Le retour à Konoha se fit sans encombre, et le passage dans le bureau de l'Hokage ne fut qu'une formalité. Les deux amis le quittèrent donc rapidement avec bonne humeur pour se rendre à Ichiraku et profiter d'un repas bien mérité. Sur le chemin, ils croisèrent Sasuke qui ne les avait pas encore remarqués, occupé à regarder des légumes sur un étal du marché. Naruto le héla avec enthousiasme alors que Sakura perdit son sourire, tandis qu'une idée la frappait soudain.
Elle avait à peine pensé à lui.
Ils avaient effectué leur mission comme ils en avaient l'habitude depuis ces derniers mois et, s'ils avaient parfois discuté de celles effectuées avec leurs anciens équipiers, Yamato et Sai, ainsi qu'avec Kakashi, ils n'en avaient presque pas fait de même avec lui. Ils l'avaient surtout évoqué sur des sujets plus privés, et essentiellement à l'initiative de Naruto, qui ne comprenait pas qu'ils ne fussent pas déjà en couple. Sans doute était-ce normal, après tout – ils n'étaient encore que de jeunes genins, à l'époque, et celles qu'on leur attribuait alors n'avaient rien à voir avec celles qu'ils traitaient désormais. Ils étaient plus grands, presque adultes. Et Sasuke avait manqué tout cela. Il n'avait pas été là durant toutes ces missions et, malgré ce qu'en disait et ce que voulait croire Naruto, ils s'y étaient habitués. Ils savaient à peine ce que cela faisait de faire équipe avec le Sasuke actuel ; ils n'avaient lutté ensemble que durant la bataille finale, contre Madara et les autres. Ils s'étaient accrochés à l'image de leur ancien équipier, celui de treize ans, et de l'équipe de cette époque, mais la vérité la frappait avec d'autant plus de violence : cette équipe-là n'existait plus. Elle avait volé en éclats le jour où Sasuke était parti, et même s'il était revenu, ce n'était plus tout à fait la même chose, même si c'était officiellement le cas. Il lui faudrait également reprendre sa place dans leurs esprits.
Mais le problème n'était pas seulement là. Toute en joie des moments passés avec Naruto, elle avait à peine pensé à lui, même en tant qu'ami, et n'avait pas réellement regretté son absence, ou très peu. Là encore, elle pouvait se cacher en prétendant qu'elle avait eu beaucoup de travail, ce qui était vrai, et qu'elle n'avait pas eu le temps d'y penser, mais c'aurait été mentir que d'affirmer cela. Il avait occupé ses pensées ; cependant, comme à l'époque où il était absent et qu'elle regrettait leur passé, c'était davantage de manière inconsciente, comme lové dans un coin de son esprit pour éclore de temps à autre. Le fait qu'il fût là, désormais, avait chassé cette appréhension, cependant cet automatisme était resté. Elle pensait à lui mais s'était tant habituée à son absence qu'elle peinait à réaliser pleinement que Sasuke était de nouveau parmi eux. Un nouveau quotidien s'était établi entre Sakura et Naruto où l'Uchiha ne figurait pas.
Sakura força ses lèvres à redresser ses lèvres en un sourire crispé lorsque Sasuke s'approcha, un panier de courses à la main. Seuls ses yeux exprimèrent une certaine surprise, mais elle se dissipa vite ; un mince sourire se dessina sur son visage et traduisit son plaisir de les revoir, de même que l'éclat dans son regard.
– Je ne pensais pas que vous reviendriez si tôt.
– Et tu pensais qu'on arrivait quand ? s'offusqua faussement Naruto, avant de se pencher vers le contenu du panier, intéressé. Alors, qu'est-ce que tu as –
Il se figea d'horreur. Des légumes frais ! Il recula abruptement. Son attitude intrigua Sakura qui se pencha à son tour.
– Tu fais la cuisine, maintenant ? s'étonna Naruto, les yeux écarquillés.
Sasuke haussa les épaules.
– J'essaie de m'y mettre.
– Je ne vois pas où est le problème, Naruto, fit Sakura en haussant un sourcil. C'est très bon, les légumes – tu devrais en faire de même.
Remarque d'autant plus pertinente que les réserves alimentaires du blond, lorsqu'elles étaient présentes, étaient constituées essentiellement de nouilles préparées et déshydratées.
