4 juillet 1983

Harry était tranquillement en train de jouer aux échecs sorciers contre lui-même dans le salon du manoir lorsque son père pénétra en trombe dans la pièce avec à sa suite l'ensemble de son matériel audio, aussi bien ses dizaines de cassettes que son casque et son Walkman. Le tout alla se fracasser dans la cheminée qui s'alluma instantanément en un brasier puissant.

Ne sachant comment réagir, Harry tenta de se jeter vers la cheminée afin de peut-être sauver quelques cassettes. Cependant cela ne lui valut que des brûlures aux mains puisque son père avait accentué la taille des flammes en apercevant son geste.

Harry tourna son regard douloureux vers son père, très mauvaise idée car l'homme prit cela pour de la défiance et lui asséna une gifle. Harry en avait l'habitude, il savait très bien comment était son père. Mais alors, pourquoi est-ce qu'aujourd'hui, encore plus qu'à l'accoutumée, il sentait son cœur se briser en un millier de morceaux. Quelques larmes échappèrent à son contrôle et cela sembla enrager James encore davantage.

Connaissant la manie de Remus à apparaître à l'improviste dans son salon par la cheminée à la moindre minute de libre, James attrapa le bras du garçon et le tira à sa suite à travers les couloirs du manoir. En quittant le salon, l'adulte ne remarqua même pas la présence de son fils cadet derrière la porte, cependant ce ne fut pas le cas de Harry qui ne put s'empêcher de lui renvoyer un regard trahit. Cela faisait des mois qu'il possédait son Walkman et seulement quelques semaines après l'avoir révélé à son petit-frère, son père était soudainement au courant.

Sur le chemin jusqu'au bureau de son père, Harry fut traîné par le col, ses pieds trébuchant régulièrement sur une irrégularité du sol. Il n'arrivait pas à suivre le pas rapide de son père avec ses petites jambes.

Harry avait l'habitude de se rendre dans cette pièce sentant l'alcool et la cigarette. A peine la porte fut-elle fermée derrière lui qu'il retira son pull, sachant parfaitement ce que son père attendait de lui. Quelques minutes plus tard, Harry s'évanouit sous la douleur provoquée par un énième coup de martinet ainsi que de sortilèges répétés.

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Lorsque Harry reprit conscience, ce ne fut que pour ouvrir les yeux sur le plafond étoilé de sa chambre. La peinture était vraiment réaliste et apaisante, cependant à ce moment-là il n'en avait que faire. Moby avait visiblement guéri ses blessures. Cependant les potions contre la douleur avaient cessé de faire effet. De plus, les rideaux n'avaient pas été fermés, laissant les rayons du soleil envahir la pièce d'une lumière forte, réveillant ainsi un mal de crâne intense chez lui.

Il prit le temps d'habituer ses yeux à la lumière avant de finalement se relever en une position assise et d'entreprendre une observation minutieuse de son corps. James ne lançait pas souvent de sortilège contre lui, il avait dû être particulièrement énervé et saoul pour agir ainsi. Son dos était recouvert de bandages qui s'enroulaient autour de son buste et de sa poitrine afin d'empêcher ses plaies de se rouvrir. Il ne lui semblait pas avoir déjà eu de punition aussi douloureuse par le passé.

Cependant, son attention était portée sur les fines bandelettes qui entouraient son avant-bras et se teintaient doucement de rouge. Certainement avait-il essayé de se tourner dans son sommeil et avait rouvert sa plaie. Cela devait aussi être la raison de son réveil. C'est seulement lorsqu'il réalisa qu'il ne voyait pas correctement les contours de sa main que Harry pensa à tâter son visage. Sa paupière droite était tuméfiée et rendait sa vision floue, cependant cela ne semblait pas être grave ou avoir atteint davantage son œil.

Une fois son analyse terminée, Harry laissa un gros soupir lui échapper. Il allait certainement mettre quelques jours à se remettre de tout cela. Il attrapa ensuite les quelques fioles de potion contre la douleur sur sa table de nuit et en avala deux, une rose et une bleue. Il ne se souvenait plus vraiment de leurs noms, mais Moby lui donnait toujours ces deux-là en premier. La verte devant être prise à la sortie de son bain.

Posant son regard sur le réveil à sa droite, il remarqua qu'il n'était que 7h et qu'il avait encore trois heures devant lui avant que son professeur n'arrive. Harry ne savait toujours pas s'il l'appréciait ou non. Miller pouvait parfois être terrifiant, comme à chaque fois qu'il sortait sa canne ou qu'il le traitait de petit crétin prétentieux et sans cervelle. Cependant il lui arrivait à d'autres moments de lui donner de bon conseil ou de lui parler gentiment comme la fois où il avait arrêté le cours en avance parce que Thomas lui avait demandé s'il pouvait l'aider à apprendre l'alphabet.

Bien sûr, cet exercice était bien trop difficile pour un enfant de trois ans. Mais cela avait été amusant de jouer au professeur pour une fois, plutôt qu'à l'élève. Thomas savait désormais écrire son nom dans des lettres à peu près droite ainsi que « Papa » et « Harry ».

Conscient qu'il ne parviendrait pas à se rendormir, Harry se redressa doucement en essayant de ne pas plus réveiller la douleur. Il attendit patiemment que les antidouleurs fassent effet et quelques instants plus tard, Harry put finalement sortir de son lit. Il testa son dos en faisant plusieurs mouvements vérifiant ainsi que la douleur avait bien disparu. Il constata donc avec regret que ce n'était pas entièrement le cas, cependant cela ne devrait pas poser de problème à moins de faire des mouvements trop amples ou brusques.

