Crédits : L'univers et les personnages de Naruto appartiennent à Masashi Kishimoto, je ne détiens aucun droit les concernant. Seuls l'histoire et quelques personnages sont issus de mon imagination et m'appartiennent de ce fait.
Ce n'était qu'une simple signature déposée en bas d'un parchemin, pourtant elle illumina les visages des deux jeunes gens qui faisaient face au bureau de leur supérieure et du jonin derrière eux. Ils en encadraient un autre qui, bien qu'étant le principal concerné par ce document, conservait un visage presque impassible. Seul un maigre sourire, invisible aux yeux de qui ne le connaissait pas assez, traduisait pourtant son allégresse. C'était bien plus qu'une signature, surtout pour lui et surtout pour eux ; c'était le début d'une nouvelle vie et la fin d'une parenthèse qui se refermait. Il lui avait fallu quelques années et de nombreux événements pour en venir à regretter, d'une certaine façon, de l'avoir ouverte.
Des trois adolescents, âgés de dix-sept ans à présent, seuls les deux premiers revêtaient leurs tenues de ninja classique à cette occasion avec pantalon, veste sans manche et bandeau frontal affranchi du symbole du village pour achever l'ensemble. Le troisième portait sa tunique ouverte et son pantalon large, qu'il portait déjà lors de leurs retrouvailles de nombreux mois plus tôt, avant même le début de la guerre. Il espérait bien en changer rapidement, car elle avait désormais une signification particulière : elle appartenait au passé, à celui qu'il avait tissé avec Orochimaru. Il la jugeait inappropriée à présent. La page se tournait et elle disparaitrait avec elle.
La Hokage se redressa après avoir rangé son stylo, avant de plier le parchemin et de le tendre à son assistante. Celle-ci la récupéra tandis que son Maitre croisait les mains, les yeux rivés vers les trois camarades. La joie transpirait également de ses propres traits ; celle de ces derniers était contagieuse et, si elle n'avait pas souhaité la venue de cet instant autant qu'eux, elle avait désiré assister à une telle scène.
— Bien ! A présent, Sasuke Uchiha, tu es réintégré parmi les ninjas de Konoha. Comme je te l'ai déjà expliqué, tu auras un statut provisoire pendant une période indéterminée, le temps pour toi de nous prouver ta détermination à revenir parmi nous et ta loyauté envers le village. Mais je ne doute pas que ce ne sera qu'une formalité qui, bien qu'agaçante, est nécessaire, acheva-t-elle en insistant bien sur ce dernier mot, auquel le concerné s'inclina.
— Je le sais. Et je vous remercie pour tout ce que vous avez fait pour moi, lui répondit Sasuke qui, sans le montrer, était particulièrement ému par les mots du chef du village.
Tous savaient qu'elle, Kakashi ainsi que quelques autres ninjas l'avaient défendu face au Conseil. Certains membres avaient souhaité le condamner du fait de sa qualité de déserteur durant ces dernières années et de sa participation au sein de l'organisation d'Orochimaru, d'une part, puis de l'Akatsuki d'autre part. Sasuke n'avait aucune idée des moyens dont elle avait usé mais ils avaient réussi à le relaxer. Non seulement il n'avait pas été jugé puis condamné pour ce qu'il avait fait mais il avait également eu la possibilité de revenir au village. Chance qu'il avait saisie. Il avait d'abord pensé partir en voyage, le temps de se reconstruire, de récupérer de réels repères, déstabilisés par toutes ses errances de ces dernières années et surtout de ces derniers mois. Tant de choses s'étaient produites, tant d'erreurs avaient éclaté à ses yeux et tant de mal avait été de son fait. Ce n'était que quelques semaines plus tôt qu'il en avait réellement pris conscience, grâce à son frère et à ses amis. Ces derniers n'avaient jamais cessé de croire en lui, malgré tout ce qu'il avait fait, ce qu'il leur avait fait, à un point que Sasuke ne parvenait pas à comprendre. Comment avaient-ils pu être si certains qu'il n'était pas définitivement perdu quand lui-même le pensait ?
C'était grâce à eux qu'il avait finalement décidé de rester. Il ne souhaitait pas leur causer davantage de peine et d'attente, bien qu'ils l'eussent assuraient qu'ils comprenaient les raisons de son départ. Il ne doutait pas que la rédemption qu'il recherchait à présent passerait par eux.
— Des questions ? demanda Tsunade, le sourcil haussé, amusée, tandis que les adolescents euphoriques s'extirpaient de leurs pensées.
— Non, Hokage-sama, fit Sasuke, et tous s'inclinèrent avant de se faire congédier d'un geste de la main par la vieille femme.
Ils s'exécutèrent et ne virent pas Shizune, qui n'avait pas quitté la pièce, se retourner vers sa supérieure, l'œil ému.
— L'équipe sept est de nouveau réunie. Les choses redeviennent comme avant.
