Et voici la seconde partie ! Je n'ai pas réussi à la faire plus courte, sans toutefois trop déborder de sorte à en faire une troisième... C'était sportif ! ^^'

Katymyny, je réponds (de façon trèèès détaillée) à ta remarque judicieuse en fin de chapitre. Je m'excuse par avance pour le véritable pavé ; j'y développe ma vision du personnage de Snape, ainsi que la relation qu'il entretient avec les deux personnages concernés par le Serment Inviolable. Je me dis en même temps que si d'autres personnes lisent ce genre d'analyse de personnages ou aiment le partage de points de vue, cela peut toujours permettre de faire d'une pierre deux coups tout en permettant de mieux comprendre. :-) (bon ok, je suis surtout une grande bavarde intenable qui aime discuter, mea culpa...)

Bonne lecture !


CHAPITRE X

« Je m'y engage. »

Victoire Duchesne / Severus Snape


Des étincèles jaillirent de la baguette d'Anastasiya pour éclater à la figure de l'un des lutins bleus qui lui faisait des grimaces. Celui-ci n'eut pas le temps d'esquiver, secouant la tête en lâchant un cri strident qui se mêla aux rires machiavéliques des autres petits êtres identiques. Ces derniers tournaient autour des deux élèves de Serpentard qu'ils venaient de prendre d'assaut dans la salle de Divination, dansant ce qui ressemblait à une farandole infernale. Ophelia mis directement un coup de baguette sur la tête de celui qui lui tirait la jupe sans user de sortilèges.

« Rappelle-moi pourquoi nous sommes venus aider ces deux gamins… » lança Ana en pointant sa baguette en direction des deux Gryffondor de première année qui tentaient d'attraper les autres Lutins de Cornouailles qui mettaient la salle sens dessus dessous.

« Parce que nous sommes des amies dévouées et que le frère de Vi' est dans le pétrin ?

- Ma bonté me perdra, maugréa la russe. Ophelia, à droite ! Hé, les morveux ! Utilisez des sorts au lieu de vous servir de votre baguette comme d'une zapette à mouches !

- Ça s'appelle une tapette à mouches, Nastya… » rectifia Ophelia avant de lancer un Immobulus au groupe de lutins qui s'approchait trop près d'elles.

Edouard imita la sorcière de sixième année et lança le même sortilège sur un autre groupe de Lutins de Cornouailles, réduisant drastiquement leur effectif. Bilius Weasley, qui l'accompagnait, en fit de même.

« Trop cool, ce sort ! s'exclama ce dernier en le répétant une nouvelle fois.

- Calme ta joie, petit, le prévint Anastasiya. Tu vas finir par blesser quelqu'un si tu t'emportes…

- Ce jeu est tellement drôle !

- Ton ami est vraiment étrange, Duchesne…

- Pas plus que toi, Karkaroff. Et pourtant, Victoire t'aime bien…

- Merci pour cette précision, gamin… »

Ophelia rit devant l'air vexé de son amie qui ne l'avait pas volé. Une fois le dernier groupe de créatures maîtrisé, elle s'approcha du bureau en fouillis du Professeur de Divination. De multiples objets divinatoires y avaient été déposés : cartes de tarots, runes vikings, brindilles… et même une boule de cristal, soigneusement posée sur un socle en bois. Les deux jeunes garçons accoururent à ses côtés pour mieux voir, fascinés.

« Woah, c'est dément*…! dit Bilius en tendant la main vers des runes.

- Je n'y toucherais pas, si j'étais toi… le mit en garde Ophelia avec douceur. Laisse-moi faire… »

Anastasiya se laissa tomber sur l'un des coussins moelleux qui juchaient le plancher de la salle de classe, observant de loin les gestes de son amie. Ophelia avait toujours été attirée par la Divination dès le premier jour de cours, lors de leur troisième année. Elle était d'ailleurs la seule de leur quatuor à avoir décidé de poursuivre cette option. Ana la vit prendre en main les runes scandinaves gravées sur de fines pièces en bois, les déposant ensuite dans un petit sac en toile de jute. Ophelia secoua le sac avant de l'ouvrir, tirant trois runes qu'elle déposa côte à côte sur le bureau, les yeux fermés. Elle n'eut pas le temps de retourner celle qui était face cachée pour débuter son introspection : le bruit sourd d'un objet lourd tombant au sol la déconcentra. La jeune fille fronça les sourcils en se tournant vers Edouard Duchesne qui venait de faire tomber la boule de cristal, l'air coupable. Elle s'apprêtait à le réprimander quand elle fut interpelée par l'état de l'objet. La boule de cristal aurait dû se briser en mille morceaux… Or, elle était intacte : aucun impact ni fêlure ne semblait avoir été causé.

