22 mai 1983

Harry était assis devant le lit de son frère depuis plusieurs minutes. Peut-être même des heures. Il ne savait plus vraiment. Cela ne lui importait nullement à ce moment. Tout ce qu'il voulait, c'était observer l'expression paisible de Thomas, profondément endormi.

James était parti pour le week-end en Bulgarie. Apparemment, il était sur le point de signer le « traité du siècle », comme il aimait le scander partout dans le manoir depuis une semaine. Bien que Harry s'en fiche comme d'une guigne des accords politiques ou commerciaux de son père, toujours est-il qu'avec Thomas, ils avaient le manoir à eux tous seuls.

Certes, Moby veillait au grain et Remus ne s'absentait que quelques heures en journée pour aller travailler. Mais ils avaient quatre jours sans James, sans classe pour lui et surtout, avec une surveillance beaucoup plus laxiste qu'à l'accoutumée. En résumé, il s'agissait du paradis pour deux jeunes garçons comme eux.

Et malgré les conditions de rêves de ce week-end, Harry avait le moral dans les chaussettes. Il avait réalisé depuis quelque temps que Thomas était plus distant avec lui. Cependant avec Miller, leur père, la pleine lune et les visites de plus en plus nombreuses de Thomas chez son ami Néville, il ne l'avait pas remarqué. Mais là, ils étaient juste tous les deux depuis deux jours et bien qu'il y avait eu des rires et des jeux, l'alchimie qu'ils partageaient depuis toujours avait comme toujours.

Harry en connaissait la cause. Ou plutôt la cause en était évidente, mais il refusait d'y croire. Voilà presque un mois que Thomas avait découvert pour sa lycanthropie et cela faisait presque un mois qu'il l'évitait. Bien que Harry ne le lui montre pas, cela lui brisait le cœur à chaque fois qu'il le sentait se tendre sous l'une de ses tapes amicales ou de tenter d'échapper discrètement à ses étreintes fraternelles. Thomas qui passait avant son temps collé à son ombre, l'évitait désormais comme la peste.

Il avait été naïf et s'en voulait. Harry ne savait même pas pourquoi il avait pensé que son frère accepterait sa lycanthropie les bras ouverts, mais maintenant il regrettait profondément ce choix. Thomas était un sorcier comme les autres au final. Comme tous les autres, il ne voulait rien à faire avec un loup-garou.

Le plus silencieusement possible, il se rapprocha de son cadet qui dormait encore paisiblement. Accroupi à ses côtés, il posa délicatement sa tête sur le matelas à côté de la sienne. Du bout des doigts, il retraça les contours de son visage sans pour autant oser poser sa pulpe sur la peau délicate de son cadet. Harry avait l'impression que si son frère continuait de s'éloigner ainsi, alors peut-être qu'un jour il ne reverrait plus jamais Thomas.

En songeant à cette possibilité, Harry retint difficilement un frisson d'horreur de parcourir son échine. Ne voulant sous aucun prétexte oublier le visage de son frère, il reprit sa petite danse fantôme autour de son visage. Comme si frôler ses contours permettrait de mieux garder en mémoire cette expression paisible.

Harry finit par abaisser son bras, ses muscles commençant à faiblir dans cette position, le bras ainsi levé. Il reprit alors sa simple contemplation de ses traits. Il devait réveiller Thomas, Remus allait bientôt rentrer du travail. Il serait alors l'heure du goûter. Mais il n'en avait aucune envie, il ne voulait pas le réveiller. Harry ne voulait plus être le témoin de la confiance perdue de son frère.

Soudain, la porte s'ouvrit en grand derrière lui, Remus les saluant avec bonne humeur. Certainement avait-il senti leurs odeurs provenir de la chambre de Thomas. Finalement, il y avait aussi des avantages à la lycanthropie, songea ironiquement Harry.

Au boucan que fit Remus en entrant dans la chambre, Thomas se réveilla en sursaut, ses yeux écarquillés s'ouvrirent juste en face de ceux de Harry. Avant même qu'il ne puisse esquisser le moindre geste, Thomas bondit en arrière ce qui fit sursauter son aîné et tomber en arrière.

« Ne me mange pas ! » s'écria le petit garçon.

En entendant cela, l'esprit de Harry se vida complètement. Son frère avait cru qu'il s'était approché si près de lui pendant son sommeil pour le manger. Ne le voyait-il donc que comme une bête assoiffée de sang ? Ne voyait-il même plus le grand-frère surprotecteur qu'il était derrière sa maladie ?

Harry n'avait même pas envie de connaître la réponse à ses questions. Il avait bien trop peur que pour Thomas, il n'était déjà plus rien d'autre qu'un loup-garou comme les autres.

Il croisa le regard terrifié de son petit-frère et s'en fut trop pour Harry. Ce fut comme un coup de poignard en plein cœur, son frère avait peur de lui. Les larmes lui montèrent aux yeux, mais il les retint de toutes ses forces. Harry ne voulait pas pleurer devant Thomas.

« Désolé, je ne voulais pas t'effrayer. »

Sa voix s'était brisée à peine avait-il ouvert la bouche. Puis, il sentit une goutte humide rouler le long de sa joue pour rejoindre la commissure de ses lèvres. Humilié à l'idée d'avoir laissé voir à son frère les premières larmes coulées, le garçon se redressa précipitamment.