Songeuse, Tsunade observa la porte désormais close devant elle, là où s'étaient effacées les quatre silhouettes des camarades enfin réunis. Un juste retour des choses, permis grâce à l'acharnement et à l'obstination de certains de ses membres. Elle se mit à sourire distraitement. Elle mit du temps à répondre.
— Non. Pas tout à fait comme avant.
Les traits de la blonde ne s'étaient ni durcis ni assombris, sa disciple ne comprit donc pas ce qu'elle voulut dire par là. Elle abandonna la tentative lorsqu'elle quitta la pièce à son tour, pour porter le parchemin à qui de droit. Il ne fallait pas oublier de la faire reconnaitre et d'archiver définitivement le sujet pour le considérer comme clos.
De leur côté, les quatre membres de l'ancienne équipe sept – et de la présente – venaient de quitter le bâtiment. Ils s'étaient arrêtés au bout de quelques pas pour balayer les alentours devant eux, empreints de nostalgie et d'espoir. La fumée et les flammes avaient disparu mais les traces de la guerre étaient encore évidentes. Certains immeubles étaient effondrés ou semblaient sur le point de l'être, et tous étaient plus ou moins touchés. Parfois, ce n'étaient que quelques pans de mur, un bout de toiture, ou même des fenêtres éclatées. Parfois davantage. Les rues aussi étaient impactées, ainsi que la forêt qui ceinturait le village. Mais la guerre était finie, à présent, et l'heure de la reconstruction était désormais venue. Et ce n'était ni le ciel d'un bleu pur et lisse, sans défaut, ni la légère brise de vent, ni le chant des oiseaux, vivifiant, qui allaient détruire leur optimisme, bien au contraire. Cela leur prendrait du temps, mais de ces ruines renaitrait leur village qu'ils chérissaient tant.
— Ichiraku ? suggéra Naruto avec un large sourire, auxquels répondirent ses trois compagnons, chacun à leur façon.
Cette fois pourtant, ce n'était pas par gourmandise qu'il le proposait, tous le devinaient, et ce simple fait leur occasionnait de drôles de sensations. Ce lieu avait tant de signification à leurs yeux ; ce n'était pas qu'un simple préparateur de ramens.
Seule Sakura acquiesça d'un signe de tête, mais l'accord des deux autres était tacite et n'eut nullement besoin d'être formulé. Ils s'engagèrent dans la rue principale, le pas lent et silencieux, pour s'imprégner des sons d'activités qui bruissaient autour d'eux. Même Naruto demeurait muet mais aucun ne souhaitait briser cet instant magique. Cela faisait tant de temps qu'ils l'attendaient qu'à présent, il leur fallait un peu de temps pour parvenir à y croire. Ça y était. L'équipe sept était de nouveau complète. Les choses étaient revenues à la normale.
Ils bifurquèrent dans plusieurs ruelles avant d'atteindre la roulotte qu'occupait actuellement le restaurateur. Ses locaux ayant été détruits durant la guerre, il avait récupéré le peu qu'il avait pu et avait emprunté pour compléter le matériel. Il s'était installé dans la roulotte prêtée par un parent, ce qui lui avait permis de relancer rapidement son activité. Cette situation était temporaire et il espérait retrouver bientôt une certaine normalité, car l'agencement actuel n'était pas des plus optimal. Cependant, il se montrait particulièrement optimiste, d'autant qu'il se savait plutôt chanceux comparé à bien d'autres. Beaucoup en étaient encore à peiner à réunir les maigres biens qui leur restaient et à chercher une solution pour retourner à un semblant de leur vie d'avant, ou même d'une vie tout court, quelque chose qui ne ressemblât pas seulement à de la survie.
Des tables et des chaises avaient été installées juste devant la large ouverture qui donnait sur les cuisines, protégées par une bâche tendue entre deux poteaux métalliques. Malgré l'heure tardive en ce début d'après-midi, la plupart d'entre elles étaient encore occupées. Ils s'assirent à l'une d'entre elles sans prendre le temps de se consulter, chose nullement nécessaire ; elle était ronde et plutôt petite, les chaises un peu hautes, mais ils s'en accommodèrent. Sasuke se retrouva entouré de ses deux amis, son ancien maitre face à lui. Là encore, le silence régna quelques minutes, le temps que le propriétaire vînt prendre leurs commandes. La carte n'avait rien d'original à leur proposer ; elle s'était raccourcie de manière considérable du fait des problèmes d'approvisionnement dont ils étaient victimes – encore une autre conséquence de la guerre – mais eux-mêmes n'y prêtaient pas attention, pas plus que les autres clients. Le simple fait de sortir et de consommer à une table, en paix, valait son pesant d'or. Cette scène des plus banales les laissait assez perplexes après des semaines de conflit. Elle ressemblait à un rêve.
— Je suis désolé, lâcha finalement l'Uchiha, tandis que la silhouette du vieil homme disparaissait dans la roulotte.
