Bonjour à toustes !

Vous êtes toujours aussi nombreux à me laisser des reviews et je vous en remercie. Vraiment, c'est un tel plaisir de les lire ! Et même si je réponds parfois des jours après, je les lis en général assez rapidement (quand je reçois les mails de notification ah ah).

Voici le chapitre 17, dans lequel il ne se pas grand chose en terme d'action, mais par contre les discussions vont être importantes.

Bonne lecture !


Chapitre 17 — Discussions Potter - Malefoy

Mercredi 11 mars 2020

Cela fait quatre jours que Poudlard est dans le noir complet. Ou presque. De nombreux élèves ont sorti des torches moldues et les autres se déplacent avec des chandeliers ou lampes à huile que le personnel leur a fournis. Les plus âgé·e·s qui veulent frimer un peu invoquent un patronus corporel, pour celleux qui y parviennent. Iels sont peu nombreux : cette méthode reste plutôt celle des adultes. Et encore, pas toustes. Drago par exemple, n'aime pas spécialement ça, alors que pour Harry c'est aussi simple que de respirer. C'est une question d'habitude. Les fantômes également sont une source de lumière, même si très pâle et qui ne diffuse pas. Ainsi, ces dernier·e·s ont pris le réflexe d'escorter les plus jeunes étudiant·e·s d'un endroit à l'autre.

Il est midi, la septième année quitte la salle de Défense Contre les Forces du Mal après un cours particulièrement adapté à la situation : le Charme du Patronus et sa raison d'être. Les circonstances ont un peu bousculé le programme de Harry et il a décidé d'avancer la pratique de ce sortilège pour permettre à ses élèves de s'éclairer. Personne ne sait combien de temps les ténèbres vont perdurer : les Briseurs de Sorts sont à l'œuvre depuis quatre jours et pour le moment il n'y a pas d'amélioration. Plus les jours passent et plus il devient improbable que ce soit une tentative des Partisans Noirs : pas de nouveau parchemin de menace dans le casier de Harry et surtout il n'est pas spécialement en danger. L'ombre menaçante du souterrain ne semble pas avoir attaqué qui que ce soit, chaque parcelle du château est éclairée par des bougies, des feux ou autre chose. Cela donne un travail supplémentaire aux elfes de maison de Poudlard et Minerva a été forcée d'embaucher une dizaine d'entre eux en extra rien que pour cela. Ce coût n'est pas exorbitant, mais comme Harry et Drago sont responsables de la situation, ça sera retenu sur leur salaire. En plus de remontrances salées de la part de la directrice, de Neville et de Tulipe qui a été évidemment mise au courant puisque Harry a été obligé d'expliquer pour quelle raison il se promenait dans la Chambre des Secrets. Drago espère que le conseil d'administration ne sera pas informé de leur responsabilité, il craint particulièrement une mise à pied ou un renvoi. Minerva les a menacés de tout divulguer au conseil, mais d'après Neville c'est du bluff, pour les faire se tenir tranquille le reste de l'année. Ensuite, elle quitte son poste et n'aura plus à gérer ce genre de choses.

Harry termine de nettoyer son tableau noir, en frottant l'éponge sur la surface en petits cercles. Son estomac gargouille et lui rappelle qu'il est l'heure de manger. Une porte claque dans son dos et Harry sursaute. Il se retourne pour découvrir Drago qui s'avance vers lui.

— Tu m'évites, Potter ?

— Pas du tout, qu'est-ce qui te fait penser un truc pareil ?

Harry a repris le nettoyage du tableau, c'est presque achevé maintenant.

— Je ne t'ai pas vu dimanche, tu n'es pas venu après les cours ni lundi ni hier. Et c'est à peine si tu me dis bonjour le matin.

— C'est toi qui veux rester discret je te signale. Et j'ai eu beaucoup de travail.

Drago se retourne vers l'entrée de la pièce et vérifie que la porte est bien fermée.

— Ça m'a manqué de ne pas te voir seul, avoue Drago, réfrénant comme il peut le rosissement de ses joues.

— Ah tiens donc ?

Harry lâche un sourire un brin carnassier. Il s'approche de Drago et entoure sa nuque de ses bras. Ce dernier se dégage.

