds ici.
Il s'arrêta devant la porte massive et décorée de la Grand Salle et ne fit pas un pas de plus. Au-delà ils entendaient les cliquetis des couverts qui indiquaient que le repas était déjà bien entamé. Étant donné l'heure, le dessert devait être servi, ce qui signifiait que la cérémonie touchait à sa fin.
Ce n'était pas gênant, Tom n'était pas mécontent d'avoir manqué la répartition, il avait toujours trouvé cette cérémonie ennuyeuse. Excepté le jour où ça avait été à son tour.
Harry sembla hésiter à entrer et Tom réalisa que l'autre allait devoir être réparti lui-même. Le fait qu'il ne porte même pas son uniforme lui sauta aux yeux et le mage noir se retint de lui faire une remarque à ce sujet. Étrangement ses vêtements qui n'avaient rien de sorcier, lui allaient bien. Ils étaient trop larges et Potter paraissait s'être battu avec mais ça lui allait bien.
Tom chassa cette pensée avec les autres et essaya de deviner ce que Potter ressentait à l'idée d'entrer dans cette salle.
Peut-être n'avait-il jamais été confronté à autant de sorciers de son âge ? Tom ne connaissait rien de son histoire et il ignorait ce qui le paralysait mais il avait conscience que puisque Dumbledore lui avait demandé de l'amener jusqu'ici, il devait s'assurer qu'il entre dans la Grande Salle. Le plus tôt possible sera le mieux.
Avec un peu de chance, il serait réparti dans une maison différente de la sienne et il pourrait se débarrasser de la sensation désagréable qu'il avait en sa présence. Celle qui le forçait à ne pas le quitter des yeux.
Jedusor le rejoignit devant la porte et la poussa d'un sortilège. Exprimant ce qu'il s'était répété sans cesse lorsqu'il n'était qu'un petit garçon de onze ans.
— Tu as ta place ici.
La porte fut bientôt grande ouverte et Potter lui lança un regard surpris. Comme s'il lui avait dit quelque chose qui venait d'ébranler l'image qu'il se faisait de lui. Cependant il ne posa aucune question, son attention fut détournée par la Grande Salle et la bonne centaine de regards posés sur eux.
Il les ignora et sembla chercher Albus Dumbledore des yeux, le professeur de Métamorphose le salua d'un sourire et le nouveau s'avança dans la salle. Tom le quitta à ce moment-là pour s'asseoir à sa place parmi les Serpentard pendant que Potter poursuivait son chemin seul jusqu'à la table des professeurs. Arrivé sur place, il jeta un œil au Choixpeau et parut tout à coup nerveux.
Le directeur en profita pour le présenter à tous en précisant ce que Tom savait déjà. Il était un étudiant transféré qui ne resterait qu'un semestre avec eux. Puis le vieil homme ajouta une information qu'il ne connaissait pas, Potter intégrerait directement la cinquième année après sa répartition.
Brusquement, Tom se demanda quel âge avait son camarade. Il paraissait avoir le même âge que lui mais pouvait très bien être plus vieux. Il était difficile de faire une estimation précise en le regardant.
Entre quinze et dix-sept ans. La manière dont il avait réussi à transplaner seul lui faisait penser qu'il devait au moins avoir quinze ans.
Alors que Tom prenait place à l'endroit où il préférait être, au milieu de la table des Serpentard, Malefoy sembla penser que c'était le bon moment pour déclarer quelque chose puisqu'il dit, assez fort pour que la moitié de la table l'entende.
— C'est lui l'héritier des Potter ? À sa place j'aurais honte de me présenter dans une telle tenue. Ce doit être un de ces stupides Gryffondor.
Le commentaire irrita Tom mais bientôt le nouvel élève s'assit sous le Choixpeau et l'appréhension noya son irritation. Son regard oscilla entre le visage fermé de Potter et le Choixpeau qui avait l'air tout aussi concentré. De toute évidence ces deux-là avaient une conversation. Parfois le Choixpeau prenait le temps de débattre avec les élèves qu'il répartissait. Jedusor n'avait pas eu cette chance mais la rumeur disait qu'il appréciait une conversation avec les profils difficiles à cerner.
Après quelques minutes pendant lesquelles la Grande Salle retint son souffle, le Choixpeau se balança en avant. La plupart des élèves tendirent l'oreille pour entendre la répartition, les Gryffondor voulaient évidemment le nouveau chez eux. Potter paraissait être un Gryffondor au premier abord. Les Serdaigle étaient curieux de connaître quelqu'un ayant étudié ailleurs et les Poufsouffle étaient d'un naturel accueillant avec les étrangers, quel qu'ils soient. Finalement, seuls les confrères de Tom étaient convaincus, après la tirade de Malefoy, que Potter ne les rejoindrait pas.
Jedusor avait pressenti l'erreur d'Abraxas et même s'il avait espéré que ce ne soit pas le cas, il se résigna au moment où le Choixpeau lui donna raison.
C'est d'une voix presque chantante qu'il cria.
— Serpentard !
Potter se releva comme s'il était monté sur ressort puis il dirigea un regard courroucé en direction d'un Albus Dumbledore ravi qui se leva pour l'applaudir. Bientôt les autres tables firent de même, à l'exception de celle des Serpentard.
Potter se dirigea néanmoins vers eux et Tom lui adressa un hochement de tête et lui désigna silencieusement la place laissée libre devant lui.
Il aimait garder cette place libre pour surveiller le reste de la salle. Aucun Serpentard ne s'asseyait jamais en face de lui. Au début ils le faisaient parce qu'ils ne voulaient pas avoir à côtoyer un né-moldu ou un sang-mêlé puis ensuite par peur ou pour éviter les problèmes. Ils lui laissaient la place du centre et faisaient comme si Tom n'existait pas.
Pendant un instant, Potter sembla vouloir refuser sa proposition puis il vint finalement vers lui après avoir jeté un œil à l'intégralité de la tablée. Il s'assit devant lui et le mage noir eut l'impression qu'il devait lui dire quelque chose.
Il éprouvait l'envie difficilement contrôlable de lui parler.
— Félicitations. Le Choixpeau n'a pas hésité autant depuis plusieurs années.
Potter grimaça mais ne répliqua rien. S'il paraissait nerveux face au Choixpeau, il semblait complètement perdu dorénavant. Lestrange qui était assis près de lui le dévisagea un long moment avant de ricaner et de se présenter.
— Je m'appelle Conrad Lestrange.
Puis il lui posa des questions sur sa famille, sur ce qu'il avait fait avant, sur ce qu'il avait étudié et Potter ne lui répondait jamais vraiment. Il se contentait de lui retourner ses questions et Conrad se faisait un plaisir de lui répondre des phrases toutes faites. Une conversation de sourds.
Lestrange était du genre bavard, bavard et dangereux. Il était doué pour récupérer des informations dont il se servait contre son interlocuteur par la suite. Le fait que Potter n'entre pas dans son jeu et semble même le retourner contre lui, allait bientôt lui faire perdre patience. Tom connaissait bien Conrad et celui-ci était autant accueillant et bavard que colérique et cruel.
Jedusor prit la décision de stopper là l'interrogatoire, Potter ne dirait rien et Conrad allait juste créer un conflit qui leur attirerait à tous des ennuis s'il continuait ainsi. Tom lui lança un regard d'avertissement que l'autre garçon ne sembla pas prendre en compte et le mage noir fut obligé de l'arrêter par un sort de mutisme, prenant la parole à sa place.
— Je ne pense pas que Potter ait envie de déballer sa vie à des inconnus.
Le sortilège prit fin et Lestrange se tut finalement, la mise en garde avait fonctionné.
Conrad faisait partie des Serpentard sur lesquels il avait réussi à prendre l'ascendant.