Celui-ci renifla avec dédain.
– Je ne le nie pas – c'est très bien avec les nouilles.
– C'est très bien seuls, aussi, rétorqua-t-elle en roulant des yeux. Ou avec du riz, ou d'autres céréales.
Elle savait qu'essayer de pousser le blond à varier son régime alimentaire était une cause vouée à l'échec, mais elle ne perdait pas espoir. Un jour, peut-être, se rendrait-il compte que les nouilles n'étaient pas la vie, bien qu'il le criât sur tous les toits, et qu'il pouvait manger bien d'autres choses, plus saines, qui fussent tout aussi bonnes voire meilleures – mais ça, même s'il s'en rendait compte, il ne l'avouerait jamais, l'adepte de nouilles qu'il était en serait incapable à jamais. Ce n'était pas que la nutrition fût un critère absolu pour la jeune fille – l'idée des régimes l'avait quittée avec le départ de Sasuke, quand elle avait révisé ses priorités et jugé cet effort dérisoire. Cependant, Naruto était dans l'exact opposé et, entre les deux, il existait un sacré milieu.
– Et tu les prépares avec quoi, toi ? demanda ce dernier à son ami, intrigué.
Celui-ci se mordit la lèvre, comme pour retenir un rire. Cela les intrigua davantage.
– … Des nouilles.
Naruto s'esclaffa tandis que Sakura se frappait le front.
– Vous êtes irrécupérables, souffla-t-elle, augmentant les rires du premier sous l'œil amusé du second, mais le ton était gentil. Enfin, je suppose que c'est déjà plus sain de les préparer soi-même que de consommer les variantes industrielles, marmonna-t-elle pour elle-même chose.
Si les deux jeunes hommes l'entendirent, ils ne répondirent pas.
– Alors, votre mission s'est bien déroulée ? fit Sasuke, une fois que Naruto fut remis de son hilarité.
– Super ! s'exclama le blond avec enthousiasme, avant de se reprendre : Enfin, pour ma part je n'ai pas fait grand-chose, il n'y a rien eu sur le trajet ni dans le village, donc –
– Encore heureux ! râla Sakura en secouant la tête, comme elle savait que l'Uzumaki regrettait qu'il n'y eût pas eu plus d'action.
– … Mais sinon c'était cool, on s'est bien amusés ! continua-t-il, presque comme s'il n'y avait eu aucune interruption.
– Parle pour toi, pour ma part j'ai surtout bossé, grogna-t-elle en croisant les bras, mais son visage démentait le ton maussade qu'elle avait adopté.
– Sauf que tu aimes ça, rétorqua Naruto avec enthousiasme. Et puis, nous en avons quand même bien profité, tous les soirs !
Il était vrai qu'ils étaient rarement restés enfermés dans leurs appartements. Cela n'avait été le cas que lorsque la jeune fille se sentait bien trop fatiguée pour sortir, ce qui leur avait permis d'épargner un peu leurs économies. Bien sûr, ils avaient pris cela en compte dans leurs excursions, mais ils auraient regretté de ne pas avoir davantage profité des lieux. Si sa mission à Suna avait été éreintante, elle n'avait rien de comparable avec le travail qu'elle effectuait à l'hôpital ces dernières semaines. Cela s'était ressenti sur ses horaires ; à Suna, elle avait toujours fini à six heures, voire sept. A Konoha, c'était plus occasionnel, quand la journée n'était pas très chargée. Cette mission avait donc été une vraie bouffée d'air frais, un changement bienvenu dans son quotidien mouvementé mais répétitif.
– … C'est vrai, concéda-t-elle finalement en le regardant s'agiter avec tendresse, tandis qu'il racontait plus en détails leur séjour à leur équipier.
Cette pensée lui fit brièvement perdre son sourire. C'était triste mais la dure réalité : Sasuke avait manqué beaucoup de choses, et continuait d'en manquer.
