Chapitre 3

- Hope ?

Comme elle le devait, et comme elle l'avait annoncé à sa sœur et à Finch, Josie avait suivi Hope après son départ. Arpentant désormais l'immense jardin de leur pensionnat à sa recherche, l'aînée des jumelles Saltzman jetait sans cesse de frénétiques œillades autour d'elle, sans jamais parvenir à poser les yeux sur la personne qu'elle cherchait pourtant avec ferveur.

- Hope ? Appela-t-elle à nouveau.

Sans grand succès néanmoins. Seul le son de sa voix brisait le silence floral établit dans le jardin qui leur servait souvent de cour de récréation, avant qu'une nouvelle immensité d'absence sonore ne lui réponde.

Refusant d'abandonner la fille qu'elle avait jadis aimé, Josie s'évertuait à continuer à marcher parmi les arbres et les parterres de fleurs, dans le vain espoir qu'une voix réponde à la sienne. Après avoir franchi encore quelques mètres vers la forêt qui entourait la propriété, et qu'Hope aimait tant, son attention fut attirée par le bruit étouffé de sanglots que l'on retenait. De là où elle se trouvait, Josie devinait que l'adolescente l'avait parfaitement entendue l'appeler, mais qu'elle avait préféré ne pas répondre en espérant que celle-ci la laisserait seule en pensant qu'elle n'était pas là. Mais ce ne fût pas le cas.

Délicatement, Josie avait contourné le grand chêne qui marquait le début de la forêt et, sans grande surprise, elle y avait alors trouvé Hope, assise dans l'herbe, le dos posé contre l'arbre à l'écorce dure et inconfortable. Les genoux repliés contre sa poitrine, l'orpheline les avaient entourés de ses bras afin de pouvoir y enfouir sa tête, laissant tout le loisir à Josie d'observer ses épaules tressauter au rythme de ses larmes.

Cette vision déchirait le cœur de l'enfant Saltzman. Ce n'était pas la première fois qu'elle surprenait Hope en train de pleurer, mais c'était la première fois qu'elle devait la réconforter. Et au fond d'elle, c'était autant plus dur pour Josie qu'il s'agisse d'un chagrin d'amour. Car si elle-même avait été amenée à combattre ce genre de peine, elle n'était tout de même pas sûre d'être la personne la plus apte à donner des conseils, aux vues de tous les échecs qu'elle avait essuyé par le passé.

- Hope, murmura-t-elle, davantage pour elle-même que pour la dénommée.

- Va-t'en, Josie, ordonna cette dernière d'une voix tremblante, entre deux sanglots incontrôlés.

L'ordre de la brune ne fût jamais pris en compte par l'aînée des jumelles. Au contraire, contre toute attente de la part de Hope, la seule chose qu'avait entreprit la plus jeune d'elles deux, avait été de prendre place à ses côtés, en s'asseyant à son tour contre l'arbre à la circonférence imposante.

Un léger silence s'installait alors entre les deux adolescentes, uniquement brisé par les sanglots de la Mikaelson. A vrai dire, ni l'une, ni l'autre ne savait quoi dire à cet instant. Hope n'avait aucunement envie que Josie soit là, et Josie, elle, ne savait simplement pas par où commencer. C'est pourquoi elle était restée assise ainsi, pendant plusieurs minutes, le regard perdu sur l'herbe qui commençait à blanchir à cause de la tombée de la neige, devant elle, en cherchant quelles paroles pourraient le plus aider sa camarade. Et finalement, rien de ce qui lui venait ne lui semblait être convenable, pourtant, elle savait aussi que c'était à elle de briser le silence établi, sans quoi, elles resteraient assises là jusqu'à ce qu'elles soient congelées par le froid.

- Tu sais, ce que ce type a dit dans le couloir… tenta-t-elle avec une pointe d'hésitation, il avait tort. Ce n'est pas ta faute si Landon est partit.

Surprise des paroles de la brune, Hope avait relevé la tête et avait rivé un regard étonné sur Josie, avant de froncer les sourcils avec incompréhension. Comment la jumelle pouvait-elle assurer une chose pareille et paraître si sûre d'elle ?

- Qu'est-ce que tu peux bien en savoir, toi ?

Le ton de Hope, défensif et accusateur, fit naître un sourire furtif sur les lèvres de Josie. Comment pouvait-elle le savoir ? Se répétait-elle. Elle ne le pouvait pas. Tout simplement. Mais ce qu'elle savait en revanche, c'était l'horrible sentiment qu'éprouvait Hope à ce moment. Et le simple fait de se remémorer ce qu'elle avait elle-même ressenti par le passé fit grimacer la brune de douleur tandis que ses pupilles brunes se faisaient plus sombres encore, en raison de la tristesse qui la traversait soudainement. C'était le moment pour elle d'être honnête et de laisser tomber les murs qui les protégeait, même si elle n'aimait déjà pas l'idée de dévoiler ses sentiments profonds à Hope.