Il se dirigea ensuite vers la salle de bain et y prit un long bain chaud avant de finalement se rendre à la cuisine. N'ayant pas vraiment faim suite aux derniers évènements, Harry piocha simplement une figue dans une corbeille à fruits et se dirigea vers le salon. Après tout, il avait commencé une partie d'échecs la veille et n'avait malheureusement pas pu la terminer.

Harry fut cependant interrompu une demi-heure plus tard dans l'une de ses parties par l'arrivée de son petit-frère dans la pièce. Il était rare de le voir debout aussi tôt. Ce dernier s'approcha timidement de lui sans oser parler. Il finit par s'asseoir en face de lui et observa les pièces bouger toutes seules.

Il fut cependant tiré de ses pensées lorsqu'une tour décapita un pion ce qui le fit sursauter et donner un coup de genou au plateau. Ce dernier bascula sur le côté et se renversa. Mortifié d'avoir stoppé ainsi la partie de son frère, Thomas releva rapidement son visage vers Harry et le regard glacial que lui envoya ce dernier lui brisa le cœur.

« Je suis désolé Harry.

- De quoi ? D'avoir interrompu ma partie ou bien d'avoir dit notre secret à Jam… Père ? »

Harry n'appelait plus James papa ou père depuis longtemps maintenant, l'homme en avait perdu le droit. Cependant il savait que cela dérangeait son cadet et essayait donc d'en garder l'habitude devant lui.

« Les… Les deux. Écoute Harry je voulais juste écouter de la musique pendant que tu faisais tes devoirs et papa est arrivé à ce moment-là. Je ne savais pas qu'il viendrait. » s'excusa Thomas en se triturant les doigts. « Je suis vraiment désolé. »

Agacé par la voix pleurnicharde et aigue de Thomas, Harry se dressa de toute sa hauteur face à lui et le toisa d'un regard froid. Pas encore prêt à le pardonner, il préféra se détourner de l'autre garçon et quitter le salon.

« Ne pars pas comme ça ! Je me suis excusé, ça ne te suffit pas ? » cria Thomas visiblement agacé de se faire royalement ignorer alors qu'il avait mis sa fierté de côté pour s'excuser.

Ne pouvant plus retenir la colère qui grondait en lui, Harry fit volte face et plaqua son frère sur le mur le plus proche. D'une façon à la fois effrayante et naturelle, il réussit à maintenir étrangement facilement Thomas contre la tapisserie. Il plongea son regard dans celui terrorisé du petit garçon, ses deux petites mains tentant de retirer l'avant bras qui barrait sa gorge afin de le maintenir en place, mais qui l'empêchait également de respirer correctement.

« Tu es désolé ? Ne te moque pas de moi, ça ne fait même pas deux mois que je te l'ai montré et papa est déjà au courant, alors que ça fait plus d'un an que je cache tout ça. Alors en plus de tout avoir fait rater, tu as en plus fouiner dans ma chambre sans même me le dire. Est-ce que tu sais seulement ce que ça représentait pour moi ? Avant que Lily ne meurt, elle chantait tout le temps, quand elle cuisinait, quand je jouais, quand je prenais mon bain, quand on se promenait, quand je n'arrivais pas à dormir, quand j'avais peur, quand je faisais des cauchemars. Il n'y avait jamais de silence dans notre maison, si bien que cela en devenait parfois agaçant. Mais au moins j'avais l'impression que j'avais enfin une vraie mère et même si ce n'était qu'une illusion, j'ai vraiment aimé ça. »

Ça voix baissa d'un ton.

« Mais maintenant… Maintenant c'est tellement silencieux, je ne veux plus jamais entendre le silence de ce foutu manoir trop grand lorsque je fais mes devoirs ou que je joue aux échecs. Je ne veux plus me rappeler constamment que Lily n'est plus là. Tu as tout gâché, tout est de ta faute. » cracha froidement Harry.

Alors qu'il se plongeait de plus en plus loin dans ses souvenirs, son bras se pressait de plus en plus fortement sur le coup pâle de Thomas. L'empêchant d'inspirer la moindre bouffée d'air. Cependant Harry ne le remarqua pas, ses yeux étaient perdus trop profondément dans le vague pour se soucier de ce qu'il se passait dans le monde qui l'entourait. Heureusement pour Thomas, Moby parvint à le faire sortir de ses pensées en l'appelant de toutes ses forces et en tirant sur son bras.

Lorsqu'il reprit enfin conscience de la situation, Harry ne put que fixer avec horreur le spectacle sous ses yeux. Thomas s'était écroulé sur le sol dès que sa prise l'avait lâchée et il tentait difficilement de reprendre sa respiration tout en essuyant les larmes qui dévalaient ses joues. Cependant ce qui blessa le plus Harry fut la peur, non, la terreur qu'il lut dans le regard émeraude de l'enfant à ses pieds. Les marques violacées qui commençaient déjà à apparaître sur son cou ne firent que l'achever. Le plus rapidement possible, il se détourna de ce spectacle et se tourna vers Moby qui le fixait avec peur, mais aussi pitié.

