CHAPITRE 8
Avril 2020
Le jour suivant fut une nouvelle succession d'heures ternes pour Anna, enfermée dans son appartement sans rien à faire. Elle surfa un peu sur internet à la recherche d'un piano électronique, mais les prix affichés la firent fuir. Même si c'était son anniversaire la semaine suivante, elle ne pouvait pas se permettre un tel cadeau. Malheureusement le confinement rendait impossible un achat sur Le Bon Coin ou autre site de vente d'occasion. Au moins pour plusieurs semaines (elle n'osa penser mois). Et jamais elle n'oserait réclamer un cadeau si coûteux à ses proches. Elle était quasi sûre que si Mary avait vent de ses projets de se remettre au piano, elle lui en achèterait un, mais Anna ne voulait vraiment pas qu'elle dépense autant d'argent pour un cadeau d'anniversaire, même si son amie n'en manquait pas. Cela serait plutôt humiliant. Elle décida donc de ne pas partager ses envies musicales avec Mary. Peut-être quand elle aurait été payée de toutes ses heures supplémentaires pour ses gardes Covid, elle pourrait regarder de nouveau. Mais ça ne serait pas avant plusieurs mois. Soupirant, Anna referma son portable et se leva. Ses yeux s'arrêtèrent sur les deux sacs poubelles qui attendaient près de la porte, et elle se décida à les descendre au local poubelle. Elle attrapa un masque et enfila ses chaussures. En ouvrant la porte de son appartement pour sortir dans le couloir, elle faillit trébucher sur un grand saladier, fermé par du film plastique, avec un Post-it collé dessus. En l'examinant de plus près, elle vit que le saladier était rempli de cookies à l'air délicieux. Sur la note était écrit : « Salut Anna, Keisha et moi avons fait ces cookies pour toi, en remerciement pour ton travail à l'hôpital. On espère que tu les apprécieras. Jim ». Anna sourit. Keisha, sa petite voisine du rez-de-chaussée, âgée de huit ans, était actuellement confinée avec ses parents Jim et Helen. Bon, conclut Anna, certains voisins étaient plus sympathiques que d'autres. Elle alla poser le saladier sur la table de la cuisine, et retourna à sa tâche initiale, à savoir descendre les poubelles.
x x x x
Quand Anna partit au travail le lendemain, elle vit Keisha qui l'observait à travers la fenêtre de son appartement. Elle s'arrêta et fit signe à la petite fille, en tenant son vélo de l'autre main. La petite fille ouvrit la fenêtre, et lui rendit son salut :
- Bonjour Anna !
- Salut Keisha ! Merci beaucoup pour les cookies, ils sont délicieux ! Je les adore ! Je te rapporterai le saladier ce soir.
Alors qu'elle continuait son chemin, la petite fille la rappela :
- Anna, attends, j'ai autre chose pour toi !
Keisha disparut quelques secondes, et revint avec sa mère. Elle tendit à Anna une feuille de papier à travers la fenêtre ouverte. Anna l'attrapa, et la regarda. Elle sentit ses yeux picoter en observant les détails du dessin que l'enfant avait fait pour elle : un dame docteur blonde, se tenant debout près d'une personne alitée sur un lit d'hôpital. En travers de la feuille, était inscrit d'une écriture enfantine : « Merci le NHS et merci Docteur Anna ». La voix chargée par l'émotion, Anna regarda Keisha et sourit :
- Merci beaucoup Keisha, c'est magnifique. Je vais afficher ce dessin dans mon bureau à l'hôpital !
Elle plia la feuille en quatre et la mit délicatement dans son sac.
- Je dois y aller maintenant, mais Helen, remercie bien Jim pour les cookies ! Je rapporterai le plat ce soir.
- Ce n'est pas pressé, assura Helen. Bonne chance au boulot. Fais attention à toi.
- Merci, acquiesça Anna, avant d'enfourcher son vélo et de s'éloigner.