Tout en frottant du revers de la main ses larmes qui ne voulaient plus s'arrêter de couler, Harry fonça vers la sortie pour s'enfuir. Il bouscula de l'épaule son parrain pour l'écarter de l'entrebaillement de la porte et ne s'arrêta pas, même lorsque Remus tenta de le convaincre de revenir. Le pauvre, il n'avait certainement pas dû comprendre ce qu'il venait de se passer. Mais Harry n'avait pas le cœur à lui expliquer maintenant que son frère avait peur de lui.

Harry courut, courut et courut encore, jusqu'à en perdre haleine. Il ne voulait plus être enfermé dans cet immense manoir. Il avait besoin d'air, de pouvoir crier à plein poumon et de laisser échapper les volutes de magie accidentelle qui lui échappaient sous le coup de ses fortes émotions.

C'est tout naturellement que ses pas le menèrent à son petit refuge secret. Il venait toujours là lorsqu'il avait besoin de souffler un peu, que ça soit pour y passer une nuit d'insomnie à regarder les lucioles ou bien simplement pour faire une pause lorsque son père était trop exigeant envers lui. Il s'agissait d'un simple petit étang entouré de roseaux et de gros rochers. Un peu plus loin, un saule pleureur frôlait de ses branches la surface de l'eau.

Harry tomba à genoux devant ce dernier, des pleurs déchirant sa gorge et se perdant dans les airs. Aujourd'hui, même le calme et la féérie des lieux ne pourraient rien faire pour le calmer. Il ne voulait pas observer le clapotis de l'eau, les grenouilles sauter de cailloux en cailloux, les papillons se mêler aux libellules ou les petits poissons s'approchant parfois de la surface. Harry était bien trop secoué pour être réceptif au calme des lieux.

Il avait envie de crier, de pleurer, de tout détruire autour de lui, d'hurler sa peine, de frapper et de s'arracher le cœur pour oublier toute cette douleur. Son frère était le centre de son monde. Jamais il ne pourrait vivre sans l'avoir à ses côtés, sans pouvoir le protéger, le faire rire et le dorloter. Sans lui, Harry n'avait aucun but dans la vie, aucune passion. Du haut de ses six ans, il lui était impossible de se projeter sans avoir son cadet à ses côtés.

Soudain, un vent se leva, frappant les branches de l'arbre follement et créant de vif remous à la surface de l'étang. Les petits animaux s'enfuirent sous des rochers, dans les bois ou sous la surface de l'eau. Ils sentaient la magie sauvage et électrique du garçon se réveiller et s'étendre autour de lui.

Puis, de petits cailloux et desbrindilles se joignirent à la danse folle du vent tourbillonant autour de Harry, lui griffant les bras ou le visage lorsqu'ils le frôlaient de trop près. Mais Harry ne sentait rien, il n'en avait que faire d'avoir une égratignure ou deux.

Il ne sut pas combien de temps il était resté là à pleurer. Mais lorsque ses sanglots se tarirent et que sa respiration se fit de plus calme, il revint alors petit à petit à ses esprits. Lentement, Harry observa son environnement. Maintenant qu'il ne pleurait plus, le lieu était étrangement calme. Il avait visiblement fait fuir tous les oiseaux, insectes et amphibiens vivants habituellement là.

Doucement, il s'approcha de l'étang pour se passer un peu d'eau sur le visage afin d'effacer les traces de ses larmes. Pencher ainsi au-dessus de l'eau, Harry observa son reflet se déformer quelques secondes pour ensuite revenir à la normale. Cette image ne lui sembla que plus insupportable lorsqu'il croisa ses iris cerclés d'ambre, lui rappelant sournoisement sa lycanthropie.

De rage, il frappa de son point la surface de l'eau. Un juron lui échappa lorsque sa main rencontra les cailloux tapissant les bords de l'étang. Il avait oublié que l'eau n'était pas profonde de ce-côté ci de la marre. Son regard se porta sur le dos de ses doigts et un soupir lui échappa un observant un peu de sang s'écouler le long de sa main.

Harry s'affala dans l'herbe et observa quelques instants les nuages se mouver dans le ciel. Petit à petit, il reprit pied dans la réalité. Harry réalisa petit à petit qu'il était en simple t-shirt et même s'ils étaient déjà en mai, les températures restaient fraîches en fin d'après-midi. « Même début de soirée », songea Harry en observant les teintes orangées qui envahissaient petit à petit le ciel.

Malgré la chair de poule qui le recouvrait, Harry n'avait pas envie de rentrer maintenant. Pourtant Remus devait être inquiet et le chercher, il le savait. Harry n'aimait pas inquiéter son parrain. Pourtant même en sachant le sermon qui allait l'attendre pour s'être ainsi enfoui, il préféra rester quelque temps de plus dans son petit repère.

Sans même s'en rendre compte, ses paupières se fermaient lentement et bientôt, Harry sombra dans un sommeil réparateur. Déchaîner sa magie l'avait épuisé.

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Lorsque Harry se réveilla quelques heures plus tard, ce fut à cause du croassement d'une grenouille qui décida que sauter sur le front de l'endormi était une bonne idée. Sous le coup de la surprise, Harry se redressa brusquement et sans trop savoir comment, il bascula en arrière. C'est ainsi qu'il se retrouva les quatre fers en l'air et les fesses dans l'eau gelée de l'étang.

