Hey !
Et voilà le nouveau chapitre ! Dans les temps. C'est pas le plus mouvementé, mais je me suis amusé en l'écrivant, je suppose que c'est le principal ?
Merci à Lae et à Mijoqui pour leur review ! J'ai pas encore eu le temps de répondre parce que c'est très la fatigue en ce moment, mais je fais ça au plus vite !
Bonne lecture !
D'or et d'argent
.
Ses cheveux s'étalent sur l'oreiller. Une lune soleil qui étend ses rayons anarchiques sur les draps comme autant de petits tentacules humides. La transpirations les gardes collés, forme comme des boucles qui n'ont pas lieu d'être dans cette tignasse lisse. Grise.
Par la fenêtre, la vraie lune perce et souffle des traits d'argent dans la pièce. Elle blanchit leur peau diaphane, avale la poussière flottante dans son halo blanc, renforce les ombres qui s'enfoncent contre les murs. Comme un spectre qui, passant la fenêtre, s'avance et envahit le lieu. Flotte, nulle part et partout. Révèle les détails que la lumière du jour aurait dissimulés sous mille autres détails.
Deux mains, sous ce ciel déchiré par les étoiles. Des doigts qui se mêlent. Des yeux brillants. Rouge, or, bleu. Rouge. Des souffles. De longues inspirations mêlées de fatigue, des peaux mouillées. Le goût du sel. Et celui, plus marqué, du sang.
Les yeux se croisent. Comme les doigts. Les jambes qui se mêlent. L'or et l'argent sur un seul oreiller. Un courant l'air passe contre eux comme un mauvais présage, échappé de la fenêtre entrouverte. Et le noiraud se redresse. Il rit. Un rire brisé qui a traversé les âges et se termine sur la bouche de l'autre, avalé. Un écho au fond de sa gorge.
– Pour toujours.
Ses paumes appuyées sur le torse blanc il se presse, comme il sent qu'on presse sa nuque, qu'on l'étreint et le rapproche. Les murmures du manoir s'effacent sous les soupirs. Sa langue fouille, parcourt, s'accapare le territoire lisse qui pulse sous elle. Sa bouche attrape, aspire. Et encore ses dents s'enfoncent. Encore cette vallée de frissons sous lui. Les ongles qui courent le long de son dos. Un grognement rauque. Deux bras qui le gardent au plus proche, agrippent sa taille, serre, impriment la forme de phalanges familières dans son corps.
Un coup de rein.
Dans son dos, le matelas tendre, les draps rougis. Une chute argentée qui s'écoule au-dessus de son visage et, face à lui, deux yeux affamés. Du sang tout autour de la pupille.
Un sourire fêlé s'écrase sur son visage.
xoxoxox
Une, semaine, presque deux. Et l'horloge interne de Riku peine déjà à suivre le rythme. Il s'est promis, ce matin, de se lever tôt et d'aller faire un tour dans le coin. De marcher vingt minutes pour aller prendre le bus le plus proche - celui qui passe trois fois par jour et qu'il aura tout intérêt à ne pas rater s'il veut rentrer.
Sauf qu'il ouvre les yeux, et que son téléphone affiche déjà 13h 25. Merde. A quelle heure est-ce qu'il s'est couché, hier ? Trop tard, sans doute. Il a vaguement parlé bouquin avec Ienzo, et puis... Oui, c'est vrai. Demyx, Sora, les jeux vidéos. La lumière de l'écran lui a fait perdre toute notion du temps. Il a joué et joué, et quand il a vu marqué 4h sur son téléphone, il lui en a fallu une de plus pour se décider à abandonner les deux vampires avant de retourner dans sa chambre.
Merde. A ce rythme, il va finir par se caler sur le leur. Sauf que les vampires n'en ont pas, de rythme. C'est bien le problème.
Et il n'a toujours pas pu parler avec Sora. Enfin, ils ont parlé. Mais pas de ce qu'il voulait lui dire. Lui demander. Il n'a pas osé. Toute la soirée, il a prétexté la présence de Demyx, cherché ses mots, baissé les yeux. En vain. Les excuses sont toujours plus simples à trouver que le courage, et son problème demeure.