Elle salua une dernière fois Keisha avant de tourner au coin de la rue et de disparaître.
x x x x
Les jours suivants au travail furent mornes. Anna avait mal en voyant Phyllis qui semblait si affectée. Un matin, la cadre infirmière avait annoncé à l'équipe que les obsèques de Joe se dérouleraient deux jours plus tard. Sa sœur, qui organisait les choses, avait eu du mal à trouver un créneau disponible, car les églises étaient débordées par le nombre de cérémonies funèbres. Le nombre de participants était limité pour raison de sécurité, donc ils ne pourraient pas se rendre collectivement rendre un dernier hommage à leur collègue. Phyllis se proposa pour représenter toute l'équipe du service de réanimation. Tout le monde approuva, et ils se cotisèrent pour une composition florale. Cela semblait si étrange, de ne pas pouvoir assister aux obsèques d'une personne comme on le souhaitait. Se rassembler pour présenter ses respects à une personne décédée faisait partie des choses qui définissent l'être humain. Et maintenant ils ne pouvaient même pas faire cela. C'était un des côtés les plus difficiles de la pandémie, songea Anna. Ne pas avoir la possibilité de dire au revoir correctement à ses proches, constituait un traumatisme qui laisserait forcément des traces profondes dans le cœur et le psychisme des gens.
En faisant sa ronde ce jour-là avec son interne Prikesht, Anna et lui évoquèrent un autre côté négatif du travail en unité Covid : à côté des difficultés relationnelles avec les familles qui étaient tenues à l'écart du service, à côté du risque pour leur propre santé, et a côté de la létalité intrinsèque de la maladie qui leur faisait perdre un grand nombre de patients, une autre caractéristique du travail en unité Covid, était l'ennui de s'occuper jour après jour d'une seule maladie. Ce qu'Anna appréciait beaucoup dans la réanimation, habituellement, était la large variété des pathologies auxquelles elle était confrontée. Rassembler les indices cliniques, biologiques et radiologiques, les organiser pour conclure à un diagnostic, comme on conduirait une enquête policière, et déduire quel traitement devait être prescrit au patient, cela était intellectuellement stimulant, et Anna aimait cela. A force de gérer uniquement des patients atteints de Covid depuis plusieurs semaines, elle se sentait parfois comme un robot, à répéter les mêmes prescriptions sans fin, et à répéter les mêmes choses aux patients et aux familles. Bien sûr, certains patients étaient atteints de maladies chroniques qui devaient également être traitées, mais en règle générale, c'était un peu comme recevoir le même patient encore et encore. Heureusement, son unité s'était engagée dans une étude clinique contrôlée randomisée, qui se déroulait dans des dizaines d'hôpitaux simultanément, afin d'étudier l'effet de différents médicaments sur le Covid. Cela lui apportait du travail supplémentaire, mais c'était gratifiant de savoir qu'ils participaient à faire évoluer le savoir médical.
x x x x
L'anniversaire d'Anna, fin avril, tomba un vendredi, sur un de ses jours off, entre deux longues séries de gardes. Même si elle n'aimait pas rester chez elle à ne rien faire, elle était contente de pouvoir se reposer un peu, et de pouvoir respirer librement pendant toute une journée sans un de ces satanés masques FFP2 qui lui gravaient des marques rouges sur le visage. Assise à sa table de cuisine ce matin-là, elle soupira en songeant à la journée qui l'attendait. Cela s'annonçait comme l'anniversaire le plus ennuyeux qu'elle avait eu depuis longtemps. Elle n'était pas du genre à s'organiser de grandes fêtes d'anniversaire, c'était plutôt le style de Mary. Mais quand même, un simple dîner d'anniversaire avec les personnes qu'elle aimait aurait été agréable. Elle aurait même peut-être invité John Bates cette année. Son cœur s'accéléra un peu quand elle pensa à lui. Au cours des dernières semaines, ils s'étaient en quelque sorte rapprochés, enfin, autant que faire se peut sans pouvoir se rencontrer. Elle réalisa qu'elle attendait avec impatience leurs papotages sur Whatsapp. Elle frissonna un instant à la pensée qu'il puisse naître une relation amoureuse entre eux. « NON », pensa-t-elle fermement. Elle ne cherchait pas de petit ami. Ils seraient amis, et rien de plus. Il avait intérêt à rester sur la même longueur d'onde qu'elle. Elle regretterait son amitié, mais n'hésiterait pas à l'envoyer balader si jamais il s'avisait de réclamer plus. De toute façon, ce problème ne risquait pas de se présenter avant un certain temps, se rassura-t-elle. Après son petit-déjeuner, elle passa une demi-heure à pédaler sur son vélo d'appartement sur une playlist de dance music, avant de partir prendre sa douche. Elle venait d'en sortir, et était en train de se sécher les cheveux avec une serviette, quand la sonnette retentit. Elle sursauta, car elle n'attendait personne.