Malefoy, qui faisait partie du camp adverse, en profita et débuta les hostilités. Bon retour parmi nous Jedusor, combattre sans répit t'a manqué pendant ton horrible été ? C'est la sensation qui le prit à la gorge lorsqu'il entendit sa voix.
— Je constate que Potter a déjà mis notre cher préfet dans sa poche. Tu devrais mieux choisir tes relations Potter. Jedusor n'est pas fréquentable pour quelqu'un de ton rang.
Cela se lisait sur le visage de Malefoy, il ne désapprouvait pas seulement les relations de Potter mais aussi son apparence, la manière dont il se tenait à table et certainement tout un tas d'autres choses. Malefoy jugeait tout et tout le monde selon des codes préfabriqués qui n'avaient rien d'humain et que lui-même ne pouvait pas suivre à la lettre. Il avait été éduqué comme ça.
Le visage du nouveau se déforma tout à coup dans une expression proche du mépris et il siffla à Malefoy, presque du tac au tac, comme un réflexe longuement travaillé.
— Garde tes conseils pour toi, Malefoy. Je sais parfaitement quelles sont les fréquentations néfastes.
Potter sous-entendait clairement que Malefoy faisait partie de la catégorie des mauvaises fréquentations. C'était la première fois que quelqu'un osait répondre aussi vindicativement à Malefoy et ce qui devait arriver, arriva. Abraxas saisit immédiatement sa baguette, pour la pointer vers le front d'un Potter mortellement calme.
Toute la table se tourna vers la scène alors qu'Abraxas répliquait.
— Je ne me laisserai pas insulter par un traître à son sang.
Tom remarqua du coin de l'œil Dumbledore et Slughorn se lever alors que la voix toujours calme de Potter claqua en réponse à la déclaration de Malefoy.
— Traître à mon sang ? Je suis de sang-mêlé, Malefoy. Tes histoires de suprématie du sang ne m'intéressent pas. Maintenant, tu as le choix entre m'envoyer un impardonnable comme le font les gens qui partagent tes idéaux ou abaisser cette baguette comme le lâche que tu es.
Malefoy était au-delà de la fureur. Jamais personne ne l'avait humilié de façon aussi flagrante, son visage prit une couleur rouge très disgracieuse alors que ses mains tremblaient de rage. La rumeur sur le statut de sang de Potter se répandit comme une traînée de poudre autour d'eux. Un sang-mêlé était né dans l'illustre, la respectueuse et noble famille des Potter. C'était un scandale. Le mot bâtard était chuchoté aux quatre coins de la Grande Salle.
Bouillonnant de rage, Malefoy s'apprêtait à lancer un maléfice à un Harry Potter toujours immobile. Inquiet à l'idée que Potter prenne réellement la décision de ne pas se défendre, Tom attrapa sa propre baguette. Juste avant que Slughorn ne fonde sur eux comme un oiseau de proie.
Il couina, de sa voix trop aiguë.
— Il suffit ! Abraxas Malefoy, tenez-vous correctement, vous êtes censé montrer l'exemple ! Quant à vous Monsieur Potter, sachez que ce n'est pas une manière décente de débuter votre séjour parmi nous. Ce n'est pas parce que vous venez d'arriver que vous pouvez vous permettre de manquer de respect à vos aînés. Je vous laisse avec un avertissement chacun pour cette fois mais que cela ne se reproduise pas. Me suis-je bien fait comprendre ?
Puis il se tourna vers lui et déclara d'une voix plus aimable.
— Tom, mon cher, veux-tu bien te charger de seconder notre invité dans sa découverte de l'école ? Je te fais confiance pour l'aider à s'intégrer.
Potter n'eut pas l'air heureux à l'idée de passer une minute de plus en sa compagnie mais Jedusor ne trouvait rien à y redire. Encore trop hébété par la nouvelle.
Harry Potter était de sang-mêlé.
Cela expliquait ses vêtements et son comportement très différent de celui des autres sangs-purs. Voilà pourquoi la famille Potter ne l'avait pas placé à Poudlard dès son plus jeune âge, c'était un bâtard. Tout comme lui.
Il avait probablement vécu une partie de sa vie chez les moldus. Si son père était un Potter et qu'il avait hérité de son nom, alors sa mère devait être celle dont le sang était impur. Il avait la chance de porter le nom de son père, un nom sorcier et il venait de déclarer devant tous les habitants de Poudlard, qui le pensaient encore de sang-pur, qu'il était de sang-mêlé.
Ce qu'il venait de faire n'avait pas de sens. À quel point fallait-il être imprudent pour commettre une telle erreur ? Ce n'était pas une erreur. C'était évident. Potter n'avait pas honte de sa condition.
Il ne respectait pas les codes de leur société, osait défier Abraxas qui était celui d'entre eux qui aurait le plus de pouvoir au sein du Magenmagot lorsqu'il sortirait des bancs de l'école. Harry Potter n'avait aucun respect pour la hiérarchie.
Malefoy fit disparaître sa baguette, ridiculisé par le nouveau qui lui envoya un regard insolent en entamant une part de tarte dont il venait de se servir.
Tom le regardait avec un mélange de fascination et d'incompréhension. Il venait de se mettre à dos plus de la moitié de l'école et il mangeait tranquillement, l'air beaucoup moins perdu, beaucoup plus détendu. Comme si se battre l'avait rassuré. Là où il était lassé de devoir se défendre sans arrêt, Potter semblait dans son élément.
Le conflit lui était familier. Sous les regards noirs et les insultes à peine masquées, il paraissait tout à fait à l'aise. Entre deux bouchées, il lui jeta un regard moitié méfiant, moitié intrigué. Se demandant visiblement pourquoi le mage noir ne pouvait détourner ses yeux de lui.
Tom avait envie de lui dire qu'il venait de creuser sa propre tombe, que les prochains mois qu'il passerait ici seraient pire que l'enfer mais ses yeux verts l'en dissuadèrent, ils étaient remplis d'une assurance qui lui permit d'être accepté parmi les Serpentard, lui qui était de sang impur.
Le futur Seigneur des Ténèbres comprit que, pour son propre bien, pour ne pas perdre le peu qu'il avait gagné en quatre années de combat silencieux et de cohabitation forcée, il devait s'éloigner de lui.
Tom comprit mieux la raison pour laquelle son intérêt s'était éveillé. Harry Potter était… l'opposé parfait de ce qu'il voulait devenir. Si proche de ce qu'il était et pourtant tellement éloigné de ce à quoi il aspirait.
Sa simple existence redistribuait les cartes des possibilités qui se présentaient à lui. Cependant, il se borna à vouloir le haïr. Lui qui acceptait si bien ce contre quoi il luttait. Lui qui semblait n'avoir rien compris à la douleur d'être mis à l'écart des autres.
Tom avait toujours vécu comme un paria, il ne l'avait jamais accepté et ne l'accepterait jamais. Il éprouvait un besoin de reconnaissance dont Potter était dénué.
Potter ne se battait pas pour être un sang-pur parmi les autres, il se battait pour gagner le droit d'être de sang-mêlé.
Tom avait longuement attendu quelqu'un comme lui, au début, lorsqu'il avait encore une vision idéalisée de ce monde de magie. Aujourd'hui il était trop tard, il se sentait trop blessé pour vouloir le suivre. Il ne désirait que le fuir. Malgré tout l'attrait qu'il ressentait pour Harry Potter, il le craignait encore plus.
Le simple fait d'être en sa présence allait lui attirer des ennuis et il le savait. Tom ne pouvait prévoir ce que Potter allait dire ou faire à l'avance. Il savait qu'il ne pourrait pas le manipuler ou lui mentir comme il l'aurait fait avec un autre.
Cela ne fonctionnerait pas sur lui.
Harry Potter était incontrôlable. Il se devait de l'ignorer.