- Je le sais parce que c'est ce que je pensais aussi… quand Penelope a préféré me laisser pour rejoindre ce pensionnat en Belgique.

Josie marquait une pause, laissant à Hope l'opportunité de parler si elle le souhaitait, mais un simple coup d'œil à la jeune femme et à son expression attentive indiquait à la Saltzman que celle-ci attendait plus qu'une simple phrase sur son vécu. Alors, Josie reprenait :

- Je m'en voulais vraiment beaucoup, au début, car j'étais persuadée que ça devait venir de moi. Que peut-être, je n'avais simplement pas su lui montrer les bons signaux ou que j'avais simplement tout fait de travers. Puis, je me suis rendu compte que, parfois, il y a certaines personnes qui ont besoin de s'en aller et peu importe à quel point tu essaies de les retenir, peu importe à quel point tu les aimes plus que tout au monde… il s'en vont.

Un soupir s'échappait de la bouche de Josie tandis qu'elle mesurait à quel point ses paroles étaient censées. A quel point elle avait raison, et à quel point son cœur se serrait alors qu'elle avait le malheur de repenser à celle qui lui avait briser le cœur à deux reprises en une année.

- Et ce n'est pas notre faute, assura-t-elle d'une voix tremblante. On ne peut pas se blâmer pour une décision qui n'est pas la nôtre, Hope.

Le silence s'abattait de nouveau entre les deux adolescentes, durant lequel les mots de Josie faisaient doucement leur chemin dans l'esprit de sa camarade. Pendant tout son discours, l'orpheline était restée pendue aux lèvres de l'aînée des jumelles et, même si son cœur la faisait toujours atrocement souffrir, elle était forcée d'avouer que les paroles de la brune l'avaient légèrement apaisée. Ses pleures avaient diminués avant de s'arrêter, ne laissant plus comme seuls témoins que les poches rouges qui gisaient sous ses yeux mouillés et irrités.

Pour la première fois depuis qu'elle était arrivée dans ce pensionnat, Hope avait réellement l'impression d'avoir trouvé quelqu'un qui partageait sa peine et qui comprenait ce qu'elle ressentait. Et ce sentiment se confirmait lorsque son regard entrait en contact avec les belles prunelles ténébreuses de Josie, qui s'étaient mises à transpirer de souffrance. Cette même douleur qui faisait écho dans l'être de Hope depuis le départ de Landon, son petit-ami.

- Comment as-tu réussi à tourner la page ? Osa demander la Mikaelson avec intérêt.

Les muscles de Josie se tendirent face à cette question, à l'image de son corps tout entier qui aurait désormais pu faire concurrence à la rigidité du chêne contre lequel elles étaient appuyées. Jamais, Josie n'avait été aussi peu sûre de la réponse qu'elle devait donner. Tourner la page ? Se répétait-elle en boucle dans son esprit brumeux. L'avait-elle seulement tournée ? Elle n'en était intimement pas convaincue.

Finch avait été son échappatoire, à cette période de sa vie. Mais pouvait-elle réellement assurer qu'elle ne pensait plus à Penelope ? Non. Surtout en cette époque de l'année. Au contraire. Chaque endroit dans lequel elle mettait les pieds, chaque flocon de neige qui tombait sur le sol de la propriété Salvatore, chaque sapin qu'elle voyait… tout lui rappelait sans cesse Penelope. Et elle détestait ça. Elle le détestait autant qu'elle détestait son ex-petite-amie.

- J'ai commencé à m'intéresser à d'autres personnes et j'ai trouvé Finch, répondit-elle alors, sincère, sans entrer davantage dans les détails.

- Facile à dire… soupira simplement son interlocutrice.

Un léger sourire, plein de compassion fendit les lèvres de la brune face à cette réplique spontanée.

- Je sais.

Hope soupirait de plus belle et, soudain, une idée germait dans l'esprit de la plus jeune d'entre elles. Sans laisser le temps à la brune de lui poser davantage de questions, Josie sautait sur ses pieds en arborant le plus grand sourire qu'elle possédait et tendait une main amicale vers l'orpheline.

- Viens. J'ai exactement ce qu'il te faut pour te changer les idées.

- Mais de quoi est-ce que tu parles ? S'étonna Hope en fronçant les sourcils sous l'incompréhension. Où est-ce que tu veux m'emmener ?

- Fais-moi confiance. Tu comprendras quand on y sera.