22 février 1985 (Altaïr a 8 ans)

Quelques semaines plus tard seulement, Altaïr atterrit dans un nouveau manoir et pour la première fois depuis le décès de Lily, il fut élevé par un couple. Pourtant, il n'en fut pas aussi réjoui que ce qu'il aurait pu imaginer. Sa grande tante, Lucretia Prewett née Black, avait beau être une femme aimante et gentille, Altaïr ne réussit jamais à se confier pleinement à elle. Il avait peur, terriblement peur de se livrer, de faire confiance et d'aimer à nouveau.

De plus, il avait participé pour la première fois de sa vie à une soirée mondaine et cela lui avait permis de prendre conscience de ce que les autres Sang-Purs pensaient de lui. Il était l'enfant maudit, celui qui sortait de nulle part à l'âge de sept ans et moins d'un an après son arrivée, ses tuteurs décédaient tragiquement. Sa présence lors des deux incidents ne faisait qu'amplifier les rumeurs.

Les chuchotements et regards moqueurs des adultes et de leurs enfants l'ennuyaient plus que ne le blessaient. Cependant il ne pouvait empêcher une pointe d'inquiétude de poindre en lui. Le garçon avait peur que Thomas ou Remus n'entendent ses rumeurs et y croient.

Il haïssait ses ragots, mais Altaïr savait aussi qu'il ne pourrait y remédier. Cela le remplissait de rancœur parfois lorsqu'il y repensait dans son lit le soir venu. Pourquoi toutes ces personnes ne pouvaient pas se rendre compte qu'Arcturus et Walburga était mort dans des accidents et non parce qu'il les avait maudits. Lui plus que quiconque n'avait aucune raison de leur vouloir du mal. Ou bien alors était-ce lui qui avait été maudit et serait condamné à perdre ses êtres chers sans pouvoir rien faire pour éviter cela.

Heureusement, ces tuteurs actuels ne semblaient pas être au courant de ces rumeurs, ou alors ils les ignoraient intentionnellement. Cela permettait ainsi à Altaïr de vivre confortablement dans le manoir du vieux couple, perdu aux milieux des bois et éloigné de tout. Altaïr aimait cet endroit, la forêt entourait la demeure sur plusieurs dizaines de kilomètres ce qui lui permettait de pouvoir passer ses pleines lunes en plein air pour la première fois de sa courte vie. Lucretia avait accepté d'installer des barrières afin de l'empêcher de quitter les bois une fois qu'il y pénétrait. Ainsi il n'y avait aucun risque qu'il attaque le manoir pendant la nuit ou un village se situant plus loin.

Un autre point positif de son nouveau lieu de vie était les serres qui s'étendaient sur une quarantaine de mètres au fond du jardin. Les deux adultes n'étant plus en assez bonne forme physiquement pour s'en occuper, ils avaient donc abandonné l'endroit quelques années auparavant. Ainsi Altaïr avait pu prendre la relève et s'occuper de cet endroit à leur place.

Altaïr aimait tout particulièrement les après-midis passées à planter diverses petites graines dans des pots plus ou moins grands. Ignatius s'installait généralement dans une chaise longue à ses côtés et lisait son journal ou un livre quelconque, veillant tout de même sur son pupille et prêt à dégainer sa baguette au moindre danger. Cependant il n'eut jamais à en arriver là car ce n'était pas forcément le danger des plantes magiques qui attiraient Altaïr, mais plutôt le simple fait de s'occuper les mains en observant une nouvelle vie naître devant lui.

Dans ces moments, Ignatius ne pouvait empêcher un doux sourire de fleurir sur ses lèvres. Voir Altaïr s'occuper avec tant de passion et de délicatesse de ces pousses si petites et fragiles était vraiment attendrissant. Puis, une fois la tournée de ses pots terminée, Altaïr s'asseyait à même le sol à ses côtés pour se laver les mains dans une bassine d'eau claire. Après cela, le vieil homme laissait généralement sa lecture de côté et se penchait vers le garçon pour lui coiffer ses cheveux indisciplinés et nettoyer son visage souvent terreux. C'était le seul contact physique que lui accordait le garçon et Ignatius en profitait pleinement.

Souvent, c'était à ce moment-là que la conversation débutait. Altaïr posant des questions auxquelles son tuteur avait bien souvent la réponse. Ignatius quant à lui parlait de ses souvenirs de jeunesse puisqu'il avait remarqué que l'enfant aimait tout particulièrement se plonger dans une enfance joyeuse datant de près d'un siècle et se déroulant entourée de nombreux frères et sœurs, et de mœurs bien différentes.

Puis, lorsque l'heure du dîner approchait, les deux garçons se dirigeaient lentement vers le manoir afin de se laver et s'habiller de façon plus conventionnelle pour partager leur repas avec Lucretia.

Altaïr se plaisait au manoir Prewett bien que Lucretia ne le mît pas à l'aise. Pourtant, il aurait dû se douter que son instinct ne lui soufflait pas de se méfier de cette femme sans raison. Il était un lycanthrope, jamais il ne pourrait faire confiance à quelqu'un de mauvais et malgré cela, la trahison lui fit plus mal que jamais.

C'était une matinée de février plus qu'ordinaire au manoir. Comme à son habitude, Altaïr se dirigea vers la bibliothèque afin d'y prendre un livre quelconque pour pouvoir le lire plus tard dans l'un des salons qu'occuperaient certainement Ignatius. Cependant, il ne pénétra pas dans la pièce, préférant se figer sur le pas de la porte. A seulement quelques pas de lui résonnait la voix de Lucretia dans l'immense pièce, elle était visiblement en discussion avec l'une de ses amies proches et parlait de lui.

