Hey !

Bon, en vrai je vais sans doute faire de ce recueil un fourre tout NaruSasu, parce que plus j'avance dans ma relecture des mangas, plus j'ai désespérément envie de lire et faire des trucs sur eux. Je pensais pas qu'on pouvait autant s'enflammer pour un OTP vieux de dix ans. Wow.

Et du coup, c'est encore écrit dans le cadre des nuits du FoF - la 134e ici - sur le thème Clarté.
Ce texte est dans la continuité du précédent ! J'aurais du mal à dire s'il peut être lu à part, mais je pense que ça devrait aller ?

(Oh, et TW enfin de page !)

Merci à Ayame pour sa review sous l'OS précédent !

Bonne lecture !


Résumé : Il pensait qu'aimer, être aimé, ça suffirait. Que ça changerait quelque chose.
Rating : T
Genre : Humour/Romance/Drama.
Univers : UA

Personnages : Sasuke.
Pairing : SasuNaru.


A l'ombre d'un lampadaire

.

Il claque la porte de sa chambre plus qu'il ne la ferme. De toute façon, personne n'entendra le cri du bois qui cogne contre les murs de la maison. Pas de parents pour le reprendre, et pas de frère - il ricane salement - pour venir le trouver dans sa tanière. Il est seul.

Seul.
C'est ce qu'il voulait, sans doute. C'est pour ça qu'il a abandonné l'alcool et la musique, et Naruto. Pour une piole vide que la nuit a envahie.

Il n'est pas content. Pas satisfait. Même pas apaisé.

Dans l'ombre silencieuse, il s'adosse, se laisse glisser, accueilli par le sol froid. Le désordre. Les étoiles pointent par la fenêtre. L'unique lampadaire qu'il aperçoit offre un filet de clarté. Une lueur timide, discrète, qui redessine la silhouette de son désordre éparpillé. Les livres qui ne sont plus qu'une pile noire, les vêtements abandonnés rassemblés comme des cadavres de fourrure, des animaux morts tapis dans l'ombre, qui l'observent. La masse difforme d'une couverture ramassée, sans relief. Un aplat terne auréolé du bronze sale que la lumière des rues crache.

Le dos d'une chaise de traviole, et le col d'une chemise jetée par-dessus qui se dresse, vainement, dans le paysage.

Son sac dans un coin. Entrouvert.

Un bic qui traine par terre et plus loin son bouchon.

L'or et le noir se mélange. Effacent les autres couleurs.

Sasuke contemple ce reflet de lui-même.

Il est deux heures, peut-être. Est-ce que Naruto est encore chez Kiba ? Est-ce que la musique cogne encore, là-bas ?

Ici c'est le silence. Mais sa propre respiration lui vrille les oreilles. Il la sent qui glisse, remonte derrière ses narines alors que son torse se gonfle. Il s'entend. Il ne se supporte pas.

Ce n'est pas nouveau.

Cette colère idiote qui l'a ramené chez lui sonne comme un caprice d'enfant. Il espère que Naruto ne lui en voudra pas. Qu'il le rejoindra, comme prévu. Comme après chacune de leur dispute. Il va lui pardonner, rire - puisque c'est tout ce qu'il sait faire, rire, même quand il faudrait pleurer, il est triste en riant - s'installer près de lui et dire, comme une évidence, C'est pas grave. Rien n'est jamais grave, avec lui.

Il n'a même pas pris la peine de se retourner alors qu'il s'éloignait. Aucune idée de la tête que l'autre a tirée. Un truc triste, sans doute. Une expression de peine qu'il cache sous un sourire forcé.

Sasuke serre les poings. Il ne sait pas pour qui est cette colère qui siffle dans son ventre.

Il ramène ses genoux contre lui pour mieux y poser la tête.

Sur le lit défait, il imagine le corps de son petit ami - c'est encore son petit ami, hein ? - endormi. Il voit comme la clarté délicate caresserait sa hanche pointue, la forme de ses côtes ensevelies sous un vieux pyjama. Les reflets blanc sur son boxer charbon. Sa tignasse éparpillée dans l'ombre. Il n'aurait qu'à se lever pour y passer la main. S'asseoir près de lui, voir l'enveloppe du garçon pencher vers la sienne, trainée par son poids.

Son regard ensommeillé qui s'entrouvre sans comprendre.

Ce serait si simple. Ça devrait l'être. Il aimerait passer la nuit à le regarder et en tirer ce bonheur déraisonnablement simple. Se dire Il est là, tout va bien. Il croyait, au début, que ce serait facile. Qu'il y aurait toujours, quelque part, l'ombre d'Itachi pour ses mauvaises nuits. Peut-être un ou deux cauchemars dans cette longue joie. Mais non.

Ses journées sont toujours d'un bleu triste, et c'est la joie qui fait tâche. La joie qui surgit et l'empêche de s'accrocher aux vieux souvenirs.

Parfois, il passe une bonne journée avec Naruto. Il rit. Il oublie.

Alors il le déteste.

Puis il s'en veut.

Ça fait des années, et ça le bouffe encore.

Itachi, il le sent dans les silences rudes de son père. Dans le regard de sa mère. Ces yeux qu'elle pose sur lui quand il s'attarde trop longtemps dans la cuisine. Il sait qu'elle cherche, mais s'il ne sait pas quoi. Une similitude, peut-être. Un trait qui le rapprocherait de son aîné. Une preuve pour se rassurer, s'assurer qu'il ne déraillera pas, lui. Ou, au contraire, une trace de cette violence que personne n'avait soupçonné chez son frère.