Bon, il n'a pas de temps à perdre avec ça. Il a la dalle, et s'il reste là à se morfondre, il n'aurait pas quitté le lit avant beaucoup trop tard - d'ailleurs, il est déjà beaucoup trop tard. Alors il abandonne les draps, il s'habille en vitesse, enfonce son téléphone dans sa poche après un bref message envoyé à Sora, puis il file dans le couloir.
Il réalise, en passant, qu'il a oublié de se laver hier. Bon. Aujourd'hui, il déjeune. Il se douche, et il sort. Il faut qu'il profite du soleil.
Mais il s'approche du salon, et déjà, il entend des voix. De vraies voix, bien sûr, pas le genre de bruits bizarres qui feraient de ce manoire la scène d'un film d'horreur. Des gens qui parlent.
– Faux. Le meilleur, c'est Crimson Peak.
Demyx. Pas besoin de l'avoir entendu mille fois pour reconnaître son timbre agité. Il peut l'imaginer, ses bras qui bougent et reviennent contre son torse. A moins qu'il ne se soit mollement affalé quelque part.
– Genre. C'est juste un ramassis de clichés gothiques. Tu vois tous venir à des kilomètres.
Et...
Il se fige.
– Justement, c'est pour ça que c'est trop bien.
– T'as un problème avec les romances clichées.
– Juste quand c'est goth. J'adore le drama en noir. Ça fait cinq cent ans qu'on a rien inventé de mieux.
Riku inspire, mais c'est comme si l'air passait au travers de ses poumons et s'évaporait hors de son corps. Il ne sent qu'un vide oppressant sous sa gorge serrée.
– Arrête, on dirait qu'on t'a transformé à quinze ans.
– Dix-sept. C'est pas si loin.
Quelqu'un souffle.
– Ça explique des choses.
– Eh !
Il agrippe la rampe.
– Quoi ? J'ai touché un point sensible ?
– Pas celui qui m'intéresse.
Un ricanement sec qui résonne au fond de son crâne. C'est peut-être ce qui le décide à bouger. Ça, et ce morceau de fierté qui l'a toujours animé. Ce refus de plier. La colère dont il se saisit.
Il ne fuira pas.
– Eh, Riku ! T'es levé tard aujourd'hui !
Mais son regard tombe sur Vanitas, et le reste du monde n'est plus qu'un décor. Pâle. Fade.
– T'avais pas dit que tu voulais aller en ville ? Remarque, vu l'heure à laquelle t'es allé pioncer... Il vous faut combien d'heures de sommeil par jour, déjà ? Quatre ? Cinq ?
– Bonjour.
– Ouais, aussi.
Demyx lui a posé une question, il croit. Les phrases ont perdu leur sens. Pas de réponse.
Les volets sont ouverts, mais les rideaux, trop épais, ne laissent pas filtrer les rayons. Il n'y a qu'une lumière diffuse qui s'étale sur les murs, renforcée par le chandelier suspendu au plafond.
– Tiens.
Un mot. Un mot, et Vanitas lui broie les entrailles. Il y plonge la main, les attrape et les tire. Et Riku ne voit plus que lui.
– Salut, il lâche.
C'est à la fois si dur, et tellement plus simple que ce qu'il appréhendait. De lui adresser cette maigre salutation.
– Tu nous fais le plaisir de ta compagnie ?
Cette voix, c'est une main qui se balade sur sa peau. Ses doigts qu'il sent caresser sa joue.
– Je viens déjeuner.
– Je t'en prie. T'as une chaise juste là.
Et comme il parle, Vanitas retire ses pieds de l'assise. Riku la zieute. Sa méfiance ne semble pas échapper au garçon, vu l'amusement qu'il exprime.
– Quoi ? T'as pas confiance ?
Non. Mais il s'assoit quand même, pour lui donner tort. Et parce qu'au fond, tout bizarre qu'il soit, le vampire ne lui a pas donné de raison de se méfier de lui. Il est inquiétant, mais mauvais ? Non. Enfin, s'il s'en tient aux dires de Sora, mieux vaut qu'il reste sur ses gardes.
– Je vais pas te bouffer.
– Je sais.
– Pas que l'envie m'en manque. Mais Sora a pris ses précautions, à ce que je vois.