— Pas là, quelqu'un pourrait entrer.

Il prend la main de Harry et le tire jusqu'au bureau de ce dernier, dont la porte est au fond de la salle de classe. Il referme derrière eux. La pièce est dans la pénombre, éclairée seulement par un feu de cheminée. Harry ne l'utilise pas beaucoup, il a demandé aux elfes de ne pas y mettre de bougies, ça leur évite du travail inutile.

— Il fait plutôt sombre ici, je vais allumer…

— C'est parfait ! l'interrompt Drago.

Drago prend en coupe le visage de Harry et fond sur ses lèvres. Il l'embrasse avec passion, quémandant l'accès à sa bouche presque immédiatement. Et Harry ne se fait pas prier, il ouvre les lèvres et accueille la langue de Drago avec délice. Il pose ses mains sur sa taille puis les remonte le long de son dos.

En l'espace de quelques instants, la pièce est emplie de respirations haletantes et rapides, de légers gémissements. Drago a poussé Harry jusqu'à son bureau et s'est glissé entre ses jambes. Les mains du professeur de potions sont sur la nuque de Harry et sur son torse. Il sent les battements effrénés de son cœur sous sa paume, à travers les vêtements, et il aime ça. Harry, lui, a exploré son dos et n'a pu s'empêcher de défaire la tresse que porte Drago : il adore passer ses doigts dans les fines mèches blondes. Les bouches sont avides de l'autre et Harry a oublié qu'il avait faim : rien ne compte que Drago contre lui. Encore une fois, il remarque que ce dernier est très passionné et ça lui plaît.

Prendre Harry dans ses bras, le toucher, l'embrasser, cela avait manqué à Drago. Ils se sont vus quelques jours plus tôt, mais il s'est habitué à avoir de la tendresse au quotidien et à ne pas être repoussé. Il en a besoin, il le sait et réalise maintenant qu'il n'en a eu que très peu dans sa vie alors qu'il en a terriblement besoin. Scorpius ne compte pas, ça n'a rien à voir.

Et Drago a envie de plus aujourd'hui : Harry lui a trop manqué. Il quitte ses lèvres, embrasse son cou puis s'agenouille. À la faible lueur des flammes, Harry le regarde et le désir brille dans ses yeux. Drago pose ses mains sur la ceinture de Harry, à travers la robe de sorcier.

— J'ai envie de te sucer.

Un hoquet de surprise s'échappe de la bouche de Harry : il avait compris l'intention de Drago, mais ne s'attendait pas à ce qu'il le dise. Dans sa bouche c'est encore plus excitant. En réponse, Harry relève sa robe et la retire prestement. Il déboucle sa ceinture afin de montrer qu'il est d'accord, sans jamais quitter des yeux l'homme à genoux devant lui. Rien que l'idée de ce que Drago s'apprête à faire donne à Harry le souffle court et il se mord la lèvre d'anticipation.

Drago sent un frisson d'excitation le parcourir en ouvrant les boutons et la braguette de Harry. Il pense au dernier moment à lancer deux sorts : nettoyage et protection, il ne tient pas à attraper quoi que ce soit. Il repose sa baguette au sol et se concentre uniquement sur ce qu'il a envie de faire. Drago baisse le pantalon et le boxer juste assez pour libérer le sexe de Harry, déjà partiellement en érection. Sans attendre, il le prend en bouche.

En quelques instants, Harry est totalement dur et ne peut plus retenir des gémissements de plaisir. Dans un éclair de lucidité, il jette un Assurdiato et verrouille la porte, le tout en informulé. Puis il se laisse complètement aller aux sensations. Il a les mains appuyées sur le bureau sur lequel il est presque assis et la tête rejetée en arrière. La bouche de Drago est chaude, douce et le fait rapidement monter vers l'orgasme. Harry ne sait pas si son amant a déjà beaucoup d'expérience dans le domaine, mais il maitrise ce qu'il fait, visiblement.

Entre deux soupirs, Harry prévient Drago qu'il va jouir. Ce dernier se recule et amène Harry à l'orgasme en quelques mouvements du poignet, sa deuxième main serrant juste ce qu'il faut ses bourses. Drago le regarde se cambrer, en appui sur ses mains, et entend un gémissement rauque s'échapper de ses lèvres entrouvertes. Il le trouve beau.

