Hey !

Bon bon, encore une fois j'ai corrigé le chapitre en une journée. Mais cette fois il fait juste 4k mots donc ça va. Mais mon dieu faut que je me bouge. Tout est de la faute de TWEWY. Et du travail. On devrait abolir le travail.

(TW en fin de page)

Merci à Lae et à Mijoqui pour les reviews ! Elles sont toujours aussi chouettes à lire.

Bonne lecture !


Le pacte

.

– Vous êtes prêts ?

Un bref échange de regard. Sora et Riku cherchent l'un chez l'autre l'approbation qu'il leur faut. Le courage pour chasser le doute.

– Oui.

– Ouais.

– Ce n'est pas une décision sans conséquences, vous en êtes conscients ?

Un hochement de tête.

Conscient, Riku ne sait pas. Il pense qu'il n'a pas d'autre option - pas d'autre option qui lui plaise - et que celle-là lui convient. Parce que c'est Sora qui est assis là, près de lui, partagé entre la peur et l'excitation. Et qu'il n'a jamais autant eu confiance en quelqu'un. La vie, près de lui, s'écoule sans encombre.

Oui. Quoi que ce pacte implique, il accepte de le nouer.

Mais il n'en reste pas moins curieux.

– Si vous avez des questions, c'est le moment de les poser.

Alors il se jette à l'eau.

– Le lien, il commence. Il dure à vie ?

Sora lui a déjà dit non. Mais Sora est filou, et deux avis valent mieux qu'un.

– Non.

Bien.

Elle plisse les yeux. Riku sent qu'on le jauge, et il n'aime pas ça. C'est comme une épreuve invisible dont il ne saurait les enjeux. Un test sans question. Il ne sait pas quelle est la bonne réponse.

– Pour autant, vous ne devez pas prendre ce pacte à la légère. C'est loin d'être anodin. Un lien, même réversible, a ses conséquences.

– Je sais. C'était juste une question.

Mince. Maintenant, elle va croire qu'il agit au hasard. Et elle n'aura pas tout à fait tort. N'empêche qu'il est sûr de son choix, et qu'il ne compte pas revenir en arrière. Quand bien même il ne resterait pas ici sur le long terme, il continuera de fréquenter Sora. C'est un ami comme on en rencontre peu. Il se sait capable de le supporter sur le long terme

– Bien.

Elle se tourne vers le "jeune" vampire, et son visage se détend. Riku retrouve la jeune femme qui l'a accueilli il y a deux jours, aux portes du manoir. Un sourire maîtrisé teinté de rouge. Il remarque, cette fois, le mascara qui alourdit ses cils.

Donc, les buveurs de sang aiment le maquillage.

– Un pacte ne vous oblige pas à passer le reste de votre existence l'un près de l'autre. Mais éviter de trop vous éloigner. Vous devez mutuellement vous nourrir et vous protéger, et ces deux tâches ne pourront être remplies que si vous êtes au même endroit.

– Est-ce qu'on va devoir échanger notre sang, ou un truc de ce genre ? le gris demande.

– Oui. On ne peut pas lier deux personnes autrement que par le sang, pour un contrat de ce type.

La fraîcheur des catacombes le fait frissonner. Il a l'impression d'être au rayon yaourt du Carrefour du coin, la lumière et la nourriture en moins. Ici, pas de quoi grailler. Enfin, rien qu'il ne puisse manger. Pour les deux créatures, c'est une autre histoire.

Dans ce carré de pierres grises, il n'y a qu'une trouble lumière qui danse, perchée sur une bougie dans le dos de la vampiresse. Une lumière fragile qui fait des ombres instables sur les murs. Comme un labyrinthe tordu.

Pas de tableau ni de rideaux, à peine une table dans un coin. Aucun miroir. Des parois de pierres nus comme les planches d'un cercueil. Un cercueil dissimulé sous terre, là où personne ne peut les entendre.

Est-ce que ce sera douloureux ? Peut-être qu'ils vont crier. Ça expliquerait le choix du lieu.

– Et on fait ça comment ? Sora lance.

Il n'est pas plus avancé que lui. Riku a toujours du mal à croire qu'en il ne sait combien d'années d'existence, il n'a jamais pris de familier. Le brun est tellement impulsif, spontané. Et de ce qu'il a compris, il est gourmand. Sûrement du genre à ouvrir le frigo en douce à deux heures du matin, du temps de sa vie d'humain. Sauf qu'au temps où il était humain, les frigo n'existaient sans doute pas.