- Oui ?, répondit-elle à l'interphone.
- Bonjour, livraison pour Mme Anna Smith.
- Euh, oui…
Elle n'avait rien commandé ces derniers temps. Peut-être quelqu'un lui avait-il envoyé un cadeau d'anniversaire. Les Carson ? Mary ? Ou John ? Non, elle ne lui avait pas dit quand était son anniversaire.
- Je vais laisser les paquets à votre porte, madame, dit le livreur.
- D'accord, merci.
Deux minutes plus tard, la sonnette de son appartement sonna à son tour. Elle attendit une minute de plus, et ouvrit la porte. Le livreur était déjà parti, mais il avait déposé deux colis et une magnifique plante sur le seuil. Anna sourit, et rentra tous les paquets dans son appartement. Elle posa la plante près d'une fenêtre et l'arrosa. Puis elle entreprit d'ouvrir la première boîte. Elle contenait plusieurs autres boîtes plus petites, qui apparemment renfermaient le nécessaire pour un savoureux déjeuner d'anniversaire. Un note de la main de Mary précisait : « Sois sur Skype à midi et demi. Instructions pour le repas à l'intérieur, de la part de Mme Patmore. » Il y avait là un repas complet de trois plats, avec un très joli gâteau d'anniversaire en portion individuelle. Chère Mary, pensa Anna, en lisant les instructions de la cuisinière pour réchauffer le repas. Quand elle eut mis les boîtes au frais, Anna se tourna vers le deuxième paquet. Il contenait aussi une autre boîte, avec une étiquette : « Ne pas ouvrir avant qu'on te le dise. »
Quand midi et demi sonna, Anna était installée à sa table de cuisine, une assiette posée devant son ordinateur portable, connecté à Skype. Le plat principal réchauffait tranquillement au four, et elle avait disposé l'entrée sur l'assiette, une salade d'avocat et de saumon fumé. Pile à l'heure, l'appel en provenance de Downton sonna, et elle se connecta. Le visage souriant de Mary apparut, Timmy à ses côtés.
- Salut Anna !
- Mary ! Waouh, c'est juste… splendide ! Merci mille fois, tu n'aurais pas dû t'embêter autant…
- Et pourquoi exactement ne devrais-je pas m'embêter pour l'anniversaire de ma meilleure amie ? Meilleure amie qui travaille comme une dingue jour et nuit, devrais-je préciser.
- Eh bien, merci, vraiment. Tu es une amie précieuse, Mary Crawley.
Elle se tourna ensuite vers Timmy :
- Salut Timmy-chou ! Comment vas-tu, mon cœur ?
- JOYEUX ANNIVERSAIRE MAMAN !, hurla le petit garçon.
Anna et Mary éclatèrent de rire.
- Tu l'as bien coaché, dit Anna.
- Attends, ça fait plus d'une semaine qu'on y travaille ! Timmy a aidé Mme Patmore à cuisiner le repas, à faire le gâteau, et il a aussi travaillé sur ton cadeau, n'est-ce pas Timmy ?
- Oui, on t'a fait un cadeau, tu l'as reçu ?, demanda Timmy, excité.
- Absolument mon chéri, répondit Anna.
Elle montra la boîte dans le champ de la caméra afin que son fils puisse la voir.
- Je ne sais pas ce qu'il y a dedans, mais je sais que je vais l'adorer !
- Ouvre-le maman !
- Ah, Timmy, dit Mary, posant une main sur le bras de l'enfant, on va manger d'abord, après on chantera Joyeux Anniversaire à maman, ensuite elle soufflera ses bougies, tu as des bougies, hein, Anna ?, ajouta-t-elle en regardant Anna à travers la webcam.
- Je pense…, dit Anna.
- Super. Et quand on aura fait tout ça, maman ouvrira les cadeaux. D'accord Timmy ?
- D'accord, minauda le garçon, impatient de voir ses cadeaux déballés.
- Allez, passons à table, dit Mary.
- Vous avez le même menu que moi ?
- Bien sûr.
