Hello !
Voici le 16ème chapitre avec bien évidemment la suite du suspense d'hier.
Certain.e.s d'entre vous ont du mal avec le Papa de Jane... je ne suis pas certaine que ce chapitre améliorera les choses, mais il vous en apprendra plus sur son passé, à défaut de le rendre aussi adorable que ses compères de Cedar Hill ;-)
Merci beaucoup pour vos retours de plus en plus nombreux. Votre avis est précieux !
Réponse à desired666 : un pronostic plutôt sympa si tu veux mon avis ;-) On verra bien par la suite s'il se vérifie, en tout cas merci pour ta review !
Bonne lecture,
M
Chapitre 16
19 décembre 2006
Lorsqu'il sortit des plumes du sommeil ce matin-là, il mit quelques instants à se rappeler où il était. Et alors qu'il distinguait des boucles brunes qui lui chatouillaient le torse, tout lui revint brutalement en mémoire. Comme une gifle. La disparition de Jane. Les heures de recherche au cœur de la nuit. La peur, l'angoisse qui se resserre comme un étau dans les entrailles. La peur encore alors qu'Hermione se penchait sur la glace pour aller récupérer sa petite protégée. La peur toujours en les voyant revenir, tout doucement, jusqu'à lui. Et la terreur, cette terreur lancinante et impitoyable qui l'avait étouffé tandis que, dans un craquement abominable, la glace avait cédé, emportant Hermione avec elle. Il n'avait pas hésité une seule seconde à plonger dans l'eau. Elle était à peine à un mètre du rivage, peut-être moins, l'eau était peu profonde. Mais tout habillé, il avait eu le sentiment de mettre de longues heures à la remonter sur la rive. Pourtant, il s'était écoulé à peine une minute, peut-être deux. Elle n'avait pas perdu conscience. Mais lorsqu'il avait vu son visage, après qu'elle eut toussé et recraché toute l'eau glacée qu'elle avait avalée, lorsqu'il avait vu ses yeux vides, ses lèvres bleuies…
Drago frissonna en se reconnectant à l'instant présent. Elle dormait toujours, bien pelotonnée sous la lourde couette que Thomas leur avait apportée. Bien pelotonnée dans ses bras. Il avait eu un mal de chien à les ramener toutes les deux jusqu'au centre-ville. Il portait Hermione à bout de bras, tenait la main de Jane qui ne pouvait s'arrêter de pleurer. Heureusement, ils avaient fini par croiser un autre groupe de recherche et toute la ville s'était alors rassemblée pour les ramener en sécurité. Jane, qui semblait ne souffrir d'aucune blessure, était rentrée chez elle avec son père après un rapide examen et la promesse d'un bon bain chaud. Le médecin s'était ensuite concentré sur Hermione. Il avait voulu l'emmener à l'hôpital de la ville voisine mais elle avait catégoriquement refusé. Finalement, après une batterie de tests, il avait cédé et l'avait autorisée à rester dormir à l'auberge, à la condition qu'elle soit veillée en permanence. Alors, Hermione avait pris la main de Drago et l'avait serrée très fort. Du regard, elle semblait défier le médecin de campagne. Drago avait serré sa petite main glacée en retour et avait adressé un signe de tête au docteur. Il prendrait soin d'elle.
Hilda avait insisté pour quitter son lit et faire de la soupe bien chaude. Hermione s'était presque endormie dans son bol. Alors, Drago et elle étaient montés dans leur chambre et, lorsque Drago l'avait bordée, elle lui avait demandé s'il acceptait de dormir avec elle. Elle lui avait paru timide, minuscule, grelottante, dans ce grand lit. Il lui avait demandé de répéter. Avait-il bien entendu ? « Dors avec moi Drago. S'il te plaît. J'ai tellement froid... » Sans un mot, il s'était couché à ses côtés et l'avait prise fermement dans ses bras, tentant de faire passer toute la chaleur de son corps vers le sien. Il lui avait embrassé le front, et elle avait fermé les yeux. Puis il l'avait veillée, longtemps. Et quand, enfin, la peur qui lui vrillait le corps s'était quelque peu apaisée, il s'était autorisé à fermer les yeux à son tour.