Puis une autre chose lui sauta soudain aux yeux, tandis qu'elle voyait les deux amis interagir avec familiarité : c'était cela qu'il leur manquait. La complicité. Si elle était présente entre elle-même et Naruto, et entre Naruto et lui, elle ne l'était pas entre eux. Elle ne l'avait jamais été durant la période où ils avaient été genins ensemble, même si elle avait fini par devenir une sorte d'amie pour lui. Du moins elle l'imaginait, pour qu'il l'eût remerciée, ce jour-là… Et ceci était toujours vrai depuis son retour, si récent après que des années se fussent écoulées depuis son départ. Et puis, comment le comparer à Naruto ? Elle-même s'était forgée au cours des derniers mois au travers de son entrainement avec Tsunade puis de tout ce que l'Uzumaki et elle avaient traversé ensemble, des moments de doutes et de douleur durant lesquels ils s'étaient soutenus l'un l'autre. Elle n'avait pas eu l'occasion de partager un centième de cela avec Sasuke. En vérité, son départ avait davantage rapproché les deux équipiers restants. Leur relation était devenue bien plus profonde qu'elle ne l'avait jamais été, et ce grâce à lui, d'une certaine manière. Au détriment de bien d'autres choses.
– Sakura, tout va bien ? s'inquiéta Naruto.
La question la tira de ses pensées et elle s'aperçut que les deux jeunes hommes la fixaient avec désarroi. Sans doute n'en étaient-ils pas à leur première interpellation car Naruto avait la main levée, comme pour l'agiter devant ses yeux. Elle leur adressa un sourire contrit.
– Oui, ça va. Désolée. J'étais dans mes pensées. Vous disiez ?
– Bah, en fait, je continuais de raconter à Sasuke ce qu'on avait fait, et puis je lui ai dit aussi qu'on allait à Ichiraku pour manger, dit Naruto, perplexe, avant de reprendre d'un ton sceptique : Tu es sûre que ça va ? Tu avais vraiment une drôle de tête.
– C'est bon, Naruto, répliqua-t-elle en agitant la main pour balayer la question. Je réfléchissais juste.
– … Ok, lâcha-t-il finalement, avant de croiser le regard de son ami, qui n'était pas plus convaincu que lui. Si tu veux.
Sakura comprit que son excuse n'avait pas été crue, mais elle ne chercha pas à aller plus loin pour autant. Comme ils avaient abandonné, il n'y avait nul besoin de s'y appesantir.
– Et du coup, tu viens manger avec nous ? fit-elle pour détourner le sujet, même si la réponse l'intéressait quand même.
Il était à peine onze heures passées, qu'il eût mangé était donc peu probable. Surtout s'il était occupé à faire ses courses depuis un petit moment, comme le suggérait son panier plutôt bien rempli. Cependant, eux-mêmes étaient affamés suite à leur long voyage et ne désiraient pas tarder.
– Oui, fit-il avant de soulever légèrement son panier pour le désigner. J'ai terminé de toute manière – enfin je pense. Juste le temps de le déposer chez –
– Mais j'ai faim ! protesta Naruto, et son estomac gargouilla de concert comme pour appuyer ses propos. Et ton appart' est super loin !
– … Je suppose que ça veut dire non.
Sakura leva les épaules en signe d'impuissance lorsqu'il se tourna vers elle, puis le duo jauger le dernier avec amusement. Aucun n'était surpris par son intervention.
– Bon, on y va ? s'exclama Naruto en reprenant sa marche, se retournant vers eux pour vérifier qu'ils suivaient.
Ses deux amis lui emboitèrent le pas et après quelques minutes, ils furent attablés devant le comptoir et attendaient. Sakura se retrouva assise entre ses deux compagnons ; et si la discussion allait bon train, en elle-même, un certain malaise régnait alors que ses précédentes réflexions revenaient l'assaillir. Un nœud de culpabilité lui comprima rapidement la gorge et, loin de disparaitre, il lui coupa l'appétit. Lorsque des doigts glissèrent doucement sur sa main, elle la recula violemment avant de se figer. Sasuke la fixait, nonchalant, néanmoins étonné par sa réaction. Elle lui adressa une moue désolée avant de détourner les yeux, gênée et troublée. Ce n'était qu'un simple geste, pas le moins du monde déplacé. Pourtant, bien que Naruto l'eût assurée de ses sentiments pour elle et que Sasuke lui-même l'eût sous-entendu, l'initiative lui paraissait peu naturelle. Inadaptée, peut-être ? Elle se sentait confuse. Tant de questions la hantaient à présent.
