A l'extérieur d'un bar vraiment miteux, dans une alcôve ombragée, Alia a observé en silence. Elle a suivi Elie depuis sa sortie de l'Afterlife. Elle sait qu'elle ne devrait pas le faire. Que si Aria l'apprend, elle finira dans l'espace. Mais elle a peur pour le Commandant. Et quand elle l'a vue entrée là-dedans, elle s'est dit qu'elle avait raison d'avoir peur. Alors elle a attendu. Et d'un coup, le calme est devenu tempête et dans le bar des explosions biotiques, des coups de feu ont retenti. Terrifiée, Alia est restée dans l'ombre. Elle a vu Elie massacrer le barman turien, jusqu'à ce qu'il ne reste que des os et des bouts de chair. Elle n'a pas bougé. Elle a vu que la mercenaire était blessée. Mais n'a pas osé pas faire un mouvement. La mercenaire a disparu un instant puis une humaine nue s'est retrouvée propulsée dehors, si fort qu'elle en est tombée. L'humaine a crié et pleuré, avec comme seul habit cet horrible collier. Plus une trace de la mercenaire. Alia s'est approchée de l'esclave, a essayé de la calmer. L'a traînée dans une ruelle, un peu à l'écart, lui a donné de son eau, murmuré des phrases douces que sa mère lui disait quand elles se cachaient des bêtes de Cerberus.

A l'intérieur, elle peut entendre des explosions biotiques, des coups de feu. Et puis, lointains, des hurlements, si horribles qu'ils lui rappellent ceux des gens enfermés dans les quartiers interdits, ceux que les bêtes avaient envahi. Elle attend, avec l'esclave. La jeune humaine s'est calmée et pleure doucement. Alia envoie un message à un contact de Liara, espérant qu'ils pourront l'aider, quand elle voit sortir six autres femmes, dans le même état que la première. Alia se précipite vers elle, les guide, les installe ensemble puis leur demande où est la mercenaire. Et une des esclaves dit à Alia une des pires choses qu'elle pouvait entendre : « Je crois qu'elle est en train de mourir en bas. » Sans réfléchir, elle court dans le bar, suit les traces de combat, essaie de ne pas trop regarder les corps et les flaques et elle arrive à la dernière salle. Au fond, elle voit Elie, le regard perdu, ensanglantée, immobile.

Elle s'approche doucement. La lueur, dans l'œil rouge, est faible, et son regard semble triste, ou nostalgique. Alia se baisse et passe une main devant le visage de la mercenaire. Pas de réaction. Elle ne sait pas quoi faire, panique. Puis elle décide, attrape l'omni d'Elie et envoie ses coordonnées à Aria. Elle comprendra, elle viendra, elle la sauvera. Alors qu'elle allait partir, la main droite bouge et saisit son poignet. Alia sursaute, essaie de se libérer quand elle entend :

« Alia… Tu devrais pas… Médigel. S'il te plaît.

Alia comprend, se lève, fouille la pièce et en trouve une réserve. Elle cherche les blessures, d'abord l'abdomen, c'est un gros trou, de part en part. Elle met du gel, arrêtant le saignement, puis va pour soigner le poignet mais la mercenaire l'arrête :

- Non. N'y touche pas. Tu dois t'en aller. En danger. Aria.

Et là, l'adolescente comprend qu'elle parle à Shepard, que même à l'agonie, le Commandant veut la protéger. Elle lui sourit doucement et murmure :

- Shepard, il faut lutter. Ne cessez pas parce qu'il y en a plein qui luttent toujours pour vous, ok ? Vous y arriverez. Il faut que je parte. Mais on se reverra.»

Et sur ces mots, l'adolescente repart en courant, laissant derrière elle un spectre qui sourit légèrement, confus, mais content. Alia ressort et rejoint la ruelle où elle a mis à l'abri les esclaves. Elle les retrouve assises, les unes contre les autres, et à leur côté une silhouette asari en armure et casquée. Elle sourit à Liara et la rejoint. L'asari lui demande :

« Tu vas m'expliquer ce qu'il se passe ?

- Liara, tu ne devrais pas être ici. Les hommes d'Aria vont arriver. Je voulais juste que tes amis aident ces femmes. Elles étaient… Elles étaient dans le bar d'à côté. Quelqu'un les a libérées.

- D'accord, aide-moi, on va descendre un peu plus loin, j'ai un véhicule, ce sera serré, mais bon… Et c'est qui ce quelqu'un ?

- Tu le sais, Liara. »

Et le silence retombe. Liara voudrait aller voir dans ce bar, mais se dit qu'elle n'y verrait qu'Elie. Alors elle aide les esclaves à se lever, marcher doucement, jusqu'en bas de la rue. Là, elles se serrent dans le véhicule de Liara, et l'asari essaie de retenir la nausée qui l'assaille à l'odeur de ces pauvres femmes, squelettiques, battues, détruites. Pendant qu'elles s'éloignent du bar, elle tente de réfléchir à un endroit où les déposer. Se rappelle un contact peu régulier, un vieux turien gérant d'une sorte de pharmacie. Il aidera les femmes à quitter Oméga sans problème, moyennant finances. Elles s'arrêtent dans une arrière court et Liara enclenche son réseau de Courtier, pour que l'info ne vienne pas d'elle, qu'elle devienne simple messager.

Elle rencontre le turien, transmet les données et les fonds envoyés par Féron, assure aux anciennes esclaves qu'elles seront bientôt parties loin d'ici, puis remonte dans la voiture, où l'attend Alia, anxieuse. Liara l'observe. Elle a du sang sur elle et semble si pâle que Liara s'inquiète qu'elle puisse s'évanouir. La curiosité pousse l'asari a demandé :

« Comment t'es-tu retrouvée dans cette situation ? C'était très risqué. Et j'ai pris moi-même de grands risques.

- Je sais, je suis désolée. Mais je suivais juste… Elie. Et elle est rentrée dans ce bar et je sais qu'il a mauvaise réputation alors j'ai attendu, pour voir si elle sortait. Et d'un coup, elle s'est mise à tuer tout le monde à l'intérieur, les esclaves sont sorties. Et voilà.

- Et voilà… Et le sang sur tes vêtements ?

- C'est le sien. Les femmes ont dit qu'elle était en train de mourir en bas, j'ai paniqué. Je suis descendue et je l'ai soignée… Et, Liara ? C'était Shepard. Je veux dire, j'ai parlé à Shepard là-bas.

- Comment ça ?

- Elle m'a dit de m'enfuir, elle s'inquiétait pour moi. Shepard est là.

- Tais-toi, Alia. S'il te plaît.

- Quoi ? Mais pourquoi ? Je croyais que ça te ferait plaisir ?

- D'accord… Merci, Alia. Maintenant, il faut que tu t'en ailles et que je rentre.

- Aria va te trouver…

- Je sais. »

L'adolescente descend de la voiture sans un mot de plus. Elle a vu les yeux de l'asari se remplir de larmes. Elle comprend que parfois on ne veut plus parler. Juste se dissoudre un moment dans les larmes. Elle s'enfonce lentement dans les boyaux chauds et surpeuplés du plus grand quartier d'Oméga, fière d'avoir pu aider son héroïne, un sombre chevalier, à sauver des dames d'un grand danger.