Là, piégé dans un foutu village de Noël, loin de ses amis, de sa famille, il était bien. Là, son ennemie de toujours profondément endormie dans ses bras, il était bien. Bien mieux qu'il ne l'avait été depuis des années. Il refusait de s'interroger sur tout ce que cela impliquait. Il ne pouvait pas, ne voulait pas envisager les conséquences de… tout ça. D'eux. Endormis ensemble, coincés dans une réalité parallèle qui n'existait peut-être même pas. Nom d'un sombral...
- Hey.
Perdu dans ses pensées, il ne l'avait pas vue ouvrir les yeux.
- Hey, répéta-t-il simplement.
Il la vit rougir légèrement, alors qu'elle prenait conscience de leur position. Ça y est, la réalité était en train de les rattraper. Pourtant, elle ne fit aucun geste pour se défaire de son étreinte. Lui non plus.
- Comment tu te sens ? Demanda-t-il.
- Je vais bien. Et toi ? Et Jane ?
Il s'esclaffa doucement.
- Granger, je t'interdis de t'inquiéter pour les autres alors que tu t'es littéralement jetée dans un lac gelé il y a moins de 12 heures.
- Que veux-tu l'héroïsme des Gryffondors, tout ça tout ça…
- Idiote, souffla-t-il.
Elle sourit. Ça ne sonnait pas comme une insulte. Pas du tout. Plutôt comme... un mot doux. Il aurait voulu reprendre le contrôle de lui-même, remettre son masque, mais il n'y arrivait pas. Elle le regardait droit dans les yeux, et il se sentait nu.
- Tu devrais aller voir Jane. Je suppose que tu n'as pas eu de nouvelles ?
Elle avait quitté leur monde à deux et les avait ramenés à Cedar Hill. C'était un peu brutal, même si elle avait posé la question d'une voix douce. Il n'était pas prêt, il n'avait aucune envie de sortir de leur bulle. Mais elle avait raison. Il fallait qu'il aille vérifier de ses propres yeux que Jane allait bien. Il soupira.
- Non. Elle allait plutôt bien hier, pour une gamine de 6 ans qui venait de passer plusieurs heures dehors en pleine nuit. Tes fichus félétilms moldus ont quand même quelques avantages Granger.
Elle rit avant de prendre un air sérieux.
- Hé, Malefoy ? Je vais bien. Tu peux me laisser. Je te promets que je ne quitterai pas cette auberge avant ton retour. De toute façon, je pense que j'ai bien mérité une bonne grasse matinée suivie d'un bain et d'un énorme petit-déjeuner. Alors va voir les Emerson. Mais ne tue pas Liam trop vite, tu veux ?
Elle l'avait cerné si vite… Comment faisait-elle, par la barbe de Merlin ?
- Je ne peux rien te promettre là-dessus Granger, dit-il finalement avec un sourire narquois.
- Drago ! Comment va Hermione ? Veux-tu que je lui monte le petit-déjeuner ?
Le blond avisa Thomas, en train d'accueillir deux nouveaux clients à l'accueil de l'auberge. S'il en croyait le vacarme qui provenait des cuisines, Hilda n'avait pas résisté à l'envie de reprendre possession des fourneaux. Il sourit, amusé.
- Elle va mieux. Je dois aller faire un petit tour…
- Ne tue pas Liam, l'interrompit Thomas. D'abord parce qu'il n'est pas si terrible que ça, ensuite parce que ça ferait la une des journaux et que la rédac' chef Elsa a bien d'autres chats à fouetter en ce moment, je te rappelle qu'elle peut accoucher d'un jour à l'autre.
Drago grimaça. Était-il si transparent sur ses intentions ? Il ne prit pas la peine de répondre.
- Thomas… Veille sur elle en mon absence. Je peux te faire confiance ?
Le brun lui sourit d'un air entendu.
- Évidemment mon vieux. Va, je m'occupe de ta belle.
- Monsieur Malefoy… Drago. Entrez, je vous en prie.