– On va utiliser un réceptacle.

– Un réceptacle ?

L'ébouriffé fronce les sourcils.

– Une troisième personne ?

– Non.

Aqua rit, et l'ombre de la pièce s'allège un instant.

– Ce serait trop encombrant. Il faut un objet que le familier puisse garder en toute circonstance.

Riku pense aussitôt au pendentif de Larxene. Il remarque le cou vierge de la maîtresse de maison. Aucune trace d'un potentiel bijou du même genre. Il sera le seul à en porter, donc.

– Je pourrai pas l'enlever ?

– Si, mais tu devras le garder près de toi.

Elle leur tourne le dos et tend la main vers la table.

– Tu peux le retirer tant que tu ne t'en éloignes pas, pour te doucher ou pour dormir. Mais je le te déconseille.

– Pourquoi ?

– On ne sait jamais.

On ne sait jamais quoi ? Elle a peur qu'il le perde ? Il est tête en l'air, mais quand même. Il lui reste de la marge, avant d'atteindre le niveau de Sora.

Mais on pourrait aussi le lui voler. Même s'il ne voit pas qui pourrait en avoir l'utilité. Remarque, pour le peu qu'il sait au sujet des vampires et de leurs pratiques, il ignore sans doute la plupart des dangers qui le guettent en ce moment même. Mieux vaut jouer la carte de la prudence.

– En soit, les vampires n'ont pas besoin de contrat pour mordre un humain, elle explique, alors qu'elle s'affaire. De même qu'un humain n'a pas besoin d'être lié à l'un des nôtres pour accepter ce genre de relation.

Il la voit tracer des lignes dont il ne peut deviner le résultat. Sa main s'applique, fait des cercles qu'elle fend. Ses yeux se plissent, comme elle se concentre sur son tracé. A quoi servent les dessins qu'elle trace sur la table ? Est-ce que c'est de la magie ? Une forme de malédiction ?

– A l'origine, ces contrats n'existaient pas. C'est nous qui les avons développés.

Alors que Sora lâche des soupirs impatients, Riku avale les mots d'Aqua. Pas de contrat au début. Donc, il y avait déjà des humains prêt à nourrir les vampires avant que le concept de familier n'apparaisse ? Pourquoi les choses ont-elles évolué ?

Il regarde son ami, du coin de l'œil. C'est lui qui lui a parlé de cette histoire de lien. Lui qui a proposé d'en tisser un, avachis dans son lit d'étudiant, son poignet abandonné près de ses doigts sur les draps mous.

– Pourquoi ?

– Parce que les règles qui régissent ce manoir n'ont de valeur qu'ici. Sorti de ces terres, chacun suit son propre code de conduite.

Il croit comprendre.

– Tous les clans ont leur propre règlement ?

– Oui. Il existe des impératifs sur lesquels nous nous sommes tous mis d'accord, mais pour le reste, chacun s'organise à sa manière.

Elle se retourne à nouveau vers eux. Dans sa main, une petite bouteille que Riku reconnaît sans mal. Du désinfectant.

– Là d'où nous venons, les vampires se volaient mutuellement leur réserve de nourriture. Quand ils n'achevaient pas eux-mêmes de leur garde-manger.

– Volontairement ?

Il a froid. A l'intérieur.

– Pas toujours, elle reprend. Un vampire assoiffé perd facilement le contrôle, surtout s'il est jeune.

Pas toujours. Donc, ça arrivait. Évidemment, à quoi il pensait ?

Comme elle parle, Riku réalise qu'il ne sait finalement pas grand chose au sujet des vampires. Il a toujours soigneusement évité d'interroger Sora à ce sujet. Ce n'est pas tant qu'il avait peur, mais c'était trop... trop. Tellement étrange, familier et pourtant si différent des légendes qu'il connaissait.

Peut-être, aussi, qu'il ne voulait pas voir cette part de lui. Cette facette qui les éloignait. Il y a trop de questions à poser, et il n'est toujours pas sûr d'en aimer les réponses.

– C'est un des avantages du pacte.

Aqua ouvre la main et découvre un minuscule récipient transparent. Long.

– Si jamais Sora dérape, il le sentira. Même si je doute que ça arrive un jour, elle s'empresse d'ajouter.