Tom profita de l'accalmie pour manger un morceau. Il résista quelques minutes à l'envie de tourner une fois de plus son regard dans sa direction avant d'y céder. Potter regardait le ciel au travers des vitraux, semblant perdu dans ses pensées.
Qu'est-ce qui occupe ses songes en ce moment ?
Autour d'eux les Serpentard se levaient et Tom savait qu'il était temps de partir. Lorsqu'il se leva, Harry eut un sursaut et lui adressa un regard, comme pour vérifier qu'il n'avait pas disparu. Tom ne voulait pas passer plus de temps avec lui ce soir mais il n'avait pas le choix après la demande du professeur Slughorn.
Il devait le conduire jusqu'à leur salle commune et lui expliquer comment et où aurait lieu les cours de demain. Le second préfet de Serpentard - une fille dont il ne se souvenait pas du nom - était chargée des premières années, ce qui signifiait que Tom n'aurait que Potter à seconder.
Celui-ci le suivit sans faire d'histoires et, alors qu'ils traversaient un couloir l'un à côté de l'autre, Tom ne put s'empêcher de lui dire.
— Malefoy est rancunier, il fera tout pour se venger avant que tu ne quittes cette école.
Potter lui lança un coup d'œil et pesa le pour et le contre avant de finalement choisir de lui répondre.
— Les Malefoy sont rancuniers, ce n'est pas nouveau. Ce sont aussi des trouillards qui ne savent pas choisir leur camp et parle beaucoup plus qu'ils n'agissent. Il ne me fera rien qui puisse être réprimandé par cette école.
Il semblait sûr de lui et peut-être avait-il raison mais il semblait également sous-estimer Abraxas, leur aîné ne devait pas l'allégeance des Serpentard seulement grâce à son nom, il était retors et malveillant.
Toutefois, Tom eut l'impression que Potter ne changerait pas d'avis alors il évita d'insister sur ce point.
Ils descendirent jusque dans les cachots en suivant les autres Serpentards, seulement interrompus par le Baron Sanglant venu saluer les premières années. Potter ne parut pas surpris de le voir surgir tout à coup. Son expression changea seulement quand ils entrèrent dans leur maison. Sans en connaître la cause, Tom vit une association d'émotions contradictoires se battre dans ses yeux alors qu'il observait leur salle commune.
Sous le lac, la salle commune des Serpentard possédaient de larges fenêtres d'où ils pouvaient voir les créatures de l'eau passer de temps à autre. Ses canapés étaient en cuir noir et les deux cheminées qui les bornaient étaient particulièrement imposantes, elles projetaient des lueurs mordorées fantasques sur toute la pièce.
Comme à chaque début d'année, la salle commune était vide et bien rangée. Tom savait par expérience qu'elle se couvrirait bientôt de manuels de classe oubliés, d'encre et de parchemins, de vieux bouquins dérobés à la section interdite de la bibliothèque et d'artefacts en tout genre. C'était ce qu'il avait de plus proche d'un chez lui.
Potter passa un moment à la toiser sans bouger, il paraissait penser que quelqu'un allait surgir de derrière les fauteuils pour le mordre. Tom lui fit signe de le suivre. Il allait lui montrer le dortoir de la cinquième année et se débarrasser de lui.
De la première à la septième année, les dortoirs s'enfonçaient de plus en plus sous le Lac noir et celui des cinquièmes années n'avait plus la lueur verte caractéristique des eaux visibles dans la salle commune. L'eau y était sombre, presque noire, et cela prêtait à leurs dortoirs une ambiance particulière, renforcés par les lits à baldaquin et les tapisseries aux couleurs de leur maison.
Normalement, ils auraient dû attendre que les sangs-purs choisissent leurs lits avant d'installer leurs affaires mais si Jedusor n'avait aucun pouvoir sur Malefoy et les septièmes années, il avait le dessus sur les cinquièmes et une bonne partie des sixièmes. Ce qui lui permettait de pouvoir installer ses affaires où bon lui semblait sans avoir de compte à rendre.
Potter prit le lit le plus proche de l'entrée, visiblement pas très à l'aise dans leur dortoir. S'éloigner de lui paraissait être une bonne idée alors Tom déposa sa malle sur le lit le plus éloigné de la porte, la salle étant un cercle parfait, ils se retrouvèrent pratiquement face à face, seulement séparés par le centre de celle-ci.
Jedusor eut l'impression de ne pas avoir besoin de lui expliquer beaucoup de choses, Potter semblait pouvoir se débrouiller seul. En passant près de lui pour aller à la salle de bain, Tom lui proposa, pour honorer son rôle de préfet.
— Si tu as la moindre question ou difficulté tu peux venir m'en parler, à moi ou à notre directeur de maison.
Il évita de le regarder alors il ne perçut pas sa réaction, par contre, il entendit très bien sa réponse, même après s'être éloigné.
— Je n'aurai pas besoin de ton aide, Jedusor.
Son nom de famille sonnait comme une insulte, encore plus dans sa bouche que dans celle des autres. Tom tenta d'ignorer les sentiments négatifs que cette simple phrase avait fait ressurgir en lui et il se fit la promesse de ne pas se mêler de ses affaires.
Harry Potter n'existait pas. Il devait faire comme s'il n'était pas là et dans quelques mois, il partirait et Tom serait débarrassé de lui. De lui et de sa présence intoxicante, de l'envie irrépressible de le regarder, de la volonté qu'il lui retourne son regard. De lui et de son mépris pour les castes présentes entre sorciers, de lui et du danger qu'il représentait.
Tom craignait ne pas pouvoir atteindre ses objectifs s'il le laissait avoir une quelconque influence sur lui. Il prit alors la décision qu'il ne lui laisserait pas cette chance.
Harry Potter n'existait pas.
⁂
Act II: He's mine
Nous étions entre Noël et le jour de l'an, les vacances avaient débuté depuis une semaine et le silence dominait dans le château. Dépourvu de ses élèves, Poudlard trônait, vide et froid et Tom Jedusor était en train de perdre l'esprit.
Assis sur le rebord de la fenêtre en proie au givre, Tom tournait le dos à la cour intérieure. Ses recherches, ses devoirs et son journal intime étaient étalés à ses pieds. Témoins de l'être qu'il était en cet instant.
Coincé entre ses allégations personnelles, son rôle d'étudiant et sa nouvelle obsession. Encore récente, celle-ci était la seule chose qui le rendait instable. Responsable de ses sautes d'humeur et de ses émotions les plus violentes.
Cette douce, irréelle et insatiable obsession. Celle qu'il avait développée, contre sa volonté, pour Harry Potter.
Dans un geste qui lui était difficilement contrôlable, il reposa sa tête contre la vitre déjà embuée par son souffle, se tournant vers l'extérieur. Espérant presque naïvement que la fraîcheur lui permettrait de retrouver une certaine maîtrise sur ses pensées.
Tom était en train de devenir fou. Ses sens étaient à la recherche de sa présence en permanence. Il ne pouvait entrer ou sortir d'une salle sans l'atteindre du regard, traverser un couloir sans tendre l'oreille pour tenter de percevoir sa voix derrière une porte ou l'écho de ses pas quelque part devant lui. Son existence le rendait malade.
Comme un cancer qui jour après jour gagnait du terrain. Il avait tenu une nuit et une journée, il avait réussi à nier l'existence de Potter l'espace de 24 heures avant de céder. Depuis il luttait chaque jour pour récupérer le contrôle de lui-même.
Tom était tout à fait conscient que son obsession n'était pas fondée, que Potter n'était rien. C'était juste comme une force invisible, la sienne, qui le poussait inlassablement vers lui. Comme si un morceau de son âme était resté attaché à Potter le jour de leur première rencontre. Sa présence l'empêchait de respirer convenablement.
Réduire son obsession démesurée pour Potter était un combat quotidien dans lequel il se perdait un peu plus chaque jour. Un duel éternel entre sa raison et le reste de ce qui le constituait.
