Lundi 1er avril 1989

Harry se réveilla pour la première fois de l'année scolaire avec le son de l'alarme chargée de réveiller les élèves de Durmstrang. Habituellement, il était réveillé depuis bien longtemps lorsqu'elle retentissait.

Le sursaut qui le prit en entendant le son strident réveilla toutes les douleurs qui parcouraient son corps. Ne voulant pas être vu dans cet état de faiblesse, il attrapa de ses mains tremblantes sa couette et en recouvrit son corps. Pas même son visage ne dépassait de ses couvertures.

Il entendit vaguement la fille qui occupait le lit au-dessus du sien discuter avec deux autres garçons du dortoir. Bien que ses paroles le fit grincer des dents, Altaïr préféra les ignorer et rester enfoui sous ses couvertures.

« Laisse-le, moi aussi j'aurai honte si mon grand-père m'avait engueulé devant toute l'école. » ricanna-t-elle méchamment. « Il se cache là-dessous depuis hier aprem. »

Altaïr aurait aimé que son comportement soit dû à la honte. Mais il n'en avait que faire de savoir ce que les autres pouvaient penser de lui. Il aurait vraiment préféré avoir honte plutôt que de souffrir autant.

Ce ne fut qu'une fois le dortoir entièrement vide qu'Altaïr se permit de quitter son lit. Chaque mouvement lui donnait envie de crier, mais il avait bien trop peur d'attirer quelqu'un en se relâchant. Alors il martirisa sa lèvres inférieur encore et encore, ne laissant que de petits gémissements passer la barrière de ses lèvres. Bientôt, le goût du sang envahit sa bouche, mais il n'y prêta pas attention.

Dans des gestes lents, Altaïr fouilla sa malle à la recherche de potions anti-douleur qu'il gardait toujours en cas de nécessité. Il n'aimait vraiment pas l'infirmière et préférait donc pouvoir se soigner lui-même au maximum. Altaïr eut même un léger sourire en découvrant quelques baumes laissés à son attention dans son tiroir de table de nuit. Visiblement, Derry avait été chargé de le rendre présentable. Il était bien le seul elfe qui aurait pu braver sa peur de Cygnus pour lui venir en aide.

D'un pas lent, il se dirigea ensuite vers les douches et s'enferma dans l'une des cabines les plus éloignées de l'entrée. Altaïr attrapa sa baguette et quelques sorts plus tard, la cabine était insonorisée et verrouillée de plusieurs sorts. Il invoqua ensuite un miroir contre la porte de cette dernière afin de pouvoir se soigner correctement.

Bien qu'ayant du mal à atteindre les lacérations qui recouvraient son dos, Altaïr fut tout de même fier de ses soins. Les bandages étaient correctement enroulés autour de son corps, si bien qu'on aurait pu croire qu'un professionnel de la santé les lui avait posés. C'est qu'il commençait à avoir l'habitude de se soigner seul.

Puis, il enfila son uniforme, veillant à ce qu'aucune bande blanche ne soit visible à travers ce dernier. Altaïr attrapa le baume que Derry lui avait laissé et qu'il avait déjà bien entamé pour badigeonner son visage avec ce dernier. Il devrait attendre pendant une demi-heure que ce dernier fasse effet et efface de son visage toute trace de coup. Heureusement que Cygnus s'était contenté de deux coups de pieds et ne lui avait lancé aucune malédiction. Sinon, la guérison aurait été bien plus longue.

C'est dans ces moment-là que Harry regrettait de ne pas pouvoir lancer de Glamour. Bien qu'étant doué en magie, il en était encore incapable. Il s'agissait d'une magie complexe habituellement enseignée en septième année.

Lorsqu'Altaïr put enfin quitter la salle de bain, il ne lui restait plus qu'une quinzaine de minutes pour rejoindre ses classes. Le plus rapidement possible, il déposa ses affaires dans sa malle, attrapa quelques potions anti-douleur pour le reste de la journée et ses affaires de cours. Il allait devoir porter son sac sur une seule épaule pendant quelques jours. Il ne voulait pas que les frottements du cartable sur ses dos ne réveillent la douleur ou ne rouvrent ses plaies.