Il espère. Sora aussi, vu l'ombre qui passe sur son visage.

– Ça ressemble à quoi ?

Riku s'étonne de lui découvrir une voix si peu assurée. Un timbre d'enfant.

– Ce que tu ressens, quand tu mords Larx, il précise.

– C'est loin d'être désagréable, si c'est ce qui t'inquiète.

Elle s'adoucit encore.

– Ce n'est pas douloureux. C'est plutôt comme une alarme dans ta tête, qui s'amplifie quand tu dépasses une certaine limite.

– Je vois.

– Ne t'en fais pas. Ça fait longtemps qu'il n'y a pas eu d'accident, ici.

Riku voudrait bien savoir ce qu'elle entend, quand elle parle d'accident. Est-ce que c'est une manière subtile d'évoquer les cadavres d'humains qui dorment sous le manoir ? Il n'a pas vu de cimetière, dans le coin. Que doit-il en déduire ?

– Le lien sert aussi de contrepartie, pour l'humain qui décide de se lier à un vampire, elle ajoute en récupérant la fiole. C'est une forme de protection.

– Je vois.

– Si tu es en danger...

– Sora le sentira.

Elle hoche la tête. Sourit. Comme si sa réponse lui apportait une forme de fierté.

– C'est ça. Dans le temps, ça permettait d'éviter que les clans ennemis ne viennent voler dans les réserves de leurs adversaires. Et c'était une garantie de survie de plus pour les humains. Mais ici, c'est juste une précaution supplémentaire.

Il l'approuve d'un geste de la tête. Pas qu'il ne leur fasse pas confiance - quoique, si, c'est un peu ça - mais il ne crache pas sur une protection de plus.

Deux yeux jaunes lui reviennent en mémoire, comme un coup fantôme au creux de l'estomac.

Est-ce que Sora le sentira, s'il croise à nouveau Vanitas ?

– Vous êtes toujours sûrs de votre décision ?

Silence. Encore, un regard entre eux. Une dernière question qu'ils ne se posent pas. Riku sait que c'est important pour Sora. Ce lien. Et c'est sans doute pour ça qu'il trouve des restes de peur au coin de ses yeux.

Sans la toucher, il approche sa main de la sienne.

– Oui.

Une seule réponse, une seule voix.

Son cœur cogne. C'est le même sentiment qui l'a pris au moment de découvrir les résultats du bac. Une peur pleine d'excitation. L'impression qu'il y avait là, à portée de main, quelque chose d'immense qui l'attendait.

C'est un grand pas dans sa vie, un tournant. Et il le prend. Sa main près de celle de Sora, il avance

– Alors on va pouvoir commencer, Aqua déclare.

Elle pose le désinfectant sur le bord de la table, se saisit d'un coton. Hésitant, Riku regarde vers son ami. Mais il comprend vite qu'il est le seul, ici, qui aura l'utilité du produit.

Il remonte la manche de son sweat, serre les dents en notant la lame qui s'est taillée une place dans la main de la vampiresse. Mais non. Il ne va pas se laisser intimider par une petite coupure. Sa fierté parle pour lui alors qu'il lève le poing dans sa direction.

Sur sa peau, le frottement du coton est léger. Froid.

L'odeur qui s'en échappe lui rappelle celle de l'hôpital.

xoxoxox

Une fatigue de mille ans écrase brusquement les épaules d'Aqua. Et pas sûr qu'elle puisse l'attribuer aux seuls talents de la main de Larxene, si habile soit-elle avec ses doigts.

– Wow. J'assure plus que d'habitude, ou c'est la séance de spiritisme qui t'a vidée ?

– Ce n'est pas du spiritisme.

– Ouais, je sais.

Elle soupire. Pour cette question, il n'y a pas de bonne réponse. Oui, le rituel lui a pris une partie de ses forces. Elle ne cracherait pas sur une longue journée de repos dans son cercueil, d'ailleurs. Ça fait un moment qu'elle ne s'est pas ressourcée. Mais elle ne peut pas laisser le manoir sans surveillance. Ça attendra le retour de Xemnas.

Près d'elle, la blonde essuie ses doigts collants sur les draps. Aqua roule pour la regarder. Elle observe, alanguie, la courbe de sa poitrine qui disparaît derrière son dos. Le cordon de son collier suspendu à sa nuque. Ses cheveux lâchés dessinent des soleils tordus sur son oreiller. Si elle passe sa main dedans, est-ce qu'elle sentira la résistance des nœuds qui s'y sont formés ? Comment les dénouer sans risquer de lui faire mal ?

