Disclaimer : Pas à moi.

Note : Toutes mes excuses pour ce retard - j'ai beaucoup eu à faire sur Discord. Notre Happy Halloween Fest étant terminé, je trouve enfin le temps de finir ce chapitre (qui était pourtant bien entamé). Je tente de reprendre mes publications le week-end - et si j'y arrive, je rattraperai avec autre chapitre dans la semaine afin de retrouver mon premier calendrier.

Merci pour vos gentilles reviews ! Merci à Dobby, à ShainaCobra, à Elena Embradge et à missmalefoy76 ! Merci à vous toutes !

Bonne lecture.


Chapitre II : La cifra

Hiver 1998

Hermione referma le journal d'un geste sec.

Tout ce ramassis de bêtises. Ces insanités. Ces mensonges.

Son cœur se serra douloureusement. Qu'allaient-ils bien pouvoir faire face à ces absurdités profondes ?

Croisant le regard inquiet de Ginny assise à sa droite, elle haussant les épaules d'un air las, trop excédée pour parler. Rien de nouveau, rien de pire, rien de grave, que n'avait-elle pas déjà dit ? Mais surtout rien de sérieux, de tangible, et toujours pas de miracle.

Reportant son attention sur la grande salle, elle soupira face à tous ces jeunes qui s'échangeaient divers bons de commandes, s'inquiétant bien plus de leurs achats de Noël que de leurs études. L'état du monde sorcier, leur propre avenir par extension, devait leur paraître bien lointain voire nébuleux. Avait-on idée d'être aussi insouciants alors que le Ministère de la Magie prouvait encore une fois son incompétence, voire l'étendue de sa bêtise ?

Elle lissa soigneusement les plis du quotidien avant de reprendre entre ses mains sa tasse de thé brûlante.

Bien sûr, certains – la plupart – avaient l'an passé vécu divers facettes de la guerre, du joug des Mangemorts. Ils croyaient peut-être naïvement être tirés d'affaire maintenant que Voldemort était enfin détruit. Ou alors ils fermaient les yeux, pensant tout simplement qu'ils n'étaient pas concernés, qu'ils n'étaient pas visés - pas eux, pas les héros, pas les rescapés. Comme si la précédente guerre n'avait pas montré à quel point il ne suffisait que d'un peu de temps pour que toutes les strates de la société ne se retrouvent gangrénées. Cela n'aurait-il pas dû les rendre plus avisés ? Alertes ? Engagés dans la reconstruction du monde de demain ?

Comme souvent, Hermione se demanda si le fait qu'elle était Née-Moldue jouait sur sa capacité à repérer les enjeux, à les voir avant – telle une Cassandre moderne qui n'espérait qu'avoir tort et qui avait pourtant chaque fois raison. Contrairement à d'autres, elle n'avait peut-être jamais eu le luxe d'être crédule...

Dès lors, pouvait-elle se plaindre car ils étaient incapables de pressentir ce qu'elle discernait, comprenait en amont ? Qui pouvait-elle accuser si tous ses camarades ne se rendaient-ils pas compte que plus important se tramait ? Que l'heure n'était plus à se soucier du dernier devoir de potions ou du dernier article à la dernière mode ? Où était donc la frontière entre l'insouciance, la bêtise et la culpabilité ?

« Les gens ont besoin de rire. »

Elle releva la tête vers son amie. Ginny poussait une corbeille de fruits vers Hermione.

« Et toi, de manger quelque chose. »

L'ombre d'un sourire passa sur le visage de la Préfète-en-Chef qui ouvrit une agrume avant de reprendre son observation.

Ses yeux se portèrent sur le visage de Lavande, assise quelques mètres plus bas.

Lavande. Qui en réelle Gryffondor, était revenue malgré tout : malgré les rumeurs, les lacérations sur son cou, la peur qu'elle devait ressentir à chaque fois qu'elle déjeunait avec eux. Et qui tentait de faire comme si de rien n'était. Elle imaginait que c'était là sa bataille à elle, ce sur quoi elle se concentrait, plutôt que les manigances du gouvernement.

Hermione se mordit les lèvres, se demandant combien d'autres luttaient contre des affects similaires. Combien tentaient de paraître juvéniles, insouciants, voire heureux, après avoir vécu des affrontements, des blessures visibles et invisibles, ou même un deuil profond ? N'était-elle pas trop sévère à espérer, à attendre qu'ils réagissent dès maintenant ? Avant qu'il ne soit trop tard ?

Balayant la table des Serpentards du regard, elle frissonnant en se demandant avec qui son nom pourrait être associé.

Nott, Zabini, Goyle.

Elle ferma les paupières, inspirant lentement. Elle était une Gryffondor, par Circée, il fallait bien qu'elle se prépare à affronter l'une des potentielles réalités qui l'attendait.

« Il est pas mal en fait. »

Hermione se tourna vers son amie qui avait suivi son regard, tournant subrepticement sa cuillère dans sa tasse.

« Qui donc ? »

Ses joues se colorant d'une légère teinte rosée, Ginny hocha la tête vers le jeune homme qui se levait de sa table.