Anastasiya se leva pour les rejoindre. Elle ramassa la boule de cristal pour l'examiner. Une volute de fumée nacrée avait commencé à bouger à l'intérieur, amplifiant selon les mouvements qu'elle exécutait. Elle la tourna vers la lumière que filtrait la seule ouverture présente dans la pièce, au niveau du toit. Des images floues apparurent avant de devenir de plus en plus précises. La boule leur indiquait un lieu. Et il s'agissait très probablement du prochain point à rallier afin de poursuivre le jeu.

« C'est la Tour d'Astronomie, certifia Ana. Vi' y passe son temps quand ce n'est pas à la bibliothèque... Je reconnaitrais l'endroit entre mille !

- Est-ce qu'on peut rester avec v-…

- Hors de question.

- Mais pourquoi ? On forme une bonne équipe ! dit naïvement Bilius Weasley.

- Je ne fais pas équipe avec des enfants de onze ans.

- Douze…

- C'est pareil. On vous a aidés uniquement parce que vous ne parveniez pas à vous débarrasser des Lutins. Point. Nos chemins se séparent ici. »

Anastasiya ouvrit la voie en redescendant de la salle de classe par l'échelle qui y menait, suivie d'Ophelia et des deux garçons de première année. Elle entendit Edouard chuchoter au Weasley : « De toute façon, on va devoir les suivre de très près pour la suite… » et soupira. Elles allaient avoir du mal à distancer ces deux gnomes qui risquaient de leur coller aux souliers…

La russe ne fut pas au bout de ses peines. Ouvrant la marche au nouveau petit groupe qui venait de se créer, elle tomba nez à nez avec Remus Lupin et Peter Pettigrew quelques couloirs plus loin.

« Oh, Merlin… Mon karma doit vraiment être mauvais… se lamenta-t-elle. De tous les élèves de cette école, il faut que je tombe sur toi, Lupin…

- Bonjour à toi aussi, Karkaroff. Dhont, salua-t-il Ophelia avec un sourire aimable. Tiens, Edouard Duchesne et Bilius Weasley sont avec vous…? Vous allez bien ? s'assura-t-il auprès des garçons. Karkaroff peut faire très peur, vu comme ça : elle grogne beaucoup, mais...

- La ferme, Lupin, le coupa-t-elle en levant les yeux au ciel. Ils vont très bien. Ce qui n'aurait peut-être pas été le cas si nous ne passions pas par là…

- Je vois, répondit le préfet. C'est drôle, tout de même... Il suffit qu'un jeu soit mis en place pour que nos maisons oublient leur rivalité et s'entraident…

- Je ne t'aurais jamais aidé, Lupin, qu'on se le dise. Ophelia et moi avons secouru ces deux-là car Edouard est le frère de notre amie. Rien de plus !

- J'y songerai, la prochaine fois que l'amie en question se retrouvera de nouveau face à un Epouvantard qu'elle ne parvient pas à maîtriser…

- Victoire ?! s'exclama Ophelia avec inquiétude, sortant de son mutisme. Est-ce qu'elle va bien ?!

- Ne t'en fais pas, la rassura Remus. Elle va bien, oui. Plus de peur que de mal…

- C'était un véritable Epouvantard ? interrogea Edouard. Pour de vrai ?

- Oui, confirma Peter. Vous ne l'avez pas croisé, dans les souterrains ?

- Non, répondit Bilius, déçu. J'aurais aimé le voir…

- Comme si un élève de première ou de deuxième année pouvait affronter un Epouvantard… déclara Ophelia horrifiée.

- Je pense que les épreuves sont adaptées au niveau du sorcier, en déduisit Remus.

- Dumbledore est encore plus fou que je le croyais… » commenta Ana.

Un autre groupe d'élèves fit son arrivée à l'intersection entre les couloirs, les interrompant dans leur semblant de discussion. Les filles, en cinquième année à Serpentard, les toisèrent les uns après les autres, se demandant probablement ce que leurs camarades de sixième année pouvaient bien faire avec quatre élèves de Gryffondor. Anastasiya accrocha le regard perçant de Rita Skeeter, faisant les gros yeux à sa vue. Cette dernière réajusta ses lunettes avant de suivre Diana Yaxley et Scarlett Bulstrode comme son ombre en direction des escaliers qui n'en faisaient qu'à leur tête, un peu plus loin. Ana ne la lâcha pas des yeux jusqu'à ce qu'elle disparaisse.

« J'arrête, déclara-t-elle.

- Quoi ? demanda Ophelia, perdue. Comment ça ?