Potter, Potter, Potter, POTTER.
Grinçant des dents, il s'éloigna un peu de la fenêtre pour prendre une grande inspiration. Observant son souffle former des volutes de brume blanche. Ne pas laisser Potter avoir une influence sur son comportement n'était plus possible mais répéter son nom dans son esprit jusqu'à en perdre toute cohérence ne l'aiderait pas à se débarrasser de cette dépendance.
Un jour après sa décision de nier son existence, il s'était retrouvé à esquisser son visage dans la marge de ses cahiers. À reproduire la cicatrice de son front partout où il pouvait le faire. À détailler la moindre de ses expressions, à essayer de comprendre sa manière de fonctionner, de penser et d'agir.
Jedusor prenait davantage de notes sur lui que sur les cours qu'il suivait et il ignorait complètement ce qui le poussait à le faire. Enfin, pas complètement mais son intérêt pour lui était déraisonnable et il en avait parfaitement conscience.
Potter provoquait chez lui un intérêt qui relevait de la psychose et qui se manifestait comme une malédiction corrompant son esprit.
Tom était désormais capable de reconnaître les différentes intonations de sa voix, sa façon de se déplacer, la manière dont il s'asseyait, sa place préférée dans une salle de classe et celles qu'il avait tendance à éviter. Il connaissait ses aptitudes et ses lacunes dans toutes les matières étudiées à Poudlard.
Potter était facile à lire. Quelques mois étaient suffisants pour le comprendre. Il méprisait les sangs-purs qui défendaient l'idéologie de Gellert Grindelwald, aimait parler et jouer au Quidditch avec les Gryffondor, réviser et lire avec les Serdaigle, manger et rire avec les Poufsouffle. Il ne cherchait pas l'attention, n'aimait pas être au centre d'une conversation mais avait un caractère bien trempé qui lui attirait fréquemment des ennuis.
S'il avait l'occasion d'être seul, il la saisissait et passait ce temps isolé, perdu dans ses pensées. Nostalgique d'un passé dont Tom ignorait tout.
Malgré son analyse précise, il n'arrivait pas à se désintéresser de lui. À élucider les mystères qui l'entouraient. Jedusor ignorait toujours ses motivations réelles, il ne savait toujours pas pourquoi l'autre garçon était venu à Poudlard.
Plusieurs mois étaient passés et le semestre touchait à sa fin. Bientôt Potter partirait et Tom n'avait pas du tout avancé sur ses objectifs personnels.
Retrouver le nom de son père paraissait impossible. À tel point que le mage noir commençait à soupçonner son père d'avoir été un moldu. Un Jedusor. Ce qui ferait de sa faible mère une sorcière affiliée à Salazar Serpentard. Elle était morte en lui donnant naissance comment avait-elle pu être de sang-pur ?
L'idée que sa mère soit celle qui le reliait au monde sorcier l'intoxiquait. Comme si on avait planté une graine à l'intérieur de son cœur et que celle-ci s'était mis à grandir, étouffant chacune des émotions positives qu'il avait eue, les remplaçant par une rancœur mordante.
Si sa mère était une sorcière alors son nom n'était pas Jedusor. Elle portait le nom d'une famille de sorciers mais malgré ses recherches, Tom n'avait trouvé aucune preuve alimentant sa théorie. Il n'avait même pas d'indice probant et ses recherches sur la Chambre des Secrets se montraient lentes et insatisfaisantes.
S'il devait désigner un coupable pour ses échecs alors ce serait lui. Harry Potter. Son nom résonnait en lui comme une malédiction. Un impardonnable dont l'interdit le faisait frémir.
Dans un mouvement de baguette impatient, Tom ramena son cours entre ses mains et le consulta du regard, essayant de se concentrer sur les lignes inscrites sous ses yeux. Il souhaitait réviser les cours de Métamorphose pour l'évaluation que le professeur Dumbledore donnerait à la rentrée et s'assurer d'obtenir la note maximale.
C'était ce qu'il avait convenu de faire aujourd'hui même s'il s'agissait de son jour de naissance. Il ne voulait pas trop penser à son anniversaire et les cours de Métamorphose avaient pour habitude de le distraire. Jedusor n'appréciait pas le professeur Dumbledore mais l'homme avait un talent certain pour l'enseignement et ses cours étaient complets, d'une précision et d'une qualité tout à fait appréciables.
Ce qui poussait Tom à les suivre malgré les regards soupçonneux et accusateurs qu'il recevait durant son cours. Dumbledore se comportait parfois comme s'il était le détenu le plus dangereux d'une prison sous haute sécurité dont la surveillance aurait incombé au directeur magnanime des Gryffondor. Tom le détestait presque autant qu'il haït Potter pour ce que celui-ci lui faisait ressentir.
Il n'avait jamais éprouvé de fureur aussi forte et désespérée que lorsqu'il pensait à lui. Au lieu de réviser, il n'était capable que de songer à cet étudiant transféré.
Distraitement, il tourna sa plume entre ses doigts, les tâchant d'encre. Ce moins que rien, médiocre dans la plupart des cours. Comme en potions où il était incapable de brasser la moindre mixture sans la faire exploser. Potter n'aurait pas dû retenir son attention, il lui était inférieur dans presque tous les domaines.
Tom reconnaissait à contrecœur qu'il était doué en Défense contre les forces du Mal.
Un prodige du duel, aussi bon en attaque qu'en défense. Agiles et athlétiques, ses réflexes étaient monstrueux. Tom l'avait vu attraper au vol une bille de verre tirée par un sortilège de Malefoy. N'importe qui l'aurait pris en pleine tête et aurait fini à l'infirmerie.
Potter l'avait attrapée à mains nues, à une vingtaine de centimètres de son visage puis l'avait laissée retomber au sol, la libérant de sa main sans adresser un seul regard à Malefoy. Il s'était seulement permis de lui dire qu'il n'avait plus l'âge de jouer aux Bavboules avant de quitter la pièce.
Comme prévu, Malefoy ne l'avait pas laissé en paix depuis la cérémonie de bienvenue où Potter l'avait provoqué. Si on le lui avait proposé, Tom aurait parié qu'Abraxas gagnerait et qu'il ferait de la vie de Potter un tel enfer que celui-ci aurait fini par abdiquer. Il aurait perdu. Malefoy avait tenté de l'intimider, de le piéger, de liguer le reste de l'école contre lui et Potter s'était contenté de déjouer ses attaques, serein face à l'adversité.
Au-delà de ses capacités remarquables en tant que duelliste, c'était un sorcier ordinaire. Inintéressant. Il préférait fréquenter les Gryffondor plutôt que les membres de sa propre maison, ce qui n'était pas étonnant étant donné le calvaire que lui faisait vivre Malefoy.
Tom savait que Potter le surveillait autant qu'il le faisait.
Ils ne s'adressaient pas la parole. Jamais. Les derniers mots qu'ils avaient échangés remontaient au premier septembre. Toutefois, lorsqu'il n'était pas en train de le regarder lui-même, Tom savait que l'autre garçon le faisait. Lorsqu'il ne le poursuivait pas, c'était lui qui se retrouvait derrière lui.
Harry empruntait chaque livre qu'il étudiait, qu'ils soient de la bibliothèque ou de la section interdite. Dumbledore lui avait donné l'accès. Il y avait… comme une amitié peu commune entre les deux hommes. Une complicité, une compréhension tacite, une capacité à communiquer en échangeant un simple regard.
Parfois Potter restait à la fin du cours de Métamorphose pour discuter avec le directeur des Gryffondor et lorsque ça arrivait, Potter revenait habité d'une nouvelle résolution.
Tom haïssait que Potter passe du temps avec Albus Dumbledore, détestait l'entendre s'amuser avec les Gryffondor et ne supportait pas qu'il accorde son attention à Malefoy.