Ne sachant comment réagir face à ses actions, Harry quitta la pièce en ordonnant à Moby de soigner Thomas et courut jusqu'à sa chambre où il resta enfermé jusqu'à ce que son réveil ne sonne dix heures. C'était l'heure de sa leçon, il était trop tard pour se faire porter malade ou renvoyer le vieil homme chez lui.

Rapidement, Moby lui lança un glamour afin de cacher les marques de coups donnés par James. Pas un seul mot ne fut prononcé, la tension était bien trop forte entre eux.

Quelques minutes plus tard, il accueillait Miller comme si ne rien était. Cependant au fond de lui, il n'arrivait pas à croiser le regard de l'homme ou même à se concentrer sur la leçon du jour. Il avait tellement honte. Il était à deux doigts de tuer son précieux petit frère.

Il était un monstre.

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Harry n'osa par la suite plus sortir de sa chambre pendant près d'une semaine si ce n'était pour se rendre à ses leçons. Il ne voulait pas croiser son petit-frère par accident dans un couloir. Il ne saurait pas comment réagir face à lui.

Il passait alors son temps libre allongé sur son lit à broyer du noir ou à dévorer des dizaines de livres afin de s'occuper l'esprit. Cependant les nuits étaient devenues des cauchemars pour lui. Aussi bien lorsqu'il était endormi car alors ses rêves rejouaient constamment la scène qui s'était déroulée quelque temps plus tôt. Mais aussi lorsqu'il était éveillé puisque ses insomnies lui laissaient tout le temps de culpabiliser encore davantage.

Sous le coup de la colère, il avait blessé aussi bien physiquement que psychologiquement son petit-frère et plus il y pensait, plus il s'enfonçait dans la culpabilité. Il était censé protéger Thomas en tant qu'aîné de la fratrie, mais cela était-il possible si le danger venait de lui ? Non, c'était impossible. Il ne pourrait jamais se le pardonner.

Et comme pour en rajouter une couche, la pleine lune avait eu lieu à la fin de cette semaine-là. Pour la première fois depuis longtemps, il préféra rester enfermé dans l'une des pièces de leur cave plutôt que de suivre Remus en Pologne, dans l'une des meutes les acceptant.

La rédemption lui vint seulement le lendemain lorsque deux bras fins l'entourèrent par la taille et un petit corps chaud se plaqua contre son torse. Il ne lui en fallut pas plus pour se retourner et emprisonner son cadet dans une étreinte d'ours, les larmes dévalant silencieusement ses joues, s'écrasant dans la chevelure du plus jeune.

« Je suis tellement désolé. Tellement désolé Tommy. Je suis désolé, pardonne moi… » La litanie d'excuses que déversa Harry dura de longues minutes, ou peut-être était-ce des heures. Cependant ni l'un ni l'autre ne le remarqua, trop occupé à se réconcilier.

En voyant l'état de fatigue et de stress dans lequel se trouvait son grand-frère, Thomas fut heureux d'avoir pris son courage à deux mains et d'être entré sans autorisation dans la chambre de Harry. Il avait eu le temps de réfléchir pendant cette semaine d'attente. Il pensa tout d'abord au regard effrayant que lui avait lancé son frère, puis à la force surhumaine qui l'avait plaqué contre ce mur.

Certes Harry était de presque trois ans son aîné, mais cela n'aurait pas dû être possible de le neutraliser d'une seule main étant donné que l'autre pendait alors le long de son corps alors occupée à se crisper et se décrisper. Certainement pour ne pas céder à l'envie de le frapper. C'est alors qu'il se souvint des récents aveux de Harry, il était un loup-garou et cela devait très certainement expliquer sa force surhumaine.

Après avoir passé plusieurs jours à ressasser les derniers évènements, Thomas arriva enfin à prendre un peu de recul sur la situation. Et s'il pensa rapidement aux étranges paroles de son frère vis-à-vis de cette histoire de mère et de trahison, il réalisa surtout ce qui était le plus important et grave dans les événements de ce mercredi soir.

Son père avait frappé Harry. Certes ce n'avait été que deux ou trois claques de ce qu'il avait vu, mais un père ne devrait pas faire cela, du moins le pensait-il. Pour les coups de ceintures, Moby lui avait dit que plusieurs familles faisaient cela, James n'était pas le seul, mais que cela devenait de plus en plus rare avec le temps.

Avant que James ne s'enferme dans sa chambre avec Harry, Thomas les avait discrètement suivis et jamais il ne pourrait oublier les propos de son père. Thomas savait qu'il était le Survivant, qu'il avait réussi à vaincre le Seigneur des Ténèbres à l'âge d'un an et demi seulement et que cela avait coûté la vie à leur mère. Il savait que grâce à ce miracle il était devenu le sorcier le plus célèbre de Grande-Bretagne et était la définition même du prince charmant pour toutes les petites sorcières.

Cependant il avait pensé que son père comprenait que la chute de Voldemort n'était que le fruit du hasard, de malchance (ou chance selon le point de vue) et de circonstances étranges. Que lui, Thomas, n'y était pour absolument rien, d'autant plus qu'il ne se souvenait d'absolument rien prouvant que c'était bien lui qui l'avait vaincu à part cette étrange cicatrice sur son front.

Mais apparemment son père n'était pas aussi lucide que son fils cadet et ce dernier le faisait comprendre à son aîné. James hurlait à son héritier qu'il haïssait sa monstruosité, qu'il avait honte de devoir l'appeler futur chef de la maison Potter, qu'il aurait mille fois préféré que l'aîné soit Thomas car il était au moins plus utile, intelligent, sage, joyeux, sensible, humain que lui. A ses yeux, Harry ne serait jamais rien de plus que le raté de la famille, le gêneur, le membre de trop.