Liam Emerson masquait avec peine la fatigue qui l'habitait. Il n'avait pas fermé l'œil de la nuit, veillant sa fille unique, rongé par la peur et la culpabilité. Les deux hommes pénétrèrent dans le grand salon, au centre duquel trônait une immense cheminée. Drago s'y dirigea et mit ses mains devant le feu. La chaleur l'apaisa quelques secondes. Là, alors qu'il profitait du crépitement des flammes, il s'aperçut que la sensation de froid ne l'avait pas quitté depuis la veille. Depuis leur arrivée à Cedar Hill, c'était la première fois qu'il avait froid.
- Écoutez, Drago je… Je suis désolé.
L'intéressé eut un rire sans joie.
- De quoi ? D'avoir abandonné votre fille ? De ne pas avoir été capable de veiller sur elle ? De m'avoir accusé de la kidnapper ? D'avoir laissé Hermione se jeter dans un lac gelé à votre place ? D'être un abruti fini ? Je continue ?
Il s'était retourné pendant sa tirade et s'était approché de Liam, menaçant. Il était à peine plus grand que lui, pourtant il semblait le surplomber de toute sa hauteur et de tout son dégoût.
- Vous savez, Emerson, là d'où je viens… je n'ai pas toujours été un saint. Je suis lâche, peureux, calculateur, cynique et égoïste. Je suis prétentieux, solitaire, mesquin parfois. Mais vous… Vous êtes encore pire que moi. Vous êtes minable.
L'homme qui lui faisait face semblait trembler sous le poids des reproches.
- Comment va Hermione ?
- Comment va Jane ?
- Elle… Elle va bien. Elle dort encore. Drago, je suis tellement, tellement désolé pour le mal que j'ai causé…
- Ce n'est pas à moi qu'il faut faire des excuses. C'est à Hermione, à Amy dont vous avez gâché la soirée, à tous les habitants de Cedar Hill qui se sont démenés toute la nuit pour réparer vos erreurs, et par-dessus tout à Jane que vous avez abandonnée !
Il avait haussé le ton. Une colère froide, sourde, s'insinuait dans tout son être.
- Je sais que j'ai mal agi, mais vous ne savez pas tout Drago, ma vie a été compliquée ces dernières années, j'ai été surchargé de travail et -
- COMMENT OSEZ-VOUS ME PARLER DE VOTRE FOUTU TRAVAIL ?! VOTRE FILLE AURAIT PU MOURIR, PAR MORGANE !
- Je sais ! Vous croyez que je ne le sais pas ?! Vous croyez que je ne sais pas ce que ça fait de perdre quelqu'un ? Ma femme est morte, Drago Malefoy ! Elle est morte dans mes bras et je n'ai rien pu faire pour la sauver !
Drago inspira profondément pour retrouver son calme.
- Et donc, reprit-il d'une voix doucereuse, vous vous êtes dit que c'était une bonne idée d'abandonner une petite fille de 6 ans à son propre sort ? C'est ça que vous êtes en train de me dire ? C'est ça, votre argument ?!
- J'ÉTAIS IVRE DE CHAGRIN ! J'étais complètement noyé dans ma peine, c'est ça que vous voulez savoir Malefoy ? Ça fait 2 ans que je vis à côté de ma propre vie parce que je suis rongé par ma tristesse ! J'ai mal, vous savez ce que ça fait de perdre la femme qu'on aime, Drago ? Vous savez ce que ça fait d'avoir mal, tout le temps ? J'ai mal nuit et jour, j'ai mal chaque minute. Chaque heure, chaque seconde qui passe me rappelle que je suis seul parce que je n'ai pas réussi à garder ma femme en vie, que je n'ai pas réussi à garder notre famille en sécurité ! Et chaque fois que je croise le regard de Jane, je vois le regard de Lina et je perds pied un peu plus !
De grosses larmes roulaient à présent sur les joues du brun.