Grelottant, il se pressa de sortir de l'eau mais cela fut sans prendre en compte les cailloux glissants qui tapissaient le fond de l'eau. Une nouvelle fois, Harry finit dans l'eau et cette fois-ci, il fit bien attention à où il mettait ses pieds pour sortir. Un fois hors de l'étang, Harry observa les alentours et ne fut pas le moins du monde rassuré par tous les petits bruits qui provenaient des ténèbres de cette nuit sans lune. Les nuages avaient recouvert le ciel pendant qu'il dormait.

Il avança à petits pas à travers la forêt en essayant difficilement de se repérer malgré la noirceur des bois. S'orienter était beaucoup plus facile de journée que de nuit et même s'il était persuadé de prendre le bon chemin, il ne reconnaissait presque pas les arbres, les souches et les rochers qu'il voyait à chaque fois qu'il venait à l'étang.

Désespérant de plus en plus de retrouver son chemin, Harry hésita à s'asseoir au pied d'un arbre afin d'attendre le lever du soleil. Il avait de plus en plus peur de se perdre. Alors qu'il s'arrêtait quelques secondes pour reprendre son souffle et essayer de calmer sa panique, un cri sembla résonner au loin. D'abord effrayé à l'idée de croiser un grosse bête, Harry s'immobilisa et retint sa respiration par réflexe.

Il ne fallut que quelques secondes pour que le cri résonne une nouvelle fois au loin. Cependant cette fois-ci Harry l'entendit très bien et tous ses muscles se relachèrent en même temps qu'il reprennait son souffle. C'était Remus qui l'appelait, certainement était-il parti à sa recherche en ne le voyant toujours pas rentré à la tombée de la nuit.

« REMUS ! REMUS ! Je suis là ! » s'écria Harry en sautant presque de joie.

Il ne fallut pas longtemps à Remus pour le rejoindre et lorsqu'il le vit, Harry sauta dans les bras de son parrain. Des larmes de soulagement et de fatigue mêlée lui échappèrent alors que l'étreinte forte de son parrain se refermait sur lui.

Il entendit vaguement Remus lui faire un sermon, cependant la fatigue liée à la retombée de l'adrénaline qui l'avait aidé à se repérer dans les bois sans paniquer était bien trop forte pour que Harry ait la force de l'écouter. Remus sembla s'en rendre rapidement, le petit garçon devenant soudainement mou dans ses bras. Il s'était endormi.

Doucement, il essuya les larmes qui recouvraient encore ses joues et le plaça un peu plus confortablement contre son torse. Harry n'était pas un enfant lourd, mais il était heureux de l'avoir trouvé non loin du manoir, le porter à une seule main n'était pas facile non plus. La seconde était quant à elle occupée à éclairer ses pas.

Lorsqu'il avait surpris Harry et Thomas dans la chambre du cadet, Remus n'avait pas vraiment compris ce qu'il se passait. Lorsque Harry était parti en pleurant, il avait tout d'abord voulu lui courir après. Mais connaissant le tempérament du garçon, jamais il ne voudrait pleurer devant quelqu'un d'autre. Alors Remus avait préféré demander tout d'abord des explications à Thomas.

Il avait bien remarqué que depuis quelque temps, une étrange tension semblait flotter entre les deux frères. Cependant Harry avait simplement détourné le regard lorsque Remus avait voulu lui parler en lui disant simplement « c'est de ma faute ». Imaginant une simple dispute, Remus ne s'en était pas plus mêlé. Harry avait l'air de vouloir régler ça tout seul.

Cependant, maintenant il regrettait de ne pas s'en être mêlé un peu plus. Ce n'était pas parce que Harry agissait parfois comme plus vieux qu'il ne l'était réellement, qu'il n'était plus un enfant comme un autre à d'autres moments. Pourtant, rien ne l'avait préparé aux explications de Thomas. Sur ce coup, Remus s'était bien planté, lui qui avait un si bon instinct habituellement.

Calmement, il s'était rapproché de Thomas et s'était assis au bout de son lit. Ce dernier se doutait que Remus avait quelques questions à lui poser et s'était installé à ses côtés, ses pieds balançant doucement dans le vide. Ne se doutant pas un seul instant des remontrances qui allaient bientôt lui pleuvoir dessus, Thomas expliqua sans aucune gêne pourquoi il semblait vouloir prendre ses distances avec son frère à Remus.

« Harry m'a dit qu'il était un loup-garou. »

Remus fut estomaqué de la réponse. Pourtant Harry avait toujours refusé d'aborder le sujet avec son frère, peu importe le nombre de fois où son parrain lui répétait qu'il finirait bien par l'apprendre. Pourtant, Remus n'avait jamais beaucoup insisté sur le sujet, lui-même n'avait jamais révélé sa maladie de son propre chef à ses amis. ces derniers l'avaient l'avait presque tous appris par accident, de la part de quelqu'un d'autre ou par déduction liée à ses absences à chaque pleine lune.

Il n'y avait bien qu'à sa première petite-amie qu'il avait avoué volontairement. Et c'était uniquement parce que cette dernière avait elle-même un cousin lycanthrope qu'elle aimait beaucoup, malgré la maladie. Cela avait mis Remus plus à l'aise et l'avait finalement poussé à se confier.