Elle ne voudrait pas lui arracher une touffe par accident.

– Ça s'est bien passé ?

– Oui. C'est un rituel basique, rien de bien méchant.

– Alors pourquoi tu t'inquiètes ?

Aqua soupire.

– Je ne m'inquiète pas.

Et Larxene l'imite. Elle grille toujours quand elle ment. A tel point que, parfois, elle se demande si la nymphe ne trouve pas le chemin de ses pensées au moyen du réceptacle qu'elles partagent. Bien sûr, elle sait que c'est impossible. Mais quand même.

Deux grands yeux bleus se plantent sur elle, et elle détourne les siens.

– Arrête, t'as mis genre, vingt minutes à jouir. T'es plus rapide que ça, d'habitude.

– Parce que tu chronomètres ?

– Non, mais je pourrais.

Elle dit vrai, et elle irait sans doute jacasser sur le sujet avec les autres familiers. Elle n'a que ça à faire pour s'occuper, ici. Aqua n'est pas dupe, elle se doute bien qu'une partie de leur vie sexuelle arrive aux oreilles des autres habitants du manoir. Mais quand même. Elle pourrait être un peu plus discrète.

Et pourtant, si elle l'était, elle ne serait plus Larxene.

– Qu'est-ce qui te prends la tête ?

– Le nouveau.

– Riku ? On a causé la dernière fois, pendant le petit dej'.

Aqua se redresse. Ça, elle ne le lui avait pas dit. Pas qu'elle soit tenue de lui rapporter ses moindres faits et gestes, mais la vampiresse aurait préféré savoir. Pas tant par rapport à son humaine que pour Riku, d'ailleurs.

– Il est pas méchant. Franchement, c'est juste un gars un peu paumé qui aime bien Sora. Je doute qu'il se lève un matin et qu'il fonce au village d'à côté hurler partout que les vampires existent.

– Ce n'est pas ce qui m'inquiète.

– Alors quoi ? T'as peur que Sora le bouffe tout cru ?

– Non plus.

Et même si ce serait sans doute un triste accident, elle n'ira pas pleurer pour si peu. Elle en a vu mourir, des humains. Tellement.

Elle voudrait croire que ça ne la touche plus autant qu'avant.

– Alors accouche. Je sèche, là.

Larxene ne peut pas comprendre. Elle ignore ce qui lui saute aux yeux. Cette évidence qui a soufflé sur la pièce, dès que Riku est entré au manoir. Ce petit détail que Sora s'est bien gardé de partager. Ils ont tous su, dès qu'ils l'ont vu. Une pensée commune qui leur a traversé l'esprit. Mais elle, elle ne sait pas. Ne peut pas savoir.

Aqua pense à Ienzo, à Roxas. Eux aussi, ils ignorent. En Riku, ils ne voient qu'un camarade de plus. Un humain qui, enfin, porte le même bijou qu'eux. Même pour les familiers les plus anciens, ils ne savent pas. Ne soupçonnent pas la lourde histoire que ce manoir portait bien avant leur arrivée.

Il y a entre ces murs des légendes qui pèsent lourd.

– C'est une longue histoire.

– Eh quoi ? T'as l'éternité devant toi, tu peux bien prendre deux minutes pour me raconter.

Sottise. Elle n'a pas, non l'éternité pour elle. Les vampires aussi meurent un jour. Au bout de milliers d'années, de lassitude, de la même d'une autre créature de la nuit.

Les vampires aussi, elle les a vu mourir. Mais elle n'a pas l'énergie pour lui expliquer ça.

Il y a une solution plus simple.

– Rhabille-toi.

– J'ai la flemme.

– J'ai quelque chose à te montrer.

Il ne lui en faut pas plus. La curiosité ravive son regard bleu, et elle quitte le lit sur ses longues jambes. Du coin de l'œil, Aqua l'observe qui récupère ses vêtements. Elle renifle son débardeur avant de l'enfiler, sans s'inquiéter de voir ses reins rebondir sous le tissu léger. Ses cuisses glissent dans les deux trous d'un short délavé. Une tenue proche de celle qu'elle portait, le jour où elle l'a rencontrée.