- On était heureux, vous savez ? On était profondément heureux et amoureux. On s'était rencontrés au lycée. J'étais fou d'elle. Elle était drôle, elle était belle, elle était d'une détermination sans faille. Lorsque Jane est arrivée, j'ai cru qu'on vivrait heureux jusqu'à la fin des temps. Et puis un jour, celle saloperie de maladie est arrivée et a détruit nos vies. Jane a perdu sa mère et moi j'ai perdu ma boussole, mon phare, mon unique repère. Je ne m'étais pas préparé à élever ma fille seule. Je ne m'étais pas préparée à répondre aux questions d'une enfant de 4 ans, qui me demande où est sa maman. Je ne m'étais pas préparé à devoir tresser les cheveux de ma fille le matin, à penser à son pique-nique du midi, à devoir gérer la maison, les courses, la vie sans elle. Je ne m'étais pas préparé… et je n'y suis pas arrivé. C'était trop dur. Alors j'ai sombré. Je me suis réfugié dans le travail, pour oublier, le temps de quelques heures, que ma vie avait volé en éclats. Je n'ai pas eu la force de croiser le regard de Jane qui me rappelle tant celui de sa mère, je n'ai pas eu la force de lui faire des tresses, de lui préparer son pique-nique. Je n'ai pas eu la force.
- Liam Emerson, vous êtes un monstre d'égoïsme.
L'homme accusa le coup et hocha la tête.
- Vous avez raison. Je sais que j'ai fait des erreurs. Des erreurs impardonnables. Et je le regrette, si vous saviez comme je le regrette… Cette nuit, j'ai presque perdu espoir vous savez ? Je me suis dit que j'avais perdu ma petite fille. Alors lorsque vous me l'avez ramenée, lorsque je l'ai serrée dans mes bras… C'est tout ce qui me reste de Lina, vous comprenez ? Mais je me suis rendu compte cette nuit que Jane n'est pas seulement un vestige de mon amour pour ma femme. Jane est une petite fille qui a besoin de son papa. Et dans ce rôle-là, j'ai échoué, lamentablement.
- Papa ? Drago ? Pourquoi vous criez ?
- Jane !
Les deux hommes s'étaient exclamés d'une même voix. La petite semblait quelque peu effrayée, mais plutôt en forme malgré la nuit qu'elle avait passé.
- Je vais vous laisser, vous avez quelques petites choses à vous dire il me semble. P'tite tête, on se voit très vite, d'accord ? Ajouta Drago en lui ébouriffant les cheveux.
- Attends Drago, tu t'en vas déjà ? Est-ce qu'Hermione va bien ?
Il sourit. Comment cette petite fille pouvait-elle être si formidable avec un père si lâche ?
- Elle va bien, ne t'en fais pas, elle est forte notre Hermione. On passera te voir bientôt, on ira boire un chocolat chez Jo et Dolly.
- On pourra aller au refuge aussi ? Ça fait longtemps que je n'ai pas vu Summer.
- Bien sûr ma jolie, tout ce que tu veux.
- Chouette !
Drago fit demi-tour. Il avait presque atteint l'entrée quand Liam l'interpella.
- Drago ! Merci. Merci infiniment d'avoir sauvé ma petite fille. Je vous promets que je vais tout faire pour mériter d'être dans sa vie désormais.
- Vous avez plutôt intérêt Emerson, sinon je vous jure que vous me trouverez sur votre chemin.
- Posez-vous la question quand même, Drago. Je ne veux pas me dédouaner, remettre en cause ma responsabilité, et croyez-moi quand je vous dis que je me sentirai coupable toute ma vie. Mais posez-vous la question une seconde. Si vous perdiez brutalement la femme que vous aimez… Seriez-vous capable de faire face ?
Il s'en voulut de laisser ses épaules s'affaisser légèrement. Il ne répondit rien et claqua la lourde porte d'entrée derrière lui.
- Hé, Malefoy !
Hermione le salua alors qu'il poussait la double-porte du Snowflake Inn. Elle était toujours en pyjama et s'apprêtait visiblement à rejoindre le salon.
- Tu arrives pile à l'heure pour le petit-déjeuner ! Hilda nous a préparé des pancakes et du – hé ! Ça va ?
Il s'était dirigé vers elle et l'avait prise dans ses bras. Il l'avait serrée fort, très fort et avait enfoui son nez dans ses cheveux. Après un instant d'hésitation, Hermione avait fini par lui rendre son étreinte, doucement.
- Allez Malefoy, viens petit-déjeuner avec moi. Tout ira bien, ne t'en fais pas.