- J'abandonne ce jeu sans queue ni tête. Un Epouvantard, des Lutins de Cornouailles, énuméra-t-elle. Des énigmes en langues mortes, des fichus tableaux qui nous envoient à droite puis à gauche pour finalement se contredire, Peeves qui nous balance du jus de citrouille à la figure, les fantômes après qui courir à travers tout le château… Sans parler de l'immense toile d'Acromantule à escalader, ou encore des Niffleurs à capturer ! J'en ai assez… Mais continue, toi ! dit-elle à l'attention d'Ophelia.

- Sans toi ?

- Depuis le début, c'est toi qui comprends toutes les énigmes et qui nous conduis dans la bonne direction. Tu peux gagner, Ophelia ! Et tu n'as pas besoin de moi pour ça…

- Peut-être. Mais le jeu n'a plus aucun intérêt si je le mène seule… »

Ana attrapa le coude de son amie, se postant face à elle de façon à avoir Lupin et Pettigrew dans son dos. Elle roula des yeux, espérant qu'Ophelia comprendrait ce qu'elle tentait de faire. Ophelia ne sembla pas du tout réceptive à sa tentative de communication, à son grand damne…

« Tu n'as qu'à rester avec eux, résolut Anastasiya en désignant les deux plus jeunes. Il faut bien que quelqu'un les surveille, ces deux-là…

- Pourquoi ne te joindrais-tu pas à nous, Dhont ? proposa Remus alors que Peter secouait la tête, nettement moins emballé. De toute façon, nous risquons de nous suivre à la trace pour le reste du parcours… Et un cerveau bienpensant de plus nous serait très utile. »

Un large sourire étira les lèvres d'Anastasiya. Peut-être que Remus Lupin n'était pas aussi irrécupérable que ses petits copains, finalement. Si Ophelia n'avait pas su saisir la perche qu'elle lui tendait, le Gryffondor venait de tomber dans les mailles de son filet à pieds joints. Elle étreignit son amie pour lui conférer force et courage, en profitant pour lui chuchoter quelques mots :

« Je n'ai jamais compris ce que tu peux bien lui trouver, depuis toutes ces années, mais mets le paquet car c'est le moment de le séduire ! Tu as jusqu'à minuit, Cendrillon…

- Nastya ! » s'offusqua Ophelia qui rougissait à vue d'œil.

Après quelques derniers encouragements à l'égard de l'étrange équipe nouvellement formée, Anastasiya dévala les escaliers, baguette en poche.

La vengeance était un plat qu'elle aimait déguster glacé.


Devant l'unique miroir psyché qui se trouvait dans son dortoir, Victoire fit un dernier tour sur elle-même, tentant de garder l'équilibre du haut de ses escarpins. Elle passa les doigts dans ses longues mèches blond polaire qu'elle venait de boucler pour les détendre un peu plus, en profitant pour inspecter son mascara au passage. En dépit du maquillage qu'elle avait tenté d'élaborer pour l'occasion, son visage restait bien pâle… Elle ajouta une dernière touche de fard à joue pour le rendre moins cadavérique, ses cheveux aux reflets presque blancs à la lumière artificielle ne l'aidant pas à la tâche… Elle écarta les mèches de sa frange rideau pour se dégager les yeux, puis se tourna vers Douglas, confortablement installé sur son lit. Elle lui demanda :

« Alors, qu'en dis-tu ? »

Le chat angora arrêta sa toilette un instant pour la regarder d'un œil presque trop critique pour un animal, avant de miauler et de reprendre son activité visiblement plus alléchante…

« M'ouais, tu as raison… » dit-elle en inspectant une dernière fois le dos-nu de sa longue robe noire à travers le miroir. « Mais ça fera l'affaire : ce n'est qu'un dîner d'Halloween, pas un bal… »

Elle glissa sa baguette dans le fourreau qu'elle portait à mi-cuisse sous sa robe, caressa le félin qui se blottissait davantage dans le plaid replié au bout du lit, prit son sac de soirée et quitta le dortoir en direction de la salle commune. Ne voyant pas son cavalier dans cette dernière, elle la quitta pour le retrouver à l'entrée.

Comme prévu, Severus l'attendait quelques mètres plus loin dans les cachots, adossé au mur. Il se redressa à sa vue, époussetant les épaulettes de sa cape de soirée avant de s'avancer vers elle. Son regard analytique glissa de haut en bas sur sa cavalière d'un soir.

« Qu'y a-t-il ? demanda Victoire mal à l'aise. C'est si terrible que ça ?

- Ton allure est surtout très décalée, Duchesne… Tu transpires le sang pur dans cette tenue. Et pourtant, tu te comportes comme une sang-de-bourbe allant à son premier Bal de Noël… »

Victoire rougit violemment à la comparaison. Elle était habituée aux réceptions de la haute société sorcière ; ses parents l'avaient forcée à y participer dès le plus jeune âge. Comment pouvait-il lui dire une chose pareille ?