Comment pourrait-elle former un couple avec lui dans ces circonstances, malgré la réciprocité de leurs sentiments ?
Naruto ne vit rien de cet instant car son bol venait d'apparaitre juste sous son nez, prétexte pour qu'il se jetât dessus. Eux deux ignorèrent tout d'abord les leurs, l'un fixant l'autre qui fixait son bol sans le voir.
– Je-je suis désolée, murmura-t-elle à son encontre en levant ses yeux vers lui. Je ne sais pas ce qu'il m'a pris, je… je suis désolée, je suis fatiguée et –
– Tu n'as pas à te justifier, je comprends, la coupa-t-il sobrement, le visage lisse mais l'air compréhensif. Je-je suis désolé pour ça.
Puis il se retourna vers son bol et se mit à manger à son tour, et Sakura se mordit la lèvre en se maudissant intérieurement. Même s'il ne le montrait pas, elle devinait qu'elle l'avait blessé. Et elle s'en voulait d'autant plus qu'il faisait de réels efforts pour essayer de montrer ses émotions après avoir passé tant d'années à les étouffer et à s'efforcer d'en faire abstraction. La gorge nouée, elle pressa brièvement le bras de son camarade de ses doigts, attirant par là-même son attention. Il comprit sa tentative et s'obligea à lui adresser un petit sourire rassurant.
– Ne t'inquiète pas, je ne t'en veux pas. Je comprends vraiment, tu sais.
Sakura acquiesça, bien que la boule dans sa gorge fût loin d'être dissipée. Cependant, ils reprirent leur repas. Mais s'il avait manqué le geste, Naruto était loin d'être sourd, et ce malgré son repas. Les deux autres, plongés dans leurs pensées, ne s'étonnèrent même pas de son silence anormal ; et lui les fixait, attentif et songeur en même temps.
Revenait la désagréable impression que quelque chose n'allait pas, que quelque chose avait changé sans qu'il sût quoi ; quelque chose qui lui échappait.
oOo
– Je ne dérange pas ?
– Sakura ? Bien sûr que non, entre !
Sakura sourit timidement à son amie avant de pénétrer à l'intérieur de son appartement, et celle-ci referma la porte derrière elle. Elles gagnèrent presque immédiatement le salon ; l'appartement était d'assez petite taille mais était bien aménagé, de sorte que l'espace offert était assez confortable. Ino louait ce loft depuis plusieurs semaines, ayant décidé de prendre une certaine indépendance depuis la guerre, ce que ses parents comprenaient. La perte de son sensei puis de plusieurs de ses camarades, en particulier Neji, l'avaient fortement ébranlée et l'avaient fait mûrir plus vite. Trop, peut-être. Comme eux tous. Aucun d'entre eux n'y avait échappé mais les événements les y avaient forcés. Cela était devenu une nécessité.
A présent que la guerre se trouvait derrière eux, il leur était un peu plus difficile de retourner à une vie plus commune. C'était étrange de voir le monde à travers le prisme de la guerre ; tout paraissait différent, alors que de nombreuses choses n'avaient pas changé.
– Alors, pourquoi es-tu venue ? demanda Ino en l'invitant d'un geste à s'asseoir.
Sakura prit place sur le petit canapé bleu et usé, mais encore très confortable, tandis qu'Ino se tournait vers la cuisine ouverte dans le but de faire du thé.
– Pas que cela me gêne, hein ! s'empressa-t-elle d'ajouter tandis qu'elle mettait l'eau à chauffer.
– Je ne m'inquiète pas à ce sujet, tu me l'aurais dit si c'était le cas, répondit Sakura d'un ton tranquille en s'enfonçant davantage entre les coussins moelleux. Tu veux que je t'aide ? s'inquiéta-t-elle soudain en se redressant brusquement, hésitante.
– Non, ce ne sera pas la peine ! Et puis tu es mon invitée !
– Ce n'est pas tout à fait exact, je me suis plutôt invitée, répliqua-t-elle avec une moue sceptique, mais elle se laissa tout de même aller sur son support.
Ino revint avec une boite contenant les sachets de thé ainsi qu'un ramequin rempli de morceaux de sucre et des cuillères. Une fois tout cela disposé sur la table basse, elle retourna au bar pour fouiller dans ses placards et répartir des gâteaux dans une large assiette.