Heureusement, sa première heure de cours était un cours théorique de sortilège. Altaïr n'aurait pas à faire attention à sa prise de notes puisqu'il était plutôt doué dans cette matière. Cependant il n'en serait pas de même pour le cours de métamorphose qui avait peur que ses mains tremblent tellement que cela n'affecte la qualité de ses sorts.

Ses membres tremblaient terriblement suite au Doloris et même avec des potions anti-douleur, il en ressentait toujours les effets. Seul des potions spécialement conçues pour contrer les effets de ce sort pourrait calmer les tremblements et les pics de douleur qui traversaient ses muscles. Cependant il n'en possédait aucune et n'avait pas le niveau pour les brasser.

Un dernier soupir lui échappa alors qu'il descendait les escaliers des dortoirs. Altaïr n'allait même pas avoir le temps de manger ce matin.

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Lundi 8 avril 1989 (une semaine plus tard)

Viktor et Lev étaient perplexes. Cela faisait une semaine qu'Altaïr les évitait et cela les agaçait de plus en plus.

C'était déjà arrivé une fois par le passé, cependant les deux garçons en connaissaient au moins la cause à ce moment-là. Cela faisait suite à la crise d'angoisse d'Altaïr et à leur comportement surprotecteur qui l'avait agacé. Mais cette fois-ci, Viktor et Lev n'en comprenaient vraiment pas la raison. C'était arrivé du jour au lendemain.

Lev ne fit pas part de ses doutes à son ami, mais il suspectait fortement que cela ait un lien avec la réunion parents-professeur du dimanche précédent. Le tuteur d'Altaïr avait dû dire quelque chose à son pupille pour le chambouler autant. Altaïr avait toujours été un excellent élève et très consciencieux dans chacune de ses matières. Mais depuis une semaine, cela frôlait la folie.

Le jeune Black passait ses journées enfouit dans ses livres, ne quittant que tard dans la nuit les tables de la salle commune et se réveillant avant tout le monde afin de travailler avant le début des cours. Altaïr avait toujours eu des cernes et Lev, alors au courant pour ses terreurs nocturnes et ses cauchemars, n'avait jamais posé de questions. Mais depuis peu, ses cernes devenaient de plus en plus violacées et cela l'inquiétait beaucoup.

Mais la goutte de trop fut la veille, lorsque Viktor avait proposé à Altaïr de faire une partie de Quidditch avec eux. Habituellement, rien ne pouvait empêcher le garçon de se joindre à eux, pas même la crainte de refaire une crise d'angoisse ou une pile de devoirs. Altaïr aimait voler, c'était évident. Alors lorsqu'il avait refusé sans aucune hésitation, les deux Bulgares comprirent que leur ami n'allait vraiment pas bien.

C'est pourquoi ils se retrouvaient assis en face d'Altaïr, à attendre que ce dernier quitte enfin son livre des yeux pour leur accorder un peu de son temps. Ce ne fut que cinq minutes plus tard que le garçon daigna finalement fermer son bouquin, ne manquant pas de soupirer profondément.

« Qu'est-ce qu'il y a ?

- Quoi ? Tu n'as pas une petite idée de ce qu'il y a ? Ou plutôt de ce qu'il ne va pas ? » s'énerva Viktor.

Altaïr créa une bulle de silence autour d'eux, il ne voulait pas énerver la bibliothécaire et se voir interdire l'accès à son antre.

« Non. »

Altaïr mentait et les deux Bulgares le savaient. Il savait très bien que ses amis s'inquiétaient pour lui et avaient remarqué son comportement étrange. Tout le monde avait remarqué. Mais faire l'autruche lui semblait être la meilleure des solutions à cet instant, même si cela allait encore plus les agacer.