« Ne me dis pas que tu n'es pas habituée aux mondanités, car je ne te croirai pas… Qu'est-ce qui te met si mal à l'aise ? » lui demanda-t-il en lui tendant son bras par galanterie.

Victoire s'y cramponna comme à une bouée de sauvetage.

« Ce n'est qu'un dîner organisé par Slughorn, tu sais… Tu y participes depuis ta quatrième année…

- N'essaye pas de me détendre, Severus… C'est inutile, lui confia la française. J'ai un mauvais pressentiment à propos de cette soirée. Et je viens de passer une sale journée, si tu veux tout savoir.

- Elle a débuté dans la bibliothèque à mes côtés, si tu te souviens bien.

- Et pourtant, ce n'était pas le pire…

- Le compliment me va droit au cœur, Duchesne. »

Quand ils arrivèrent devant le bureau de Slughorn, au bout des cachots, Victoire stoppa Severus un instant.

« Ne me quitte pas un instant durant la soirée, s'il te plaît.

- Duchesne, je vais finir par regretter d'avoir accepté ton invitation…

- S'il te plaît.

- Tes caprices me perdront, grommela-t-il. Si je t'ai dit que je t'accompagnais, ce n'est pas pour te planter durant la soirée… Je n'ai qu'une parole, et tu devrais le savoir. »

Victoire toqua à la porte du bureau, un peu plus détendue. Severus la regarda faire, fasciné par la fille qui lui tenait le bras. Une minute plus tôt, elle semblait désemparé ; il n'aurait par ailleurs pas été étonné de la voir tourner les talons pour rentrer aux dortoirs et ainsi esquiver le dîner. Pourtant, au moment où le Professeur Slughorn ouvrit la porte pour les accueillir dans son bureau métamorphosé en salle de réception, une toute autre Victoire Duchesne salua de dernier. L'héritière sang-pur par excellence, à la beauté froide propre aux Malefoy – qu'elle tenait de sa mère – et aux manières aussi mesurées qu'aristocratiques venait de faire son entrée en scène. Le masque était parfaitement en place, au point où Severus eut du mal à reconnaître la jeune fille qui lui servait de cavalière.

À force de la côtoyer à la bibliothèque, dans cet espace faisant presque partie d'une sphère privée qu'ils s'étaient progressivement forgés, Victoire avait fini par abattre face à lui presque toutes les défenses qu'elle érigeait au quotidien en public. Severus eut l'ultime confirmation à cet instant qu'elle ne mentait pas, lorsqu'elle prétendait le considérer comme un véritable ami. Elle lui faisait confiance au point de laisser tomber le masque devant lui, se dévoilant telle qu'elle était, jusqu'à ses moindres faiblesses.

La fille qui tenait son bras, elle, n'était pas son amie. Ce n'était pas celle qu'il avait appris à connaître. Et encore moins celle des bribes de souvenirs qui lui avaient échappées lorsqu'il s'était introduit dans son esprit…

« Professeur, l'entendit-il saluer Slughorn d'une voix chaude, nous vous remercions pour votre invitation.

- Bonsoir, Miss Duchesne, la salua en retour Horace Slughorn avec beaucoup trop d'enthousiasme, quel plaisir est votre venue ! Monsieur Snape. Entrez donc ! »

Victoire fut la première à avancer, tirant discrètement le bras de Severus pour le faire avancer. À la vue du drôle de couple qui venait d'arriver dans la salle de réception, le volume sonore des discussions se réduisit, les étudiants les évaluant avec curiosité. Victoire les observa les uns après les autres, impassible, avant de briser le silence :

« Et si nous nous servions un verre, Severus ? »

Si Snape avait pu se terrer au fond d'un trou, il l'aurait fait sans hésiter. Il avait pensé qu'en acceptant l'invitation de Victoire, il saurait davantage se fondre dans la masse, n'étant pas pointé du doigt car venant en éternel solitaire, ou ne finissant pas par être confronté à Lily, seul, une fois de plus. Pourtant, il avait la désagréable impression de se retrouver au centre de l'attention en l'espace de cinq minutes passées au Club de Slug…

« On se demande qui est mal à l'aise, à présent, lui chuchota Victoire avec un soupçon de malice tandis qu'ils trinquaient.

- Tu es vraiment déstabilisante, comme fille, tu le sais ? »

Le petit rire cristallin, tout en retenu, que sa cavalière lâcha acheva de le convaincre qu'elle comptait réellement passer la soirée à jouer le rôle pour lequel on l'avait conditionnée. Soit… Qui était-il pour la juger ou trouver cela ridicule, après tout ? Lui-même participait sans hésiter aux mascarades de la maison Serpentard lorsqu'il l'était nécessaire ; c'était après tout le seul moyen de se faire accepter au sein de certains cercles, le sorcier de septième année étant de sang-mêlé…

« Qu'est-ce que… » entendit-il sa partenaire de soirée murmurer. Il tourna la tête en direction de l'entrée, n'en croyant pas ses yeux. Lily venait d'arriver, resplendissante, comme toujours, ses cheveux roux retombant gracieusement sur sa robe d'un vert aussi profond que ses iris. Et à ses côtés se trouvait Potter. De tous les potentiels cavaliers qu'elle pouvait se trouver dans l'école, ou même à ce simple dîner, Lily avait réellement jeté son dévolu sur ce veracrasse de Potter ?