« J'ai peur Maria, tu as vu ce qui est arrivé à mon père, ma belle-sœur et les autres. Ce garçon est trop étrange, il m'effraie. Tu devrais voir son regard, il ne ressemble en rien à celui d'un enfant. »

Un léger silence s'installa entre les deux femmes, chacune se plongeant dans leurs pensées.

« Tu as essayé ce que je t'ai dit ? » demanda ladite Maria.

« Oui, je lui ai offert des plantes venimeuses mais il a réussi à les dompter ou alors Ignatius le protégeait. Et puis j'espérais qu'en se transformant dans la forêt sans ériger de barrière de sécurité, il attaque un village Moldu ou quelque chose comme ça et que les Aurors l'abattent à vue. Mais ce n'est jamais arrivé, il ne dépasse jamais la limite de la forêt. Même l'empoisonner à petite dose n'a pas marché, il a été malade une petite semaine puis plus rien. C'est comme si son organisme s'était habitué à la potion en quelques jours seulement. Je ne sais plus quoi faire Maria… J'ai peur que les rumeurs soient vraies, et si Ignatius et moi mourrons à cause de lui ?

- Je ne sais pas Lucretia… Et Ignatius, qu'en pense-t-il ?

- Ce crétin a réussi à s'attacher à ce gamin. Tu devrais voir à quel point Altaïr a réussi à l'embobiner, il serait prêt à se plier en quatre pour satisfaire la moindre de ses demandes. Merlin soit loué, Altaïr n'est pas vraiment capricieux. J'ai peur qu'il s'y attache de trop avant que je n'arrive à m'en débarrasser.

- Je vais réfléchir à tout cela, je te le promets. La prochaine fois que je t'appellerai, j'aurai une solution à te proposer. » assura Maria d'un ton sûr avant de couper la discussion.

Lucretia laissa échapper un long soupir avant de se relever, époussetant sa longue robe des quelques cendres qui s'y étaient déposées. Cependant, elle se figea dans son mouvement lorsqu'elle aperçut dans l'encadrement de la porte le garçon qui l'effrayait tant. Si ce fut d'abord la surprise et la peur qui tirèrent ses traits, ces deux émotions furent rapidement remplacées par une colère féroce.

« Tu écoutes aux portes maintenant ! » s'exclama-t-elle d'un ton accusateur.

Pourtant c'était elle qui avait tenté de l'assassiner à trois reprises. Peut-être même qu'il y en avait encore davantage et qu'elle n'avait pas abordé ici. Pourquoi est-ce que c'est lui qui devrait être puni. Il n'avait rien fait de mal, c'est elle qui méritait de souffrir. Rien n'était de sa faute, tout était de la sienne. Cette confiance, cette compassion et cette générosité n'était qu'une façade pour mieux le trahir. Altaïr avait enfin pensé trouver sa place dans ce monde qui ne l'acceptait pas, mais encore une fois, il avait eu tout faux depuis le début. Tout cela n'avait été qu'une illusion.

Soudain, une haine féroce s'empara de son cœur et de son esprit. Elle envahit bientôt tout son être au fil des trahisons qui remontaient à la surface de sa mémoire. Aquila qui avait préféré la guerre à son enfant. Lily qui l'avait abandonné aux sortilèges de Voldemort pour pouvoir sauver Thomas. James qui ne lui avait jamais caché sa haine. Thomas qui lui avait fait porter le chapeau auprès de son père plusieurs dizaines voire centaine de fois. Les autres enfants de Sangs-Purs qui l'appelait le démon ou le monstre. Et enfin Lucretia qui lui plantait le plus empoisonné des couteaux dans le dos.

Son regard enragé ne quitta jamais celui de Lucretia alors que peu à peu, il perdait le contrôle de sa magie. Altaïr ne reprit contact avec son environnement qu'au moment où il remarqua des flammes puissantes se jeter sur la vieille sorcière et qui se propagèrent rapidement à l'ensemble de la pièce.

Paniqué à l'idée d'être la cause de cet incendie et de mourir ainsi, Altaïr tenta tant bien que mal de dévaler les escaliers le plus rapidement possible, ne remarquant pas que les flammes l'évitaient miraculeusement, comme si une barrière invisible se dressait autour de lui. Ce ne fut qu'une fois à l'extérieur de la demeure qu'il réalisa ne pas avoir prévenu Ignatius de l'incendie. Cependant il semblait impossible pour lui de retourner à l'intérieur de la demeure, les flammes destructrices ayant déjà envahi le hall d'entrée.

Il pensa d'abord à appeler leur elfe de maison pour faire transplaner le vieil homme jusqu'à l'extérieur. Cependant ce fut au moment de l'appeler qu'il se souvint que les Prewett n'en avait pas étant donné que Lucretia aimait cuisiner plus que tout au monde et Ignatius préférait faire le ménage lui-même afin d'occuper ses longues journées. Par dépit, il tenta d'appeler Kreattur ou encore Moby à l'aide, cependant aucun d'entre eux ne vint à son secours puisqu'il n'avait plus aucun lien magique avec eux.

Des larmes de désespoir s'écoulèrent le long de ses joues. Dans un geste purement instinctif, il tendit ses mains vers l'avant et cria de toutes ses forces.