- C'est tellement gentil de ta part Mary, jamais je n'aurais imaginé que tu organises quelque chose comme ça… Tu en fais déjà tellement.
- Si je dois être honnête, l'idée vient de Matthew, avoua Mary.
Matthew, qui était assis en face de Mary, fit le tour de la table pour venir saluer Anna dans la webcam.
- Salut Anna ! Joyeux anniversaire !
- Merci Matthew !
Ils attaquèrent la salade d'avocat et saumon, tout en bavardant. Mary raconta les dernières aventures et bêtises de George et Timmy à Downton Abbey. Anna parla un peu du travail, mais pas trop. Elle mentionna également ses discussion avec John Bates, ce à quoi Mary répondit d'un air entendu :
- Oh, oui, je suis au courant, Bates m'a tout raconté. C'est bien de savoir que tu auras quelqu'un avec qui sortir dès que le confinement sera terminé. Je veux dire, il est un peu vieux à mon goût, mais c'est un gars bien.
- Mary ! Je ne veux pas sortir avec lui, ne commence pas avec ça. Nous. Sommes. Amis.
Anna insista sur chaque mot de sa dernière phrase, tandis que Mary opinait en affichant une mine complètement incrédule.
- Oui, bien sûr. Si tu le dis.
- Laisse tomber, Mary, s'il te plaît.
- D'accord, d'accord. Alors, que penses-tu de ce parmentier de canard ?; demanda Mary au sujet du plat principal, pour changer de sujet.
- Hmm, c'est délicieux. S'il te plaît, fais passer mes plus vifs remerciements à Mme Patmore. Tu sais, je pensais que si je ne fêtais pas mon anniversaire cette année, peut-être que je pourrais l'ignorer, et continuer à avoir trente-et-un ans pendant encore un an. Maintenant tu as tout gâché, je suis obligée d'accepter que j'ai trente-deux ans…
Mary s'esclaffa de bon cœur.
- Ah, oui, désolée pour ça.
Quand ils eurent fini le plat principal, Anna alla chercher une bougie dans un de ses tiroirs, et l'enfonça dans la jolie charlotte aux fraises. Elle écouta Timmy, George, Mary et Matthew, tous rassemblés devant la caméra, lui chanter « Joyeux anniversaire ». Un nœud se forma dans sa gorge, et malgré le contexte, elle se sentit reconnaissante d'avoir de si bons amis, et un fils si charmant. Quand elle eut soufflé sa bougie, Timmy cria :
- Maintenant tu ouvres les cadeaux !
- Oui mon chéri !, approuva Anna.
Elle prit le paquet-cadeau, et déchira délicatement le papier cadeau qui l'entourait. La boîte contenait plusieurs choses : une feuille de papier roulée, entourée d'un ruban, un petit sac en coton, et une boîte à bijou. Anna prit d'abord le papier, et défit le ruban. C'était un dessin de Timmy, représentant Downton Abbey, avec George et lui jouant dans le parc, accompagnés d'une créature à quatre pattes, qu'Anna supposa être Isis, le chien de Robert Crawley.
- Oh, c'est magnifique mon chéri, merci beaucoup !
Elle mima l'envoi d'un baiser vers Timmy à travers la caméra, et continua avec le petit sac en coton. Elle desserra le lien qui le maintenait fermé, et laissa le contenu tomber sur la table. C'était un collier, composé de perles enfantines très colorées. Au milieu des perles de couleur, il y avait des perles « lettres », qui épelaient « Timmy aime maman ». Anna sentit ses yeux humides à la vue du cadeau fait main, pensant à tout le temps et les efforts que son petit garçon avait du y mettre, et à ce moment elle regrettait amèrement de ne pas pouvoir le prendre dans ses bras et l'embrasser partout. Sa voix tremblait légèrement quand elle passa le collier autour de son cou et dit :
- Merci Timmy, je l'adore, il est merveilleux.
- Je l'ai fait pour toi. J'ai fait les mots, Tante Mary m'a montré les lettres.
- Oui, je vois, il est très bien fait. Je t'aime aussi Timmy, très très fort, et j'espère que tu pourras rentrer à la maison très vite.