– Alors ? insista celle-ci, bien que concentrée sur sa tâche.
Sakura s'humecta les lèvres en songeant à la question de sa venue. Cela faisait plusieurs jours que le problème lui trottait dans la tête et qu'elle ne cessait de se morfondre à ce sujet, sans réellement en comprendre la raison. Finalement, elle s'était dit que, peut-être, se confier à quelqu'un l'aiderait à y voir plus clair – et qui de mieux pour cela que sa meilleure amie ?
Leur rivalité n'avait plus lieu d'être depuis longtemps, depuis qu'Ino avait abandonné la perspective de former un couple avec Sasuke. A vrai dire, à présent, Sakura doutait que cela serait resté si cela n'avait pas été le cas. Une telle compétition lui semblait dérisoire, désormais.
– Je… je voulais te parler de quelque chose.
– De quoi ? fit Ino, curieuse, en posant l'assiette sur la table.
La bouilloire ne tarda pas à sonner lorsque l'eau fut à température, et elle dut donc interrompre son observation pour retourner verser l'eau dans les tasses et les ramener avec elles, ce qui accorda quelques secondes supplémentaires à la rose pour réfléchir à la manière dont elle devait introduire le sujet. Elle fut extirpée de ses pensées par une tasse fumante qui apparut soudain devant son nez. Elle leva brièvement la tête vers son interlocutrice qui trempa son sachet de thé, et elle en fit de même. Mais elle sentait le regard peser sur elle ; alors tandis que le tout commençait à infuser, elle se décida à se lancer :
– C'est à propos de… de Sasuke et de moi. Surtout de moi, en fait. Je… je crois qu'il y a un problème.
– Quoi, comment ça ? s'inquiéta aussitôt son amie, les yeux agrandis de surprise.
Tout le monde les voyait ensemble, après tout. Ils passaient pour LE couple de leur promotion. Comment avaient-ils pu être assurés des sentiments de l'Uchiha à son égard ? Elle n'en avait aucune idée ; elle-même ne s'en était jamais doutée auparavant.
Alors elle lui expliqua tout : ses doutes, cette sorte de distance qu'elle percevait entre eux, cette complicité qui leur manquait, ses habitudes de vie qui ne l'incluaient pas dans leur équation. Ino ne prononça pas un mot, comme Sakura peinait à trouver les siens. A mesure qu'elle parlait, le visage de la blonde se tordait sous le désarroi. Finalement elles en oublièrent leurs tasses qui infusèrent trop longtemps. Lorsque Sakura y trempa les lèvres, une fois ses explications achevées, elle grimaça de dégoût à cause de l'amertume de la boisson, qui n'était pas seulement dû à l'oubli du sucre. Elle pensa à la jeter mais, peu ravie de gâcher, elle décida de mettre un morceau de plus pour tenter de le rendre buvable. Ce ne fut pas une grande réussite mais il y eut une certaine amélioration.
Puis elle garda le silence, attentive à la réaction de son amie. Celle-ci, troublée, ouvrit la bouche quelques secondes sans qu'aucune parole n'en sortit, puis elle bégaya quelques instants avant de parvenir à lâcher :
– Je… je ne sais pas quoi te dire, vraiment… Peut-être – peut-être que… ce n'est qu'une mauvaise passe et que – enfin, tu vois, après tout ce que nous avons vécu, la guerre, les morts… comme une sorte de… de baby blues ?
– De baby blues ? répéta Sakura, hébétée, avant de réfléchir à ces propos.
L'idée la laissait sceptique et en même temps… pourquoi pas, après tout ? Peut-être que, comme elle disait, ce n'était qu'une mauvaise passe ; après tout ce qu'ils avaient enduré, ils avaient un peu de mal à retrouver une vie normale. Peut-être que le problème dans sa relation avec Sasuke venait de là ? Après tout, ce n'étaient pas ses sentiments qui manquaient à l'appel ; il y avait autre chose. Et peut-être que cette chose trouvait son origine dans les événements tragiques qu'ils avaient traversés.
– Tu as peut-être raison, concéda-t-elle finalement en trempant une nouvelle fois ses lèvres dans le liquide ambré, pour prendre une autre gorgée. Peut-être que ça me passera.
Du moins, elle l'espérait.