« Disparais ! Disparais ! Eteins-toi stupide feu. Ne lui fais pas de mal. Eteins-toi ! Je t'en supplie ! » s'écriait à corps perdu l'enfant.

Soudain, un jet d'eau gigantesque jaillit de ses mains et s'abattit sur les flammes. Un nuage épais de vapeur s'échappa de la demeure et il sembla que le feu et la forte concentration de magie avait finalement avertit les Aurors et autres secours magiques puisque déjà quelques bruits de transplanage se faisaient entendre par ci par là.

Lorsqu'il les aperçut, le petit garçon accourut vers l'homme le plus proche. C'était un grand homme à l'allure effrayante et Altaïr se souvint de l'avoir déjà vu dans les journaux car il avait reçu un prix en l'honneur de ses nombreux sauvetages il y a quelques mois. Certainement était-il sur place pour vérifier que l'incendie n'était pas d'origine criminelle. Cependant cela ne faisait aucune importance dans l'esprit du garçon.

« Monsieur, Ignatius il est dans la maison. Je… je ne l'ai pas vu sortir, il est vieux. Très vieux. Il m'a dit qu'il n'arrive plus à transplaner, il ne peut pas sortir. Il faut l'aider. Tout est de ma faute Monsieur, mais Ignatius il n'a rien fait. » éclata Altaïr en sanglot tout en s'accrochant à ses jambes, perdant toutes les notions de maintien que lui avait inculqué ses précédents tuteurs.

L'homme s'assura qu'un de ses collègues avait entendu le garçon et donnait des ordres afin d'intervenir au plus vite. Puis il s'agenouilla face au garçon et tenta de lui faire reprendre son calme puisque pour l'instant, ses propos étaient incompréhensibles. Après plusieurs longues minutes que l'homme avait passé à faire faire des exercices de respirations à Altaïr, il décida qu'il était enfin assez calme pour instaurer la discussion.

« Je m'appelle Richard Bones, je suis un sauveteur de la brigade d'intervention des accidents magiques. On est tous là pour aider ton grand-père.

- Ce n'est pas mon grand-père. » rectifia par automatisme Altaïr.

« Très bien, on va sauver ton … ami, d'accord ? Mais pour nous aider, est-ce que tu pourrais répondre à mes questions ? » Altaïr hocha de la tête. « Comment t'appelles-tu mon grand ?

- Altaïr Remus Black, héritier de la Noble et Ancienne famille des Black. » se présenta le garçon comme un automate.

Certainement que sa famille lui avait enseigné cette phrase par cœur, se dit Richard. Cependant il ne se souvenait pas que les Black avait un enfant aussi jeune dans leur famille. C'est vrai qu'ils se faisaient plutôt discrets ces derniers temps et que lui-même ne se rendait plus dans les soirées mondaines depuis longtemps. Il avait dû passer à côté de l'information.

« Et quel âge as-tu ?

- J'ai huit ans. » Richard fut surpris, il lui aurait bien donné un ou deux ans de plus.

« Très bien Altaïr, qui est la personne que nous devons sauver ? Tu sais où elle se trouve ?

- C'est Ignatius Prewett, il est mon tuteur. Je crois qu'il est dans un salon. Il aime bien celui du deuxième étage et un autre au rez-de-chaussée. Il est très vieux, il est né le 13 janvier 1925. » Exposa le garçon qui essayait de donner le plus de détails possibles malgré son état de panique et de fatigue extrême dû à sa forte utilisation de magie accidentelle.

« D'accord, ça va nous aider à mieux le trouver. Tu sais ce qu'il s'est passé ? Et toi, comment es-tu sorti de là ? » L'enfant se crispa et baissa la tête avant de lui répondre.

« C'est de ma faute. Je… Lucretia a dit que je devais mourir, elle ne m'aimait pas. Elle… elle a même dit qu'elle avait empoisonné ma nourriture. J'étais en colère et je ne sais vraiment pas pourquoi Monsieur, mais des flammes ont tout brûlé. Il y en avait partout et… et elle criait si fort. » A ce moment, les larmes dévalaient le visage du garçon et des sanglots brisaient sa voix. « Elle disait que je devais mourir, que j'étais un monstre, mais je ne voulais pas faire ça. Je ne voulais pas tout brûler. »

L'enfant fondit une nouvelle fois en sanglot, sa respiration fut de plus en plus saccadée et bientôt ses propos ne fit plus aucun sens pour l'homme. N'étant habituellement pas celui qui s'occupait des témoins, Richard ne sut pas immédiatement comment réagir. Cependant il laissa rapidement place à son instinct. Il tenta tout d'abord de réconforter le garçon en lui montrant son soutien en plaçant sa paume sur son épaule. Mais en voyant sa main se rapprocher de lui, le garçon plaça ses bras devant son visage comme par automatisme.

« Je suis désolé, je ne voulais pas. Ne me punissez pas, pas tout de suite. Il faut sauver Ignatius. S'il vous plaît. Je suis désolé.

- Personne ici ne va te punir Altaïr. Ce que tu as fait s'appelle de la magie accidentelle. Tu sais ce qu'est un accident Altaïr.

- C'est quand on ne fait pas exprès. Il faut punir plus fort pour que je fasse plus attention monsieur.

- Non Altaïr, accident veut dire que tu n'y peux rien. Tu ne vas pas être puni et personne ici ne va le faire. Je vais m'en assurer, d'accord ? » Il attendit que l'enfant hoche de la tête avant de poursuivre. « Comment es-tu sorti d'ici Altaïr ?