Alors Remus n'avait jamais voulu forcer Harry à parler de cela avec son petit-frère. Il aborderait déjà le sujet lorsqu'il se sentirait prêt. Cela l'étonnait donc que Thomas soit au courant de ça. Mais ce que retenait surtout Remus, c'est que visiblement le garçon avait très mal pris la révélation de son aîné. Cela le décevait quelque peu de la part de Thomas, même s'il comprenait que cela pouvait être effrayant pour un enfant aussi jeune. Mais Harry était son frère, il avait espérer que son amour et son admiration envers lui seraient plus forts que cette peur.

« Quand est-ce qu'il te l'a dit ? » soupira-t-il en pensant déjà à la longue conversation qu'il allait devoir avoir avec Thomas, puis avec Harry.

Alors, Thomas lui expliqua tout. Qu'il avait entendu James et lui en parler. Que Harry lui avait dit pour sa condition trois semaines plus tôt. Que depuis, il avait un peu peur de lui. Qu'il lui en voulait de lui l'avoir caché. Qu'il ne voulait pas devenir un loup-garou. Qu'il évitait Harry pour ne pas se faire mordre par accident. Qu'il avait l'impression que son frère allait se transformer à tout moment pour le dévorer.

Thomas lui raconta tout et Remus attendit patiemment qu'il finisse. Le discours de l'enfant était un peu décousu et pas toujours très compréhensible, mais Remus avait l'habitude. Après tout, Thomas n'était qu'un petit garçon, c'était normal qu'il ait du mal à s'exprimer.

Lorsqu'enfin, il cessa de parler, Remus ne savait pas comment réagir. Il avait envie de hurler sur le garçon pour avoir été aussi injuste et méchant avec son frère. Mais d'un autre côté, il le comprenait. Lui aussi, avant de devenir lui-même un lycanthrope avait eu beaucoup de préjugés sur cette maladie.

Prenant une profonde inspiration, il décida que rien ne servait de lui crier dessus ou de l'effrayer en lui expliquant que lui aussi, était un loup-garou. Il préféra plutôt tenter de lui expliquer ses erreurs.

« Thomas, ce n'est pas parce que ton frère est un loup-garou qu'il va t'attaquer dans ton sommeil ou essayer de te dévorer. Il est un humain avant tout et surtout ton grand-frère. Harry a toujours été comme ça, même si avant tu ne le savais pas. Pourtant il n'a jamais été méchant avec toi, n'est-ce pas ? »

Thomas rougit de honte en réalisant qu'il n'avait jamais pensé à ça. Cependant Remus avait bien conscience que cela ne suffirait pas à lui faire comprendre que Harry n'était pas un danger. Les prochaines paroles de Thomas en fut la preuve.

« Mais si ça se trouve, il veut me manger depuis longtemps mais n'ose pas le faire. »

Remus soupira. Il avait envie de lui mettre une claque. Thomas avait hérité du caractère borné de ses parents.

« Non et tu le sais très bien. »

Son ton avait été un peu plus froid qu'il ne l'avait voulu et Thomas sursauta. Il n'avait pas l'habitude de voir Remus fâché.

« Harry t'aime plus que tout. tu es son précieux petit-frère. Il t'aide toujours, prends soin de toi tous les jours et passe son temps à te chouchouter. Tu penses vraiment qu'il pourrait te faire du mal ? »

Thomas le fixa d'un air dubitatif, pas encore complètement convaincu par son oncle. Pendant la demi-heure qui suivit, chaque argument de Remus fut contré par un « oui mais si ça se trouve, il ne te l'a pas dit mais il veut me manger » de la part de l'enfant. N'en pouvant plus, Remus finit par perdre sa patience légendaire.

Il se leva brusquement du lit de Thomas, se plaça face à lui, les mains sur les hanches et le toisa d'un air strict. Le garçon sembla comprendre que cette fois-ci, Remus n'allait pas accepter de se faire contredire et baissa les yeux. Pourtant, il ne comprenait toujours pas en quoi sa logique était mauvaise.

« Maintenant ça suffit Thomas. Si je te dis que Harry n'est pas dangereux, c'est qu'il ne l'est pas ! Être un lycanthrope n'est pas une tare ou une malédiction, c'est une maladie. Il ne l'a pas choisi et en souffre tous les mois. En dehors de ses transformations pendant les pleines lunes, le loup n'a aucun contrôle sur lui et Harry n'est pas dangereux. Même s'il te mord, tu ne te transformeras pas. S'il ne te l'a pas dit avant, c'est justement parce qu'il avait peur que tu ne comprennes pas à quel point c'est dur pour lui de vivre avec. Il avait peur que tu le rejettes, que tu ne l'aimes plus et que tu n'essayes pas de le comprendre. Tu es juste en train d'agir comme le pire des frères possible. Harry a toujours pris soin de toi, il t'aime plus que tout et il est le premier à détester sa maladie. Jamais il ne pourra te blesser et tu le sais très bien, tu cherches juste des excuses parce que tu n'acceptes pas que ton frère puisse être un loup-garou. »

Remus était essoufflé par sa tirade, mais ce n'était pas suffisant. Entendre Thomas parler de façon aussi mesquine de son frère pendant aussi longtemps l'avait mis sur les nerfs. Cela l'agaçait d'autant plus que lui aussi était un loup-garou. Il suffisait de remplacer « Harry » par « Remus » dans ses phrases pour comprendre ce qu'il penserait de lui. Et bien qu'il ne voulait pas le montrer, cela blessait Remus.