Il désigne son collier d'un geste de la tête. Le froid qui flotte autour du bijou se répand brusquement dans son corps. Instinctivement, Riku y porte sa main.
Le lien. Est-ce que c'est pour ça que Sora lui a proposé ce pacte ? Pour éviter que son jumeau ne l'approche de trop près ? Il déglutit.
Et Vanitas sourit. Et il comprend qu'il vient de tomber dans un piège qu'il ne soupçonnait pas. Une mauvaise blague.
– Très drôle, il réplique.
– Arrête Van, tu vas vraiment lui faire peur, Demyx lâche.
– C'est l'idée.
Son sourire s'ouvre sur une ligne de dents si blanches. Riku ne peut s'empêcher de s'attarder là où pointent les canines. Un triangle aiguisé tout ce qu'il y a de plus naturel. Rien qui ne trahisse la véritable nature du garçon - pour l'instant.
S'il se taillait la main, là, est-ce que les crocs de Vanitas sortiraient ? Qu'en serait-il de la couleur de ses yeux ?
Il a déjà remarqué la lueur carmine qui gagne parfois ceux de Sora. Un voile rosé qui n'a jamais le temps de s'assombrir. Au début, il pensait rêver. Son esprit devrait lui jouer des tours, pour tout le temps qu'il passait à l'observer du coin de l'œil. Et puis, il a fini par lui expliquer la vérité, et Riku n'a plus cessé de guetter ce morceau de grenat qui s'illuminait parfois sur son visage.
– Laisse, le blondin reprend. Il est toqué, mais il a pas mauvais fond. La plupart du temps. Faut juste passer outre, même si c'est pas toujours évident.
Il lâche ça sans s'inquiéter du regard que le corbeau coule vers lui. Mais le principal concerné, ne se vexe pas. Même, il a l'air de prendre ça pour un compliment. Ou alors, ça l'amuse ? Il a toujours ce rictus flottant sur ses lèvres.
Riku décide de passer outre. S'agacer, c'est rentrer dans son jeu. Il ne lui servira pas de distraction.
Mais toujours, son cœur cogne.
– Mais t'es pas trop claqué, du coup ?
– Ça va.
– Désolé pour hier. J'avais zappé que tu dormais.
Pas le genre de phrase que Riku pensait entendre ce matin.
– T'es resté au lit grave longtemps, quand même. T'es sûr que ça va ?
– Oui, Dem.
Longtemps ? Il a dormi quelque chose comme huit heures. Peut-être moins. A moins qu'il n'ai passé plus d'une journée au pieu sans s'en rendre compte ? Pas impossible, vu comme les vacances bousillent ses repères.
– N'empêche, tout ce temps perdu. Ça vous démoralise pas trop, de passer tout ce temps au pieu ? Encore ce serait pour baiser, mais même pas. Passer le tiers de sa vie à dormir, quand elle est aussi courte...
Passer le... Il a bien entendu ? Est ce que Demyx réfléchit, avant d'ouvrir la bouche ? Riku soupire.
Il ne s'imagine pas, lui, passer l'éternité sans fermer les yeux. Rester des heures et des heures à faire défiler le temps. C'est un coup à perdre la raison. Ça doit bien arriver, non ? Des vampires qui déraillent. C'est peut-être pour ça que Vanitas est aussi bizarre.
Est-ce que ça arrivera aussi à Sora ? Avec un peu de chance, il ne vivra pas assez longtemps pour voir ça.
– Pour ce que tu fais de la tienne, Vanitas raille.
Et Demyx siffle. Il fait mine de le chasser d'un geste de la main, du bout de son interminable bras. Riku a déjà noté l'étonnante longueur de ses membres, mais ça l'étonne à chaque fois. On dirait, presque, qu'il les étire à volonté. Est-ce qu'il peut faire ça ?
Non. Il va trop loin.
– T'façon j'repars en tournée dans deux jours.
– Oh. Xemnas a changé d'avis ?
– Il sera pas encore rentré.
En tournée ?
– T'es musicien ?
– Ouais ! Depuis genre cinq ou six ans. Enfin, officiellement.
Riku n'est pas sûr de comprendre.
– Officiellement ?