Cependant Altaïr n'avait pas le choix. Cygnus avait été clair, il devait obtenir les notes maximales à tous ses prochains contrôles. Altaïr ne voulait pas retourner dans ces foutus cachots, il les haïssait. Au fil des années, il avait développé une peur phobique de ce genre de lieu. Il lui avait fallu des mois pour ne pas stresser à la simple idée de rejoindre les souterrains du château pour ses cours de potions.

Or ALtaïr avait conscience que plus il passait de temps avec ses amis et moins il pourrait se concentrer sur ses cours. Les premiers mois d'école, il avait eut des notes quasiment parfaites à toutes ses leçons. Mais depuis janvier, elles baissaient petit à petit. Il n'avait pas besoin de Cygnus pour faire le lien avec son temps passé à jouer aux échecs, à la bataille explosive et au Quidditch avec Viktor et Lev.

« Altaïr, nous sommes tes amis. Tu peux nous dire si quelque chose ne va pas. »

Il était évident que Viktor était quelqu'un au sang chaud et encore plus qu'Altaïr pouvait se montrer très colérique par moment. Alors Lev tentait tant bien que mal de calmer le jeu.

« Tout va bien. »

Encore un mensonge évident.

« Je sais que tu es plus intelligent que nous.

- Parle pour toi. » marmonna Lev, légèrement vexé mais tentant tout de même de faire un peu d'humour. Viktor grogna.

« Très bien plus intelligent que moi. Je ne suis pas une flèche et pourtant, là tu ne vas pas me faire gober que tu vas bien. T'as des cernes affreuses, tu passes ton temps dans tes livres et tu ne veux même plus passer du temps avec nous.

- Je ne vois pas en quoi ne plus passer de temps avec vous deux implique que je vais mal. » cingla Altaïr.

Il savait très bien que ses paroles étaient blessantes. Il savait aussi que par ses paroles, Viktor essayait de lui faire comprendre que son comportement avait drastiquement changé depuis peu.

« Ce n'est pas ce que je voulais dire ! » s'agaça Krum. « On est tes amis et on te voit moins que la bibliothécaire.

- Mes amis ? » songea Altaïr.

« Oui, tes amis. » assura Lev d'un ton ferme.

Il devait alors briser cette amitié, si c'était pour cette raison que Lev et Viktor s'accrochaient à lui. Altaïr devait rester concentré sur ses objectifs. Il devait oublier ce pincement qui lui enserrait le cœur et étouffer son envie de fondre en larmes. Il mourait d'envie de demander de l'aide et pourtant à cet instant, il s'en retrouvait tout bonnement incapable. Devant lui, Altaïr ne voyait que sa cellule miteuse dans les cachots de Cygnus, rien d'autre. Il devait se concentrer sur ses cours, il n'y avait que cela qui importait.

« Je dois avouer, que j'étais curieux. Je n'ai jamais eu d'ami avant alors j'ai pensé que ça pourrait être amusant d'en avoir un ou deux. Mais ça devient ennuyeux, je n'aime pas tant que ça finalement. »

Son ton était froid, sa moue était ennuyée et son regard était plongé dans ceux de ses amis. Lev avait un don pour détecter ses mensonges. Mais cette fois-ci, Altaïr ferait en sorte que même lui tombe dans le panneau. Distraitement, il rouvrit son livre et reprit la lecture de son chapitre, ne portant plus attention aux deux autres garçons.

« Comment tu peux dire ça ? »

Viktor semblait sur le point de pleurer. Altaïr le dévisagea froidement, il ne craquerait pas.

« Tu sais que c'est faux. Tu te souviens de ce dont tu m'as parlé dans la salle de bain de ton dortoir, il y a quelques mois ? Tu n'aurais pas dit à quelqu'un que tu considères comme un inconnu.

- Je ne sais pas si tu te souviens, mais à ce moment-là nous nous étions parlé trois fois, peut-être quatre au maximum. Alors oui, tu étais un inconnu. Et je venais de faire une crise de panique, j'aurais pu parler de ça à n'importe qui. »

Lev eut un mouvement de recul. Bien que visiblement conscient qu'Altaïr cherchait à les éloigner volontairement de lui en essayant de les blesser et en mentant, il était tout de même touché par ses paroles.