- Je ne sais pas. Les flammes ne m'ont pas touché. Elle partait quand elle me voyait. J'ai couru et je me suis retrouvé dehors. C'est là que j'ai vu qu'Ignatius n'était pas là. J'ai tendu mes mains comme ça et un jet d'eau en est sorti. » mima le garçon tout en calmant ses pleurs.

« Merci Altaïr. Tu as été très courageux. Viens avec moi, on va se diriger vers les deux dames là-bas, elles vont regarder si tout va bien dans ton corps, ok ?

- ok. » répondit simplement le garçon.

Cependant il n'eut même pas le temps de faire un seul pas que toute la fatigue et le stress accumulés pendant les dernières minutes se rappelèrent à lui. Altaïr s'évanouit et il échappa de peu à une rencontre avec le sentier de gravier grâce aux réflexes de Richard qui l'avait rattrapé à la dernière seconde. L'homme plaça le garçon dans ses bras et le porta jusqu'à la tente où se trouvaient deux médicomages et son chef d'équipe. Il aurait ainsi l'occasion de faire son rapport dans la foulée.

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24 février 1985

Lorsque Altaïr reprit connaissance, il reconnut sans mal son environnement, il se trouvait dans une chambre de Ste-Mangouste. Il commençait presque à s'habituer à ce décor désormais. La même infirmière que les fois précédentes se trouvait à ses côtés et lui expliqua la situation. Mais à la plus grande surprise de cette dernière, elle vit pour la première fois une émotion traverser le visage de l'enfant. Lui qui préférait habituellement fixer d'un air morne ses mains, avait cette fois-ci relever la tête avec brusquerie lorsqu'elle lui annonça la mort du couple Prewett.

« Ignatius est mort. » murmura-t-il.

« Je suis désolée, mais les brûlures étaient trop graves. Nous n'avons rien pu faire. »

L'expression de l'enfant était partagée entre le choc, la tristesse et la culpabilité. Elle avait entendu deux Aurors parler dans les couloirs la veille. Ils disaient que l'origine du feu était très certainement dû à un acte de magie accidentel, cependant elle ne les avait pas cru. Comment est-ce qu'un enfant pourrait dégager une magie aussi puissante, même inconsciemment, c'était impossible. Cependant la trace de culpabilité qui persistait dans le regard du garçon finit de la convaincre, si ce n'était pas de sa faute, pourquoi se sentirait-il coupable sinon ?

Se sentant observé, Altaïr tenta de replacer rapidement son masque d'indifférence sur son visage. Mais il était déjà trop tard, les larmes dévalaient ses joues et des sanglots déchiraient sa gorge. Habituellement le garçon attendait d'être seul pour craquer alors c'était la première fois qu'elle le voyait pleurer en face d'elle. La jeune infirmière fit la seule chose qui lui semblait sensée à cet instant, elle s'approcha du garçon et le serra contre elle. Cela sembla être la bonne chose à faire puisqu'il ne fallut que quelques secondes à Altaïr pour s'accrocher à elle de toutes ses forces, lui faisant presque mal.

Cependant l'infirmière se laissa faire, comprenant la douleur de l'enfant et sachant parfaitement que ce n'était pas le moment de lui demander de la lâcher. Ils restèrent ainsi de longues minutes, si bien qu'elle en perdit la notion de temps. Elle se détacha lentement de la prise du garçon qu'une fois qu'elle fut certaine qu'il s'était endormi. Elle replaça délicatement les couvertures sur lui et sécha ses joues et son nez avec un mouchoir.

Le plus doucement possible, elle quitta la pièce en espérant que cette fois-ci, le garçon tomberait enfin sur un gardien jeune, en bonne santé et gentil afin qu'il puisse prendre soin de lui le plus longtemps possible. Elle ignorait encore à quel point elle se trompait.

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Altaïr haïssait sa vie auprès de Cygnus, son nouveau tuteur. L'homme était horripilant et constamment désagréable envers lui. Ce dernier croyait fermement aux rumeurs qui parcouraient les familles de Sang-Pur et ne comptait pas subir le même sort que ses autres tuteurs. Il n'oublierait pas que ce gosse était la cause de l'extinction de sa famille et du nom des Black.

En effet, les morts subites des différents Blacks ne passèrent pas inaperçus aux yeux des aristocrates et autres politiciens. Cependant seule une poignée d'entre eux avait connaissance de l'existence du jeune héritier. Mais ces quelques sorciers ne mirent pas longtemps à parler entre eux et même si cette idée semblait futile, ils ne purent pas s'empêcher de penser que ces morts étaient étroitement liées à l'arrivée de cet enfant. Et comme son existence était censée n'être connue que de peu de monde, la quasi-totalité des familles sorcières furent au courant de son histoire. Altaïr haïssait les rumeurs et les commérages.

Au départ, Cygnus s'était contenté de l'ignorer. Cependant à la première erreur d'Altaïr, les cris avaient fusé. A la seconde, ce fut une claque. A la troisième ce fut un coup de canne. A la quatrième, ce fut un sort. A la cinquième, ce fut un Doloris. Altaïr redécouvrit par la même occasion la douleur de ce sortilège que son père lui avait déjà lancé. Bien que la puissance était moins forte, la répétition des sortilèges faisaient qu'Altaïr redoutait au final bien plus ceux de Cygnus. En plus du fait que James l'avait renié et ne risquait donc pas de le revoir un jour, contrairement au vieux sorcier qu'il croisait tous les jours.