– Bah j'peux pas toujours garder la même identité. J'veux dire, une star de deux cent balais, au bout d'un moment, tu grilles qu'y a un truc. Du coup je joue pendant un moment sous un pseudo, puis je laisse couler avant de recommencer.
– Oh. Et tu joues de quoi ?
– Du sitar. Mais j'aime bien les cordes en général.
S'il en joue depuis aussi longtemps qu'il vit, Riku imagine qu'il doit avoir un sacré niveau. Pour autant, sa voix ne lui dit rien. Il doute de l'avoir déjà entendu quelque part. Ou alors, le vampire module aussi sa voix. Est-ce qu'il a déjà écouté une de ses chansons, sans le savoir ?
– Il se débrouille bien, Vanitas ajoute.
Et c'est peut-être la première fois que Riku l'entend dire quelque chose de positif. Il a dû rater l'ironie dans sa voix. Pourtant, aucune trace de moquerie sur la trogne qu'il tourne vers son… colocataire ? Son ami ?
– Tu nous joues quelque chose, Demyx ?
Sa tête penchée, l'or de ses yeux s'aligne à la lumière d'une énième bougie. Sa main s'étale sur la table, ses doigts poussés comme de petits serpents sur le bois lisse. Sous sa peau lisse, les articulations marquées font des bosses et des pliures que ses mouvements accentuent. Cette pression sur la table, Riku la sent contre sa nuque.
Il se détourne.
– Mm, si gentiment demandé.
– Tu vas chercher ton instrument ?
Est-ce qu'il y a un sous-entendu dans cette phrase ?
Non.
Si ?
Il se fait des idées. Il se fait beaucoup trop d'idées, d'ailleurs.
Mais il sent les pupilles de Vanitas qui l'agrippent, et ça éclate dans son ventre. Un nuage diffus, chaud. Confortable.
Il n'aime pas ça.
– J'en ai pour deux minutes, Demyx lâche en se levant.
Riku ne le voit pas partir. Un instant, le musicien est là. La seconde d'après, il a disparu. Il n'y a qu'un bruit, comme un courant d'air brusque, une chaise qui racle le sol, puis le silence.
Et il se retrouve seul avec Vanitas.
– Il est serviable, hein ? Un amour, vraiment.
Le gris plisse les yeux. Est-ce qu'il l'a fait exprès ?
– On dirait.
– Un brave type, vraiment. Il était déjà comme ça de son vivant.
De la curiosité. Riku s'y accroche. Mais ça n'efface pas la brûlure lascive que le regard de Vanitas trace sur lui.
– Comment tu sais ça ?
Le noiraud croise les jambes, entièrement tourné vers son interlocuteur.
– A ton avis ?
Avant... Il a l'air plus jeune, pourtant. Riku s'autorise à l'observer. Son visage arrondi, et pourtant si dur. L'arête lisse de son nez, et l'éclat satisfait qui pétille sur son iris. Ses cils longs, comme sa chevelure sombre. La petite langue rose qui glisse sur ses lèvres pour les humidifier, lèvres désespérément pâles, s'il les compare à celles d'Aqua. Il voit comme il croise les bras, bras si fins, une peau claire comme une lune ronde. Et son poignet délicat. L'or a l'air fragile, il pourrait l'entourer de ses doigts. Garder sa main autour. Chercher le creux de sa paume.
Non.
Il détourne la tête.
– Il a été transformé après toi, il lâche.
– Exact.
Sa bonne réponse ne lui apporte aucune fierté.
– Remarque, ça l'a pas beaucoup changé. Il était déjà remuant, à l'époque.
Comme il ne lui répond pas, Vanitas insiste.
– T'es pas des masses curieux, toi.
– Pas plus que de raison.
– Tu débarques dans un manoir de vampire, et t'as pas envie d'en savoir plus ?
Sa langue roule à l'intérieur de sa bouche, et Riku doute. Est-ce qu'il a dit savoir, ou avoir plus ? Est-ce que c'est vraiment important ?
Savoir. Savoir quoi ? Il y a tellement de questions à poser, et aucune ne se démarque. C'est un nuage au loin dans sa tête, mais pas une priorité. Lui il est venu ici pour s'éloigner du monde. Mais il y a devant lui cette teigne qui ne le lâche pas, et oui, peut-être qu'il voudrait savoir.