Thomas n'avait finalement que pu plaquer ses mains sur ses oreilles, stoppant ainsi le flot ininterrompu d'insultes de son père. Tout ce qui arrivait à son grand frère était de sa faute, parce qu'il avait essayé d'utiliser la machine à musique de Harry, parce qu'il était un survivant miraculé de l'attaque de Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas- Prononcer-Le-Nom.

Puis, James avait claqué la porte de son bureau derrière lui, stoppant ainsi le flux d'insultes qui parvenait jusqu'à Thomas.

Finalement, après plus d'une semaine à se morfondre dans ses souvenirs et la culpabilité, il avait décidé de franchir le pas de la porte de son frère. Cependant ce dernier avait été le plus rapide puisqu'il en sortit en compagnie de son père. Cependant la fatigue extrême tirant les traits de son frère l'empêcha d'aller vers lui. A la place, il préféra les suivre et fut surpris de constater qu'ils se dirigeaient vers les caves. James ouvrit la première porte qu'il vit et attendit que Harry y pénètre avant de refermer la porte et d'y jeter plus d'une dizaine de sortilèges de protection.

Puis James remonta les escaliers menant au rez-de-chaussée, ne faisant pas attention à la paire de jambes visible derrière l'un des piliers du couloir. Thomas ne savait pas vraiment quoi faire à ce moment-là. Devait-il aller parler à son frère avant que sa transformation ne commence, ou bien devait-il plutôt attendre le lendemain pour en parler.

Cependant il n'eut pas à faire de choix puisque déjà, un hurlement de douleur s'échappa de la pièce ressemblant drôlement à une cellule de son point de vue. Petit à petit, les cris et plaintes humaines devinrent grognements et hurlements lupins. Thomas voulut quitter le plus rapidement cet endroit effrayant, cependant ses pieds refusaient de lui obéir. Son regard fixait le pan de bois le séparant de la bête visiblement très agacée à l'idée d'être enfermée.

Soudain, l'animal se jeta contre la porte renforcée magiquement, encore et encore, si bien que Thomas avait presque peur d'entendre son crâne se briser sous la force des chocs. Puis la bête sembla tourner en rond pour ensuite tenter de s'échapper en grattant le sol de la pièce. Cela sembla d'ailleurs stupide de tenter de s'échapper par le sol dans un endroit déjà sous terre.

C'est ainsi que le garçon, hypnotisé par les sons provenant de la cage, se rapprocha peu à peu de cette cellule. Finalement, Thomas resta planté là pendant toute la nuit, à la fois terrorisé et fasciné. Il finit par s'adosser contre le mur faisant face à la porte et sans même s'en apercevoir, il s'assoupit alors que le soleil commençait à se lever.

Il n'entendit donc pas Harry reprendre forme humaine et Moby le rejoindre afin de lui donner des vêtements propres. Cependant la dispute qui suivit entre ces deux-là eut finalement raison de son sommeil. Apparemment, Moby tenait à le soigner avant qu'il ne quitte la pièce tandis que Harry, lui, préférait d'abord prendre un bon bain chaud afin de se nettoyer de toute cette poussière et ce sang. Ce fut sous les cris indignés de l'elfe que Harry quitta la pièce, cependant il se figea de surprise sur le pas de la porte en apercevant son frère devant la porte.

Moby, surpris de l'immobilité de son jeune maître regarda quelle était la raison de cela et se figea elle aussi en apercevant Thomas. Finalement, elle décida que leur réconciliation ne la concernait pas et transplana vers les cuisines. Thomas profita du manque de réaction de son frère pour le dévisager rapidement.

Même si son pull était propre grâce à Moby, du sang commençait peu à peu à en imbiber l'épaule droite ainsi que le dos. De plus, du sang s'écoulait, goutte à goutte de ses ongles à moitié arrachés, certainement à force de creuser le sol. Enfin, du sang déjà sec plaquait ses chevaux à son crâne.

A ce moment-là, Harry ne ressemblait en rien aux loups-garous dépeind dans les contes pour enfants et autres légendes. Harry ressemblait juste à un enfant perdu, blessé et en ayant déjà beaucoup trop vu pour son jeune âge. Alors Thomas oublia le monstre qui sommeillait en lui et sauta dans les bras de son aîné.

Harry le rattrapa tant bien que mal, retenant le cri de douleur qui allait lui échapper. L'un des os de son bras était cassé et l'une de ses côtes était quant à elle fissurée. Ne remarquant pas le trouble et la grimace de douleur de son aîné, Thomas le serra encore quelques instants dans ses bras avant de le relâcher et de le tirer par le bras, heureusement celui qui n'était pas blessé, jusqu'à sa chambre. Moby avait raison, il devait être soigné.

Pendant qu'il prenait son bain, Thomas décida d'attendre son frère dans le lit afin de faire une sieste avec lui pendant la matinée. Cependant, il ne parvint pas à se tenir éveillé et s'endormit comme une masse moins de vingt secondes après avoir touché l'oreiller. Harry le rejoignit près d'une heure plus tard, une fois que Moby avait fini de le soigner et de le tartiner de baume en tout genre.