Altaïr avait oublié ce qu'était la douleur. Certes, il subissait encore ses transformations douloureuses chaque mois, cependant cela n'avait rien à voir avec la souffrance donnée par autrui. Depuis James, il n'avait plus eu à subir un tel traitement. Cependant, il ne fallut que quelques semaines à Altaïr pour s'y habituer à n'aimait pas penser à cela, à quel point il pouvait s'adapter rapidement à ce type d'environnement.

Il apprit rapidement que contrairement à James, Cygnus n'aimait pas les cris, il n'aimait pas voir des larmes traîtresses lui échapper, il ne voulait pas d'une mauviette. Non, il voulait un garçon qui subirait sans protester, sans supplier et sans pleurer. Il voulait pouvoir ne ressentir aucune culpabilité et cela n'était possible que si Altaïr restait le garçon responsable de la mort des membres de sa famille à ses yeux.

De plus, le reste de la famille n'avait rien pour plaire à Altaïr. Il avait rencontré cette dernière pour la première fois au repas d'Ostara, le 21 mars, le lendemain du bal donné par la famille Malefoy et auquel il n'avait pas été autorisé à participer. Ostara était la fête célébrant l'équinoxe de mars, la fin de l'hiver, le printemps qui pointait le bout de son nez, le renouveau et la fertilité. Altaïr savait qu'à cette fête, il fallait allumer de grand feu en offrande à la mère Magie pour porter chance à son développement, sa croissance.

Pendant le repas, Narcissa l'avait analysé du regard quelques secondes, lui offrit un rapide sourire en coin mais finit rapidement par l'ignorer. Elle devait absolument parler à son père du dernier accident magique de Draco et n'avait donc pas le temps d'accorder plus d'attention à cet enfant. Ledit Draco s'était contenté de le regarder de haut malgré qu'il fasse plus d'une tête de moins que lui. Cet enfant semblait déjà aussi arrogant que son père.

Mais la rencontre la plus difficile à supporter pour Altaïr fut celle de Lucius Malefoy. Il reconnut aisément le son de sa voix et sa chevelure blonde, c'était celle qui hantait chacun de ses cauchemars. Altaïr se souvenait parfaitement de la dernière fois qu'il avait vu cet homme.

Il avait alors deux ans et venait de se faire pousser dans un passage secret par sa grand-mère. La dernière chose qu'il put apercevoir fut le regard empli de tristesse et d'amour d'Euphemia alors qu'un sortilège vert l'atteignait en plein cœur. Et alors que Altaïr exécutait l'ordre de la femme en s'échappant à travers les conduits sous-terrains, les paroles d'un homme à la chevelure blonde et au masque argenté résonnait dans sa tête. C'était la première fois qu'il avait entendu quelqu'un prononcer le sort de la mort : « Avada Kedavra. »

Ne voulant pas rester à proximité de l'homme ayant assassiné sa grand-mère bien aimée, Altaïr prit rapidement congé malgré que cela puisse paraître impoli de sa part. Le reste de la journée se passa lentement pour lui. La plupart des invités étaient des Malefoy ou des familles leur léchant les bottes et Altaïr n'en trouva aucun suffisamment intéressant pour s'en approcher. C'est ainsi qu'il passa la journée assis dans un coin de salle de réception du manoir, un livre à la main. Il ne fut même pas surpris de ne pas être appelé pour le dessert.

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5 avril 1985 (Altaïr a 8 ans)

Euphemia était confortablement dans son canapé de velours au coin du feu. Ses doigts maniaient ses aiguilles à tricoter avec une agilité certaine dans la confection d'une petite paire de gants rouge. Son mari était assis à même le sol sur le tapis duveteux de leur salon, son dos reposant contre ses jambes.

Elle esquissa un tendre sourire lorsqu'elle remarqua que Harry, son petit-fils, était bien plus occupé à manger son cavalier plutôt qu'à écouter Fleamont. Ce dernier essayait de lui apprendre les règles des échecs depuis quelques jours déjà et malgré tous ses efforts, Harry ne comprenait absolument.

Le petit garçon de trois ans fixa son regard anthracite sur lui lorsqu'il poussa un soupir à fendre l'âme. En plus de ne pas réussir à former ce qui devait être son partenaire de jeu, ce dernier machouillait son précieux jeu d'échecs.

« Harry, arrête de manger ça. Ce n'est pas bon. » gronda gentiment Euphemia. « Papy aime beaucoup ce jeu alors ne l'abîme pas.

- Pa'don Papy. » s'excusa timidement le garçon en essuyant le cavalier baveux sur le tapis.

Puis, il empoigna un fou noir et le tandis à son grand-père. Ce dernier l'attrapa, espérant secrètement que Harry ait enfin compris les règles et souhaite jouer avec lui. Cependant ses espoirs furent étouffés dans l'oeuf alors que sa femme explosait de rire derrière lui.

« Toi t'as les noirs, c'est les méchants. Ça c'est ma princesse, je dois la sauver. Et eux, c'est mes chevaliers. Ok ? » expliqua-t-il de sa voix fluette.

Fleamont hocha de la tête et Harry débuta la bataille. Le vieil homme était heureux de constater que son petit-fils essayait au moins de lui faire plaisir en faisant bouger ses fous et ses tours en diagonales et lignes en criant « Pas chassés, pas chassés ! » à tue-tête.