« Zabini. »

Elle avala une gorgée avant d'ajouter :

« Il est dans mon cours d'Enchantements. »

Hermione fronça les sourcils sans répondre, laissant son amie aller au bout de son propos. Il semblait que Ginny aussi avait entendu qu'il fallait boire avant une conversation jugée difficile tant elle serrait fort son récipient entre chaque phrase.

« C'est... Eh bien, je ne m'attendais pas à ce qu'il soit aussi sympa, je crois. »

Elle releva la tête, les yeux brillants, attendant le verdict de Hermione, qui souffla doucement, l'estomac noué. Elle dût se résoudre à poser la question qu'elle avait évité jusqu'à présent, dont la réponse l'angoissait autant que ses propres peurs.

« Et... Harry et toi ? »

L'air désabusé de Ginny brisa quelque chose en Hermione. L'espoir auquel elle s'accrochait sans doute.

« A quoi bon ? Si la loi passe, nous n'avons aucune chance d'être ensemble. Il n'est pas concerné, tandis que moi si. »

Hermione attrapa les mains de son amie, avec douceur.

« Vous auriez au moins ça, non ? »

Ginny se renfrogna encore plus.

« Quelques mois, quelques années tout au plus... Des souvenirs de moments bâclés, précipités ? Dans la peur constante ? Très peu pour moi. »

Son regard vif, décidé, croisa l'éclat incertain qui habitait ceux de son amie, sans ciller.

« Harry n'avait pas voulu prendre de risques avant, et je ne veux pas gâcher ce qu'on a vécu en vivant une demi-relation maintenant. »

Hochant la tête Hermione ne put qu'approuver. Elle ne comprenait que trop puisque c'était également ce qui l'arrêtait. Et sa volonté de se concentrer sur ce qu'il y avait à faire, sur les nécessités, de ne pas s'éparpiller - cette même détermination qui leur avait permis de mener à bien leur mission, de détruire les Horcruxes, puis Voldemort. Survivre la torture, déjouer les envies des meurtres, sauver tout le monde – tout cela lui semblait désormais dérisoire. Alors qu'une autre peur intangible, différente car insidieuse, était plus que jamais présente.

Car pouvait-elle survivre à un cœur brisé ? Si elle goûtait à cette relation qu'elle avait tant attendue avec Ron, n'aurait-elle pas que plus d'amertume lorsque viendrait le temps des adieux ? A quel point serait-elle aigrie si elle devait finir par en épouser un autre ? Ne fallait-il pas mieux continuer d'espérer, de fabuler leur possible relation ? Se remémorer leurs baisers volés en pleine bataille ? L'ignorance n'était-elle pas une offrande bénie ?

« Et avec Zabini ? »

Observant sa silhouette qui quittait la Grande Salle, Ginny humecta ses lèvres avant de répondre.

« Parler avec Zabini ne m'engage à rien. De toute façon, je ne peux même pas tomber sur lui. »

Une grimace étira ses traits alors qu'elle jetait ensuite un œil sur leur table.

« Je peux tomber sur Dean, qui n'est pas parfait, mais qu'au moins je connais. »

Elle haussa les épaules.

« Je ne sais vraiment pas ce qui est mieux. »

Une idée s'embrasa dans l'esprit de Hermione alors qu'elle voyait le grand garçon noir s'arrêter pour échanger vivement quelques mots avec un blond. Malefoy, qui venait d'arriver, attrapa une pomme sur sa table avant de le suivre aussitôt.

Malefoy, grâce au plaidoyer de Harry, avait été pardonné à condition de revenir à Poudlard. Sous réserve de bons résultats, notamment en Études des Moldus, il retrouverait même tous ses droits sur ses possessions. Un énième abus de pouvoir du Ministère, qui avait dépossédé son père, pouvant se servir à sa guise dans les coffres de la famille en attendant que le fils passe ses examens. Mais la population marchait : les Malefoy n'avaient que ce qu'ils méritaient pour s'être alliés à Voldemort. Pour l'avoir hébergé. Pour avoir manqué mourir de sa main à plusieurs reprises. Peu importait que le mensonge de Narcissa ait contribué à les sauver, l'opinion publique ne les voyaient nullement comme de pauvres victimes qui cherchaient à survivre.

Bien sûr, Hermione se doutait que la pureté du sang était toujours engrainée chez eux ; comment pouvait-on seulement changer en une nuit toute une éducation, vivace après des années, des siècles de croyance ? Elle aspirait au changement mais se doutait que c'était bien plus compliqué. Et malheureusement, croyant bien faire, le Ministère passait à l'offensive face à ce problème. Comme si une loi idiote qui sacrifiait une génération entière de jeunes pouvait être la solution.

Elle repensa à Malefoy qui, dans son malheur, était un potentiel candidat pour elle. Un potentiel mari. Qu'il n'appartenait qu'à elle de connaître vraiment. Son cœur se mit à battre brusquement, lui coupant le souffle ; une nouvelle perspective, un fol espoir renaissant en elle.

« Ginny... J'ai peut-être une idée. »

Elle se leva, engouffrant rapidement ses affaires éparpillées dans son sac, déterminée.

« Je dois aller à la bibliothèque. »

Un éclat de rire échappa à son amie qui secoua la tête tristement.

« Ginny », ajouta Hermione gentiment face au sourire triste de sa camarade, « ça va aller. »

Ça allait aller. Ca devait. Elle avait un plan.