Il aurait voulu qu'il n'y ait que lui et Potter, se poursuivant dans le silence.
C'est ce qu'il avait obtenu durant ces vacances. Il aurait dû en être satisfait. Il ne l'était pas. Ces vacances étaient les premières et dernières que Potter passait ici.
Il quitte Poudlard à la rentrée.
Dans quelques jours, l'objet de toutes ses pensées sera parti.
Cela aurait dû le soulager. Tom en rêvait. Être débarrassé de la dépendance qu'il avait développée pour sa présence était ce qu'il voulait. C'était ce dont il avait essayé de se convaincre ces derniers jours. Seulement il savait que la disparition subite et brutale de Potter n'allait pas le satisfaire. Loin de là.
Elle le rendrait fou.
Sa perte lui paraissait être une hérésie encore plus dangereuse que la fascination violente et irraisonnée qu'il avait pour lui. Harry Potter allait quitter Poudlard et Jedusor ignorait où il irait, ce qu'il ferait.
Il avait obtenu de lui toutes les informations qu'il avait pu en l'observant. Il avait profité des recherches qu'il faisait sur sa propre filiation pour en faire sur la sienne, malheureusement il n'y avait aucune trace d'un Harry Potter dans les lignées officielles de la famille Potter. Ce n'était pas surprenant. Tout comme Tom l'était, Harry était un bâtard qui n'apparaissait nulle part.
L'idée de le traquer l'avait percuté, le matin dernier. Lorsque Tom l'avait découvert paisiblement endormi, dans un fauteuil de leur salle commune vide de ses occupants.
À son approche Potter, s'était levé et avait fui et n'avait pas réapparu de la journée. Jedusor s'était senti comme si le manque allait lui faire perdre la raison.
Le traquer hors de Poudlard paraissait impossible tant qu'il était élève ici. Tom devait finir son cursus scolaire, atteindre ses objectifs. Obtenir plus de pouvoir et de reconnaissance, assez pour obtenir le nom et le statut qui lui manquait, le respect qu'on lui devait.
Ensuite Potter ne pourrait plus le fuir.
Leur jeu du chat et de la souris le lassait. Parfois Tom avait l'impression que Potter n'était pas conscient de l'attention qu'il lui portait et d'autres fois leurs regards se croisaient par accident et il était certain qu'il savait parfaitement l'effet qu'il lui faisait.
Comme ils n'avaient jamais eu la moindre conversation, Jedusor ne pouvait pas mettre les choses au clair avec lui. Lui demander… il ne savait même pas ce qu'il voulait lui demander. Qui était-il, que faisait-il ici ? Pourquoi était-il autant attiré par lui ?
Il pourrait répondre facilement à ses questions, il est Harry, le fils illégitime de la lignée des Potter, il étudie ici pour engranger des connaissances qu'on ne lui a pas enseignées et Tom est attiré par lui sans raison valable.
Des réponses simples, fausses car tout ce qui paraissait simple chez lui ne l'était pas.
Le mage noir se releva d'un mouvement sec, ses muscles engourdis protestant contre ce geste brusque. Il était resté immobile trop longtemps.
Il récupéra et rangea ses effets personnels, les glissant à l'intérieur de son sac à dos. Si Potter partait dans quelques jours, Tom voulait en avoir le cœur net. Le confronter. Il réussirait certainement à le persuader de rester ou à le forcer à le faire. Il avait des arguments convaincants.
Tom se sentait ridicule. Incohérent, Potter allait le prendre pour un malade, ce qu'il était probablement.
Malgré ses craintes, il avait passé trop de temps à se battre contre lui-même, à combattre l'envie de lui parler, de s'approcher de lui. Il s'agissait de sa dernière chance pour comprendre pourquoi il le fascinait.
Jedusor fit quelques pas sur le carrelage immaculé, se préparant à affronter ce qu'il craignait et fuyait depuis des mois.
Traverser Poudlard lui parut d'une simplicité déconcertante. Les escaliers habituellement récalcitrants le conduisirent sans mal vers les profondeurs et il se retrouva rapidement devant la salle commune de la maison des Serpentard.
Il avait peu de chances de trouver Harry derrière cette porte mais c'était une possibilité et le premier endroit qu'il se devait de vérifier. Il donna le mot de passe au serpent en pierre qui gardait la porte et entra dans ses quartiers.
Ses yeux trouvèrent les siens immédiatement. Potter s'apprêtait à sortir. Il était là, à quelques mètres de la porte, à quelques mètres de lui.
L'air interdit, ses yeux remontèrent lentement vers les siens et il recula d'un pas, comme si leur soudaine proximité l'avait brûlé. Ce n'était pas comme si Tom pouvait le toucher de là où il était.
Jedusor le détailla du regard, réduisant la distance qui les séparait pas à pas, affamé à l'idée de l'avoir plus proche, d'être capable de l'effleurer en tendant la main.
Son apparence dégageait toujours un mélange subtil de maladresse et de force. Ses sourcils étaient froncés et malgré les cinq centimètres qu'il avait de moins que lui, il paraissait imposant. Écrasant. Tom ressentait encore ce sentiment, comme si sa poitrine était tout à coup comprimée dans un étau alors qu'il se tenait face à lui.
Une appréhension sourde, comme si d'un instant à l'autre la situation pouvait dégénérer.
Potter évita de le regarder dans les yeux et le manque de contact visuel donna à Tom l'envie de hurler de frustration. Sa cicatrice attirait son regard, ses cheveux courts et emmêlés lui donnaient envie de passer ses mains dedans pour les tirer et tenter de les discipliner.
Il voulait qu'il le regarde. Son uniforme était semblable au sien, de seconde main et sa cravate était dénouée. Il la portait enroulée autour de sa main, comme s'il venait de l'arracher de son cou.
Il voulait qu'il le regarde. Ses yeux rencontrèrent les siens une seconde et leur couleur verte le hanta. Tout à coup, Potter baissa la tête, carra les épaules et lui déclara.
— Écarte-toi de la porte, j'aimerais sortir.
Ces mots étaient les premiers qu'il lui adressait depuis des mois. L'envie de saisir son visage pour le contraindre à le regarder, à le considérer, le saisit à la gorge et Tom fut obligé de juguler ses pulsions.
Le toucher ne ferait qu'empirer sa dépendance et lui démontrer sa démence.
Ses yeux revinrent sur la cravate que Potter tenait serrée dans son poing et il remarqua à quel point son vis-à-vis était sous tension, ses muscles tendus à l'extrême.
Avec soin, contrôlant du mieux que possible sa voix et l'expression de son visage, Tom lui demanda.
— Où comptes-tu te rendre ?
Le tutoyer lui plaisait. Lui parler lui faisait plaisir. Son regard percuta le sien avec brusquerie et Potter déclara d'une voix rendue rauque par la colère qui l'habitait.
— Ça ne te concerne pas, Jedusor.
Son nom sonnait comme un juron sur sa langue.
Potter lui mentait. Tom ne pouvait pas expliquer de quelle manière il l'avait su mais à la seconde où celui-ci avait dit que cela ne concernait pas, Jedusor savait que ce que Potter comptait faire à l'extérieur avait tout à voir avec lui.
Tom comprit que si leur confrontation s'éternisait, Harry sortirait sa baguette et un duel s'engagerait. Il était étonnant que Potter ne soit pas déjà en train de le maudire, tant il semblait sur le point de débuter un combat dont il savait ne pas pouvoir ressortir sain et sauf.
Il ne l'appréciait pas. Tom l'avait su le premier jour mais il ne pensait pas que Potter le considérait comme un danger, un ennemi. Il n'avait rien fait pour justifier ses craintes. Il n'avait jamais autant été sur le qui-vive et son hostilité était surprenante. Même face à Malefoy il était plus détendu. Quelque chose clochait.