Le roi de Fleamont était sur le point de succomber à une attaque de chatouille lorsqu'une explosion retentit à l'extérieur du manoir et fit trembler les cadres posés sur la cheminée. En moins de dix secondes, Fleamont et Euphemia était en position de combat, baguette à la main et Harry s'était relevé pour se diriger vers la cachette la plus proche.

Il savait très bien ce qu'il se passait dehors. Le petit garçon avait déjà vu deux fois la guerre. La première fois avait été lors d'une attaque similaire sur un autre de leur manoir. Cependant les barrières n'avaient pas cédé face à l'intrusion et ce n'était que par mesure de précaution que les Potter avaient décidé de déménager vers un manoir plus protégé. La seconde fois avait été sur le Chemin de Traverse alors qu'il faisait des courses avec son Papy quelques semaines plus tôt pour pouvoir fêter le réveillon de Noël comme il se devait.

Fleamont s'approcha doucement de la fenêtre et observa quelques instants les intrus avant de faire part de ses observations à sa femme.

« Ils sont une vingtaine. Je vois les Lestrange, les Malefoy, Rosier et Rowle père, il me semble. Je n'arrive pas à distinguer les autres à cause des masques.

- Ils n'ont aucune honte, vingt contre deux vieillards.» s'insurgea Euphemia.

« Parle pour toi, moi je suis encore frais comme un gardon. » plaisanta son mari.

Ils échangèrent un regard plein de sous-entendus et d'inquiétude avant d'hocher de la tête. Ils avaient tous les deux la même chose en tête. Si ces Mangemorts venaient si nombreux, ce n'était certainement pas simplement pour les effrayer ou s'amuser. Ils avaient une mission importante pour qu'autant de membres du premier cercle soit présent. Cela devait certainement avoir un lien avec les sommes astronomiques que les Potter versaient à l'Ordre du Phœnix afin de financer la guerre.

« Harry, changement de plan. Tu ne vas pas te cacher mais t'enfuir. Viens avec moi. » ordonna Euphemia en lui attrapant la main.

Fleamont les suivit en ne quittant pas du regard la porte d'entrée, puis s'engouffra à leur suite dans le couloir menant à la cuisine. Euphemia s'accroupit devant le vaisselier, en ouvrit l'un des placards et en décala le contenu sur d'autres étagères. La manipulation permit à Harry d'apercevoir une trappe qui s'enfonçait dans le sol. Cependant l'ouverture était bien trop petite pour laisser passer un sorcier adulte et il comprenait très bien ce que cela voulait dire.

« Vous ne venez pas avec moi ?

- Ecoute moi attentivement. » commença Fleamont sans répondre à sa question. « Tu vas rester ici un moment, ils attendent notre fuite à l'extérieur, alors tu ne dois pas partir tout de suite, d'accord ? » Harry hocha de la tête. « Nous allons faire diversion et à notre signal, tu sauteras dans le trou, tu n'auras que quelques secondes pour agir alors ne réfléchis pas et saute. Au bout du tunnel, tu devras faire trente pas vers le nord et tu seras en dehors du chant d'action des Mangemorts, ils ne pourront plus rien contre toi. Tu devras te cacher là jusqu'à l'arrivée des Aurors, compris ?

- Je ne sais pas où est le nord. » paniqua Harry.

Il ne voulait pas faire rater le plan de ses grands-parents juste pour cela. Cependant le sourire tendre de sa mamie le rassura quelque peu.

« Nos Patronus te guideront. » lui murmura-t-elle tendrement.

Moins d'une minute plus tard et après un dernier câlin, Harry était enfermé dans le vaisselier en compagnie d'un papillon et d'une libellule faits de magie. De son emplacement, le petit garçon arrivait à observer ce qu'il se passait dans la cuisine et une partie du couloir à travers une brèche dans la porte du placard.

Il observa ses grands-parents s'embrasser tendrement avant de se séparer, les larmes aux yeux. Harry entendit étrangement bien le doux « Adieu » que ses grands-parents s'échangèrent et alors, il comprit. Il ne les reverrait certainement plus après ce soir, la situation était bien trop dangereuse et désespérée pour qu'un tel miracle se produise.

Soudain, la porte d'entrée sauta de ses gonds et Fleamont quitta la cuisine pour accueillirent leurs assaillants tandis qu'Euphemia feignait de sortir de la buanderie juste en face. Ainsi les Mangemorts penseraient que le garçon s'était enfoui dans cette direction et non en passant par le vaisselier de la cuisine.

De son poste d'observation, Harry ne pouvait plus voir son grand-père, cependant il pouvait l'entendre crier sortilèges sur sortilèges. Cependant il apercevait Euphemia par intermittence puisqu'elle combattait dans le couloir. Le petit garçon posa ses petites mains sur sa porte du placard tout en retenant son souffle. Il était terrifié à l'idée de perdre sa famille.

Les deux petits Patronus se posèrent sur ses doigts et lui envoyèrent une bouffée de courage et de sérénité au petit garçon. Cela lui permit de rapidement se calmer et d'ainsi pouvoir se reconcentrer sur sa mission. Il ne devait pas quitter du regard sa mamie afin de ne pas passer à côté du signal.