« Tu agis bizarrement depuis une semaine. Est-ce que c'est à cause de ton grand-père ? » osa finalement demander Viktor.

Lev lui envoya un regard surpris. Il n'avait pas pensé que son ami ferait le lien avec la réunion de la semaine passée. Il n'était pas des plus malin et passait généralement à côté des évidences.

La réaction d'Altaïr ne fut cependant pas celle à laquelle ils s'attendaient. Il laissa échapper un rire. C'était si rare que Lev et Viktor le fixèrent d'un air interloqué. Altaïr ricanait méchamment parfois lorsqu'il se moquait d'un de ses harceleurs ou bien laissait un sourire étirer ses lèvres quelques secondes lorsque Viktor faisait une très bonne blague. Mais jamais, il n'avait éclaté de rire à leurs côtés.

« Mes grands-parents sont morts il y a longtemps, Krum. »

Les deux Bulgares grimacèrent. Altaïr les appelait habituellement par leurs prénoms, pas par leurs noms de famille.

« Nous ne sommes pas amis. Vous ne connaissez rien de moi.

- Bien sûr que si, on passe nos journées ensemble ! » s'insurgea Viktor.

« Et bien, ce n'est pas entièrement faux. Mais même si on passe beaucoup de temps ensemble, c'est toi qui parle, Krum. Et si ce n'est pas toi, c'est Kaminski. Je ne vous parle pas souvent de moi. La preuve, vous ne connaissez même pas le nom de mon tuteur ou notre lien de parenté. Vous ne savez rien de moi. »

Lev se renfrogna, Altaïr marquait un point.

« Vous ne savez même pas que je n'ai plus de grand-parents, ni si j'ai un frère ou une sœur. Vous ne savez pas quel métier je veux faire plus tard. Vous ne savez pas si j'ai vécu toute ma vie avec Cygnus ou pas. Vous ne savez pas qui est mon père. Si ça se trouve, j'ai menti en disant qu'il était mort pour faire oublier à tout le monde l'idée que je pourrais être un bâtard. Vous ne savez même pas si Aquila Black est vraiment ma mère, je pourrai être le fils de Cygnus et de l'une de ses maîtresses. Pour ce que vous en savez. » continua de se moquer Altaïr. « Vous ne savez pas si j'ai un animal de compagnie en Angleterre ou pas, ma couleur préférée, mon plat préféré ou même mon deuxième prénom. Vous ne savez rien de moi. Je pourrai être un vampire, un loup-garou, atteint d'une maladie incurable ou même être un meurtrier ou à l'inverse un enfant modèle, un amoureux de la nature ou un voyant. »

Altaïr avait légèrement haussé la voix. Il quitta enfin son livre des yeux pour fixer son regard dans celui de Lev. Il serait le plus dur à convaincre. Il n'avait pas besoin de le voir pour savoir que Krum était sur le point de le laisser en plan pour ne plus lui reparler.

« Vous vous êtes mis dans la tête que j'étais juste un petit anglais perdu dans une école étrangère et moqué par ses camarades. Vous vouliez être mes bons samaritains et pas un seul instant, vous avez pensé que peut-être vous avez pu vous faire rouler pour mon propre divertissement. Vous ignorez la moitié de ce que mes vrais proches connaissent de moi, ou juste les anglais en général savent. Je ne suis pas aussi gentil que vous le pensez et ça, tout le monde le sait, dans ma famille. »

Une alarme retentit autour d'eux. Harry agita sa baguette pour la faire taire. Il rangea distraitement ses affaires dans son sac et quitta son banc.

« Attends ! »

Altaïr attendit patiemment que Lev reprenne la parole, tapant impatiemment du pied sur le sol. Il lui faisait clairement comprendre qu'il ne voulait plus être là.