Harry reprend ses esprits, rouvre les yeux pour observer Drago, à ses pieds, le nettoyer d'un coup de baguette. Harry est essoufflé, a terriblement chaud et se sent détendu. Le Serpentard reste encore un peu à genoux pour le rhabiller délicatement et Harry trouve ça très attentionné. Il aime ce genre d'attention et ce que cela sous-entend. Il le savait déjà, puisque leur relation n'est pas basée sur le sexe, mais ce genre de geste prouve un attachement de Drago pour Harry. Pas forcément de l'amour, Harry sait qu'il faut souvent du temps pour tomber amoureux — quand on n'est pas lui — mais déjà quelque chose. Et c'est très encourageant.

Drago se relève. Harry le remercie d'un léger baiser et lui caresse doucement la joue. Harry aime bien la peau toujours rasée de près de Drago, contrairement à la sienne. Un simple coup d'œil permet à Harry de constater que le Serpentard est excité lui aussi. Et il a terriblement envie de le satisfaire.

— Je peux te rendre la faveur ? chuchote-t-il d'une voix encore rauque de plaisir.

— Oh ça va, merci. Je voulais juste te faire plaisir.

Drago a un léger sourire, il n'a pas agi ainsi pour avoir une réciproque. Il en avait juste envie. Il prend Harry dans ses bras et blottit son visage dans son cou, quémandant un peu de douceur.

Harry ne pose pas de questions et le serre contre lui. Voilà quelque chose auquel il ne s'attendait pas et ça aiguise sa curiosité. Il se dégage lentement de l'étreinte, mais laisse ses mains sur les hanches de Drago tandis que ce dernier caresse distraitement la nuque de Harry.

— Tu n'es pas trop frustré ?

— Ça ne me dérange pas, j'ai l'habitude.

— Tu as eu peu d'histoires avec des hommes, je suppose ?

Drago penche légèrement la tête sur le côté, pensif. Cet aspect de sa vie, il l'avait jusque là gardé pour lui. Mais il ne va pas pouvoir taire indéfiniment ce qu'il a vécu, ou en l'occurrence ce qu'il n'a pas vécu. Les mains de Harry sont toujours posées sans pression sur ses hanches, il trouve ça confortable et rassurant d'être là près de lui.

— Je n'ai eu aucune histoire avec un homme.

— C'était une première fellation plutôt réussie alors, taquine Harry, un peu mal à l'aise.

— Je n'ai pas dit que je n'avais jamais eu de relations sexuelles, Potter, j'ai parlé d'histoire avec quelqu'un. Ça n'a rien à voir.

Harry se sent nul tout à coup, bien que ça réponde à des questions qu'il se posait. Et Drago reprend de lui-même.

— Ceci dit, ce n'est pas arrivé tous les quatre matins non plus, avec Scorpius à élever et mon poste de professeur, mon temps était limité. J'ai appris à accepter la frustration.

Drago ne dit pas tout, il n'a pas encore envie de raconter ses premières années ici, alors qu'il n'était pas du tout professeur. Il ne dit pas non plus avec qui il a appris à faire l'amour avec un homme. Ça viendra plus tard. Probablement.

— Tu es certain que je ne peux pas t'aider un peu ? Avant tu n'avais personne, mais je suis là maintenant, minaude Harry en passant une main sur le torse habillé de Drago.

Ce n'est pas son genre d'insister, mais Harry a tellement envie de le faire jouir, de regarder son visage s'éclairer de béatitude, se détendre totalement. Parce que même s'il voit bien que Drago n'est plus aussi froid qu'il le montrait à l'adolescence, il sait qu'il se contrôle, qu'il ne laisse pas toujours paraître ses sentiments et ses émotions en public. Mais quand ils sont seuls et particulièrement quand il jouit, Drago n'est plus le même. Et Harry commence à trouver ça addictif de fréquenter le vrai Drago Malefoy.

— Je suis certain, mais merci de proposer. Je promets que tu auras le loisir de me satisfaire une autre fois.

Drago embrasse le front de Harry puis le bout de son nez et termine par un baiser tout doux sur ses lèvres.

— On va déjeuner ?