Harry s'allongea à ses côtés, n'osant pas s'approcher de son frère qui lui paraissait si frêle dans ce lit immense. Mais seulement quelques minutes plus tard, Thomas vint se blottir tout contre lui, s'agrippant avec force à son t-shirt de pyjama. Harry ne tarda pas à lui rendre son étreinte.

« Je suis tellement désolé. Tellement désolé Tommy. Je suis désolé, pardonne moi… »

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20 juillet 1983

Le professeur Miller était parti depuis deux bonnes heures maintenant. Pourtant, Harry n'avait toujours pas quitté la bibliothèque. La raison était simple, son père n'était pas satisfait de ses résultats. Apparemment au dernier petit test que son tuteur lui avait fait passer, il n'avait eu que quatre-vingt-quinze pourcents de bonnes réponses et un Potter ne pouvait qu'obtenir un score parfait.

Harry ne dit bien évidemment pas à son père que Miller ne faisait que lui dire qu'il aurait aimé que son père soit aussi bon élève que lui à l'époque où il lui enseignait encore. Cela ne lui causerait que plus de problèmes.

C'est ainsi que Harry se retrouvait depuis deux bonnes heures à réciter par cœur le contenu de son petit classeur où tous ses parchemins de cours étaient réunis. Lui se tenait immobile, les mains posées sur son bureau tandis que son père faisait les cent pas derrière lui. A chaque fois que sa langue fourchait, qu'il se trompait sur une définition ou inversait une date, un coup de ceinture s'abattait sur son dos.

Pour l'instant, Harry n'avait reçu que sept coups. Mais la douleur embrumait petit à petit son esprit. Il avait de plus en plus de mal à se concentrer et la peur du prochain coup ne le rendait que plus hésitant dans ses réponses.

« Concentre-toi davantage. Il n'y a plus que deux pages et j'ai d'autres choses à faire. »

Harry laissa un soupir de soulagement lui échapper et cela ne sembla pas plaire à James qui fit claquer sa ceinture sur le bois du bureau, juste à côté de sa main. Harry avait vraiment hâte d'être à Poudlard pour ne plus avoir à subir les leçons draconiennes de James.

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3 août 1983

Altaïr et Thomas n'avaient pas pu se rendre chez Remus ce dimanche-là puisque ce dernier avait dû remplacer son collègue qui travaillait dans le même pub que lui. Apparemment ce dernier avait attrapé une sacrée grippe et n'arrivait même pas à se lever. Harry ne comprenait toujours pas comment est-ce qu'on pouvait tomber autant malade en août et Thomas semblait penser comme lui.

C'est pourquoi ils avaient décidé de profiter de cette journée ensoleillée mais sans canicule pour faire une course de balais. Thomas avait reçu son premier balai magique pour son anniversaire vingt jours plus tôt et depuis, il ne le quittait plus.

Bien sûr, il montait sur des modèles pour enfant qui possédaient une multitude de protection en tout genre. Mais cela ne freinait aucunement leur amusement. Un peu plus loin se trouvait Moby qui les surveillait afin d'intervenir au moindre problème.

Sans savoir réellement comment ça s'était produit, Harry et Thomas s'étaient retrouvés à s'amuser à voler jusqu'au sommet du grand chêne au fond de leur jardin afin de grimper sur la plus haute branche de ce dernier. A cause de sa petite taille, Thomas n'avait jamais atteint la cime de ce dernier contrairement à son grand-frère et cela fut très plaisant d'admirer la vue depuis leur perchoir.

Ce ne fut qu'au moment de descendre de l'arbre que les problèmes survinrent. Harry qui avait déjà grimpé quelques fois jusqu'ici n'eut aucun mal à atteindre le sol sans avoir besoin d'utiliser un balai. Cependant ce n'était pas le cas de Thomas. Pour monter sur son balai, cela voudrait dire qu'il devrait se mettre debout sur sa branche ou bien sauter sur ce dernier en espérant ne pas glisser et cela lui paraissait impossible.

Mais descendre l'était d'autant plus puisqu'il n'arrivait même pas à atteindre avec ses pieds la branche juste en dessous de lui. Finalement, il opta pour la première option et décida de se mettre debout sur l'arbre et de glisser son balai entre ses jambes à ce moment. Il espérait seulement que le balai décollerait au moment même où il taperait du pied et non avec un temps de retard parce que sinon, il tomberait certainement.

Ce ne fut qu'au moment où Thomas leva un pied pour frapper la branche que Harry réalisa qu'il n'était pas encore descendu. En levant les yeux vers la cime, l'aîné réalisa dans quelle situation se trouvait son cadet. Il le vit glisser comme au ralentit de son perchoir. Ce n'était qu'un balai pour enfant et sa faible rapidité d'action n'était pas très pratique pour ce genre de situation.

Heureusement Moby fut à leur côté en une fraction de seconde et quelques instants plus tard, Thomas fut lévité jusqu'au sol. A peine assis sur l'herbe qu'il éclata en sanglots. Il s'était tordu la cheville pendant sa chute en plus de récolter une belle frayeur.

Le petit garçon tendit les bras vers son grand-frère et ce dernier le serra dans ses bras après une brève hésitation. Depuis leur dispute quelques semaines plus tôt, Thomas refusait tout contact physique avec lui et Harry comprenait très bien pourquoi. Il avait peur de lui et Harry n'était pas près de le toucher une nouvelle fois sans son consentement. Mais cette fois-ci c'était son cadet qui lui réclamait un câlin et cela le poussa à accepter l'étreinte.