Anna essuya ses yeux, et sourit, en attrapant le dernier présent. Elle ouvrit la petite boîte à bijou, et y trouva une simple mais très belle broche en forme de cœur. Elle la sortit de la boîte, et admira comme elle brillait dans la lumière. Elle regarda Mary, ses yeux pleins de nouvelles larmes.
- Merci Mary, elle est magnifique.
Mary lui sourit en opinant de la tête.
- Mon Dieu, ajouta Anna avec un rire ému, vous me faites tous pleurer. Merci mille fois d'avoir pris le temps de préparer tout ça.
- Avec plaisir. Ça nous a occupés, au moins. J'aurais préféré pouvoir partager ce repas face à face, mais bon… J'espère qu'on pourra se voir pour l'anniversaire de Timmy au moins.
- J'espère aussi…
Timmy était né fin Mai, environ un mois après l'anniversaire d'Anna. Elle n'y avait pas vraiment encore réfléchi, mais maintenant qu'elle y pensait, elle espérait vraiment que le confinement serait levé à ce moment-là, car elle ne voulait même pas imaginer comme elle se sentirait déprimée si elle ne pouvait pas être avec son fils pour son anniversaire.
x x x x
Plus tard dans l'après-midi, alors qu'elle se préparait à sortir faire des courses, le téléphone d'Anna sonna. C'était Charles et Elsie Carson, qui l'appelaient pour lui souhaiter un bon anniversaire également. Anna leur raconta le déjeuner d'anniversaire que les Crawley avaient préparé pour elle, et les Carson furent ravis de savoir qu'elle n'avait pas été complètement seule en ce jour particulier. Timmy et Anna leur manquaient énormément, surtout en ce genre d'occasions.
- J'ai un cadeau pour toi aussi, dit Charles, mais je voudrais attendre qu'on puisse se voir pour te le donner, si tu n'y vois pas d'inconvénient ?
- Bien sûr Oncle Charles, ce n'est pas pressé. Et merci.
Ils discutèrent quelques minutes de plus, puis Anna raccrocha. Elle était en train d'enfiler ses chaussures quand la sonnette du bas retentit de nouveau. Qu'est-ce que c'était, cette fois, se demanda-t-elle.
- Oui ?
- Bonjour, j'ai une livraison pour Mme Anna Smith.
- Euh, oui, quatrième étage.
Elle n'avait aucune idée de ce que ça pouvait être ou de qui ça pouvait venir. Toutes les personnes qui connaissaient et s'intéressaient à son anniversaire lui avait déjà envoyé quelque chose, ou appelé, ou envoyé un message. Seul John ne l'avait pas contactée ce jour-là, mais une fois encore, elle pensait qu'il ne connaissait pas la date de son anniversaire. Elle mit un masque pour ouvrir la porte, et vit que le livreur était encore dans le couloir, se tenant à côté d'un objet très grand, posé sur une planche à roulettes, et caché sous une couverture.
- Qu'est-ce que…, commença-t-elle, bouche bée devant l'objet.
- Vous êtes Mme Smith ?
- Oui, mais, c'est quoi ?
- Livraison de la part de M. John Bates.
- Quoi ?
- Puis-je entrer ?, demanda le livreur, imperturbable.
- Euh, oui, bien sûr.
Quand il eut poussé sa charge dans le salon d'Anna, il retira le couverture, et Anna ouvrit de grands yeux à la vue du piano électrique qui était caché dessous.
- Où voulez-vous que je le mette, madame ?
- Euh… Je…, bafouilla Anna.
Elle avisa un coin vide contre le mur de son salon, et le montra du doigt :
- Là-bas, s'il vous plaît.
L'homme poussa le piano près de l'endroit désigné, puis Anna et lui soulevèrent chacun un bout de l'instrument, et le posèrent sur le sol. Quand le piano fut en place, l'homme lui présenta un papier :
- Pouvez-vous signer ici madame, s'il vous plaît ?
Anna obéit, et l'homme toucha sa casquette :
- Bonne journée madame.
- Oui merci, au revoir, répondit Anna distraitement.
Quand l'homme eut quitté les lieux, fermant la porte de l'appartement derrière lui, Anna se tint un moment, sans voix, devant l'instrument. Quand elle retrouva ses facultés, elle prit son téléphone, composa un numéro, et attendit.
- Allô ?
- John Bates, QUE DIABLE AS-TU FAIT ?