Harry accepte : son estomac se rappelle à lui. Drago a promis de le laisser lui donner du plaisir une autre fois, il en trépignerait presque d'impatience. Avec tout ça, Harry a oublié qu'il cherche depuis plusieurs jours à discuter avec Drago de leur relation et qu'il ne sait pas comment aborder le sujet.

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Samedi 14 mars 2020

— Est-ce que tu comptes me dire ce qui ne va pas Albus ? Tu es renfrogné depuis des jours et des jours.

Albus soupire lourdement et tourne son regard vers son ami, assis en face de lui. Ils sont sur le lit de Scorpius en train de relire leurs devoirs, isolé du reste du dortoir par les rideaux épais et la noirceur anormale qui règne depuis une semaine. Une grosse bougie flottante éclaire faiblement l'endroit. Habituellement, elle est posée sur la table de nuit du garçon, mais le jeune Malefoy s'exerce au sortilège du Wingardium Leviosa sur une longue durée.

— J'ai peur, Scorp'.

— Tu veux qu'on allume la torche que m'a prêtée Josh ?

— Je n'ai pas peur du noir. J'ai peur pour mon père.

Le léger sourire de Scorpius se fane. Il pensait taquiner son ami sur sa crainte des endroits sombres, mais visiblement les choses sont plus sérieuses qu'une simple peur du noir.

— Viens là, propose Scorpius en soulevant ses couvertures.

Albus hésite un peu avant de finalement rejoindre son ami. Il fait bon sous les couvertures et Scorpius dégage une chaleur agréable. Ce dernier lui prend la main pour lui montrer son soutien : leurs doigts s'entremêlent et Scorpius serre fermement ceux d'Albus.

— Raconte-moi.

— Il y a eu une nouvelle attaque, mais on ne devait pas en parler. Tu te souviens vendredi il y a deux semaines, quand Hagrid était absent du cours de Soins aux créatures magiques ?

— Ah oui, le jour où l'appartement de ton père a été vandalisé ?

— C'est ça. Le truc c'est que ce matin là, Hagrid était absent parce qu'il a aidé mon père, avec d'autres profs, à combattre une manticore dans la forêt interdite. Ils ont appris quelques jours plus tard que c'était le même groupe de gens qui l'attaque depuis le début de l'année.

Scorpius pose une main sur sa bouche pour retenir un cri silencieux. La main d'Albus, dans la sienne, est moite et tremble. Scorpius serre un peu plus les doigts de son ami, fugacement.

— Il a été blessé ?

— Heureusement, non, rien de grave. Mais s'il n'avait pas été Auror avant, je pense qu'il ne s'en serait pas sorti.

La voix d'Albus est voilée par les larmes qu'il contient.

— Et son appartement c'est le même groupe ?

— Personne ne sait, mais mon père pense que oui. Les Aurors ont passé deux jours dedans apparemment. Scorpius, j'ai peur que quelqu'un réussisse vraiment à le tuer…

Albus ne peut plus retenir ses larmes et de bruyants sanglots lui échappent. Scorpius ne sait pas quoi faire de plus alors il attend tranquillement que son ami se sente mieux et il garde précieusement sa main dans la sienne. Puis, quand les pleurs cessent, il lui tend un mouchoir en tissu. Albus récupère sa main et se mouche. Il essuie ses yeux et ses joues humides. Son regard est posé devant lui, sur le petit monticule que ses jambes forment sous les couvertures. Ses ongles grattent distraitement le drap.

— Ne t'inquiète pas, Al'. Ton père est super fort et il est rarement seul, il a des amis ici qui veillent sur lui. Et il y a mon père aussi.

Albus tourne brusquement la tête vers Scorpius et scrute son visage.

— Que vient faire ton père là-dedans ?

Scorpius se mordille les lèvres, il hésite.

— Tu dois me promettre de ne rien dire à personne.

— Promis.

Scorpius raconte à Albus le coming out de son père le mois précédent, d'une voix si basse que le jeune Potter est obligé de tendre l'oreille pour ne rien manquer. Il lui confie aussi que quelques jours après, Harry Potter est venu discuter avec son père du travail alors qu'il était là. Et qu'il a remarqué les regards que les adultes s'échangeaient.