Severus sentit une main chaude se poser délicatement sur son poignet. Victoire lui adressa un sourire peiné, fissurant son masque de froideur aristocratique l'espace d'une seconde.

« Bien, il semblerait que tous les invités soient arrivés ! annonça allégrement Slughorn. Prenez place, jeunes gens : installez-vous, que nous puissions débuter la soirée comme il se doit ! »

Victoire avait calculé son coup : ne pas s'asseoir en bout de table dans le but de ne pas être trop facilement au centre de l'attention. Ne pas s'installer trop près de Slughorn afin d'éviter ses inlassables monologues, ou ses questions un peu trop indiscrètes. Éviter d'être assise trop près d'un Gryffondor ou d'un Poufsouffle. Se rapprocher d'un Serdaigle, à la limite. Le tout en esquivant Black numéro un, qui allait encore la saouler avec son histoire de sauvetage redevable, ainsi que Black numéro deux dont les intentions n'étaient pas encore tout à fait claires. Un jeu d'enfant, n'est-ce pas ?

Un échec total : elle se retrouva coincée entre Regulus et Severus qui demeurait son seul point d'ancrage pour la soirée. Face à eux étaient respectivement attablés Lily Evans, James Potter et Sirius Black, venu seul, par le plus grand des miracles. Mauvais pressentiment, quand tu nous tiens… se dit Victoire, dépitée. Elle sentit Severus se tendre à ses côtés. Elle devina aisément que la simple vue d'Evans en compagnie de celui qui fut un véritable harceleur durant une grande partie de sa scolarité ne devait pas l'aider non plus…

Le dîner débuta par les remerciements du Professeur Slughorn, plus que ravi de compter ô combien de si illustres étudiants à sa table ce soir-là, suivis par la série de questions-réponses qu'il affectionnait tant.

« Votre mère travaille-t-elle toujours en tant que journaliste pour le Daily Prophet, Monsieur Fawley ? » « Comment se porte votre grand-père, Miss Rowle ? Un homme formidable, assurément ! » « Avez-vous déjà réfléchi à ce que vous souhaiteriez entreprendre après Poudlard, Monsieur Snape ? Le domaine des Potions vous réussirait à coup sûr ! » « Le droit magique vous attire-t-il, Monsieur Potter ? Comme votre grand-père, ce très cher Henry, a pu s'illustrer au Magenmagot, de son temps ! » « Ah, Miss Duchesne… Vous ressemblez tellement à votre mère, Léda Malefoy ! Elle était une élève très charmante, vous savez. Je ne serais pas étonné d'apprendre, comme pour elle à l'époque et le veut la coutume, qu'un fougueux héritier sang-pur demande votre main d'ici la fin de votre scolarité… »

Victoire avala de travers. Elle toussota, tentant de faire bonne figure en dépit de la bouchée de nourriture qui restait coincée dans sa gorge. Elle déglutit calmement, réfléchissant à toute allure à ce qu'elle pourrait bien répondre à telles inepties. Severus lui remplit galamment son verre d'eau avant de le lui tendre. Elle l'accepta volontiers, le remerciant faiblement avant d'en boire une gorgée. Slughorn s'était tu, tout comme l'ensemble des étudiants réunis à sa table, attendant visiblement une réponse de sa part. Une étincelle brilla dans les yeux du professeur. Victoire ne comprit que trop tard sa méprise.

« Oh, mais non… dit-il avec douceur. Votre cœur est déjà pris, Miss. »

Victoire était certaine d'être écarlate de gêne. Severus lui donna un léger coup de pied pour qu'elle se ressaisisse.

« Vous faites erreur, professeur, répondit-elle poliment d'une voix qu'elle aussi claire qu'assurée. Mon cavalier et moi-même ne sommes venus qu'en tant qu'amis, ce soir.