« Je ne veux pas te voir en dehors de ta chambre pour aujourd'hui. Tu es puni, je vais te confisquer tous tes jouets et j'espère bien que tu utiliseras ce temps pour réfléchir à tes actions. Tu me déçois beaucoup Thomas.

- Désolé, je ne savais pas. » murmura Thomas en baissant les yeux.

« Je m'en fiche, ce n'est pas à moi que tu dois t'excuser. Maintenant je vais chercher Harry et lorsque tu le verras tu lui présenteras tes excuses. Je ne veux plus jamais te voir lui dire des choses méchantes. Je ne serai pas aussi conciliant la prochaine fois. »

Thomas hocha de la tête et Remus tourna les talons en direction de la chambre du second Potter. Cependant, il fut surpris de ne pas l'y trouver. Après avoir visité la bibliothèque, la salle à manger et la salle de jeux, Remus fut de plus en plus inquiet. Mais où était donc passé son filleul ?

« Moby ! » appela-t-il.

« Que peut faire Moby pour Monsieur Remus Lupin ?

- Est-ce que tu sais où est Harry ?

- Le jeune maître est sorti en courant un peu plus tôt. » lui indiqua l'elfe en se tordant les doigts. Certainement avait-elle peur de se faire réprimander pour ne pas avoir arrêté l'enfant.

« Merci Moby, je vais aller le chercher.

- Attendez Monsieur Remus Lupin. » souffla finalement l'elfe en trépignant sur place, elle n'avait pas le droit de donner d'ordre à un sorcier normalement. « Moby pense que ce n'est pas une idée. Moby pense que le jeune maître Harry préfère rester seul un peu plus longtemps. »

Remus songea quelques instants au conseil de l'elfe de maison avant de pousser un profond soupir. D'un air las, il passa sa main dans ses cheveux avant d'accorder un sourire réconfortant à l'elfe. Il ne lui en voulait pas de lui avoir donné son avis.

« Tu as raison, je vais aller l'attendre sur le porche. » soupira-t-il finalement.

Remus se dirigea donc vers la porte d'entrée et s'installa sur les marches menant à l'extérieur. Lui-même avait eu la chance de ne pas se faire rejeter à cause de sa lycanthropie par les personnes qui lui étaient les plus chères. Finalement, les seuls à s'être éloignés de lui n'étaient que des amis lointains, des collègues avec qui il ne s'entendait pas forcément très bien de toute façon ou de la famille éloignée qu'il ne voyait presque jamais.

Les seules personnes qui comptaient vraiment étaient toutes restées à ses côtés, aussi bien ses parents que ses meilleurs amis. Pourtant il imaginait très bien ce que Harry pouvait ressentir. Il lui suffisait de remplacer « Harry » par « Remus » dans le discours de Thomas pour savoir ce que le garçon penserait de lui s'il apprenait qu'il était lui aussi un loup-garou.

Remus songea brièvement qu'il aurait dû lui aussi annoncer sa maladie à l'enfant, maintenant qu'il savait pour celle de Harry. Mais il se dit que finalement, ses remontrances auraient plus d'impact si elle venait du tonton Remus totalement humain que l'enfant connaissait, plutôt que d'un autre loup-garou menteur qui protégeait juste l'un des siens.

Finalement, il était resté assis sur les marches du perron pendant plusieurs heures, bien qu'il ne le réalisa pas immédiatement. Ses pensées le préoccupaient bien trop pour que Remus fasse attention au soleil qui se couchait au loin. Ce ne fut que lorsqu'il se fit la remarque qu'il avait un peu froid que le lycan réalisa qu'il était déjà vingt heures.

Affolé à l'idée que Harry n'était toujours pas rentré, il se précipita dans les bois et commença à appeler son filleul. Rien ne servirait d'appeler Moby pour chercher l'enfant, s'il ne l'appelait pas de lui-même alors elle ne pourrait pas le localiser. De plus, son odorat surdéveloppé ne lui était pas d'une grande aide. Harry avait disparu il y a plusieurs heures et son odeur s'était complètement effacée à cause du vent. Remus espérait juste qu'il n'était rien arrivé à Harry.

De temps en temps, Remus retournait au manoir pour vérifier que Harry n'était pas rentré. Mais à chaque fois qu'il demandait à Moby, la réponse était toujours la même; aucun signe de l'enfant.

La nuit était tombée depuis deux bonnes heures lorsque Remus obtint le premier signe de vie de son filleul. Complètement hystérique à l'idée d'enfin avoir retrouvé Harry, il courut en direction de la voix de ce dernier sans faire attention à son environnement. Il trébucha sur plusieurs racines et cailloux et faillit même tomber à quelques reprises. Mais à cet instant plus rien importait à Remus, il voulait juste le retrouver.

Lorsqu'il le vit enfin, Harry fronça de lui-même dans ses bras et Remus ne put que l'emprisonner dans une étreinte forte. Les pleurs de l'enfant firent échos à la peur qu'il avait lui-même ressentie quelques instants plus tôt, mais aussi au soulagement qui l'envahissait désormais. Harry était complètement trempé et grelottait comme une feuille dans ses bras. Mais qu'avait-il bien pu faire pour finir dans cet état ?