Mais savoir quoi ?
– Pas spécialement.
– Menteur.
Grillé. Il serre les lèvres.
– Allez, pose tes questions. Tu peux même lâcher les plus gênantes. J'ai jamais été coincé.
Il n'aime pas comme son sourire, là, cette bouche qui le nargue. Et en même temps il l'aime, et il ne comprend pas. Cet effet qu'il a sur lui. Cette tignasse où il s'imagine passer sa main - est-ce qu'elle est aussi rêche que celle de Sora ? C'est comme un fil entre eux qui le pousse à s'avancer, alors qu'il voudrait reculer.
Bon.
Des questions, il a dit. Il en a, et c'est un moyen comme un autre de tromper ses pensées.
– Vous avez quel âge, Sora et toi ?
Il choisit celle qu'il n'a jamais osé poser à son ami. Van doit le sentir, parce que son sourire se brise. Ça dure le temps de rien. Mais Riku le voit.
– C'est tout ce que t'as à demander ?
Pas de réponse. Le vampire se résigne.
– Pas loin de six cent ans.
– Autant ?
– Oui.
C'est à la fois énorme et dérisoire. Six cent ans. C'est... s'il fait le calcule, ça veut dire qu'ils sont nés dans les années mille quatre cents. Même son arrière grand mère n'était pas ne serait-ce que conçue.
Sora a connu des langues, des pays, des noms qui ne sont plus que des souvenirs abandonnés dans les livres d'histoire. Il a vu des familles disparaître, des dynasties s'éteindre. Il a connu les guerres et les révolutions, des époques aujourd'hui révolues.
Et il l'a croisé à la fac, dans un couloir mal éclairé, à l'abri de la lumière du jour. Au sous-sol.
Il en va sans doute de même pour Vanitas.
– Ça en jette, hein ?
– C'est... long.
– Tu peux le dire. C'est long. Mais ça passe vite.
Ça, c'est la même chose pour tout le monde, non ? Arrivé à un certain stade où les souvenirs s'entassent, le temps passe entre les doigts comme un filet d'eau. Et encore, l'eau, il peut toujours la garder au creux de sa main.
– Allez, t'as rien de plus palpitant à demander ? J'ai rarement vu un humain aussi plat, c'est désolant.
Riku se rappelle brusquement qu'il avait faim en arrivant. Mais Vanitas lui parle, et il n'a pas la force de se lever.
– Qu'est-ce que tu voudrais que je demande ?
– Oh, Riku. C'est pas drôle, si je dois te souffler ton texte. Fais preuve d'imagination.
Le bestiau se lève. Son corps se recule d'instinct, mais le dossier de la chaise entrave sa fuite. Il sent qu'on le regarde de haut. Ça le retourne. Des bulles dans son ventre.
Comment est-ce qu'il fait ça ?
– Ça ressemble bien à Sora, de s'enticher des petites bêtes comme toi.
Soudain, plus personne. Devant lui le vide. Et sur ses épaules, les mains de Vanitas. Il sent sa présence dans son dos. Le dossier entre eux. Dernière barrière.
– Il ramenait tous les chiens errants qu'il trouvait.
Quand ? Du temps où ils étaient encore humains ? Après leur transformation. Ici, au manoir ? C'est lui qu'il désigne, quand il parle de chiens errants ?
– Mais déjà que les humains ont la vie courte, alors les chiens...
Ses mains ne bougent pas, et pourtant, il sent qu'on le caresse. C'est son souffle, sa voix. Sa présence. Un ronronnement centenaire qui passe sur sa peau.
– Je pensais qu'il avait abandonné l'idée. Mais je me suis planté.
Un gloussement éternel qui roule.
– Il s'est trouvé un nouveau jouet.
– Je ne suis pas un jouet.
Une réponse sèche. Riku se lève d'un bond. Sur ses épaules, les mains de Vanitas ne sont plus qu'un souvenir. Une absence.
Il recule. Le fusille du regard, puisque c'est la seule arme dont il dispose.
– Vraiment ?
– C'est mon ami.
– Ton ami ? il répète. Juste ton ami ?