- Oh mais je ne vous parle de Monsieur Snape, Miss Duchesne ! rit le Professeur Slughorn comme s'il s'agissait de la blague de l'année. J'ai cru voir un article passer, il y a peu… N'était-ce pas dans le journal de l'école que rédige une élève de ma maison, par ailleurs ? Quel est son nom, déjà… ? Ah oui, Miss Skeeter ! N'avait-elle pas parlé de fiançailles, à votre sujet ? Avec Monsieur Black ici présent, si mes souvenirs sont bons ? »

Les deux frères Black relevèrent instantanément la tête à l'entente de leur nom, lançant un drôle de regard à Slughorn avant de se dévisager l'un l'autre, face à face. Une tension se créa dans la pièce, que seul le professeur ne sembla pas remarquer. Il poursuivit sur sa lancée :

« Mais lequel était-ce, déjà… ? »

Victoire se serait bien terrée dans le même trou que celui dont rêvait Severus une heure plus tôt. Ce fut Sirius qui tenta de détendre l'atmosphère, optant comme à son habitude pour la plaisanterie.

« Certainement pas moi, professeur ! » déclara-t-il d'un ton léger, un sourire amusé aux lèvres. « Je crois qu'il est inutile de rappeler que la famille Black m'a renié. Il serait impossible qu'une jeune fille de si bonne famille comme Miss Duchesne puisse être lié à un tel individu : pas même en rêve, hélas… »

Son intervention eut l'effet escompté, arrachant un sourire à la plupart des invités malgré la mine désapprobatrice de Slughorn, le professeur appréciant moyennement la déviation du sujet ainsi que le ton avec lequel en parlait le concerné. Les propos de Sirius renfrognèrent au contraire Victoire, qui demeura physiquement insensible, ainsi que Regulus qui lançait à présent une œillade glaciale à son frère.

« Avec tout le respect que je vous dois, professeur, il ne faut pas croire tout ce que rédige Rita Skeeter dans Les Potins de Poudlard, s'immisça Regulus. Comme le nom de sa gazette l'indique, le contenu ne se fonde que sur des bruits de couloir. Vous-mêmes savez à quel point de simples propos entretenus entre pairs peuvent finir par être déformés… N'est-ce pas ?

- Hum, oui, en effet… approuva le professeur. Je ne faisais que m'interroger, comme bon nombre d'entre nous à mon avis… Je vous remercie d'avoir éclairé ce point, Messieurs Black, Miss Duchesne » finit-il avec embarras.

Le dîner se poursuivit, Slughorn changeant de sujet ainsi que de cible pour reporter son attention sur d'autres étudiants, au grand soulagement de Victoire.

Ce serait la dernière fois qu'elle mettrait les pieds au Club de Slug.


Vingt-deux heures trente. Il ne leur restait qu'une heure et demie pour terminer le jeu qu'avait lancé Dumbledore en début de journée.

« Nous sommes près du but, dit Remus. J'en suis sûr… »

Ophelia observa Peter Pettigrew déambuler devant la tapisserie sur laquelle Barnabas le Follet semblait tenter d'apprendre la danse classique à un groupe de trolls des montagnes. Pendant ce temps, Edouard énumérait les différents indices qu'ils avaient trouvé au cours de cette fin de journée passée ensemble, tandis que Bilius Weasley tentait d'ouvrir une par une les salles présentes au septième étage.

« Peter, tu me donnes le tournis, lâcha Edouard en le voyant exécuter un nouvel aller-retour devant la tapisserie.

- C'est pourtant comme ça, que ça fonctionne… baragouina le septième année.

- À quoi penses-tu pour faire apparaître la porte ? l'interrogea Remus.

- À la tête de Sir Patrick, répondit Peter. Elle est forcément cachée dans la Salle sur Demande.

- La… Salle sur Demande ? »

Remus se tourna vers Ophelia, acquiesçant d'un signe de tête.

« La Salle sur Demande est une salle magique qui apparaît uniquement lorsqu'une personne en a vraiment besoin. Pour l'ouvrir, il faut passer plusieurs fois devant en pensant à ce qu'il nous faudrait.

- Comment connaissez-vous son existence, Pettigrew et toi ? s'étonna Ophelia, fascinée par l'existence d'un tel lieu caché dans le château.

- Si nous te le révélions, ce ne serait plus un secret… » dit mystérieusement Remus en voyant enfin apparaître la porte de la salle.

Il fit signe à la Serpentard d'entrer avant de s'assurer que les deux élèves de première année les suivent. Tant Remus et Peter que les trois autres, qui n'avaient encore jamais vu la Salle sur Demande, restèrent bouche bée face à ce qui s'étendait devant eux.

La salle avait pris la forme d'un immense débarras où s'entassaient des milliers de meubles et d'objets.

Si c'était là-dedans que le Baron Sanglant avait caché la tête de l'autre fantôme, alors la retrouver serait aussi facile que chercher une aiguille dans une botte de foin…


Rita Skeeter savait qu'elle n'aurait pas dû écouter les deux autres filles de sa maison avec qui elle faisait équipe. Depuis le début, elle le sentait : elle aurait dû laisser tomber les rivalités entre maisons pour rejoindre son amie Poufsouffle. Elle, au moins, n'aurait pas proposé de se séparer dans les couloirs lugubres du château afin de rechercher des indices qui demeuraient inexistants depuis plus de deux heures. Découragée, Rita fit une pause.