Cette violence.
Elle est là. Elle souffle à l'intérieur de lui, une rage qu'un rien réveille. Elle surgit quand il s'engueule avec Naruto, quand le garçon approche de trop près une Hinata souriante et qu'une jalousie sournoise le pique. Elle est là quand il serre les poings, quand il passe devant ce qui était autrefois la chambre de son aîné, devant une photo de lui. Il croise son regard alourdi par les cernes.

Il se questionne.

Et ça aussi, ça l'énerve.

Pourquoi est-ce qu'il a l'air si fatigué sur les clichés, son frère ? Comment ont-ils pu ne pas le voir avant ? Est-ce qu'ils auraient pu empêcher ça, s'ils s'en étaient rendu compte ? Mais peut-être qu'ils l'ont vu ? Ils l'ont vu, mais il ne voulait pas le voir, alors ils ont fermé les yeux. Les études, ça devait le fatiguer. Ils ont trouvé une excuse parfaite, et ils ont étouffé l'inquiétude.

Peut-être que ça s'est passé comme ça. Il ne sait plus. Ses souvenirs sont flous. Il était petit. Ses parents n'en parlent jamais.

Il se rappelle, en revanche, de la police devant la maison. De ses parents devant la porte, qui lui intiment de rester dans sa chambre. Des questions de l'agent, plus tard. Toutes ces choses bizarres qu'il lui demandait sur son frère.

Il se souvient du visage de Shisui. De cette humilité dans ses sourires. Shisui qui ne parlait jamais que de garçons quand, caché derrière une porte entrouverte, un canapé, Sasuke épiait ces conversations pleines de silence qu'il partageait avec Itachi. Il se souvient aussi du choc, quand il a compris qu'il ne viendrait plus jamais à la maison. De l'horreur, quand on lui a expliqué pourquoi.

Du vide immense. Des réponses qu'il n'aurait jamais.

On lui a dit, oui, pourquoi Itachi a fait ça. Mais il ne comprend toujours pas.

Naruto a raison, sans doute. Il devrait lui rendre visite, aller lui parler. Il s'est renseigné, la prison autorise les entrevues. Mais il n'y arrive pas.

Ça aussi, ça l'énerve.

Et ça afflue, dans sa tête. Les questions.

Pourquoi est-ce qu'il a fait ça. Tuer. Tuer parce que… Pour quelque chose qui le concerne, lui aussi. Lui et Naruto. Est-ce qu'Itachi l'aurait détesté, s'il avait su ? S'il sait ? Qu'est-ce qu'il dirait, s'il devait passer la porte de la maison pour le retrouver affalé sur le canapé, un Naruto somnolant allongé sur son torse, une main égarée dans sa tignasse ? Est-ce qu'il aurait ce regard méprisant qu'il lui imagine sans jamais l'avoir vu ? Ce rictus tordu qu'ont parfois les gens au lycée ? Ces mots sales dans la bouche ?

Qu'est-ce qu'il en penserait ?

Et lui ? Est-ce qu'il serait capable de faire la même chose ? De glisser ses mains froides autour d'un cou familier et de serrer, d'insuffler dans un corps toute cette colère jusqu'à ce que l'autre cède ? Jusqu'à ce qu'il ne bouge plus ?

Est-ce qu'il pourrait déraper, un jour, sur une énième dispute ?

Il imagine Naruto. Son grand sourire, ses yeux francs. Et puis, sous son visage, ses propres mains. Ses doigts qui se rejoignent derrière sa nuque et-

Non.

Non, il ne ferait jamais ça. Il veut le croire.

Mais peut-être qu'Itachi le croyait, lui aussi. Peut-être qu'il ne se pensait pas capable d'une chose pareille.

Peut-être qu'il la prémédité.

Ou peut-être qu'on lui ment. Qu'il y a une vérité que personne ne sait. Qu'on a inventé toute cette histoire comme une couverture pour la recouvrir.

Des milliers de peut-être.

La première fois qu'il a embrassé Naruto, il pensait que sa lumière les dissiperait. Qu'il l'accompagnerait sur un nouveau chemin. Mais non.

Naruto est semblable à cette clarté qui pénètre sa chambre. Une lueur tendre qui souligne les ombres. Les étire.

Une lueur, ça ne sauve pas. C'est là, ça éclaire ses mains. Mais ce n'est jamais qu'une couleur sur sa peau. Une brève chaleur. Rien qu'il ne puisse attraper. Retenir.

C'est là, et bientôt, ça se dissipera.

Sasuke soupire. Il ramène ses mains contre lui. Appuie son front contre ses genoux.

Plus de lueur.

Il en veut à Naruto, de profiter de ce bonheur qu'il n'arrive pas à partager. Cette joie qui le touche, parfois, qui lui fait oublier une histoire à laquelle il se raccroche aussitôt. Il l'aime, et il lui en veut, et c'est injuste.

Mais la colère et la justice sont deux notions bien différentes.

Il ne comprend pas ce qu'il ressent. Et s'il ne comprend pas, c'est sans doute qu'il n'y a rien à comprendre. Que c'est comme ça, qu'il n'y peut rien.

Il espère, malgré tout, que Naruto va le rejoindre. Il guette le grincement de la porte d'entrée. Un bruit de pas qui remonterait les escaliers, glisserait dans le couloir jusqu'à sa porte. Un toc bref contre le battant. Un murmure. Son nom sur sa bouche.

Il attend.

Il devrait peut-être lui envoyer un message pour s'excuser.

Peut-être.


(TW : meurtre, homophobie)

Voilà ! J'ai encore des idées pour eux, donc je vais sans doute poster d'autres trucs dans les jours à venir.

Vos avis ?