— Je suis certain qu'il y a quelque chose entre eux, conclut-il en murmurant toujours.

— Mon père a juré qu'il nous dirait s'il sortait avec quelqu'un et il n'a rien dit sur ton père pourtant…

— Peut-être qu'ils nous le diront plus tard ? Mon père était terrifié à l'idée que je le rejette, à cause de son éducation, tu sais. À mon avis, personne n'est au courant et ils attendent un peu pour le dire.

— J'espère que c'est ça, grommelle Albus, dépité.

Le silence reprend ses droits entre les lourdes tentures du lit de Scorpius. Albus pose sa tête sur l'épaule de son ami quelques minutes et profite de leur proximité. Puis il décide de rejoindre son lit : il est fatigué. Les deux garçons se souhaitent une bonne nuit et Albus se faufile hors des rideaux. Il traverse la pièce à la lumière du feu dans la cheminée et des quelques bougies éparpillées.

Alors qu'il monte sur son propre lit, l'un de ses camarades de dortoir l'interpelle brusquement.

— C'est toi qui pleurais comme une chochotte tout à l'heure ?

— Qu'est-ce que ça peut bien te faire, Chad ?

Albus s'installe en ignorant Chad O'Conor. Il ne s'est jamais entendu avec ce garçon et la plupart du temps ils ne s'adressent pas la parole. Mais ce soir, Chad semble être d'humeur méchamment moqueuse. Et ça n'est jamais bon signe.

— Tu t'es fait refouler par Scorpius, c'est ça ? Depuis le temps que vous vous tournez autour…

— Tu ne sais pas de quoi tu parles, Chad. Laisse-moi tranquille.

— C'est étonnant, j'aurais pensé qu'un Malefoy ne ferait pas la fine bouche… continue le garçon d'une voix mauvaise.

Les rideaux du lit de Scorpius s'ouvrent alors. Ce dernier en sort et se poste face à son camarade.

— Tu ne sais rien de moi ou d'Albus. Tu n'es qu'un ignoble scrout à pétard frustré et jaloux.

— Moi, au moins, ma famille n'a pas de Mangemorts dans ses rangs ! raille Chad. Et je ne suis certainement pas jaloux de l'un de vous, vous me dégoûtez !

Scorpius sent l'énervement monter et menacer de déborder. Mais il ne peut pas se bagarrer avec un autre élève, non seulement il risque une punition sévère, mais en plus son père serait très déçu. Par ailleurs, il a peur que son père perde sa place par sa faute.

— Laisse-le dire, Scorp', il mérite pas qu'on use notre salive pour lui, tente d'apaiser Albus qui n'aime pas les conflits.

Scorpius se tourne vers Albus et croise son regard vert. Il sait maintenant pourquoi tout le monde raconte que le cadet Potter ressemble à son père, tout autant que lui ressemble au sien. Et il a une idée totalement saugrenue pour faire taire Chad. Il ne pense pas aux conséquences que cela pourrait avoir, il veut juste que l'autre arrête d'embêter Albus tout le temps parce qu'ils sont amis. Alors il franchit l'espace qui le sépare d'Albus, attrape ce dernier par son haut de pyjama, le tire vers lui et lui plante un baiser sonore sur les lèvres.

Le dortoir en reste muet d'étonnement, Albus le premier, son cœur battant la chamade. Chad se détourne en grimaçant et les autres rejoignent également leurs lits.

— On en parle demain, bonne nuit, chuchote Scorpius.

Albus n'a même pas le temps de répondre que Scorpius s'est de nouveau réfugié derrière ses rideaux. Le jeune Potter souffle la bougie de sa table de nuit, encore hébété, et s'allonge. Il reste les yeux grands ouverts pendant longtemps dans la pénombre de la grande chambre, rejouant inlassablement dans sa tête la scène qui vient de se dérouler et son premier baiser.

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Il est vingt-deux heures quand quelqu'un frappe à la porte de Drago. Ce dernier, immergé dans une lecture palpitante, sursaute et renverse un peu du thé tiède qu'il tenait de la main droite. Il peste, lance un sort de nettoyage et se lève. À cette heure, c'est certainement un·e étudiant·e qui a des ennuis. Le couvre-feu est passé depuis trente minutes et personne n'est censé se balader dans les couloirs, sauf urgence. Peut-être quelqu'un qui est malade…

Drago incante un Lumos, ouvre la porte et se retrouve nez à nez avec le couloir désert. Il fait un pas à l'extérieur dans l'idée de vérifier s'il n'y a pas quelqu'un en train de s'enfuir et se cogne à un obstacle invisible.