Moby soigna rapidement la cheville du plus petit avant de leur conseiller de faire une petite pause pour l'instant dans leurs jeux. Harry accepta volontiers tandis que son petit-frère se blottissait plus fortement encore contre lui. Apparemment il avait vraiment eu peur et ne comptait pas recommencer à faire le casse-cou avant un moment.

Finalement, Harry porta son cadet jusqu'au salon où ils prirent un rapide goûter tout en jouant une partie de bataille explosive. Bien que Thomas soit un peu jeune pour cela, Harry lui avait appris une version plus facile du jeu de cartes.

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31 octobre 1983 (Anniversaire de Harry, il a 7 ans)

Ce soir-là, Harry se coucha avec le cœur rempli d'amertume. Il n'en voulait pas particulièrement à son frère, après tout il ne lui avait jamais dit la date exacte de son anniversaire, il ne pouvait donc pas la connaître. Cependant il s'attendait tout de même à ce que son père lui offre un cadeau. Mais comme chaque année, son désir ne s'était pas réalisé. A peine étaient-ils rentrés du cimetière que Thomas s'était enfermé dans sa chambre et son père avait dévalisé le placard à whisky-pur-feu pour finalement se terrer dans son bureau.

Autant dire que la seule personne ayant pensé à lui souhaiter un joyeux anniversaire au manoir fut Moby et sa tarte à la mélasse. Habituellement Remus passait lui rendre visite après son travail et lui offrait généralement une peluche ou un livre, cependant cela n'avait pas été possible cette année. Étant donné qu'il travaillait dans un bar moldu, il y avait beaucoup plus de monde qu'à l'accoutumée en cette soirée d'Halloween.

Il avait reçu une lettre de son parrain par le biais de Moby pour lui annoncé que cette année, son cadeau serait légèrement en retard. Remus tenant à lui offrir en main propre plutôt que par hibou. Pourtant, même essayer de deviner le cadeau de Remus ne suffit pas à le distraire de ses pensées moroses. Mais qu'y pouvait-il lui, si son jour de naissance tombait le même jour que l'anniversaire de la mort de Lily Potter. Rien, il n'y pouvait absolument rien.

Alors pourquoi est-ce que son père faisait mine que ce jour était exclusivement devenu celui de sa défunte femme. Certainement parce qu'il avait peur de l'oublier ou bien peut-être parce qu'il refusait de donner de l'importance à son fils aîné. Ce fait était d'ailleurs quelque chose que Harry ne comprenait toujours pas, comment est-ce que son père qui se vantait tant de son meilleur ami lycanthrope et d'être au-dessus de ces coincés d'aristos, pouvait penser à déshériter son propre fils à cause de sa maladie lupine.

Peut-être que finalement son père se souvenait bel et bien que cette horrible journée était celle de son anniversaire car ce dernier avait enfin décidé de lui annoncer la grande nouvelle. En effet, le matin même, James lui avait demandé de se rendre quelques minutes dans son bureau en attendant que son cadet soit prêt à se rendre au cimetière. A peine la porte fut-elle fermée que l'homme prit la parole.

« J'ai rencontré Walburga et Arcturus Black il y a quelques semaines. Je ne pense pas que tu te souviennes d'eux, tu n'étais qu'un bébé lorsque tu les as vu pour la dernière fois. C'était avant l'emprisonnement de ta mère, je pense. »

Harry hocha de la tête, même s'il savait très bien que son père n'attendait pas de réponse de sa part.

« Nous avons eu un accord. Finalement, il se pourrait que tu sois enfin utile à quelque chose. » soupira James.

Bien qu'il ne le montra pas, ces paroles firent mal à Harry. Alors pour James, il n'était toujours pas utile alors même qu'il était un excellent élève, s'occupait tout le temps de son petit frère et s'acharnait à apprendre les bonnes manières afin de devenir un bon héritier.

Ses poings se crispèrent et ses ongles grattaient douloureusement les paumes de ses mains. Mais Harry n'y faisait pas attention. Peu importe le nombre de fois que son père le dénigrait, il se retrouvait toujours à espérer que la prochaine fois, ce dernier reconnaîtrait ses efforts. Cette douleur qui creusait sa poitrine était bien plus douloureuse que celle de ses ongles perçant sa peau.

« Initialement, mon premier mariage devait donner deux enfants, le premier devait être l'héritier des Potter et le second l'héritier des Black. Mais ta mère a été emprisonnée avant de pouvoir avoir un autre enfant. Résultat, les Black n'ont plus d'héritier et les Potter en ont deux, comme je me suis remariée. »

Plus James parlait et plus Harry avait peur d'entendre la suite. Il savait ce qui allait venir. C'était évident.

« C'est pourquoi j'ai passé un accord avec Arcturus. Je te renie des Potter et de cette façon, il peut te récupérer comme l'héritier des Black. Thomas deviendra de cette façon le prochain Lord Potter et en bonus, j'ai réussi à récupérer des actions dans trois entreprises du Chemin de Traverse en échange de ton reniement. » finit-il en lui offrant un sourire mesquin.

« Mais pourquoi ? Je … je fais tout pour vous plaire, Miller a dit que j'étais un excellent élève et Thomas ne voudra pas que je parte. J'ai toujours essayé d'être le meilleur possible pour ne pas faire honte au Potter, je ne veux pas partir. » supplia-t-il vainement.