« Oh par Merlin Harry, mais qu'est-ce qui t'es arrivé ? J'étais si inquiet, ne disparait plus jamais comme ça. Je me suis fait un sang d'encre. Et je ne parle même pas de Moby, je ne l'ai jamais vu aussi stressé. Et si tu avais rencontré une créature sauvage ? Ou que tu t'étais encore plus perdu dans la forêt, j'aurais pu ne pas te retrouver du tout. »

Remus aurait pu encore continuer longtemps à évacuer ainsi sa frustration, ses inquiétudes et sa peur, cependant sentir Harry se détendre contre lui le fit se stopper dans ses remontrances. Toute cette mésaventure avait dû l'épuiser.

« Aller, rentrons à la maison. » soupira-t-il en lui embrassant le front.

Remus était lui aussi épuisé. La discussion qui les attendait devrait attendre le lendemain.

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Le lendemain

Lorsque Harry se réveilla, il fut surpris de découvrir le plafond de sa chambre. Il se redressa lentement dans son lit et remarqua alors que Remus avait dû lui donner un bain rapide hier soir et avait soigné ses petites égratignures. En tournant la tête sur le côté, il remarqua que Remus s'était endormi dans un fauteuil à ses côtés. Certainement avait-il eu peur qu'il retente de s'échapper ou bien qu'il attrape un rhume pendant la nuit à cause de son petit plongeon dans l'étang.

Comme s'il avait senti que Harry s'était réveillé, l'adulte commença à bouger sur son fauteuil et quelques minutes plus tard, il émergeait enfin du sommeil. Son regard croisa celui de son filleul et un doux sourire étira ses lèvres. Il ne voulait pas l'effrayer ou lui faire penser qu'il était encore en colère.

« Bonjour Harry. » Remus lui embrassa le front et se leva afin de faire disparaître son fauteuil. « Est-ce que tu as faim ? »

Le petit garçon hocha de la tête et après un court entretien avec Moby, un plateau recouvert de bacon, d'œufs au plat et de toast apparut devant lui. Il y avait même quelques pancakes avec du sirop d'érable, un jus de pamplemousse et un grand bol de chocolat chaud.

« Il y en a trop pour moi, tu veux quelques toasts ? » proposa-t-il gentiment à son parrain.

Remus accepta de bon cœur, lui non plus n'avait pas encore mangé. Il grimpa sur le lit du garçon tout en faisant attention de ne pas trop faire bouger le plateau afin de se retrouver assis en tailleur face à Harry. Le petit déjeuner se passa en silence, aucun d'eux ne sachant comment aborder les évènements de la veille.

Ce ne fut qu'au moment de finir son dernier pancake que Harry trouva le courage de parler à son parrain. Il baissa les yeux timidement et prit une profonde inspiration pour se donner du courage.

« Je suis désolé. Je ne voulais pas partir aussi longtemps. Mais … mais je me suis endormi sans m'en rendre compte. Et quand je me suis réveillée, il faisait déjà nuit. » s'excusa-t-il en triturant ses doigts plein de sucre.

« Je ne t'en veux pas Harry. J'étais juste très inquiet, la prochaine fois appelle Moby si tu te perds dans la forêt. » lui sourit Remus.

Délicatement, il attrapa ses mains et les nettoya avec un gant de toilette qu'il attira depuis la salle de bain. Puis, ce fut au tour de sa moustache de sirop. Harry acquiesça timidement de la tête, il avait honte d'avoir ainsi inquiété Remus.

« J'ai parlé à Thomas. Il n'avait pas à te dire des choses aussi méchantes. Il est puni jusqu'à ce qu'il te présente ses excuses.

- Je n'ai pas besoin de ses excuses. Elles ne seront pas sincères. » se renfrogna Harry en vidant d'une traite son verre de jus.

Remus soupira en faisant disparaître le plateau et les plats désormais vides. Il se doutait bien que Harry réagirait de cette façon. Mais d'un autre côté, il refusait d'aller voir Thomas pour lui dire que finalement, ses excuses ne sont plus nécessaires. Cela ne ferait que lui faire croire que finalement, ses actes n'étaient pas si graves que ça. Non, Thomas devait comprendre qu'il avait mal agi envers Harry.

« Harry, regarde moi. »

Remus attendit patiemment que les yeux anthracites se lève vers lui pour reprendre la parole.

« Rien de tout ce qu'il a dit n'est vrai. Nous ne sommes pas des monstres, nous sommes des sorciers. De simples sorciers qui n'ont pas eu de chance et ont fait une mauvaise rencontre. Rien n'est de notre faute, nous sommes des malades et des victimes, pas des criminels. »

Remus tenta de sembler le plus confiant possible en disant cela. Certes, ces paroles auraient eu plus de sens venant de quelqu'un d'autre que d'un lycanthrope essayant de s'auto convaincre de cela depuis des années. Mais il était le seul présent pour rassurer Harry, alors Remus le ferait de la façon la plus convaincante possible. Alors il ne rompit pas le contact visuel jusqu'à ce que Harry hoche doucement de la tête.

« Bien. » sourit Remus. « Que dirais-tu de faire une bataille explosive ?

