Il finit par ouvrir les yeux quelques minutes plus tard.

« Putain mais tu m'as foutu la trouille. Qu'est-ce qui t'es arrivé ?

- Rien ça va.

- Bon Antoine, t'arrête de te foutre de ma gueule maintenant. Je passe peut-être mon temps à m'occuper des morts, mais je sais reconnaître quand un vivant va pas bien.

- Je te préviens tu dis rien à Candice. C'est clair ?

- Antoine !

- Bon alors qu'est-ce qu'on a ?, éluda-t-il en voyant Mehdi et Val arriver »

Antoine vit Nathalie souffler et le fixer durement. Certes il avait décidé de ne rien dire, mais la quinquagénaire était bien décidée à obtenir des réponses rapidement. Elle se dirigea vers le cadavre et exposa la situation :

« Arnaud Jouarre, 38 ans. A première vue il est mort ce matin aux alentours de 5h00. Il s'est pris cinq coups de couteau dans le thorax. Lame plutôt tranchante de type cuisine je dirais. Le tueur n'a rien laissé : ni empreinte, ni arme du crime.

-Qui a découvert le corps ?, demanda Mehdi.

- Un joggeur. Il faisait sa course matinale et il est tombé dessus.

- À mon avis personne n'a rien vu, renchérit Val, C'est une ruelle sombre et pas très fréquenté. Surtout à 5h du mat' quoi.

- Vous allez quand même faire une enquête de proximité, on sait jamais, si quelqu'un a entendu quelque chose…, ordonna Antoine.

- Ok. Et ses papiers ?

- Il avait tout sur lui !, répliqua Nathalie en tendant le portefeuille à ses collègues.

- Il bossait dans la boutique de lingerie au bout de la rue là-bas, il était même gérant., précisa Val en sortant ses papiers.

- Bien, vous interrogez les alentours. Vu le nombre d'appartements ici, ça devrait aller vite et vous me rejoignez à la boutique ! »

Les officiers de police acquiescèrent et partirent vaquer à leur tâche. Antoine observa la victime et consulta ses papiers, avant de tourner les talons. Rapidement, il fut interrompu dans sa marche par Nathalie.

« Antoine !

- Quoi encore ?

- C'est à cause de ton accident c'est ça ?, Antoine souffla.

- Qu'est-ce que ça peut te faire ?, lança-t-il sèchement.

- Je suis ton amie, et je suis inquiète. Je vois bien que ça va pas, tenta-t-elle doucement.

- Ok… J'ai fait des analyses et le médecin m'a découvert un angiome. Mais tout est sous contrôle, j'ai des médicaments exprès, y a pas à s'inquiéter.

- Tout est sous contrôle ? C'est vrai que ce matin t'avais l'air bien !, ironisa-t-elle.

- Oui bon ça va. Mais tu dis rien à Candice, c'est clair ?

- Elle s'inquiète tu sais…

- C'est pour ça qu'il ne faut rien lui dire. J'ai pas envie qu'elle s'inquiète encore plus.

- Comme tu voudras. Mais je serai toi, je lui parlerai.

- Sauf que t'es pas moi. Donc tu dis rien et tout ira bien. Merci !, répondit-il sèchement et agacé. »

Val et Mehdi retrouvèrent Antoine devant la boutique de lingerie où travaillait la victime. Ils rentrèrent et saluèrent la vendeuse qui semblait ranger les produits en rayon. Par chance, aucun client n'était dans la boutique.

« Votre patron était bien Arnaud Jouarre ?

- Euh oui. Mais pourquoi était ?

- Il est mort madame.

- Ah… D'accord…, répondit-elle choquée.

- Vous vous appelez ?

- Julie Girardin, je remplace la vendeuse en poste pendant ses congés. Je travaille rarement ici.

- Elle est en congé depuis quand ?

- Euh, bientôt 10 jours. Elle doit rentrer demain.

- D'accord. Vous pourriez nous donner ses coordonnées, qu'on vérifie ça ?, demanda Val en sortant son calepin.

- Oui, oui. Pas de soucis, affirma la vendeuse en se dirigeant vers le comptoir, Voilà ! Tenez.