Elle prit le temps d'observer les lieux, réfléchissant. La cinquième année était certaine d'arpenter le bon couloir, contrairement à ce que Diana et Scarlett prétendaient. Après une énième dispute, les trois filles avaient décidé de faire bande à part et de poursuivre le jeu chacune de leur côté jusqu'à ce que l'une d'elles tombe sur un indice leur permettant d'avancer.

Rita savait que les deux autres avaient tort. Et la lueur qui filtrait à travers la porte à moitié ouverte, quelques mètres plus loin, lui donnait entièrement raison. Elle essuya rapidement ses grosses lunettes rectangulaires à l'aide de sa manche, avant de les replacer sur son nez et de se diriger vers la porte qu'elle ouvrit en grand. Elle invoqua un Lumos pour un peu mieux l'éclairer, puis fit quelques pas pour se poster au centre de la salle.

La porte se referma d'un coup sec et se verrouilla, son claquement sinistre résonnant dans le couloir du sixième étage.


Minuit moins dix. Le dîner de Slug était terminé depuis un moment lorsque Victoire acheva de grimper les escaliers qui débouchaient sur le haut de la Tour d'Astronomie, pieds nus, tenant ses chaussures à talon dans une main, suivie de près par Severus Snape et Regulus Black. Le trajet s'était fait en silence, aucun des trois ne souhaitant revenir sur les événements de la soirée.

Du sommet de la Tour, Victoire jeta ses escarpins au sol pour s'appuyer sur la rambarde, les yeux rivés vers la nuit étoilée. Severus la rejoignit, s'accoudant à son tour.

« Es-tu certaine de vouloir le faire ? » lui demanda-t-il.

L'absence de réponse immédiate de la blonde qui n'avait pas quitté le ciel d'encre du regard fit douter Regulus. Il l'avait pensée suffisamment forte pour encaisser tout cela. Peut-être s'était-il trompé… La petite fille avec qui il avait grandi aurait catégoriquement refusé, il en était certain. Mais la jeune femme à qui il serait prochainement rattaché par des liens des plus sacrés, elle, si elle pliait, ne casserait pas. Ce qu'il avait pu observer de son attitude à la soirée de Slug avait achevé de l'en persuader. Il espérait ne pas se tromper à son sujet.

« Nous pouvons commencer » annonça-t-elle en se tournant tranquillement vers lui.

Regulus s'approcha du drôle de duo qu'il n'aurait pas cru voir tant se rapprocher un jour. Il placerait sa vie entre les mains de Severus les yeux fermés ; il l'aurait volontiers offerte autrefois pour la jeune femme qui se tenait dignement face à lui. En attendant, il se devait d'assurer sa sécurité avant toute chose.

Il attrapa la main de chacun d'entre eux, les reliant au poignet de l'autre. De sa baguette, Regulus esquissa un premier geste autour de leurs bras joints, démarrant le processus. Une première chaîne rougeoyante apparut autour de leurs poignets.

« Severus, t'engages-tu à ne rien dévoiler de ce que tu as vu et de ce que tu verras dans l'esprit de Victoire, lorsque tu entreprendras de lui apprendre l'art de l'Occlumancie ? »

Severus planta son regard abyssal dans celui, presque translucide à la lueur de la lune, de Victoire.

« Je m'y engage. »

Une seconde chaîne s'enroula autour de leurs mains, entrelacée à la première.

« T'engages-tu également, Severus, à poursuivre cet enseignement jusqu'à ce qu'elle le maîtrise suffisamment de manière à protéger son esprit ?

- Oui. »

Une troisième chaîne apparut, faisant grimacer Victoire dont la peau fut lacérée au passage.

« T'engages-tu à ton tour, Victoire, à ne jamais révéler, et ce à quiconque, ce que Severus t'a volontairement confié lors de ton expérience de Legilimancie contre lui ?

- Oui. » répondit Victoire sans hésiter, resserrant sa prise sur la main de Severus comme pour doubler sa parole.

Une quatrième et dernière chaîne s'entrelaça aux autres, à la grande surprise de la jeune fille.

« Enfin, t'engages-tu, Victoire, à ne rien révéler des activités du groupe actuellement formé à Serpentard, quoi qu'il advienne ? »

Victoire tourna la tête vers Regulus, craignant mal comprendre ce que les deux garçons exigeaient d'elle. Ce n'était pas convenu dans leur pacte, ça. Il n'en avait jamais été question…

« Ce n'est pas ce qui avait été convenu, fit-elle remarquer à Severus. Je ne sais même pas à quel groupe il fait référence.