Tom se retint de lui demander quoi, il n'allait pas lui répondre. Au lieu de ça, il se décala d'un pas pour le laisser accéder à la porte.
Harry le dévisagea avec incrédulité, visiblement persuadé qu'il ne pourrait sortir sans se battre. Puis, aux aguets, il s'avança jusqu'à la porte et lorsqu'il passa à quelques centimètres de lui, Tom dut restreindre ses muscles à l'arrêt. Pour ne pas saisir son bras et le serrer jusqu'à lui en briser les os, pour s'assurer qu'il ne puisse plus jamais s'éloigner de lui.
Après son départ, il relâcha un souffle difficile, sa poitrine lui faisait mal et son cœur battait trop fort. Il le laissait partir mais il allait le poursuivre, il ne pouvait s'en empêcher. Il avait la sensation que s'il ne traquait pas immédiatement sa proie, elle lui échapperait à jamais.
Il lui laissa quelques minutes d'avance. Tom ne savait pas où Harry se rendait mais il savait que cela avait un rapport avec lui et il n'avait toujours pas obtenu les réponses à ses questions. Qui était-il, pourquoi était-il ici et qu'est-ce qui, chez lui, le rendait tellement incontrôlable.
Avant son arrivée, tout allait bien pour lui. Il avait des priorités, des objectifs.
Aujourd'hui il n'était plus que l'esclave de désirs qui ne faisaient que grandir.
Harry Potter devenait peu à peu son adversaire, son antagoniste. Il n'avait pas prévu d'en avoir un mais dorénavant il ne se voyait pas réaliser ses ambitions sans s'assurer d'abord de la mort ou de l'allégeance de Potter. Parce qu'il ne pouvait l'imaginer qu'à ses côtés ou détruit.
Inégal dans ses résultats, mauvais élève, sang-mêlé. Son physique n'avait rien d'extraordinaire, ses capacités magiques non plus. Ce qui n'empêchait pas Tom de vouloir sa reconnaissance plus que celle de personne. De désirer sa présence plus que celle de n'importe qui.
Combattre ses démons le concernant faisait déjà de lui son ennemi attitré. Tom éprouvait des sentiments pour Harry Potter. Des sentiments qu'il ne comprenait qu'à moitié, oscillant entre violence et douceur.
Le laisser partir loin de lui n'était pas envisageable. Il devait savoir. Jedusor saisit sa baguette et se concentra suffisamment pour lancer un charme qui le rendrait invisible pendant un certain temps. C'était un sortilège temporaire et complexe qu'il n'était pas pleinement sûr de maîtriser mais c'était le seul moyen qu'il avait pour le suivre sans se faire remarquer.
Une fois satisfait du résultat, il sortit sans attendre de la salle commune, empruntant le même chemin que sa cible. Poudlard était désert et ses sens exacerbés. Il avait l'impression d'être capable d'entendre le souffle de Potter se précipiter alors qu'il marchait de plus en plus vite.
Tom le suivit en laissant une distance respectable entre eux, même avec le sortilège il avait l'impression que s'il s'approchait davantage, Potter le saurait. Parce que Jedusor était là, à fixer son dos, comme il avait pris l'habitude de le faire.
Harry gravit les marches jusqu'au deuxième étage, lançant parfois des regards derrière lui pour vérifier qu'on ne l'avait pas accompagné. Il paraissait persuadé que Tom allait le faire, il avait raison. À cet instant le suivre était devenu sa raison d'être.
Arrivé au deuxième étage, Potter ralentit, jusqu'à aboutir devant les toilettes pour filles. Tom fronça les sourcils, de plus en plus dubitatif sur ce que son ennemi était en train de fabriquer. Potter lança un dernier coup d'œil alentour et entra à l'intérieur des toilettes.
La porte se referma derrière lui et Tom se retrouva seul à l'extérieur. Il ne pouvait pas entrer après lui, Harry verrait la porte s'ouvrir et saurait immédiatement qu'il n'était pas seul.
Une dizaine de minutes passèrent sans que Jedusor n'entende rien de particulier provenir de l'intérieur. Qu'y avait-il dans les toilettes du deuxième étage de si intéressant ?
Ce devait être quelque chose ayant un rapport avec lui. Une intuition brutale traversa son esprit et Tom sortit la carte dont il se servait pour ses recherches sur la Chambre des Secrets. Il avait fouillé toutes les pièces du sous-sol, du rez-de-chaussée, du premier et des deuxième et troisième étages. Toutes les pièces sauf une. Les toilettes pour filles du deuxième étage lui étaient inaccessibles et il n'avait pas songé au fait qu'elles puissent le mener à la Chambre.
Il avait émis la possibilité que le monstre de Salazar Serpentard puisse être un Basilic, si les légendes étaient vraies ce en quoi il doutait mais si elles étaient réelles, un serpent de la taille du Basilic avait besoin de place pour se déplacer. La tuyauterie de Poudlard était un vaste réseau, immense et accessible par les toilettes et les salles de bains.
Ce qui renforça sa nouvelle intuition. Il n'avait pas pensé à cette possibilité jusqu'à aujourd'hui, Potter avait trop parasité son esprit pour qu'il atteigne seul ces conclusions. Si son intuition se confirmait et qu'Harry Potter eût trouvé le passage menant à la Chambre des Secrets, cela ne faisait qu'ajouter au mystère qui l'entourait.
Potter l'avait forcément espionné, avait découvert sur quoi étaient portées ses recherches et était parvenu à la Chambre avant lui. Comment ? Pour quelles raisons ? Tom n'en savait rien.
La famille Potter n'avait aucun lien avec Salazar Serpentard. À quoi bon rechercher la Chambre s'il n'en avait pas l'utilité, s'il ne pouvait même pas l'ouvrir.
Était-ce un piège ? Potter s'attendait-il à ce qu'il le suive et ouvre la Chambre pour lui ? Dans quel but ?
Tom Jedusor désirait découvrir la Chambre pour être certain qu'une partie du sang de la lignée des Serpentard coulait effectivement dans ses veines. Pour s'assurer qu'il avait du sang sorcier. S'il se révélait être l'héritier de Serpentard, il pourrait s'imposer aux membres de sa maison. Utiliser le monstre de la Chambre pour asseoir son autorité et prendre l'ascendant sur Malefoy et les autres sangs-purs qui le regardaient de haut.
Se hisser à leur rang et pouvoir prétendre à une place dans ce monde. Cela n'avait rien à voir avec Potter. C'était personnel.
S'il s'agissait d'un piège, comment Harry Potter aurait-il su qu'il était fourchelang ? Tom n'utilisait jamais son don, la réaction de Dumbledore à la simple évocation de celui-ci l'avait convaincu de ne plus jamais le mentionner aux autres sorciers. Peut-être était-ce Dumbledore lui-même qui l'avait trahi.
Toutefois même ainsi, il lui manquait des éléments de compréhension, des éléments importants. Ceux qui feraient la connexion entre Potter et lui. Peut-être que ces éléments expliqueraient rationnellement sa fascination irraisonnée pour l'autre garçon.
Alors qu'il était resté paralysé devant la porte, sa carte à la main, il entendit tout à coup un sifflement. Un sifflement humain, en fourchelang. Le premier sifflement humain qu'il entendait et qui ne provenait pas de lui.
§ Ouvre-toi ! §
Un cri, un ordre sifflé. Instantanément, un grincement terrible retentit, comme si on déplaçait quelque chose de lourd contre la pierre. Un déclic résonna puis Tom entendit Potter haleter, aussi précisément que si son oreille s'était retrouvée contre sa bouche.
Jedusor l'entendait se déplacer. Le bruit était similaire à celui d'un corps glissant le long d'un toboggan rugueux, comme si Potter était tombé à l'intérieur de la tuyauterie.
Tom se rua sur la porte des toilettes pour l'ouvrir, encore sous le choc d'avoir entendu Potter, POTTER, parler fourchelang.