« Je sais très bien que nous ne te connaissons pas aussi bien que toi, tu nous connais. Mais c'est autant de ta faute que de la notre. De plus, ce n'est pas ça qui nous empêche d'être tes amis et si c'est vraiment ce que tu penses, alors c'est qui tu ne connais rien à ce qu'est une amitié sincère. C'est impossible de d'abord connaître tout de quelqu'un ensuite seulement de décider si on devient son ami. Non, c'est l'inverse. D'abord on copine, on apprend à se faire confiance et ensuite seulement, on s'ouvre à l'autre. C'est à chaque nouveau secret découvert qu'on décide si on veut poursuivre ou non cette amitié et non en imaginant ce que l'autre peut être, sans même avoir de certitude.

- Dans ce cas, je décide que d'après tout ce que je sais de vous, je n'ai plus envie d'être votre ami.

- Non, tu ne comprends rien. Ce que je voulais dire, c'est que tant qu'on ne connaît rien sur toi, alors nous n'avons pas de raison de te détester ou de nous éloigner de toi. »

Altaïr soupira. Il regarda sa montre, ce qui horripila les deux Bulgares. Black savait vraiment bien leur faire ressentir qu'ils étaient en train de le gêner.

« Et bien, si vous comptez vous accrochez stupidement à mes basques, grand bien vous fasse. Mais faîtes le en silence désormais, vous me déranger. Si on en a fini, alors je vais partir, Mr Georgiev m'attend. »

Altaïr se détourna brusquement en faisant claquer son lourd manteau derrière lui. Cette conversation l'avait épuisé. Il n'avait pas pensé la moitié des choses qu'il venait de dire, mais il ne comptait pas non plus revenir dessus. Finalement, peut-être que ça ne serait pas si mal de revenir à sa vie d'il y a quelques mois. Il était alors si simple d'être seul dans son coin, sans pensées parasites ou de remords. Oui, Altaïr voulait simplement retrouver son état normal et enterrer profondément au fond de son cœur les émotions qui l'envahissaient bien trop facilement ces temps-ci.

Il était si fatigué.

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Pendant les semaines qui suivirent sa dispute avec Lev et Viktor, Altaïr réalisa à quel point leur amitié l'avait protégé des moqueries et farces des autres élèves. En fait, c'était surtout l'amitié de Lev qui l'avait préservée. Personne ne voulait se mettre à dos le père du garçon, en plus d'être un excellent duelliste, il était réputé pour ses compétences politiques et financières. On racontait que grâce à ses parts dans toutes sortes d'entreprise et à sa maîtrise parfaite des cours de la bourse, il pouvait ruiner en quelques mois n'importe quelle famille.

Alors aucun enfant ne voulait que Lev rapporte à son qu'ils avaient été méchants avec l'un de ses amis. Mais maintenant qu'Altaïr et lui s'étaient publiquement disputés et éloignés l'un de l'autre, ils s'en donnaient à cœur joie.

Les premiers jours, Altaïr n'y fit pas attention. Il devait se concentrer sur ses cours, quelques moqueries n'étaient rien. Cependant lorsque ses camarades se mirent à vouloir lui nuire directement, Altaïr eut bien plus de mal à se contenir. Il avait lancé quelques sorts discrets en direction de certains de ses harceleurs en feignant l'ignorance lorsque les soupçons se portaient sur lui. Heureusement qu'il était assez intelligent pour ne pas laisser d'indices menant à lui.

Cependant, sa patience arriva bientôt à sa limite. Altaïr s'était absenté de la salle commune quelques minutes afin de chercher un manuel dans son dortoir. Ses affaires de cours avaient donc été sans surveillance pendant ce laps de temps. Cela avait suffi pour qu'un petit malin prenne la confiance et décide d'attraper le pot d'encre laissé ouvert sur la table. Sous les encouragements et rires de ses amis, il renversa l'encre sur le parchemin d'Altaïr. Puis sur son manuel et finit par vider le reste directement dans son sac.