« Tu es un loup-garou, ça ne te suffit pas comme argument ? Et ton caractère n'est pas celui d'un Potter, tu n'as rien en commun avec nous. »

Le cœur de Harry se brisa dans sa poitrine. Il venait de tout perdre, toute sa vie partait en fumée. Il n'aimait pas James, il s'en fichait de ce qu'il pouvait penser de lui. Mais jamais il n'aurait imaginé que ce dernier le haïrait au point de le renier. Harry pensa soudainement à son frère, jamais plus il ne pourrait le revoir, leur père ne laisserait pas cela se produire. Ce n'était pas pour le voir traîner au manoir en tant qu'inviter qu'il le reniait. Harry était réaliste, James voulait le faire disparaître de leurs vies.

Et tout cela pour quoi ? Parce qu'il était un lycanthrope. Pourtant cela n'avait jamais semblé le déranger lorsqu'il s'agissait de Remus, son meilleur ami. Alors pourquoi est-ce que ce serait un problème si c'était lui qui était malade ? Bien qu'il ne veuille pas se l'admettre, Harry en connaissait la raison. Ce n'était pas grave si Remus était un loup-garou, parce que personne ne faisait attention à lui. Et puis, même si cela venait à se savoir publiquement, cela ne ferait que faire passer James pour un bon samaritain qui ne discrimait pas son meilleur ami.

Mais s'il s'agissait de son fils, alors les rumeurs seraient toutes autres. Un lycanthrope chez les Sang-Purs, cela n'était pas acceptable. Peut-être même que la famille perdrait des alliances politiques ou économiques, les autres familles ne voulant pas être liées à un futur Lord hybride.

Harry avait envie de pleurer. Remus ne lui avait jamais dit qu'être un lycanthrope pouvait être aussi douloureux, que la vie était aussi injuste envers eux, qu'il pourrait tout perdre à cause de ça. Pourtant, Harry ne voulait pas comprendre, il refusait de comprendre. Parce que s'il le faisait, alors il accepterait de perdre son frère, Remus, ses habitudes au manoir, Moby et Borgy, ses leçons avec Miller, son petit bureau dans la bibliothèque, ses escapades près de l'étang dans la forêt. S'il acceptait cette situation, alors Harry perdait tout et ça, il le refusait, alors il s'entêta.

« Mais rien n'interdit à un loup-garou de devenir un Lord !

- Tais-toi ! Il ne me semble pas t'avoir demandé ton avis, je suis le chef de famille et rien ne m'empêche de vouloir protéger ton frère et moi de la honte. Imagine le scandale médiatique si ton statut d'hybride venait à être découvert. La réputation de ton frère ne suffirait même pas à faire taire les journaux et les mauvaises langues. »

Harry était estomaqué. Visiblement son père avait fait son choix et sa réputation était plus importante que son fils, même s'il ne l'avait pas désiré. En plus de cela, il venait certainement de lui lancer la pire des insultes pour un loup-garou. Harry n'était qu'un hybride à ses yeux. Il n'était même pas assez humain pour mériter un peu de sa pitié.

« La paperasse sera terminée d'ici deux à trois semaines. Tu utiliseras le nom de ta mère désormais. Et estime toi heureux que je te laisse vivre sous mon toit le temps de faire tes adieux à ton frère et Remus. » soupira James en quittant la pièce, comme s'il pensait vraiment que Harry devait lui être reconnaissant.

Le reste de la matinée avait semblé se dérouler comme au ralentit pour Harry. C'était comme si bien que son corps suivait James et Thomas au cimetière, son esprit quant à lui se perdait dans toutes ses pensées sombres. Il avait toujours su que cela se terminerait ainsi, cependant il avait espéré que son père attendrait sa majorité et non ne l'abandonnerait alors qu'il n'avait que sept ans.

Après cette matinée plus que catastrophique, Harry avait essayé d'oublier les derniers événements en se plongeant dans le tout nouveau roman d'aventure qu'il avait acheté quelques jours plus tôt sur le Chemin de Traverse avec son parrain. Cependant il lui avait rapidement semblé impossible de lire plus de quelques mots sans repenser aux paroles de son père. Finalement, il avait décidé d'aller courir dans la forêt afin de se libérer l'esprit. Bien qu'il ne soit pas sous sa forme lupine, cela lui faisait toujours du bien.

Lorsqu'il retourna enfin au manoir, il était alors plus de vingt-deux heures et la nuit était tombée depuis longtemps. Cependant même après un bon repas, un long bain et une journée épuisante, il n'arrivait toujours pas à trouver le sommeil. D'un geste rageur, il rejeta ses couvertures à l'autre bout du lit et se dirigea vers la chambre de son père.

Il était trop jeune pour réussir à gérer tous les sentiments qui s'accumulaient en lui depuis le matin. Harry ne savait pas comment réagir. Il se sentait trahi, abandonné, seul, en colère, désespéré et profondément triste. Il n'arrivait pas à assimiler ce qu'il lui arrivait. Imaginer une vie sans son frère, sans Remus, sans tout ce qu'il avait connu à ce jour lui était insoutenable. Il le refusait.

James n'avait pas le droit de faire ça, c'était si injuste. Harry refusait de se soumettre encore une fois à la source de tous ses problèmes. Si James n'avait pas voulu de lui, alors pourquoi ne s'était-il pas opposé plus férocement à ses parents pour ne pas avoir à épouser sa mère. Pourquoi avait-il décidé d'avoir un enfant, même si c'était pour l'abandonner ensuite.