Les trois autres levèrent des mines surprises en sa direction, avant qu'ils ne comprissent l'allusion. Les traits de la seule femme du groupe s'adoucirent tandis que ceux du plus âgé se faisaient intrigués ; après tout, le brun n'était pas réputé pour cela. Seul Naruto se mit à rire, ce qui lui valut de s'attirer tous les regards, y compris des tables voisines. Ces personnes se détournèrent vite d'eux en chuchotant.
Après tout, ils étaient bien connus dans le village et au-delà de ses murs à présent, comme des héros. Des héros de guerre. Excepté pour l'ancien déserteur dont les rumeurs étaient bien plus nuancées ou sombres. Il faudrait encore du temps pour qu'elles se dissipassent ; la population civile ne se montrait pas aussi clémente que ses camarades à l'égard de Sasuke, comme une bonne partie des ninjas du village et de leurs alliés. Il fallait avoir été proche d'eux pour les comprendre.
Sasuke fronça les sourcils avant d'en hausser un, tandis que le blond secouait la tête avec amusement. Ses propos étaient on ne peut plus sérieux, et il ne comprenait pas la soudaine hilarité du blond. Il estimait que le sujet était grave.
— Crois-tu réellement que tu en aies besoin ? lâcha finalement Naruto, qui avait fini par se rendre compte que personne n'avait compris son éclat de rire. Ce n'est pas grave, tu sais. C'est du passé tout ça, à présent. Tu n'as rien à te faire pardonner.
Sasuke retint un hoquet interloqué, mais haussa tout de même son deuxième sourcil pour l'occasion. Sa surprise amusa les deux autres, qui ne rétorquèrent rien ; comme le blond, ils pensaient réellement que la page était tournée. Ils s'étaient déjà tout dit ou presque ce jour-là, lorsqu'il les avait rejoints, puis lorsque tout s'était terminé, et cela leur suffisait.
— Comment… comment peux-tu dire ça ? Comment pouvez-vous penser cela ? demanda Sasuke à l'ensemble du groupe, car il avait deviné que les deux autres fonctionnaient comme lui.
La chose n'était pourtant pas anodine ; dans sa folie, il avait même failli tuer Sakura. Elle n'avait été sauve que grâce à l'intervention de leur ancien maitre, pas grâce à lui. Sans cela, jamais il n'aurait interrompu son geste. Sa camarade serait morte. Par sa faute. Tuée de sa propre main.
Et de tout ce qu'il avait fait, cela, il ne parviendrait jamais à se le pardonner ou du moins, il s'en sentait incapable pour le moment.
— Tu n'as pas à t'en vouloir autant, Sasuke, rétorqua Sakura d'une voix douce. Nous comprenons, tu sais. Tu as été manipulé – d'abord par Orochimaru, puis par Madara.
— Cela n'excuse en rien mes actes, soupira-t-il, mais il n'argumenta pas davantage.
S'il y avait bien quelque chose qui était resté intact malgré les années passées, c'était leur entêtement. Cette pensée le fit sourire. Comme cela lui avait manqué. Il aurait fallu tant de choses pour se rendre compte de quoi il s'était détourné par désir de vengeance. A présent, il était temps de rattraper le temps perdu.
— Arrête de te biler, Sas'ke ! Et voilà les plats de résistance ! s'enthousiasma l'Uzumaki, le regard tourné vers l'objet de ses désirs.
Celui-ci progressait lentement vers eux, auréolé de douces vapeurs et du blanc du tablier que portait la serveuse. Il en eut l'eau à la bouche.
— Je ne me bile pas, idiot.
Les bols fumants furent déposés devant chacun d'entre eux, et après un 'Bon appétit !' chaleureux, la jeune femme les quitta rapidement. Ils attrapèrent leurs baguettes, les séparèrent et entamèrent leur repas. Cette fois-ci cependant, les babillages enthousiastes du blond rompirent définitivement le silence qui les avait accompagnés jusque-là, ce qui les fit tous sourire. Les choses étaient enfin revenues à la normale et leur complicité n'avait en rien été entachée.
Sakura fut pourtant surprise lorsqu'à un moment, alors qu'une de ses mains était posée sur sa cuisse, elle sentit une autre main la saisir et la serrer brièvement. Elle la fixa quelques secondes, interloquée, avant de remonter le bras qui se rétractait, pour observer le coupable qui ne lui adressa qu'une œillade mystérieuse avant de reporter son attention sur leur ami, occupé à raconter elle-ne-savait-plus quelle aventure. Ses joues rosirent et elle baissa la tête vers son bol pour masquer sa gêne. L'ambiance presque festive de la tablée rendait pourtant sa tentative presque inutile. Personne ne remarqua ni le geste, ni sa propre réaction à cela. Et puis, pourquoi quelqu'un aurait-il réagi ? Il n'y avait presque rien à dire et puis, Sakura avait toujours été amoureuse de Sasuke. Ce dernier n'avait jamais semblé lui retourner ses sentiments et avait toujours affiché une certaine indifférence, voire du mépris, vis-à-vis d'elle, mais peut-être s'était-elle trompée.
De toute façon, les choses n'étaient plus tout à fait comme avant.