Riku déglutit. Il n'a pas pu comprendre, hein ? Non. Ça date. Il n'aime plus Sora, plus comme ça. Vanitas n'a pas pu le sentir. Il le connaît depuis deux semaines, et il ne restait déjà rien de ces sentiments consumés quand il est arrivé. A peine un souvenir qu'il retrouve parfois et qui s'efface dès que la voix de Sora retentit, alors...
– Oui.
Pourtant le corbeau lui balance ce sourire fourbe. Il a trouvé ce qu'il cherchait, quoi que ce soit.
– Méfie-toi. C'est un vampire.
– J'avais compris.
– Il en a vu mourir des gens comme toi, tu sais ? Depuis le temps.
Il s'en doute, même si c'est inconcevable pour lui.
– Quand on a notre âge, on ne s'attache plus aux gens de la même manière.
Son souffle. Est-ce que Vanitas était aussi près, quand il a commencé à parler ? Son corps est là devant lui, à portée de main. Sa peau sans chaleur, aussi pâle que celle de Sora est hâlée. Il pourrait tendre la main et le gifler, ou caresser sa joue.
– Un humain ou un autre...
Mais c'est le vampire qui lève la sienne. Et un instant, Riku n'a pas d'autre envie que de la sentir, là. Sa paume contre sa joue. Découvrir cette froideur qu'il a déjà sentie chez Sora, cette chair morte qui pulse sans jamais dégager de chaleur. Cette peau de lune.
Il a juste à rester là, perdu sur deux cercles d'or.
– C'est la même chose. On s'attache, on se lasse et au suivant.
Les doigts n'atteignent pourtant pas sa joue. Il les chasse avant.
– Pour toi, peut-être.
Le bruit claque. Ou bien c'est dans sa tête. N'empêche que, pour la première fois, Vanitas écarquille les yeux.
Et puis sous sourire d'allonge.
– Mais Sora n'est pas comme ça.
– Oh. Tu penses mieux connaitre mon frère que moi ?
Oui. Et il se plante sans doute si fort.
– Ça fait quoi ? Deux ans que vous vous fréquentez ?
Sans bouger, Vanitas cogne droit où ça fait mal.
– Enfin. Libre à toi d'y croire. Tu verras bien comment il le traitera, quand Kairi sera rentrée.
Kairi. Il l'avait complètement oubliée.
– Ma chambre est au bout de l'aile ouest, si jamais tu t'ennuies. Tu la trouveras facilement.
– Non merci.
Il jette tout ce qu'il a de froideur dans sa voix. Et toujours, l'expression de Vanitas s'illumine. Une joie contentée habite ses lèvres claires, toutes douces, que les gerçures n'ont jamais abîmées. Une bouche trop délicate pour les saletés qui en sortent.
Sous la peau de Riku, ça cogne. Son cœur, ses tempes, un ensemble de tambour. Ça crie.
– C'est bon, je l'ai trouvée !
Et la voix de Demyx, loin de briser l'enchantement, lui cause une terrible frustration.
Frustration partagée, vu la tête de son interlocuteur.
– Désolé, j'ai croisé Zexy sur le chemin et- oh, j'ai aussi croisé Aqua !
Un vide énorme qui lui brise les jambes, comme il se laisse lourdement tomber sur sa chaise.
– Devinez qui rentre la semaine prochaine ?
Mais Riku ne veut pas jouer aux devinettes. Il ramène en lui toute la colère qui s'est écoulée et qui le somme, là, d'attraper la nuque de Vanitas. L'envie de serrer ces petits cheveux jusqu'à lui tirer une grimace de douleur, et... Et quoi ?
Et puis ?
Il se tourne vers les deux vampires.
Et puis quoi ?
– Xemnas ? le noiraud propose.
– Yes !
Riku entend. Ne comprend pas. Tout est loin.
– Le congrès est terminé ! Le boss rentre au bercail.
– Quelle merveilleuse nouvelle, l'autre ironise.
Sa main, sur sa nuque.
S'il la lève maintenant, il peut encore la toucher.
Mais pas besoin de lui tirer les cheveux. Vanitas grimace déjà.
Et voilà !
pas sur que je poste la semaine prochaine, comme je compte poster sur les 100 thèmes de Demyx, mais j'y réfléchis encore. A voir. Du coup, le prochain chapitre sera pour dans deux semaines au plus tard !
A plus !