- Est-ce que tu pourrais plutôt m'apprendre à jouer aux échecs ? » demanda Harry surexcité, le précédent sujet de conversation déjà complètement oublié. « J'ai vu un livre qui parlait de ça dans la bibliothèque, mais je n'y ai rien compris. » grimaça-t-il.

« Bien sûr, je vais chercher le plateau de James et je reviens. » sourit Remus, amusé par l'engouement de Harry.

Peut-être que d'ici quelques mois, il aurait enfin un meilleur adversaire que son meilleur ami. James avait beau être le chef du bureau des Aurors et savait donc parfaitement comment élaborer une stratégie, il était pourtant une véritable catastrophe avec un jeu d'échecs dans les mains. Jamais Remus n'avait vu quelqu'un d'aussi facile à battre et cela l'attristait de ne plus pouvoir jouer de longues parties contre Lily. Même Sirius, le plus impatient et impulsif des Gryffondors, était un meilleur adversaire que lui.

Ils passèrent ainsi le reste de la matinée à jouer aux échecs. Remus montrant les mouvements et les stratégies de base alors que Harry prenait consciencieusement des notes dans un petit carnet. Sa rigueur fit sourire Remus. Même si Harry n'avait pas côtoyé Lily très longtemps, il semblait qu'elle avait tout de même réussi à lui refiler certaines de ses habitudes.

Puis, lorsque Remus partit travailler, Harry décida de s'atteler aux devoirs que James lui avait donnés pendant son absence. Il espérait ainsi ne pas avoir le temps de trop ressasser ses mauvaises pensées. Afin de ne pas croiser Thomas, il demanda à Moby de lui apporter son repas de midi directement dans sa chambre. Elle accepta, même si dans d'autres circonstances Harry n'en aurait pas eu le droit.

Ce ne fut qu'en fin d'après-midi que le calme de la pièce fut perturbé. Thomas avait visiblement décidé qu'il ne voulait plus être puni. Il s'approcha doucement du bureau de son frère qui ne s'était toujours pas retourné. Harry ne l'avait encore jamais ignoré de cette façon, il devait vraiment être fâché, se dit Thomas.

« Je suis désolé pour ce que je t'ai dit hier.

- C'est bon, je dirai à Remus que tu t'es excusé. Tu n'es plus puni. »

Thomas fronça des sourcils. Harry ne le regardait même pas, alors qu'il venait lui présenter ses excuses. Il avait réfléchi toute la nuit et toute la journée avant de venir dire pardon. Mais visiblement, son frère n'en avait cure. S'il avait su, il n'aurait pas autant réfléchi sur le sujet.

Pourtant, mû d'un instinct étrange, Thomas décida de se rapprocher de Harry et de tourner sa chaise de bureau vers lui. Ainsi ils se faisaient face et alors Thomas comprit. Harry ne s'en fichait pas de ses excuses, c'est juste qu'il ne le croyait pas. Il devait penser que son petit-frère en avait simplement marre d'être puni et était donc venu lui demander pardon.

Mais ce n'était pas vrai. Thomas voulait vraiment se réconcilier avec son frère. Il avait beaucoup réfléchi à ce que Remus lui avait expliqué. C'était la première fois qu'il avait été aussi en colère contre lui et le petit garçon s'était donc dit qu'il avait dû faire une sacrée bêtise en ne voulant plus parler à son frère.

« Harry, je suis vraiment désolé. Pour ce que j'ai dit hier.

- Oui oui, c'est bon Thomas. »

Non, ce n'était pas bon. Harry ne l'appelait jamais par son nom complet. C'est qu'il était encore fâché contre lui, alors Thomas ne partirait pas. Il releva le regard d'un air déterminé mais lorsqu'il croisa celui blessé de son frère, il perdit tout son courage. Harry n'était pas fâché, il était triste. Thomas réalisa soudainement que son frère n'avait jamais eu l'air de souffrir autant, ou alors jamais face à lui. Même lorsqu'il s'était cassé le bras par sa faute ou qu'il s'était brûlé chez Remus. C'était la première fois qu'il avait l'air au bord des larmes.

« Et pas juste pour hier. Je suis désolée pour tous les autres trucs que j'ai fait avant. Je ne connais pas bien les loups-garous, alors j'ai eu peur. Mais Remus m'a dit que ce n'était pas comme dans les livres. Il a dit que dans la vraie vie, les loups-garous ne sont pas tous méchants. Un peu comme tous les chats ne sont pas noirs, il y en a aussi des blanc ou des oranges.

- des roux, pas orange. » reprit Harry par habitude.

« Ah euh oui, il y en a aussi des roux ! C'est ce qu'il avait dit. »

Harry laissa échapper un petit rire. Visiblement Thomas n'avait pas tout compris de la leçon que Remus lui avait donnée la veille. Son frère rougit en comprenant que Harry se moquait de lui. Cela l'embarassait, même si ce n'était pas fait méchamment.

« Enfin, je veux dire que j'ai compris. Tu n'es pas comme les méchants loups-garous qui sont à Azkaban ou qui attaquent des gens.