Soudain, Euphemia passa par la porte de la cuisine et se stoppa quelques mètres devant le placard qu'occupait son petit-fils. Deux Mangemorts passèrent la porte à sa suite et Harry cru reconnaître l'un deux. Il avait déjà vu ses cheveux blonds dans les magazines que sa grand-mère lisait. Elle lui avait alors expliqué qu'il s'agissait de Lucius Malefoy, l'un des politiciens les plus puissants du pays ainsi qu'un puissant sorcier. Lui n'avait que retenu qu'il était très beau. Oui, cela ne faisait aucun doute, il s'agissait bien de cet homme.

Ils échangèrent quelques sortilèges et désormais, Harry apercevait facilement le profil de sa grand-mère. Elle semblait au bord de l'évanouissement et du sang s'écoulait le long d'une de ses jambes ainsi que de son nez. Son souffle était rapide et son chignon défait. Elle ressemblait à une véritable guerrière ainsi et cela rendait Harry incroyablement fier d'elle. Sa mamie avait la classe.

Puis, Malefoy leva sa baguette vers elle dans un geste qui paraissait infiniment lent à l'enfant. Euphemia ne fit rien pour se protéger et alors, il comprit. Le signal n'était pas un mot, un geste ou une quelconque autre indication, mais la mort de l'un de ses grands-parents.

Alors Harry se redressa doucement dans son placard, prêt à faire faire le grand saut. Il porta son regard une dernière fois sur le visage d'Euphemia, gravant à tout jamais ses traits dans sa mémoire.

« Avada Kedavra »

Le sortilège avait fusé vers la vielle femme, ce qui contrastait étrangement avec la lenteur à laquelle elle s'écroula sur le sol. Harry ferma avec force ses yeux, chassant les larmes qui menaçaient de lui échapper à tout moment. Il devait être prêt. Non, il était prêt. Pour honorer le sacrifice de Fleamont et Euphemia, il était prêt à tout.

Soudain, des runes illuminèrent le sol du couloir et quelques secondes plus tard, une explosion retentit dans le manoir. Harry profita du bruit pour sauter au fond du trou sans se faire repérer. Un tunnel partait de là et s'enfonçait sous le manoir. Si la situation n'était pas aussi grave, Harry aurait pu s'inquiéter de la faible circonférence de ce dernier, ne lui permettant que de faire du quatre pattes.

Ce fut en observant le Patronus de son grand-père qu'il réalisa que la libellule de sa mamie avait disparu. Le voltige du papillon semblait incroyablement solitaire et triste ainsi séparé de sa partenaire de toujours. Les larmes commencèrent à couler le long des joues de l'enfant et ses sanglots coulaient à flots sur son visage recouvert de terre. Ici, il pouvait pleurer aussi fort qu'il le souhaitait, personne ne le retrouverait. Tant qu'il avançait le plus rapidement possible, tout irait bien.

Les yeux rivés sur le petit papillon de magie, Harry avançait aussi rapidement que possible dans l'obscurité du tunnel. Sans cette faible source de lumière, il n'arriverait même pas à remarquer les virages avant de rentrer dans un mur. Puis, il réalisa avec horreur que la lueur faiblissait doucement par moment. Harry se stoppa net et attrapa dans ses petites mains le pays, les larmes qui dévalaient ses joues s'évaporant au contact de la magie. Le Patronus ne dégageait plus qu'un faible sentiment de chaleur, ce n'était rien comparé aux bouffées de chaleur qu'il lui insufflait habituellement.

Soudain, le papillon éclata en un millier de petits éclats lumineux et une épaisse obscurité obscurité envahit tout aussi rapidement le tunnel. Harry comprit aussitôt ce que cela signifiait. Le Patronus de Fleamont s'était éteint. Il était mort, c'était fini. Harry était tout seul désormais et surtout, il ne connaissait toujours pas le nord.

Peut-être qu'en attendant ici suffisamment longtemps, les Mangemorts partiraient ou bien les Aurors les neutraliseraient. Cela ne lui semblait pas être un si mauvais plan. Il doutait franchement que les Mangemorts aient un enfant dans leurs rangs qui pourraient se faufiler à sa poursuite. Ici, personne ne pouvait rien pour lui.

Harry reprit son souffle et essuya ses joues de ses mains afin de se redonner un peu de contenance. Ses grands-parents avaient été dignes et courageux jusqu'à la fin, alors lui non plus ne flancherait pas.

Pourtant, ses bonnes résolutions et son plan tombèrent rapidement à l'eau. Une explosion retentit au loin et le tunnel se mit à trembler autour de lui. Quelques secondes de silence s'écoulèrent avant qu'une nouvelle explosion ne retentisse.

Cela ne faisait aucun doute, les Mangemorts avaient trouvé le passage secret et savaient qu'il se trouvait là. De plus, ils semblaient déterminés à le faire ensevelir ou bien à l'asphyxier en le privant d'oxygène. Le petit garçon reprit sa route le plus rapidement possible, écorchant ses genoux et ses paumes dans sa précipitation, mais cela n'avait plus d'importance. Il devait sortir d'ici avant qu'il ne leur vienne à l'idée de balancer des fumées empoisonnées dans son conduit.

Au bout du tunnel, Harry se cogna violemment la tête contre un pan de bois. Malgré la forte douleur qui transperçait son crâne, il poussa de toutes ses maigres forces sur la trappe et inspira plusieurs goulées d'air avant de quitter définitivement son tunnel.

Une fois à l'extérieur, il analysa rapidement les environs et grâce à la lueur de la pleine lune, il aperçut au loin le manoir à travers les bois. Supposant que son échappatoire devait se trouver dans la continuité du tunnel, Harry partit dans la position opposée à ce dernier.