Elle la revoit, plantée au bord de la route, son pouce levé. Un sac jeté en travers de son épaule - et, bientôt, abandonné sur la banquette arrière de sa voiture.

Une chaleur palpitante gonfle en elle comme le souvenir remonte.

De son côté, la vieille jeune femme récupère les habits qu'elle portait avant d'entrer dans cette chambre. Un regard dans la vitre - mais non, son reflet n'est toujours pas au rendez-vous. Elle se demande si les humains inventeront un jour une machine capable de capturer leur image.

– Catacombes ? Larxene lance alors qu'elle récupère son collier.

– Non. Grenier.

– C'est pas le truc où on est pas censé entrer ?

– Si. Alors pas un mot à Xemnas.

Et comme elle prononce son nom, elle pense à celui de leur patriarche. Ce sera déjà compliqué d'annoncer la nouvelle au maître de maison, alors pour l'autre... Elle espère qu'il dormira le plus longtemps possible. Tout l'été, même. Qu'il ne se réveillera jamais.

Sa main tremble. Elle serre le poing.

– Oh. On attaque le gros des secrets de famille ?

– On ne forme pas vraiment une famille.

– C'est tout comme.

Ils sont peu, ici, à partager les liens du sang. Même si certains ne se privent pas d'en échanger.

Mais Aqua a mieux à faire que de perdre son temps sur ce genre de question. Elle les chasse d'un geste de la main. Enfile une paire de chaussettes et quitte la chambre. Comme prévu, Larxene s'avance à sa suite.

– Y a quoi, au grenier ?

– Des vieilleries qu'on a accumulées au fil du temps.

– C'est tout ? Attends, Xemnas va pas nous exécuter pour deux bibelots entassés sous les combles, quand même.

– Ce ne sont pas n'importe quelles vieilleries.

Elles passent le couloir, gagnent une porte qu'Aqua débloque à l'aide d'une clef qu'elle n'avait pas sortie depuis plus d'une décennie. L'objet grince et résiste, mais elle sait y faire.

– C'est tout ? Larxene s'étonne.

– Quoi ?

– Suffit d'une clef pour l'ouvrir ? C'est même pas magique.

– Nous ne faisons pas de...

La jeune femme soupire. Pas la peine de se prendre la tête pour ça.

– Il n'y a pas besoin de plus.

– Vous pourriez péter cette porte les doigts dans le nez.

– L'entrée n'a pas été condamnée pour nous.

Des escaliers en colimaçon. Elle sort son portable pour en éclairer les marches, les franchit sans se presser, que Larxene puisse également profiter de la lumière. Ici, la poussière forme un unique voile qui recouvre et le sol et les meubles qu'elles aperçoivent bientôt, plantées dans les combles. Il ne s'agit là que d'un des différents greniers du manoir, celui de l'aile est. Mais c'est le plus important.

– Wow. Vous venez pas souvent ici.

Elle, non. Elle croyait que Vanitas montait encore, pourtant, la poussière témoigne du contraire.

– J'suis presque sûre que j'étais pas née, la dernière fois que quelqu'un est venu ici.

– Possible.

A moins qu'il ne l'ait pris avec lui ? Non. Elle l'aurait remarqué, depuis le temps. Il est large, impossible de la cacher dans une chambre. Sous un lit, à la limite. Mais quel intérêt aurait-il à le dissimuler là où il ne peut lui-même pas le voir ?

Oh, il aurait pu l'emmener pour la provoquer. C'est possible, et plausible, connaissant le personnage.

– Y a des trucs qui valent cher, ici ?

– Rien que tu ne puisses revendre.

Pas sans que Xemnas ne s'en aperçoive. Et Xemnas, quoique d'un calme olympien, n'est pas un homme clément.

– C'est par là.

Elle avance, regarde autour d'elle. Cherche la fonction lampe torche sur son portable avant de le coincer contre un vieux meuble, pour illuminer le fond de la pièce.

Les toiles d'araignées font des dessins déchirés contre la charpente. Des tâches fragmentées que la lumière blafarde imprime sur les pliures des draps. Leurs maîtresses à huit pattes se sont enfuies, alertées par le bruit des deux visiteuses, mais leur maison de fil penche encore sous le poids des cadavres qu'elles y ont accumulés. Des dizaines de petits insectes morts, leurs corps suspendus au bout d'une tombe aérienne.