Lorsqu'Altaïr revint dans la pièce, il sentit une rage immense bouillonner en lui. Il avait été patient, très patient. Il s'était contenu aussi bien que possible parce qu'il avait conscience d'à quel point ses colères pouvaient être dangereuses aussi bien pour lui que pour les autres.

Quelques filles assises non loin se mirent à ricaner lorsqu'elles l'aperçurent. Cependant Altaïr n'y fit pas attention. Tout ce qu'il voyait, c'était que tous ses devoirs et ses cours sur lesquels il travaillait depuis des heures étaient désormais complètement foutus. Tant pis, il pourrait les refaire. Il avait une bonne mémoire, ça lui prendrait moins de temps cette fois-ci puisqu'il n'aurait pas tout le travail de recherche à faire.

Alors qu'Altaïr tentait tant bien que mal de se calmer, il vit le garçon attraper un livre dans son sac et étaler encore plus d'encre dessus. C'était un livre de la bibliothèque, il allait devoir le rendre et si Altaïr n'arrivait pas à le nettoyer, alors la colère de la vieille bibliothécaire serait terrible. Le garçon ne voulait même pas imaginer sa sanction, peut-être aurait-il simplement une retenue ou alors dans le pire des cas, serait-il banni de la bibliothèque ? Il n'osait même pas l'imaginer tant cette idée l'horrifiait. Altaïr ne pouvait pas se le permettre, il avait besoin des livres de l'école pour améliorer ses notes.

Tout ce qu'il voyait à cet instant, était cette bande d'enfants stupides, Ivan Melnik et le livres recouverts d'encre dans sa main. Il n'entendait que leurs rires mesquins. Altaïr ne fit attention à rien d'autre, pas même aux rires des filles, ni aux coups d'œil inquiets que Lev et Viktor lui lançaient de l'autre bout de la salle et encore moins aux dizaines de paires d'yeux des autres premières années posées sur lui.

Non, Altaïr ne voyait que son livre abîmé et la perspective d'être banni de la bibliothèque. Alors, il s'avança vers son harceleur. Il le reconnaissait sans mal, c'était le garçon à qui il avait lancé quelques Incendio quelques mois plus tôt. Ivan Melik, ou Melnak. Ou alors était-ce Melnik ? Altaïr s'en fichait à cet instant. Il voulait juste détruire cet Ivan quelque chose.

Bien que ses amis le virent arriver dos à Ivan, ils n'eurent pas le temps de le prévenir. Altaïr s'arrêta à un pas de lui, leva son pied à la hauteur de son dos et le frappa de toutes ses forces. L'ukrainien tomba sur le tapis de la salle commune. Il se retourna pour se relever mais déjà, Altaïr était sur lui.

Ivan avait beau suivre les cours de self-défense avec Altaïr, leur niveau était juste trop différent. Il ne pouvait rien faire face à la puissance brute du lycanthrope alors qu'il était déjà sonné par les premiers coups.

Altaïr perdait le contrôle, il le sentait, il le savait. Pourtant, il n'arrivait pas à se défaire de cette envie de tout frapper, de tout détruire. Il avait l'impression de se revoir des années plus tôt, à lancer des objets dans sa chambre chez les Potter afin de se défouler. Il avait l'impression de revivre l'agression de son petit-frère. Altaïr sentait qu'il perdait conscience de son environnement.

Il ne voyait que le garçon sous lui, son visage en larme, le sang s'écoulant de sa bouche, les deux dents qui lui manquaient et le craquement de son nez lorsque son poing le frappe. Il n'entendait pas les cris, le battement de son sang à ses temps envahissait son ouïe et éclipsait son environnement.

Altaïr sentit quelqu'un passer dans son dos et placer un bras autour de sa gorge. Certainement l'un des amis de Ivan qui voulait le défendre. Mais Harry ne voulait pas se calmer, il voulait extérioriser toute cette frustration qu'il gardait en lui depuis si longtemps, toute cette colère, toute cette rage. Alors il se pencha vers le côté, leva son coude et frappa de toutes ses forces de sa main dans les parties du garçon derrière lui. Il en profita pour passer son son aisselle et faire quelques pas en arrière.

