Chapitre 2
Lorsque Josie avait finalement quitté la salle de classe après avoir pris ses engagements auprès de son paternel, elle constatait que Finch l'attendait bel et bien dans le couloir. L'esprit contrarié, la brune l'avait rejoint tandis que l'adolescente, appuyé contre le mur avec un pied replié vers l'arrière à partir du genou, observait les alentours, curieuse de savoir ce qui se passait autour d'elle. Et Josie aurait été tentée de faire de même si Lizzie ne s'était pas ruée vers elles en voyant sa sœur jumelle sortir de la pièce.
- Jo, il faut qu'on parle sérieusement, déclara-t-elle avec contrariété. Maman arrive ce soir et il faut à tout prix que l'on décore le salon et qu'on lui prépare son plat préféré.
- Mais tu ne sais même pas cuisiner…
Les mots de Josie semblèrent blesser la blonde. Relevant la tête avec un air consterné, l'adolescente toisait sa sœur aînée quelques instants avant de secouer la tête avec vivacité.
- Bien sûr que je ne sais pas cuisiner, admit-elle avec évidence. C'est pour ça que j'ai besoin de toi pour le faire.
Lizzie marquait une pause rapide, durant laquelle ses yeux se teintèrent d'une lueur pétillante de supplication.
- Josie, insista-t-elle. Tu dois m'aider. Pour maman.
L'incertitude traversait l'esprit de la brune tandis qu'elle coulait un regard vers Finch qui arborait ce même sourire amusé qu'elle avait toujours lorsqu'elle était témoin de ce genre de scène entre les sœurs Saltzman. Longtemps, Finch avait entretenu une relation bancale avec Lizzie, du fait que cette dernière s'était fait une mission de lui rendre la vie dure pour qu'elle ne se rapproche pas de Josie. Lizzie avait été persuadée qu'elle n'était pas bonne pour sa sœur, durant des mois. Et finalement, un jour, la petite guerre qui les opposaient avait cessée. Lizzie s'était résignée à laisser sa petite sœur faire ses propres choix et s'était mise à tolérer Finch qui, finalement, semblait exercer une bonne influence sur l'aînée des jumelles.
Et comme à chaque fois que Josie lui lançait ce regard plein d'hésitation, la jeune femme au teint basané se permettait de donner son avis, consciente que Josie prendrait en considération sa pensée.
- Ce n'est pas une mauvaise idée, ça fait longtemps que je ne vous ai pas vu préparer quelque chose ensemble. Je pourrais vous aider aussi, si Lizzie est d'accord.
Un immense sourire vint automatiquement fendre les lèvres de la blonde sur ces paroles. Elle n'était toujours pas un fervent membre du fan club de la petite-amie de sa sœur mais elle appréciait que celle-ci approuve ses exigences. Et puis, au fond, il fallait dire que Lizzie n'avait jamais approuvé aucune des relations amoureuses qu'avaient entretenues Josie par le passé, il n'y avait donc pas de raison pour que cela change aujourd'hui.
- Si ça peut convaincre ma sœur et que tu ne mets pas tes sales pattes empoisonnées de goudou dans la nourriture, je ne vois aucun inconvénient à ce que tu contribues à notre petite fête surprise.
Josie s'apprêtait à ouvrir la bouche pour répondre lorsque soudainement, des éclats de voix attirèrent l'attention de toutes les personnes présentes dans le couloir.
- Je t'interdis de prononcer son nom ! S'était égosillé une voix qui ne leur était que trop familière.
L'aînée des jumelles échangeait un vif coup d'œil avec sa sœur cadette, avant qu'elles ne se tournent d'un même mouvement vers la source de l'attention générale, au bout du couloir.
Debout, face à face, un étudiant de deuxième année toisait Hope avec un rictus sur le visage et le regard rieur. Hope n'était pas très grande, ce qui faisait que, bien qu'elle soit plus âgée que le jeune homme, celui-ci la dépassait sans mal de quelques centimètres, la forçant à relever la tête pour lui adresser une œillade noire. Les poings serrés contre sa taille, l'enfant unique de la célèbre famille Mikaelson, généreux et riches donateurs ayant permis de construire ce pensionnat dans lequel ils étaient tous enfermés, s'apprêtait à laisser sortir l'étendue de sa colère. Le self-control n'avait malheureusement jamais été l'un des points forts de la protégée du père Saltzman.