- Tu es loin d'être idiote, Victoire, répondit Snape. Discrète, naïve et craintive, probablement. Mais pas idiote. Nous nous assurons seulement de la sécurité ainsi que de l'honnêteté de chacun. Donnant, donnant. »

Victoire ne pouvait s'en vouloir qu'à elle-même. Elle était celle qui avait marchandé avec Snape par réserve alors qu'elle aurait tout simplement pu lui faire confiance aveuglément. Celle qui avait exigé un Serment Inviolable malgré la parole qu'il lui avait solennellement donnée. Cela lui apprendra à se méfier de tout le monde, tout en ne se méfiant pas suffisamment de son propre jugement.

Elle allait faire un nouveau pas en avant, droit dans la gueule du serpent. Car elle n'avait plus le choix, désormais. Les dés étaient jetés.

« Très bien. Je m'y engage. »


à suivre...

* Je pense que vous aurez reconnu à quel personnage la réplique de Bilius Weasley faisait référence... :-D tel oncle, tel neveux...

Katymyny : Je pense comprendre ton questionnement quant à la réaction de Severus. Nous connaissons surtout le Severus Snape adulte, qui a enduré bon nombre de dommages physiques comme moraux, et qui forgent celui qui nous a été présenté dans la saga. Pour moi, à l'époque de sa scolarité, bien que solitaire, il reste très jeune pour tout ce qui lui tombe sur le coin du nez. Un jeune pas encore adulte bien qu'il soit majeur, qui a été abandonné par l'une de ses seuls amis et la fille qu'il aimait de surcroît, et qui essaye de faire ses preuves au sein d'un cercle douteux qui semble être le seul à l'accepter. Comme Regulus qui se détournera très vite de Voldemort d'après le headcanon, Severus se retrouvera enrôlé très (trop) jeune parmi les Mangemorts. Il est actuellement en septième année, et cela arrivera très vite finalement... J'ai donc fait le choix ici de lier Regulus et Severus par une amitié réelle et indéfectible (la seule qu'il restait à Severus, en vérité). Victoire s'ajoute comme maillon pour diverses raisons, et son propre lien avec Regulus vient influencer autant que peser dans les choix de Severus. On a pu constater qu'il était un être protecteur, qui tient particulièrement ses engagements bien que ce soit dans l'ombre. J'ai essayé de transférer cette part de sa personnalité ici, bien qu'elle soit encore assez ambiguë et pas pleinement assumée. Peut-être vais-je trop vite en besogne, c'est tout à fait possible, d'où l'interrogation ; je tâtonne encore pas mal dans le domaine. Dans ce que j'essaye de faire, Severus tente aussi de protéger Regulus, en quelques sortes, et par extension Victoire en plus de lui-même. Victoire connaissait déjà le lien qui liait autrefois Severus à Lily, sans qu'il n'en ait trop dévoilé auparavant. Une grande partie de l'école a assisté (de ce que l'on sait) à l'altercation entre James / Severus / Lily. Il ne restait que l'affection que ressentait Severus pour la Gryffondor à dévoiler, finalement. Ainsi, Sev et Victoire sont quittes et peuvent poursuivre leur relation qui va se mouvoir en amitié assez forte. Du moins, c'est ce que j'aimerais pour la suite. Victoire a déjà côtoyé des nés-moldus, elle peut donc le comprendre sans le juger. Snape deviendra extrêmement important pour mon personnage principal, je dirai même un pilier. Alors je joue (dangereusement) avec le headcanon afin de le respecter sur sa durée, tout en insérant ce genre de petites choses essentielles à l'avancée de l'histoire. J'espère que ces explications sont suffisamment claires pour mieux esquisser mes intentions. La toile se tisse progressivement... Le serment inviolable est très violent et catégorique, voire inimaginable pour des sorciers de leur âge, je suis totalement d'accord ! Mais Severus s'intéresse à la magie noire et pratique déjà des sortilèges proches des maléfices ; Victoire est loin d'être crédule contrairement à ce que son côté encore un peu naïf peut parfois laisser croire. Elle-même joue avec le feu depuis son enfance, et elle a besoin de se protéger coûte que coûte même si ses choix et méthodes sont plus que discutables. Les Serpentards restent de grands individualistes, qui ne servent que leurs propres intérêts… Et pourtant, plus que quiconque, le personnage de Severus Snape a su parfaitement prouver que le bien commun pouvait passer avant sa propre vie... :-( (est-ce que ça se voit, qu'il me fascine, le Snape ? XD #modegroupieactivé)

Merci d'avoir pris le temps de lire ces explications, si tu en as eu le courage. J'essaierai de faire plus court la prochaine fois XD navrée ! On m'a toujours dit que l'esprit de synthèse n'était pas mon truc, et je comprends clairement pourquoi...! Ha ha ha