Un autre garçon leva sa baguette contre lui. Harry fit glisser sa baguette de son holster attaché à son avant-bras et se protégea grâce à un bouclier. Il ne lui fallut qu'une demi-seconde pour contre-attaquer. Le garçon s'effondra au sol en un cri de douleur alors que le sortilège de découpe lui lacéra le torse au même moment où un bloque-jambe touchait ses genoux. Altaïr lui confisqua sa baguette d'un simple Experliarmus.

Puis, il lança son pied une nouvelle fois dans l'entrejambe du garçon qui avait précédemment tenté de l'étrangler alors qu'il essayait de se relever. Un autre coup de pied frappa sa joue alors qu'Altaïr se protégeait d'un autre sortilège. Il ne lui fallut que quelques secondes de plus pour neutraliser les deux garçons restants.

Ivan se releva difficilement et d'une rage intense mêlée à de l'humiliation il tenta stupidement de se jeter sur son adversaire. Il ne lui fallut pas longtemps pour rejoindre à nouveau le sol, Altaïr enroulé autour de son bras droit. Ivan lui lança un regard terrifié alors que la pièce était soudainement plongée dans un silence profond. Il ne faudrait qu'une toute petite pression de la part d'Altaïr pour lui infliger une luxation du bras.

Ivan croisa difficilement le regard du garçon qu'il prenait plaisir à humilier quelques minutes plus tôt. L'air amusé de Black ne l'effraya que plus et il n'eut même pas le temps de le supplier qu'un claquement sonore résonna dans la pièce silencieuse, rapidement suivi d'un hurlement de douleur. Son coude avait lâché.

Altaïr le lâcha enfin et Ivan roula sur le côté, s'éloignant le plus possible de lui en bougeant le moins possible son bras douloureux. Black se redressa à son tour et s'assit en tailleur, le regardant pleurer pathétiquement sur le sol. Et alors, l'anglais éclata de rire. C'était la première fois de sa vie qu'il avait laissé sa colère prendre le dessus sur son self-control et c'était incroyablement apaisant.

Son éclat de rire sembla réveiller l'ensemble de la pièce. Les filles qui ricanaient quelques minutes plus tôt s'enfuirent à l'autre bout de la salle en croisant son regard alors que quelques élèves courageux s'approchaient pour aider leurs camarades toujours au sol. Altaïr les regarda faire, toujours secoué par son rire. Cela faisait si longtemps qu'il n'avait pas rit ainsi, les contractions de ses abdos l'obligeaient à se plier vers l'avant, ses joues lui faisaient mal à force de se tendre et des larmes perlaient au bord de ses larmes.

Altaïr découvrit qu'il aimait rire.

Puis, l'adrénaline et la sérotonine retombèrent doucement. Son rire cessa et son expression redevint aussi froide qu'à l'accoutumée. Il releva alors son regard vers l'assemblée et découvrit avec surprise que beaucoup de monde avait quitté les dortoirs où les salles d'études pour venir observer le combat. Et juste derrière lui se tenait Lev, rapidement rejoint par Viktor qui avait été le seul élève à penser qu'appeler un professeur pouvait être utile dans ce genre de situation. Juste derrière lui se tenaient les professeurs Krakov et Georgiev, ils devaient être ensemble lorsque Krum avait appelé un professeur.

Les deux hommes se rapprochèrent vivement des six garçons, Georgiev lançant déjà quelques sorts de soins aux cinq blessés tout en leur faisant ingurgiter diverses potions. Krakov quant à lui se planta devant Altaïr, le regard courroucé. Il était de notoriété publique que le professeur haïssait qu'on utilise les compétences apprises dans sa classe pour provoquer une bagarre. Il voulait leur apprendre à se défendre et à créer une opportunité pour fuir. Krakov ne voulait pas apprendre à ses élèves à détruire leurs adversaires.