Son esprit en effervescence était déjà en train d'atteindre des conclusions sur lesquelles il n'osait se pencher. Lui et Potter devaient avoir un lien de sang. Familial. Cela expliquerait pourquoi Tom avait eu l'impression de le connaître, cela expliquerait, au moins en partie, son obsession pour lui. S'ils étaient de la même famille peut-être que Potter était au courant. Peut-être que son comportement envers lui était dû à cela.
Un lien de sang. Ce sang si précieux et important pour la société sorcière. Tom voulait que ce soit réel. Que le même sang que le sien coule aussi dans les veines de Potter lui paraissait satisfaisant. C'était assez personnel pour contenter sa volonté de les voir liés.
Néanmoins c'était impossible. Les Potter n'étaient pas liés à la lignée des Serpentard. Il ne pouvait que faire fausse route en supposant que ce fût le cas, ou alors Potter avait menti sur son nom de famille. Cela paraissait être une possibilité, il y avait une myriade de possibilités et Jedusor n'avait pas le temps de penser à chacune d'elles.
La première chose sur laquelle ses yeux se posèrent fut le trou béant ouvert au fond de la pièce. Sur le robinet ornant le lavabo qui s'était déplacé, il remarqua des serpents gravés dans le métal. Ils étaient là depuis tout ce temps. Juste sous son nez. Potter connaissait la localisation de la Chambre, ça ne faisait aucun doute, comment aurait-il pu la trouver avant lui dans le cas contraire ?
Était-ce pour elle qu'il était venu quelques mois à Poudlard ? Voulait-il mettre la main sur le monstre prétendument détenu à l'intérieur ? S'ils étaient tous deux les héritiers de Serpentard, Tom était prêt à faire quelques concessions et partager. À condition que Potter réponde à toutes ses questions en échange.
Pour cela, il devait descendre, le retrouver et le confronter. Le sortilège qui le rendait imperceptible s'était brisé lorsque Tom avait entendu parler fourchelang. Il ne prit pas la peine d'en lancer un autre.
Il voulait que Potter le regarde, qu'ils puissent se parler. Il avait besoin de lui parler.
Sa chute fut longue et désagréable. Incapable de fermer les yeux, il vit le sol se rapprocher dangereusement et eut tout juste le temps de ralentir sa chute avant de s'écrouler au sol. Des canalisations de la taille de véritables couloirs lui tendaient les bras.
La panique fit rater un battement à son cœur lorsqu'il s'adressa la réflexion qu'il ne savait pas du tout dans quelle direction aller. Puis en regardant attentivement le sol, il remarqua des traces laissées par les chaussures mouillées de Potter. Celles-ci menait vers le couloir d'en face, il n'avait qu'à les suivre pour le rattraper.
Ses chaussures aussi étaient trempées, tout comme son uniforme. Les lieux étaient d'une humidité particulièrement désagréable mais Tom n'y prêtait que peu d'attention. Trop extatique à l'idée de découvrir la Chambre. Il avait encore des difficultés à réaliser qu'il était tombé dans les entrailles de l'école. Il y était presque, l'un de ses souhaits les plus chers allait se réaliser.
Il avait minutieusement suivi les pas de Potter jusqu'à ce que les couloirs s'élargissent, formant de véritables excavations aussi larges et hautes que la Grand Salle. Puis il arriva devant une porte munie d'un mécanisme complexe où des serpents entrelacés retenaient des dizaines et des dizaines de verrous différents. Les yeux de ces serpents avaient la même couleur que ceux de Potter. Émeraude.
Potter l'avait ouverte sans prendre le temps de la refermer et Tom ne prit pas la peine de le faire non plus.
S'il faisait sombre jusqu'ici, Jedusor était désormais capable de percevoir une source de lumière qui provenait certainement de la Chambre.
Il avança à l'intérieur d'un pas mal assuré, malgré son excitation. La Chambre des Secrets était une longue salle humide éclairée par une lumière verdâtre. Elle était pourvue d'immenses piliers de pierre autour desquels étaient sculptés d'innombrables serpents s'élevant vers le plafond obscur. Trop haut pour en discerner les détails.
Tom poursuivit son chemin lentement, prenant le temps de contempler la grandeur des lieux, tout en cherchant Potter du regard. Il atteignit le fond de la salle où trônait une immense statue représentant Salazar Serpentard, le fondateur de la Chambre. Proche de la statue, la tête levée avec solennité, Potter contemplait les traits de Serpentard avec résolution.
Tout dans sa posture criait l'emphase qu'il ressentait à être ici. Il se dégageait de lui une tranquillité résignée d'une violence qui lui retourna l'estomac et Tom n'osa pas s'approcher davantage. Harry ne semblait pas avoir remarqué sa présence, en transe, concentré sur son objectif.
Tom ne pouvait à peine voir les traits de son visage mais il était capable de distinguer ses mouvements avec clairvoyance. Comme si, l'espace d'un instant, ils ne faisaient plus qu'un.
Harry Potter apporta la cravate qu'il tenait toujours dans sa main à son visage et, d'un mouvement assuré, il la noua devant ses yeux. Se rendant aveugle. Tom comprit avec facilité la portée de ce geste, si le monstre de la Chambre était bel et bien un Basilic, se protéger les yeux pour ne pas croiser le regard du monstre était primordial.
Cependant les légendes précisaient que l'héritier de Serpentard n'avait rien à craindre des pouvoirs de la bête. Elle ne pouvait que lui obéir. Perplexe, Tom le vit vérifier que son bandeau tenait fermement avant de tirer de sa poche quelque chose qui ressemblait à s'y méprendre à une épée.
Enfin Potter ouvrit la bouche et tout s'accéléra le Basilic l'attaqua, le temps passa, s'étira, se déforma.
⁂
Act III: He stayed with me
Tom esquissa une grimace, relire son vieux journal intime lui donnait l'impression de redécouvrir ce qu'il avait été adolescent. Ses objectifs, sa manière de voir le monde, ses idéaux, son comportement, tout lui paraissait un peu enfantin et ridicule maintenant.
— Tu as sérieusement pensé qu'on faisait partie de la même famille ?
Tom se tourna dans la direction de la voix pour trouver le visage d'Harry. L'autre homme était en train de lire par-dessus son épaule, sans gêne.
Il ajouta tout à coup.
— Tu étais complètement obsédé par moi, c'est plutôt effrayant.
Tom referma le journal dans un claquement, se leva pour voler un baiser à son compagnon et profita de la surprise de celui-ci pour déclarer contre ses lèvres.
— C'est la seule chose qui n'ait pas changé.
Potter se mit à sourire, le repoussa dans leur lit, s'éloigna et déclara.
— Prépare-toi, on a été appelé pour déplacer une urne supposément hantée.
Tom prit le temps d'observer son amant se déshabiller pour enfiler la tenue dans laquelle il travaillait. Harry Potter n'avait pas beaucoup changé en cinq ans, il avait grandi et s'était musclé mais arborait toujours les mêmes cheveux noirs courts et hirsutes, les mêmes lunettes dorées et rafistolées, la même cicatrice, la même aura. Il était beau dans son uniforme. Affreusement beau.
Lorsque Potter se dirigea vers la porte de leur chambre pour sortir et probablement transplaner sans même prendre le temps de petit-déjeuner, Jedusor verrouilla celle-ci d'un mouvement de la main.
Harry Potter se stoppa, la main sur la poignée de porte et gronda d'une façon qui le fit sourire.
— Est-ce que tu viens de nous enfermer ?
Tom ne répondit pas tout de suite, retira ses habits et entreprit de se changer, enfilant chaque vêtement de son costume avec lenteur, lorsqu'il arriva au nœud autour de son cou, il entendit un juron et la seconde d'après Harry Potter l'avait attrapé par la nuque pour l'embrasser à son tour.