Aqua les voit filer du bout de leurs longues pattes. Elle se rappelle les avoir chassées, petites, pour leur arracher les membres. De si petites vies entre ses mains, qu'elle abandonnait au pied des arbres.

– Alors ?

– C'est là.

Elle peut encore renoncer. Mais ce serait mauvais, de jouer ainsi avec la curiosité de Larxene. Et elle aura peut-être besoin d'elle. De son regard attentif, et de la possible amitié qu'elle pourrait nouer avec Riku. Oui, Aqua doit compter sur elle. Même si c'est dur.

Elle empoigne le drap face à elle, inspire. L'odeur de poussière lui rappelle les siècles qu'elle a traversés. Les tragédies auxquelles elle a assisté, les vies qui ont pris fin sous ses yeux. Des univers qui s'évaporaient.

Ces fins du monde.

Elle tire d'un coup sec. Derrière elle, Larxene lâche un juron.

– Oh. Oh putain.

C'est trop tard pour reculer.

– Attend, il date de quand ce truc ?

– D'il y a longtemps.

– C'est...

– Oui.

– Ok. Va falloir que tu m'expliques, là.

Et elle va le faire.

Elle prend une grande inspiration. Mais c'est comme d'agrémenter un feu d'un long jet d'huile.

– Tu peux t'asseoir. J'en ai pour un moment.

Pourquoi faut-il que ces histoires la rendent si fragile ?

xoxoxox

C'est petit. Joli, aussi. Riku aime cette couleur que son sang, mêlé à celui de Sora, ont formé. Un liquide sombre, rouge comme l'ombre compacte d'un vin obscur. Le récipient prend la forme d'un cylindre aux pointes triangulaires, ce qui n'est pas sans lui rappeler certains bijoux qu'il a vu en vitrine. Il le sent fragile entre ses doigts, prêt à se briser au premier choc. Et pourtant, Aqua lui a certifié qu'il ne pourrait pas ne serait-ce que l'ébrécher.

Suspendu au bout d'une chaîne en métal, le réceptacle retombe sur son torse, froid. Au creux de son coude, un petit coton tient par la force d'un cadre de scotch.

Ça y est, c'est fait. Et pourtant rien n'a changé. Il ne se sent pas plus fort. Ses sentiments sont les siens, il ne sait rien de ce qui se passe à l'intérieur de Sora. De tout ce qu'il s'était imaginé, il ne lui reste qu'une vague déception mêlée de soulagement. Non, la vie n'est pas plus extraordinaire maintenant qu'il a lié la sienne à celle d'un vampire. Mais elle n'est pas plus horrible. Et c'est ce qui le conforte dans son choix.

Tout va bien.

Il inspire.

Sora ne l'a toujours pas mordu. Une fois le rituel terminé, il s'est contenté de lui sourire. Comme ça. Il a sans doute besoin de temps pour appréhender leur nouvelle condition ? Mais ça viendra. Est-ce que ça changera quelque chose à leur amitié ?

Une faible vibration traverse le lit. Son portable. Riku l'attrape. Mais il le repose aussitôt, alors qu'il reconnaît le numéro de son père.

Il jette un regard vers les volets enfin ouverts sur une nuit profonde. Au loin, la cime des arbres se mêle au ciel sans couleur. Ne reste que les tâches étoilées pour séparer la terre de cet espace immense. Et le morceau de lune qui se découpe.

Tout semble si profond. Infini. Comme cet avenir inespéré qui vient de s'ouvrir à lui. Une porte qu'il n'avait jusqu'alors jamais remarquée.

Riku songe, distraitement qu'il pourrait rester ici. Abandonner ses études - ou les finir à distance. Oublier l'idée d'un monde semblable à celui qu'il a connu, et vivre au crochet de Sora. Loin de cette société tordue et des angoisses qu'elle lui a toujours causées.

Il songe, oui. Rêve doucement.

Sa main revient inlassablement autour du pendentif. Cherche sa présence, comme pour s'y habituer. L'apprivoiser.

Il ferme les yeux.

Un instant, le verre froid lui rappelle le contact de la glace. Une surface lisse et froide.

C'est comme de tenir un morceau de neige éternelle.


[TW : mention de sexe]

Et voilà ! Je crois que c'est un des seuls chapitres où Van n'apparaît pas. C'est pour ça qu'il est plus court que les autres, et que j'ai pu le corriger vite.

Si ça vous a plu, n'hésitez pas à laisser une review !

A la semaine prochaine !