« Debout Black. »

Le ton était froid. Altaïr obéit. Il allait certainement être viré de la classe de Krakov, mais ce n'était pas un problème. Il avait pris cette option afin d'apprendre à maîtriser sa force et à copier les capacités physiques des autres élèves. Altaïr avait voulu apprendre à cacher sa lycanthropie. Maintenant qu'il savait comment se fondre dans la masse, cette leçon ne lui était plus indispensable, bien qu'il aimait apprendre les arts martiaux et des techniques de self-defense.

Altaïr attendit, droit comme un piquet là où Krakov lui avait dit se tenir debout. Son professeur aidait son collègue à placer leurs étudiants sur des brancards et lancer des sortilèges de lévitation. Lev en profita pour s'approcher de lui, Viktor resta quelque peu en recul, bien qu'étant assez proche pour entendre la conversation.

« Pourquoi as-tu fait ça, tu vas avoir des problèmes ? » lui reprocha Lev, ce qui était plutôt étrange vu sa mine inquiète.

Toujours légèrement euphorique, Altaïr lui lança un sourire en coin.

« Parce que j'en avais envie. »

Lev eut un mouvement de recul. Quand bien même il n'appréciait pas les cinq ukrainiens, jamais il n'aurait dû leur faire ça. Lui, il n'aurait jamais pu frapper quelqu'un ainsi, pas même sous le coup de la colère. Lev ne comprenait pas.

« Je me retenais depuis des mois. Tu étais un bon bouclier, personne ne voudrait s'en prendre à l'ami de Lev Yudina, vu qui sont tes parents. Il était inévitable qu'en coupant les ponts avec toi, alors je serai à nouveau harcelé et que je finirai par m'énerver. » haussa des épaules Altaïr.

Lev crispa ses poings de colère et baissa le regard, il était visiblement blessé par les propos de son ancien ami.

« Alors tout ce temps, tu ne faisais que nous utiliser, Viktor et moi ?

- Je suis un Black, je suis le descendant de dizaines de Serpentards, la ruse et la folie sont inscrites dans mes gènes. »

Lev releva son regard vers Altaïr, ce dernier fut surpris de lire un peu de curiosité mélangée à la colère qui brillait dans les yeux du Bulgare. Pourquoi est-ce qu'à chaque fois qu'Altaïr essayait de faire fuire ce garçon, il se retrouvait au final à attiser son intérêt. Il ne comprenait pas.

« Tes yeux sont rouges. »

Altaïr pâlit brusquement. Son brusque excès de magie avait dû briser les glamours apposés par Derry. Le garçon n'avait pas le droit d'appeler les elfes de maison de Cygnus. Cependant le vieil homme avait fait une exception pour les lendemains de pleine lune. Altaïr pouvait alors appeler Derry et ce dernier avait pour ordre de seulement changer la couleur des iris de son jeune maître. Pas le droit de parler, pas le droit d'inspecter de potentielles blessures. Puis, à chaque nouvelle pleine lune, sa magie lycanthrope effaçait le glamour et le lendemain, Derry lui en apposait un nouveau.

Pris de panique, Altaïr baissa la tête et se dirigea vers les toilettes du rez-de-chaussée, prétextant se nettoyer le visage. Il avait du sang sur ses joues et ne parlons même pas de ses mains.

A peine enfermé dans la cabine que le garçon appela l'elfe de Cygnus. Ce dernier comprit rapidement la situation, lui lança un glamour et disparut tout aussi rapidement. Puis, Altaïr en profita pour réellement se rafraîchir. L'odeur putride du sang réveillait le loup en lui. La pleine n'était pas loin et il sentait la bête remuer dans ses entrailles.

Altaïr tenta vainement de faire taire sa partie lycanthrope avant de finalement retourner auprès du professeur Krakov. Il découvrit alors que Georgiev avait fini par évacuer les élèves blesser et son professeur de combat ne tarda pas à lui faire quitter à son tour le bâtiment des premiers années.