— Aïe !

La voix s'élève de nulle part. La voix de Harry. Merlin, ce dernier se promène avec sa cape d'invisibilité !

— Potter, qu'est-ce que tu fiches là ? gronde Drago à voix basse.

— Laisse-moi entrer d'abord.

Drago a presque envie de lui fermer la porte au nez et cette réaction puérile lui fait lever les yeux au ciel. À la place, il se décale et attend quelques secondes avant de refermer la porte. Harry se dévoile en jetant sa cape au sol.

— Les portemanteaux ne sont pas faits pour les croups, Potter !

Harry ramasse son vêtement et l'accroche près de la porte. Puis il rejoint Drago qui est déjà retourné s'asseoir dans son fauteuil.

— Thé ?

— S'il te plaît.

Drago réchauffe la théière d'un coup de baguette et fait léviter une tasse depuis le meuble de rangement jusqu'à la table basse. Puis il s'enfonce confortablement dans son dossier et croise ses jambes.

— Tu sais te servir…

Drago regarde Harry verser le thé et tenter de boire une gorgée sans s'ébouillanter. C'est un échec, évidemment, et sa grimace fait sourire Drago.

— Qu'est-ce que tu fais ici, Potter ?

— Ça fait des jours que j'essaie de trouver le temps de discuter et que je n'y arrive pas.

— Essaies-tu d'insinuer que nous passons trop de temps la main dans le pantalon de l'autre et que nous devrions faire autre chose que s'embrasser ?

Harry éclate de rire et Drago ne peut retenir un sourire en coin machiavélique. Il avale une gorgée de son thé maintenant froid. Il repose la tasse sur la table.

— Je ne me plains pas de ce que font tes mains et ta bouche sur moi, Malefoy. Mais j'aimerais parler de nous. Enfin, surtout de toi.

— C'est-à-dire ?

— Est-ce que tu es bien avec moi ? Est-ce que tu as réfléchi à comment le dire à tes proches ? As-tu encore besoin de temps ? As-tu besoin d'aide ?

— Ah. C'est un interrogatoire, alors.

— Mais non, voyons ! Je m'inquiète pour toi, je sais qu'il peut être rude de sortir du placard et tu étais frileux à cette idée. Je veux juste savoir où nous allons, c'est tout.

— J'ai promis de le faire, Potter, ne remets pas ma parole en doute !

— Tu as dit que tu le ferais si tu pensais que notre histoire avait un avenir possible. Ce que je comprends totalement. J'aimerais donc avoir ton ressenti.

— As-tu eu la sensation, même une seule fois, que je ne suis pas à l'aise avec toi ? Que je veux mettre un terme à notre relation ? Ta bite dans ma bouche n'était pas un indice suffisant ? Parce que je peux t'assurer que je ne suce pas le premier type venu !

Harry s'étouffe avec son thé. Ça lui apprendra à boire en pleine dispute. Il tousse puis repose sa tasse, finalement le thé n'est pas une bonne idée.

— Merlin… Je suis désolé, Drago, ce n'est pas du tout ce que je voulais dire. Je me sens très bien avec toi et je pensais que c'était aussi ton cas, c'est vrai. Mais je voulais confirmation que tu ne regrettes pas et que tu es toujours d'accord pour en parler aux autres. Quand tu seras prêt.

— Je suis désolé moi aussi, je n'aurais pas dû être aussi agressif. J'ai encore besoin de temps.

— Je sais. Je…

— Mais je l'ai dit à ma mère il y a deux semaines, le coupe Drago.

— Tu lui as dit qu'on était ensemble ? s'étonne Harry.

— Je ne t'ai pas nommé. Elle sait que je suis en relation avec un homme. Maintenant que j'y pense, elle aurait peut-être moins mal réagi si j'avais parlé de toi…

— D'où te vient cette intuition ?