- Landon, Landon, Landon, répéta le garçon en prenant un malin plaisir à mettre son interlocutrice à mal. Quoi, ça te blesse ? Tu devrais avoir l'habitude pourtant, il t'a juste abandonnée comme ton père l'a fait avant lui. Peut-être que c'est chez toi que quelque chose ne tourne pas rond, finalement…
La dernière phrase de l'afro-américain restait en suspend dans les airs tandis qu'il se retrouvait propulsé sur le sol dur du couloir derrière lui. Folle de rage, Josie pouvait voir tout l'effort que sa vieille amie d'enfance mettait pour ne pas se jeter un peu plus sur le garçon et finir ce qu'elle avait commencé. Lui, ébahi par l'audace de l'adolescente, l'observait maintenant avec une lueur de peur dans ses prunelles chocolat, conscient qu'à vouloir impressionner ses amis, il s'était attiré les foudres de la mauvaise personne.
- Relève-toi mec, qu'est-ce que t'attends ? S'insurgea un second garçon dans la foule d'étudiants. Tu ne vas quand même pas te laisser mettre K.O par une meuf ?
Le provocateur ne répondait rien à son ami, bien trop occupé à fixer des yeux son assaillante pour s'assurer de pouvoir esquiver un coup futur. Mais aucun autre coup ne vint. La mâchoire aussi serrée que l'était ses poings, Hope avait trouvé la force de reculer d'un pas en mordant sa joue. C'était une nouvelle technique qu'elle essayait avec sa psychologue : remplacer la colère par la douleur. Et ça fonctionnait assez bien, elle devait l'avouer.
- Tu ne vaux même pas la peine que je me batte contre toi, lâcha-t-elle avec dédain. Tu aboies beaucoup mais tu es incapable de mordre. Au moins, maintenant, tes amis verront avec quelle mauviette ils trainent.
Sans laisser le temps à son interlocuteur de lui répondre quoi que ce soit, la jeune orpheline avait tourné les talons et s'était enfuie par la porte principale, en direction du jardin. Voyant cela, un profond soupir s'échappait de la gorge de Josie. Pourquoi fallait-il que tout soit si compliqué ? A croire que son père avait deviné que quelque chose de ce genre allait se produire lorsqu'il l'avait chargé d'aller parler à Hope, pour laquelle ses sentiments étaient encore assez troubles. Lizzie la détestait, elle, mais contrairement à sa sœur, Josie était partagée entre l'amour qu'elle avait un jour éprouvé pour la jeune femme, et son ressentiment face à la manière qu'elle avait de toujours accaparer leur propre père.
Et pourtant, les paroles de ce dernier et la promesse qu'elle lui avait faite ne cessait désormais de tourner en boucle dans son esprit. Même si elle n'en mourait pas d'envie, Josie savait que c'était le moment pour elle de rejoindre Hope et d'avoir une discussion avec elle. Mais pas l'une de ses discussions basiques où elles se demandaient comment elles allaient sans en avoir réellement quelque chose à faire. Non. Elles devaient avoir le genre de conversation où elles mettraient à nu leurs sentiments pour pouvoir aller de l'avant. Et Dieu seul savait à quel point Josie détestait ça. Elle le détestait déjà quand il s'agissait de l'écrire dans son journal pour extérioriser, alors le confier à quelqu'un… à Hope…
Que quelqu'un la pende, pensait-elle intérieurement.
- Je devrais aller lui parler, annonça-t-elle à ses deux camarades de but en blanc.
L'une comme l'autre, Lizzie et Finch froncèrent les sourcils, peu sûres des paroles de leur compatriote.
- Quoi ? S'indigna instantanément Lizzie avec une grimace de dégoût. Mais pourquoi faire ? Hope n'a que ce qu'elle mérite. A toujours vouloir être le centre du monde, forcément, on attire l'attention.
Haussant un sourcil, Josie retenait un rire. Avait-elle bien entendu ? Elle n'en croyait pas ses oreilles. Voilà que c'était l'hôpital qui se foutait de la charité. S'il y avait bien une personne qui était mal placée pour tenir ce genre de discours, c'était Lizzie. Toutefois, elle se gardait bien d'en faire la remarque pour ne pas la blesser.
- J'ai promis à papa que je le ferais, expliqua Josie tandis que sa jumelle blonde secouait vivement la tête en signe de dénégation. Je vous retrouve dans le salon juste après, d'accord ?
- Si tu veux, soupira alors Lizzie en levant les yeux au ciel. Mais tu ne viendras pas te plaindre quand elle t'aura entraîné dans sa dépression.