- Merci Tom, d'essayer de me comprendre. » le dit Tom lui lança un sourire resplendissant en échange. « Si tu veux, tu peux me poser des questions. Comme ça je pourrai te dire ce qui est vrai ou pas dans ce que tu penses des loups-garous. »

Thomas hocha vivement de la tête. Les deux garçons descendirent dans l'un des salons du manoir et discutèrent longtemps, très longtemps. Si bien qu'ils décidèrent d'aller se coucher ensemble cette nuit-là, ainsi ils pourraient continuer de parler et de s'amuser.

Harry était heureux, son petit-frère n'avait plus peur de lui.

xxx

14 juin 1983

« Alors ? Il dit quoi ? » demanda impatient Thomas à son grand-frère puisque lui-même ne savait pas lire.

« On est dans la mouise jusqu'au cou !

- Mouise ? » demanda Thomas qui ne connaissait pas ce mot.

« Ça veut dire qu'on a des problèmes, il faut absolument qu'on se rendre chez Remus, il a complètement oublié.

- Non, c'est impossible. Jamais il ne pourrait oublier un truc aussi important ! » s'horrifia le plus jeune.

Les deux enfants tentèrent de ne pas dramatiser la situation, mais c'était impossible pour eux. La situation était bien trop grave. C'est pourquoi ils décidèrent d'échafauder un plan pour se rendre chez Remus avant 16h30.

Ainsi, vers quinze heures, Harry demanda à Moby de se rendre sur le Chemin de Traverse pour acheter un livre qu'ils n'avaient pas dans la bibliothèque. Mais comme Miller lui en avait parlé quelque temps plus tôt, il tenait vraiment à le lire. Borgy ne poserait quant à lui aucun problème puisque c'était l'heure d'arroser les Mandragores et cela prenait plus de trois quarts d'heure. Enfin, James était au Ministère comme toujours et ne serait donc pas là pour les gronder.

Une fois certain que Moby était parti, Harry et Thomas se mirent en route. Le premier chercha quelques pièces dans sa tirelire où il plaçait les pièces qui lui restaient dans les fonds de poches de ses pantalons avant que Moby ne les lave. Thomas alla quant à lui dans la cuisine pour récupérer une gourde remplie d'eau pour le voyage. Une fois prêt, Harry attrapa une casquette qui était toujours accrochée à la cheminée sur la tête de son frère afin que personne ne reconnaisse le Survivant.

Puis, les deux garçons entrèrent dans l'âtre de pierre et une fois une poignée de poudre de Cheminette jetée à leurs pieds, Harry s'écria :

« Chaudron Baveur ! »

Les deux garçons atterrirent avec perte et fracas dans le pub miteux, cependant l'attention se déporta rapidement d'eux. Après tout, des gamins passaient tous les jours par ici afin de rejoindre leurs parents ou essayer de s'échapper de leur maison pendant quelques heures. Aussi rapidement que possible, Harry remit son frère sur ses pieds et l'épousseta afin de faire partir les cendres de son pull préféré. James le lui avait offert pour ses trois ans et représentait l'attrapeur de l'équipe Écossaise de la dernière coupe de Quidditch mondiale.

Une fois rassuré quant au fait que ce n'était que quelques tâches que Moby pourrait rapidement nettoyer, Thomas accepta de suivre son frère jusqu'au comptoir d'où l'aubergiste les observait.

« Bonjour mes p'tits gars, vous voulez allez sur le Chemin ? » demanda-t-il d'un air avenant.

« Non Mr. Tom, on voudrait prendre le Magicobus mais on n'a pas de baguette pour l'appeler.

- Le Magicobus ? »

Face à l'air dubitatif de l'adulte, Harry s'empressa de reprendre les choses en main. Ce ne fut pas long pour lui de trouver un mensonge efficace. De plus, l'homme semblait quelque peu naïf envers la candeur infantile.

« Oui, notre oncle n'habite pas loin. Il a un nouveau bébé alors on voulait lui faire une surprise. Avec des ballons et tout. » improvisa-t-il en désignant le sac que portait Thomas.

Certes, il n'y avait aucun ballon de baudruche à l'intérieur, mais de cela l'aubergiste n'en savait rien. Ce dernier hocha de la tête et contourna son bar pour sortir du côté Moldu. Son sourire en coin semblait indiquer qu'il était amusé par leur comportement. Mais Harry s'en moquait pas mal, personne ici ne savait qu'il était l'héritier Potter donc il n'avait pas besoin de se comporter comme tel.

Quelques minutes plus tard, les deux garçons se tenaient devant l'immeuble où vivait Remus. Harry, qui observait beaucoup son entourage, connaissait depuis longtemps le digicode de l'immeuble. De plus, James avait un double des clés de Remus pour pouvoir venir chez lui en cas de problème ou d'urgence. Il n'avait pas été compliqué pour lui de la récupérer dans son bureau du premier étage. L'opération aurait été plus compliquée si elle avait été conservée dans le bureau du chef de famille et dont seul James avait l'accès.

Une fois dans l'appartement, ils s'installèrent à leurs aises devant la télé avec quelques boissons et un paquet de bonbons que Remus conservait toujours dans le deuxième placard de sa cuisine. Lorsque la télé s'alluma, les deux garçons furent satisfaits de constater que les pubs ne s'étaient pas encore finies et qu'ils étaient donc arrivés pile à l'heure pour le début de leur émission.

Tout cela parce que Remus avait oublié d'acheter des nouvelles cassettes pour remplacer celles cassées et donc enregistrer leur nouvel épisode d'inspecteur gadget.