Harry n'arrivait pas à comprendre et il haïssait son père pour cela. Il avait cette rage immense, tapie au fond de son cœur et qui n'attendait qu'un déclic de sa part. Et ce déclic, cette colère l'avait trouvé aujourd'hui. Harry était à bout, sa vie n'avait plus aucun sens et James en était la cause. Il avait envie de le frapper, de le détruire, de lui faire payer ses malheurs, de se venger de tous ses abus.

Avant même qu'il ne s'en rende compte, le garçon traversait les couloirs du manoir en direction de la chambre de son père. A son passage, les vitres se brisèrent, les vases s'éclatèrent contre les murs et les tableaux tremblaient si fort qu'ils tombaient au sol. La magie du garçon réagissait à sa colère.

Une fois devant la porte qui le séparait de son père, Harry y tambourina de toutes ses forces, hurlant à James de lui ouvrir. Dès que le pan de bois s'ouvrit, il frappa de toutes ses forces dans le ventre de l'homme, malheureusement il était encore trop petit pour atteindre son visage.

Cependant il regretta bien vite son comportement impulsif lorsqu'une droite bien placée le frappa en pleine joue. Harry avait oublié que dans ce manoir, il n'était pas le seul à avoir un tempérament violent et bientôt, il ne put plus que cracher ses insultes comme seule défense contre les coups de plus en plus fort de James. C'était la première fois que James le frappait ainsi. Il avait déjà reçu des claques, des coups de ceintures ou de martinet. Mais jamais cela n'avait dépassé le cadre de la « punition ».

Il n'aurait jamais imaginé qu'un passage à tabac puisse être aussi douloureux. C'était différent de d'habitude. Ce n'était pas froid et impersonnel, James y mettait toute sa rage, toute sa haine, toute sa colère et c'était bien plus dur à supporter.

Puis, le silence prit place dans la pièce. On ne pouvait entendre que le souffle court de James et la respiration laborieuse du garçon. James se détourna et attrapa le verre de whisky qu'il n'avait pas eu le temps de finir, interrompu par l'arrivée de Harry. Il but le liquide ambré d'une seule gorgée et attrapa sa baguette qui avait été abandonnée sur son bureau. Lentement, il la leva sur Harry.

Son fils le fixa comme un chevreuil le ferait en croisant les phares d'une voiture. Cet instant qui ne dura en réalité qu'une fraction de secondes sembla s'étendre pendant des heures pour eux. Harry attendant avec crainte le sortilège qui allait quitter la baguette. Serait-ce un simple sort de lévitation pour le mettre à la porte, ou bien un Diffindo comme James adorait lui en lancer lorsqu'il était saoul. Ce sortilège de découpe était proportionnellement dangereux à la volonté du sorcier et James savait parfaitement jouer de cela. Il savait comment blesser son fils sans que cela ne semble trop grave.

James quant à lui essayait de savoir s'il serait capable de lancer ce sortilège. C'était son fils, il ne devrait pas. Pourtant, en croisant son regard métallique il n'y voyait qu'Aquila, sa première femme. Cette salope qui ne méritait aucunement de vivre. Alors tout devint clair dans son esprit. Le fils de cette femme le méritait.

« Doloris »

Le sortilège rouge quitta sa baguette et l'instant d'après, le corps de l'enfant se tordait de douleur. Sa voix se brisait sous la puissance de ses cris. Les larmes dévalaient ses joues. Le sort s'arrêta seulement quelques secondes plus tard, mais déjà la vision de Harry devenait de plus en plus floue jusqu'à finalement s'assombrir totalement, il s'était évanouit.

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1er novembre 1983

Lorsqu'il se réveilla, Harry remarqua avec surprise qu'il était allongé dans son lit. Incapable de bouger à cause de la douleur qui lui traversait le corps de part en part, il ne put que murmurer le nom de l'elfe de maison des Potter de sa voix rauque et cassée par ses cris de la veille. Il n'eut qu'à attendre quelques secondes avant de voir apparaître devant lui la vieille Moby.

« Jeune maître, vous êtes enfin réveillé ! Moby s'est beaucoup inquiétée lorsqu'elle vous a vu en sang dans le couloir ce matin. Alors Moby vous a soigné et vous a ramené dans votre chambre. Moby peut-elle faire quelque chose d'autre pour le jeune maître ?

- mal. » ne put que murmurer Harry avant d'être pris par une quinte de toux.

Moby comprit immédiatement le message et fit apparaître dans ses mains un verre d'eau et une potion contre la douleur. Elle aida par la même occasion son maître à se surélever suffisamment afin de ne pas s'étouffer en buvant.

Une fois la douleur passée, Harry put enfin se concentrer sur son environnement. Il remarqua alors que son réveil affichait 18h30, apparemment il avait dormi toute la journée.

« Merci Moby, est-ce que tu pourrais me préparer quelque chose à manger ? » demanda Harry.

Il se redressa dans une position assise afin de pouvoir atteindre sa table de un roman qu'il avait commencé la veille. Harry espérait se changer les idées de cette façon. Cependant cela était rendu difficile par les tremblements de ses mains, l'elfe de maison décida alors de lancer un sort sur le livre pour qu'il lévite devant Harry et qu'il tourne les pages dès qu'il le dirait.

Harry passa ainsi le reste de sa journée à lire dans son lit, tentant d'oublier que bientôt, il allait devoir annoncer la nouvelle à son frère. Comment allait-il bien pouvoir s'y prendre ?