Des aboiements retentissaient derrière lui, les Mangemorts avaient dû lâcher des Croups à sa poursuite, une sorte de chien à trois queues et qui étaient autrefois éduqués afin d'aider à la chasse. Cependant le garçon préférait se concentrer sur la ligne blanche qui scintillait doucement quelques mètres devant lui. Ce devait être la barrière dont ses grands-parents parlaient et cela le soulagea grandement. Il allait réussir.

Puis un hurlement retentit juste derrière lui. Ce n'était pas des Croups. Non, c'était bien pire : un loup-garou l'avait pris en chasse. Voilà donc pourquoi il n'entendait plus les chiens depuis quelques secondes, ils étaient retournés près des sorciers en sentant la présence du loup. Harry courait le plus vite possible, mais la bête se rapprochait de plus en plus et sans le moindre effort. Il jouait de sa peur et s'amusait de ses petits cris effrayés.

Plus que quelques pas et il y serait. Plus que quelques pas et tout serait fini. Il ne savait pas en quoi cette barrière magique pourrait l'aider, mais il se devait de l'atteindre. Si ses grands-parents lui avaient dit que cela l'aiderait à s'enfuir, alors le garçon n'avait aucune raison de douter.

Plus que cinq pas.

Quatre pas.

Trois pas.

Deux pas.

Et une lourde patte noir s'abattit sur son dos, le faisant s'écraser au sol. Ses doigts frôlaient la traînée de magie blanchâtre, c'était si frustrant. Frustrant et douloureux. Surtout douloureux.

Du dos de sa patte, le loup-garou le retourna sur le dos et un halètement de douleur bloqua le souffle de Harry quelques secondes en sentant son dos ensanglanté entrer en contact avec le sol. Puis un hurlement de douleur et de peur mêlé lui échappa lorsqu'il croisa le regard ambre du loup. C'était terrifiant.

Sa gueule se rapprocha de lui et le petit garçon ferma les yeux avec force. Il ne voulait pas assister à sa propre mort, cela semblait bien trop effrayant. Il sentit les crocs de la bête s'enfoncer profondément dans son flanc droit. Le loup le souleva de quelques centimètres et le lança dans les airs, comme s'il était un simple jouet pour chien.

Harry sentait son sang couler et les extrémités des ses doigts se refroidir. C'était étrange comme sensation, il avait mal, mais il se sentait aussi vide. C'était comme flotter entre deux eaux, entre douleur et sérénité. Difficilement, il réussit à ouvrir ses paupières et il ricana amèrement en réalisant que ce n'était pas grâce à ses capacités qu'il avait dépassé la limite de la barrière, mais grâce à un loup stupide. Cet idiot l'avait lancé de l'autre côté de la barrière.

Soudain, le loup fit quelques pas en arrière avant de japper de détresse en s'enfuyant. Harry ne comprit pas vraiment cette réaction, cependant ça ne lui importait pas vraiment à ce moment-là. Lui, tout ce qu'il voulait, c'était dormir.

Des ordres furent criés à ses côtés et lui fit comprendre que cette fameuse zone à rejoindre était la zone de transplanage des urgences et des Aurors. Leur arrivée devait être la cause de la fuite du loup.

Un dernier hurlement du loup résonna au loin avant que l'enfant ne sombre dans l'inconscience.

Altaïr se réveilla en sueur au beau milieu de la nuit. Son souffle était court et il avait de plus en plus de mal à respirer correctement. Il enserra d'une main le haut de son pyjama au niveau de sa poitrine tandis que de l'autre main, il tâtait sa table de nuit pour trouver le sachet en papier qu'il gardait dans un des tiroirs.

Le petit garçon inspira et expira à plusieurs reprises avant de finalement retrouver un souffle plus calme. Ces crises de panique et d'hyperventilation étaient de plus en plus présentes dans son quotidien depuis peu. Ces dernières étaient d'autant plus fréquentes la nuit, lorsqu'il émergeait d'un cauchemar.

Altaïr savait très bien quelle était la cause de son mal-être. Depuis qu'il avait rencontré Lucius Malefoy, tous ses mauvais souvenirs lui revenaient en pleine face. Cela n'avait peut-être pas aidé d'avoir tenté de les oublier pendant si longtemps au lieu d'essayer de les surmonter. Rencontrer le meurtrier de ses grands-parents l'avait bien plus chamboulé qu'il ne l'avait imaginé.

Cependant ce n'était pas seulement les mauvais souvenirs qui le terrifaient. Altaïr avait toujours pensé que si un jour, il devait revoir Lucius, alors cela se ferait sur un champ de bataille. Après tout, il avait été un Potter et les Potter avait toujours combattu contre les mages noirs. Alors cela lui paraissait évident que si les soupçons de Remus quant à un retour de Voldemort se réalisaient, il serait contre les Malefoy.

Mais désormais, il était un Black. Il était avec les mages noirs et contre les Aurors. Les Malefoy n'étaient plus des ennemis, mais de futurs alliés. Altaïr réalisait petit à petit que dans la prochaine guerre, il serait contre son frère et cela le rendait malade. Il avait envie de s'enfuir loin, très loin. Là où ses cauchemars disparaîtraient et où il n'y aurait plus de guerre, d'ennemis et de peur.

Juste lui, Thomas et Remus.

Juste sa famille et la paix.