— Elle ne cesse de t'encenser. Depuis la fin de la Guerre, dès que les journaux parlent de toi, c'est Potter par ci et Potter par là.

Drago repense à toutes ces fois où sa mère ne tarissait plus d'éloges sur le grand héros de la nation, comme si Harry Potter était plus digne de ses compliments que son propre fils. Cela énervait tellement Drago. Évidemment, il était content d'avoir été débarrassé de Voldemort et avait conscience que Harry Potter en était responsable, en grande partie. Il était même reconnaissant, mais il avait détesté cette impression de valoir moins que Harry Potter pendant des années. Il avait fallu de nombreuses années et beaucoup de courriers échangés pour que Drago accepte les excuses de sa mère et sa fascination pour Celui-qui-a-survécu.

— Je suis navré qu'elle ait mal pris la nouvelle. Est-ce que cela change quelque chose entre nous ?

— Non. J'aime ce que l'on partage, Harry. C'est très nouveau et j'ai conscience que j'ai encore du travail à faire sur moi-même pour considérer que c'est totalement normal, mais je ne veux pas revenir en arrière. Je me suis rendu compte en discutant avec ma mère que je m'étais mis seul dans une cage et je ne veux plus être enfermé, je ne veux plus mentir.

L'émotion submerge Harry. Il s'était fait son opinion sur ce que vivait Drago, mais il était loin du compte. Ce dernier devait être si malheureux, seul et empêtré dans ses mensonges. Le parallèle avec la souffrance qu'il a vécu en gardant sa relation avec Charlie secrète lui saute aux yeux, même si ce sont des situations différentes. Une bouffée d'affection pour Drago lui serre le ventre, il a l'impression que plus il le découvre, plus il le connaît, plus il tombe amoureux.

— Je vais en parler bientôt à Scorpius, reprend Drago, je ne veux pas lui cacher ça.

— C'est une bonne idée. Ça me permettra de le dire aux enfants aussi. Tu penses le faire avant les vacances de Pâques ?

Drago se redresse un peu, quelque chose lui semble curieux. Le ton de Harry peut-être.

— Avant les vacances ? Tu as prévu quelque chose dont tu ne m'as pas parlé ?

— Hermione m'a demandé de t'inviter pour raisons professionnelles, elle est sur un projet législatif complexe. Elle travaille déjà avec Parkinson et toute une équipe au Ministère, mais elle voudrait aussi ton avis. Je me disais que si les enfants et nos amis proches sont au courant, ça serait plus simple…

— Pourquoi moi ?

— Elle semble persuadée que ton statut de Sang-Pur, avec ton éducation et le fait que tu aies dépassé tes préjugés, lui seront utile. Et en toute franchise, je crois que Ron et Hermione ont déjà deviné pour nous deux et qu'ils veulent nous donner l'opportunité de leur dire sans avoir besoin d'une annonce officielle, ou je sais pas quoi.

Drago reste perplexe. La peur reprend un instant le dessus à l'idée que tant de gens sachent pour son homosexualité. Puis il se force à être objectif : maintenant que Scorpius et sa mère sont au courant, il n'y a pas de raison qu'il continue à le cacher. Il pourra en parler petit à petit. Et puis l'opinion des amis de Harry ne semble pas négative.

— Je lui dirais au début des vacances alors. Et tu pourras dire à Granger que j'accepte de la rencontrer pour son projet de loi.

— Merci.

Le sourire de Harry, si chaleureux, remue un peu Drago. Il n'avait pas réalisé que son bonheur le rendrait heureux lui aussi. Et pourtant c'est le cas. Drago comprend que c'est peut-être ça de tomber amoureux. L'idée l'effraie autant qu'elle le met en joie. Il va falloir apprendre à apprivoiser ces nouveautés.

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Dimanche 15 mars 2020

Le temps est tellement maussade que peu d'étudiant·e·s se sont risqué·e·s à l'extérieur, alors qu'il fait toujours un noir d'encre dans le château. Les plus âgé·e·s, qui savent lancer des sorts de confort – chaleur et imperméabilité – sont dans le parc. Mais ce n'est pas le cas des élèves de troisième année. Albus est assis dans un recoin de la Salle Commune de Serpentard, sur un rebord de fenêtre recouvert de coussins. Le lac est juste derrière la vitre et la lumière verdâtre se reflète sur son profil. Étrangement, cette lumière-là arrive à pénétrer le sortilège maléfique qui a plongé Poudlard dans l'obscurité depuis huit jours.

