Le vaisseau qu'a fourni Aria à Elie est impressionnant, d'origine asari, mais qui a copié le système furtif humano-turien du Normandy. Il y a aussi énormément d'inspiration galarienne. L'équipage semble compétent et Elie est heureuse de retrouver le pilote galarien de ses précédentes missions aux commandes. Elle est conduite à ses quartiers par une contremaître asari qui lui offre de grands sourire et un déhanché des plus exquis sur le chemin, tout en lui décrivant les spécificités du vaisseau. Elie écoute à moitié, se concentrant surtout sur les hanches et le corps devant elle. L'asari doit s'en être rendu compte, puisqu'elle doit répéter deux fois à la mercenaire qu'elles sont arrivées devant la cabine. Elie remercie, clin d'œil et coup de chapeau qui font s'assombrir les joues de la demoiselle, puis entre dans la pièce.

C'est moins grand que dans le SR-2 mais suffisamment spacieux. Son regard est aussitôt attiré par une table d'armement où sont disposés un fusil à pompe Claymore et un pistolet Carnifex derniers cris et modés jusqu'au bout des ongles. Son sourire de chat du Cheshire est déjà là et quand elle voit l'armure disposée juste à côté, c'est comme si son visage se fendait en deux. Ce n'est pas d'une qualité de spectre, mais certainement à peine en dessous. Elle regarde son omni. Encore une dizaine d'heures avant d'arriver à la Travée. Et de là, il faudra observer et planifier l'assaut. Encore une longue mission.

Elle sort de sa cabine et erre dans les couloirs. Il y a beaucoup d'asaris comme membres d'équipage et Elie ressent beaucoup trop de charges biotiques dans certaines pièces. Elle n'est pas habituée. Un instant, elle s'imagine dans une ville de Thessia. Elle se dit qu'elle n'y survivrait probablement pas. Elle voit les regards qu'on lui porte, elle sait que ses biotiques à elle sont pour le moins chaotiques et est persuadée que les asaris en jouent. Elle sourit, cache sous son chapeau ses joues qui sont un peu trop rouges à son goût et part à la recherche de son équipe.

Elle tombe sur les krogans et les butariens dans l'armurerie, discutent avec eux de leurs préférences, leur explique vaguement les modalités de la mission puis poursuit son chemin. Elle voit l'humain tout seul à la cafétéria et ne cherche même pas à lui parler. Trouve un des turiens occupé à draguer une ingénieure asari, elle sourit, échange des banalités et avance encore. Elle est ravie quand elle voit qu'elle vient de trouver le bar et entre. A l'intérieur, les deux asaris boivent un verre, adossées au comptoir.

Elie entre, coup de chapeau, elle évite le clin d'œil, ce n'est pas pro, et avance vers le comptoir. Les deux asaris ont arrêtés de parler à son arrivée et la suivent du regard. Elie sent les biotiques des deux femmes. Elles sont intimes. Elle ne sait pas comment elle sait, mais elle le sent, peut-être leur danse biotique, ce petit tempo synchrone qu'elle capte dans les vagues et les pics. La mercenaire se penche au-dessus du comptoir et pioche une bouteille de whisky, s'en sert un, s'adosse près des deux commandos, et commence à boire. Le silence est toujours là et elle sent qu'une des deux mercenaires a changé quelque chose à la danse. Comme si elle lançait à Elie une invitation. L'humaine répond timidement, ne comprenant pas tout, comme si elle voulait juste être polie face à une femme qui la draguerait en boîte de nuit. Les deux asaris échangent un regard, l'une semble agacée, soupire, puis quitte le bar d'un pas décidé. Étonnée, Elie regarde l'asari qui est restée, Kesanta, elle se souvient maintenant, l'entend s'exclamer :

« Depuis quand les humains peuvent faire ça ?

- Peuvent faire quoi? demande Elie en sirotant son verre, un sourire aux lèvres.

- Ne jouez pas à l'idiote chef, ça ne vous va pas bien. Sérieusement ?

- Je ne sais pas, peut-être que j'ai du sang asari ?

- Évidemment ! Quelle question !

- Pourquoi votre partenaire est partie en semblant agacée comme ça ?

- Vous pouvez sentir ça aussi ? Impressionnant, humaine, dit Kesanta, en se rapprochant doucement.

- Vous jouez un jeu dangereux, asari, vous le savez ? Dit Elie en essayant de contrôler ses biotiques face aux doux assauts de l'autre.

- Que voulez-vous, j'aime le danger, réplique l'asari, une main venant effleurer l'épaule d'Elie.

- Vous l'aimez plus que votre vie ? Vous savez qui je suis ? Demande la mercenaire, arrêtant de ses mots le geste de l'asari, tout comme les jeux biotiques.

- Ho. Les rumeurs disent donc vraies ?

- Et que disent les rumeurs ?

- Que vous êtes la favorite d'Aria. Et qu'il n'y en a eu aucune autre depuis votre arrivée à Oméga.

- Je ne pourrais pas confirmer ça. Mais je suis à Aria. Donc ne jouez plus avec moi.

- Promis, j'arrête. Kali va vraiment se foutre de ma gueule…

- Et pourquoi ça ? Demande l'humaine, amusée par l'expression de Kesanta.

- Je lui ai dit que je vous aurais dans mon lit avant le début de la mission. Tout ce qu'elle a dit c'est que je rêvais éveillée. Je déteste quand elle à raison… Mais sérieusement, comment une humaine gère ses biotiques comme nous ?

- Honnêtement, je n'en sais rien. C'est assez nouveau. J'ai encore du mal quand je suis entourée de trop d'asaris, mais j'apprendrai.

- Il n'y a jamais trop d'asaris, voyons. Et vous vous débrouillez très bien, chef, pour une novice.

- Merci pour le compliment. Allez, rappelez votre partenaire, qu'on boive un coup et qu'elle rit à votre encontre. »

Elie passe quelques heures avec le couple d'asaris, se régalant d'une discussion simple et sans bagages, sans ombres ni cœur qui se serre. Juste trois personnes qui parlent sur un vaisseau se dirigeant au fond de la galaxie. Elle prend congé, avale un cocktail de cachets et prend le chemin qui semble mener à la salle d'observation. Là, comme elle le faisait avec Samara, elle s'installe sur le sol et perd son regard dans la contemplation de la Voie Lactée. Mercenaire jadis héroïne, corps brisé jadis soldat indompté, esprit unique aujourd'hui fragmenté.