- Est-ce que quelqu'un d'autre avait l'habitude de bosser ici ?, demanda Mehdi.

- Je pense qu'il faudrait voir avec Valérie la cogérante. Ce sera elle la plus a même de répondre à vos questions.

- Vous savez où on peut la joindre ?

- Ah bah justement, la voilà, répondit-elle en observant la brune passer la porte de la boutique.

- Ah beh y en a du monde pour un lundi matin !, s'exclama-t-elle joviale.

- Bonjour, police. On est là pour la mort d'Arnaud Jouarre, lâcha Antoine.

- Arnaud est mort ?, demanda la cogérante choquée. »

Valérie les entraîna dans l'arrière-boutique. Elle déposa ses affaires et s'affala sur une chaise, encore secouée de la nouvelle qu'elle venait d'apprendre. Antoine la questionna sur la vie personnelle d'Arnaud. D'après sa collègue, hormis le travail, sa vie était plutôt plate. Pas de femmes, ni d'enfants. Il était propriétaire de la boutique depuis plus de dix ans. Rien de transcendant ne ressortait de ce portrait quasi parfait du commercial. Mehdi l'entraîna ensuite sur le terrain financier :

« Et les comptes ? Vous étiez plutôt dans le rouge ou l'affaire marchait bien ?

- Ça dépend des périodes vous savez… Ok, on a pas mal été affaiblis par la crise de 2008. On s'est retrouvés en redressement judiciaire. Mais Arnaud n'a rien lâché ! Il a tout fait pour remonter la pente et ça a fonctionné.

- Tout fait ? C'est-à-dire ?, questionna le commissaire.

- Il travaillait du matin au soir. Il a même changé les horaires de la boutique pour gagner davantage. Mais… Il a été obligé de de licencier une des deux vendeuses, Vanessa Carlier. Il a pas eu le choix. Elle lui en a beaucoup voulu, mais ce sont des rancœurs passées.

- Il va nous falloir ses coordonnées également. En attendant, on vous laisse la boutique ouverte, vous restez à notre disposition, merci., conclut le commissaire en quittant les locaux. »

Les trois collègues sortirent de la boutique et se dirigèrent vers la voiture afin de faire un point sur la situation.

« Qu'est-ce que t'en penses ? demanda Mehdi à son supérieur.

- Elles ont l'air sincère. Difficile de se prononcer pour l'instant. Je pense que l'avis de Candice aurait pu nous aider…

- Elle est où d'ailleurs ?, demandant Val.

- À l'hôpital avec Jules d'après Nathalie. On se retrouve chez la victime ? C'est juste à côté. En attendant, je vais essayer de l'appeler voir si elle peut nous rejoindre.

- Ok ! À toute. »

Antoine sortit son téléphone et composa le numéro de sa compagne, légèrement inquiet qu'elle lui en veuille de ne pas l'avoir rappelé plus tôt. Candice était assise dans la salle d'attente des urgences. Elle trouvait le temps tellement long… La coupure de Jules n'était pas une priorité absolue. Alors après lui avoir prodigué les premiers soins, ils les avaient fait patienter dans la salle d'attente. La sonnerie de son téléphone résonna dans la pièce. Elle le récupéra et décrocha en s'éloignant de son fils.

« Tiens un revenant !

- Désolé… J'ai pas pu te répondre avant.

- Oh… Tu devais être sacrément occupé dis-donc.

- Ça va Jules ?, demanda-t-il pour esquiver.

- Ça va mais l'attente est longue, répondit-elle sèchement.

- T'es obligée de rester avec lui ? Non parce qu'on a un cadavre sur les bras et j'aurais aimé ton avis… On part chez lui là.

- Je vais voir avec le docteur ce que je peux faire. Donne-moi l'adresse par sms.

- Ok ! Je t'…, Candice raccrocha, Sympa…, conclut le commissaire en se rendant compte que sa compagne lui avait raccroché au nez.

C'était officiel, elle lui en voulait et Antoine sentait qu'il allait galérer à se faire pardonner.