Scorpius débarque à ses côtés, un peu essoufflé et s'assoit en tailleur face à Albus a entouré de ses bras ses genoux relevés. Il a le regard perdu dans le lac et observe les poissons qui nagent tranquillement dans les eaux calmes. Pour la première fois depuis toujours, Albus ne sait pas comment parler à son ami alors il préfère attendre que Scorpius se décide à s'expliquer sur son geste.

— Albus, tu es fâché après moi ?

— Non, je ne suis pas fâché.

— Tu m'as ignoré toute la matinée et je te cherche partout depuis le déjeuner.

Albus hausse les épaules. Scorpius suspecte que son ami est blessé parce que ce n'est pas son genre d'être aussi mélancolique et de le fuir ainsi. Le jeune homme regrette de ne pas avoir réfléchi aux conséquences de son baiser la veille. C'est forcément ça le problème.

— Tu veux bien me regarder, Al' ?

Albus tourne son visage vers Scorpius. Ses yeux verts sont tristes et sont soulignés par des cernes. Il n'a pas bien dormi cette nuit.

— Tu m'en veux de t'avoir embrassé, hein ? Je suis désolé, je n'aurais pas dû le faire sans te demander. Chad m'a trop énervé, je voulais lui clouer le bec et c'est la première chose qui m'est venue à l'esprit. Je sais que c'était idiot.

— Je ne t'en veux pas, Scorpius. Mais c'est vrai que j'aurai préféré que tu me demandes.

— Tu aurais probablement refusé. Je suis tellement désolé.

— Je ne sais pas, Scorp'. En tout cas, j'aurais aimé que mon tout premier baiser soit avec quelqu'un qui en avait vraiment envie, pas juste pour faire taire ce troll.

Scorpius est mortifié. Il savait pourtant qu'Albus n'avait jamais embrassé qui que ce soit, mais ça lui était sorti de la tête. Son énervement était tel qu'il n'avait en fait pas du tout réfléchi. Il s'en veut terriblement. D'autant plus qu'il a conscience qu'il n'aurait jamais embrassé son ami hors de ce contexte.

— Si tu veux, on peut dire qu'il n'a jamais existé ?

— Ça ne marche pas comme ça, Scorpius… C'est trop tard maintenant.

— Est-ce que je peux faire quelque chose pour me rattraper ? Je n'aime pas te voir aussi mal.

— Laisse-moi juste du temps pour digérer ma déception.

— Tu veux que je te laisse tranquille ?

Albus réfléchit un peu avant de répondre. Une part de lui aimerait ne plus voir Scorpius, parce que sa présence rend tout plus compliqué. Albus se pose des questions sur lui-même et sur son orientation sexuelle depuis des mois. Il a des doutes et ne sait pas à qui en parler. Il ne sait pas si ses sentiments pour Scorpius sont normaux pour deux jeunes garçons très amis ou si c'est autre chose. En même temps, il a besoin de Scorpius à ses côtés, parce qu'avec lui tout est toujours si facile. Et parce qu'il ne sait pas s'il supporterait de ne plus être près de lui.

— Non, je n'ai pas envie de changer nos habitudes. Mais je vais sûrement être un peu grognon encore quelques jours.

— Je comprends très bien. Je te demande pardon, encore une fois.

Albus hoche la tête et la tourne de nouveau vers le lac. Regarder les créatures marines le fascine et le détend, ça l'empêche de trop penser. Scorpius, de son côté, prend son livre en cours de lecture et se replonge dans les aventures de Sherlock Holmes.

Tout à coup, une vibration puissante ébranle l'intégralité du château, les murs tremblent, les portes grincent et les vitres se tordent. Cela dure quelques secondes puis les ténèbres disparaissent. Les éclairages magiques se rallument automatiquement et Poudlard retrouve la lumière.


N'oubliez pas de me laisser une petite review si vous avez aimé :)

On se retrouve dans deux semaines, le 15 septembre 2022 avec le chapitre 18 : « Le passé de Drago ».

En attendant, portez vous bien !