C'est à bout de souffle qu'ils se séparèrent. Tom garda ses mains sur le corps de Potter, plongeant son regard dans le sien, immensément satisfait qu'Harry le lui retourne. Que les yeux verts qui le hantaient encore il y a cinq ans se posent sur lui avec la même intensité que la sienne.
Harry Potter lui appartenait. Celui-ci dut saisir le tournant qu'avaient pris ses pensées puisqu'il se détacha de lui et lui indiqua.
— On va être en retard.
Tom rétorqua, en saisissant la main de son amant.
— Tu as traversé le temps pour me rejoindre, on peut se permettre d'être en retard.
Potter le contredit mais entreprit de serrer sa main en retour.
— Ça n'a rien à voir. J'ai traversé le temps pour te tuer et ça ne nous donne pas le droit d'être en retard. Tu sais comment sont les Gobelins.
Oui, Harry Potter était venu du futur avec un objectif très précis. Éliminer le Basilic qui représentait un danger et le tuer, lui, lorsque cette tâche serait accomplie.
Harry avait tué le monstre de la Chambre des Secrets ce jour-là à Poudlard, puis ils s'étaient battus en duel et Potter avait gagné. Il aurait pu l'abattre. Deux mots auraient suffi mais il ne l'avait pas fait. Tom avait été un monstre dans son futur, il était le meurtrier de ses parents et le responsable de deux guerres sorcières mais Harry n'avait pas pu l'abattre.
Au lieu de ça, il s'était écroulé, effondré sous le poids des responsabilités qui pesaient sur ses épaules. Tom et lui étaient restés comme ça un long moment, couchés dans l'obscurité et le silence de la Chambre, éclaboussés par le sang du Basilic et hébétés par leurs propres blessures.
Potter avait brisé ce silence pour lui raconter son histoire, celle d'un futur bien réel d'où il venait et où il avait vécu. Tom avait compris, éclairci les dernières zones d'ombre qui maculait encore l'histoire de Potter et lorsque celui-ci était arrivé à bout de son récit, il lui avait demandé, conscient d'être incapable de se défendre si tout à coup Potter changeait d'avis et décidait qu'il méritait de mourir pour des actes qu'il n'avait pas encore commis.
— Maintenant, qu'est-ce que tu vas faire ?
Harry s'était difficilement relevé, le visage baigné de larmes et lui avait soufflé.
— Tu penses que j'ai le choix ? Je suis coincé dans le passé et si je… si je ne finis pas la mission qu'on m'a donnée, à quoi auront servi les sacrifices que j'ai faits ?
Potter avait passé les six derniers mois à s'entraîner pour le battre, il avait tout quitté pour mener à bien cet objectif. Dans son futur, Lord Voldemort était un monstre immortel ayant pris le pouvoir sur l'Angleterre. C'était un homme fou qui détruisait le monde sorcier, remonter le temps pour le tuer avait paru être le seul moyen d'empêcher un désastre. Harry Potter venait d'avoir dix-sept ans lorsqu'il avait quitté son époque sans retour.
En comprenant tout ce que cela impliquait, Tom avait répondu ce qui lui paraissait être la seule solution, pour lui, pour eux, pour satisfaire les sentiments qui obsédaient son âme.
— Reste avec moi.
Potter l'avait regardé comme s'il était fou, ce que Tom s'était avoué être depuis un moment, puis il s'était mis à rire, un rire sans joie, de ceux qui trahissaient un désespoir confinant à la folie.
— Bonne idée, je passe le reste de ma vie à t'empêcher de devenir celui qui tuera mes parents. Combien de temps ça durera avant qu'on s'entretue, d'après toi ?
C'était plein d'une ironie résignée, triste, sans espoir. Tom s'était contenté de répéter.
— Reste avec moi.
C'était tout ce qui lui importait à ce moment-là, que Potter ne disparaisse pas comme un mirage dans son existence.
Tom ne savait pas pourquoi Potter avait accepté, peut-être n'y avait-il rien d'autre.
Aucune possibilité. Aucune solution. Toujours est-il que Potter n'avait pas quitté Poudlard après les vacances de Noël. Il était resté avec lui. Ils avaient fini leurs études ensemble, avaient obtenu leurs diplômes et Potter l'avait empêché de commettre les actes qui l'auraient conduit à devenir Lord Voldemort.
Jedusor avait implicitement compris que pour que Potter reste avec lui, il se devait d'abandonner les ambitions qui avaient été les siennes. Celles-ci les auraient seulement conduits à un autre duel où Potter ne lui aurait pas laissé de deuxième chance.
Ils s'étaient rapprochés. Albus Dumbledore - qui s'était révélé être au courant de toute l'histoire - n'avait pas apprécié ce rapprochement. L'homme avait souhaité que Potter accomplisse ce pour quoi il était venu et comme celui-ci ne l'avait pas fait, il s'était mis à se méfier d'eux comme si Jedusor avait corrompu Harry d'une façon ou d'une autre.
Après Poudlard, ils étaient restés ensemble et avaient cherché un moyen de gagner leur vie. Aboutissant dans l'Allée des Embrumes à travailler chez Barjow et Beurk quelques années, le temps de gagner assez d'argent pour ouvrir leur propre boutique.
Une boutique en plein milieu du Chemin de Traverse, leur activité était acceptée par les Aurors et le ministère puisqu'ils n'y faisaient rien d'illégal. Ils récupéreraient des objectifs maudits, hantés ou dangereux, les rendaient inoffensifs lorsque cela était possible et les vendait dans leur magasin. Si un artefact se révélait trop corrompu pour être vendu chez eux, il le donnait à Barjow et Beurk contre quelques galions ou Tom le gardait pour lui.
Harry acceptait qu'il conserve les babioles qu'il considérait comme acceptable. C'est-à-dire les moins amusantes ou celles trop dangereuses pour finir sur le marché noir.
Tom avait reconnu ses sentiments pour ce qu'ils étaient. Cette obsession irraisonnée et douloureuse était une forme malade d'amour. Un amour qu'il éprouvait pour un ennemi venu d'un autre temps.
Potter ne lui avait pas rendu ses sentiments facilement, il lui avait fallu gagner sa confiance.
C'était tout récent. Cinq années avaient été nécessaires pour le convaincre.
C'était parfait. Tom avait Harry Potter et leur statut de sang-mêlé lui importait peu. Harry l'avait informé qu'une décennie après la défaite de Gellert Grindelwald, les lois changeraient, le monde sorcier deviendrait plus tolérant. Tom se contenterait de ça. Il ne changerait pas le monde, n'allait pas le détruire ni même modifier son identité pour s'y conformer. Il allait y vivre et le ferait en gardant Potter auprès de lui.
C'était tout ce qui lui importait, la reconnaissance de Potter lui suffisait. Il se sentait accepté, compris et écouté et il espérait rendre à Harry la liberté que celui-ci lui avait donnée.
Harry Potter l'avait laissé vivre, Harry Potter l'avait laissé l'aimer.
— Tom ? Tom ! Tu m'écoutes ? Si tu penses encore à cet artefact capable de faire apparaître les morts, je le confisque. La bague des Gaunt n'est pas un jouet, c'est probablement l'une des Reliques de la Mort.
Potter se tenait devant lui, excédé par son manque d'attention, le menaçant de lui prendre la pièce la plus importante de sa collection et Tom ne put que lui adresser un sourire narquois.
— Je n'étais pas en train de penser aux capacités de cette bague.
Son compagnon le regarda avec suspicion et lui demanda.
— Et à quoi tu pensais ?
Tom Jedusor sourit davantage.
— Je me demandais si tu l'accepterais comme bague de fiançailles ou si j'allais devoir en trouver une autre.
Harry Potter écarquilla les yeux, pâli puis se mit à rougir et Tom décida que sa vie avait définitivement pris la bonne direction.
Fin.
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