Bonjour / bonsoir !
Quatorzième chapitre écrit et publié dans la foulée. Comme cela fait du bien de reprendre l'écriture après plusieurs semaines sans coucher un mot sur le papier ! Le soulagement. Une véritable thérapie, même. Cela m'avait manqué…
Au programme, pas énormément d'action, mais une longue discussion de famille chez les Duchesne qui vous permettra de mieux connaître les parents de Victoire & Edouard (et je ne peux que deviner à quel point vous aimez Theobald, oui oui oui !). Je pense que cette conversation aura le mérite de mieux comprendre certains points concernant le fonctionnement de cette famille, mais aussi l'atmosphère qui y règne. Tout ceci s'ajoute aux bases qui avaient été posées au cours des chapitres précédents. Sang-Pur oblige ! J'espère avoir réussi à retranscrire ce que je souhaitais faire comprendre par ce passage assez important…
J'en profite pour remercier Katymyny pour sa fidélité toujours aussi présente malgré les semaines off pour cette fanfiction. Ton idée de résumé en début de chapitre pour éviter de larguer les lecteurs/rices en cas de délai de publication allongé est très intéressante ! Je vais envisager de le faire pour ceux à venir, tu as raison.
J'aimerais également remercier Grindelwald68 pour son ajout en favoris ainsi que sa lecture de tous les chapitres postés, et ce en si peu de temps. Ta review me va droit au cœur, car tu es la première personne à avoir lu les 13 chapitres d'une traite pour ensuite m'en laisser une impression globale plus que positive. Cela me rassure concernant la crédibilité de l'intrigue et des personnages, qu'il s'agisse des OC comme de ceux d'origine que j'essaye de respecter. Je te souhaite la bienvenue dans cette petite histoire que j'essaye d'adapter au mieux, en espérant que la suite te plaira tout autant !
Je vous souhaite une agréable lecture !
CHAPITRE XIV
« Passez de bonnes fêtes au 12 Square De L'Horreur. Je vous enverrai peut-être une carte de vœux, si j'y pense. » - Sirius Black
Ses yeux suivirent le cheminement embrumé qu'empruntait le train à mesure de son avancée en direction de la gare King's Cross, au Nord-Est de Londres. Elle avait l'impression de pénétrer dans un tunnel nébuleux, dont les volutes blanches lui faisaient penser à une espèce de neige fondue dont la chute se serait subitement arrêtée, comme pétrifiée dans les airs. Au-delà de la barrière de brume opaque se dessinaient les landes écossaises qui s'étendaient à perte de vue mais qu'elle parvenait à peine à distinguer. Même le pont de pierre sur lequel le Poudlard Express serpentait était à peine discernable avec le brouillard qui l'ensevelissait.
Victoire jeta un coup d'œil aux jumelles Dhont qui partageaient comme à leur habitude son wagon. À ses deux amies s'ajoutaient également Edouard ainsi que Bilius Weasley, que la Serpentard avait fini par tolérer au point de l'accepter dans le compartiment sans trop rechigner. Seule Anastasiya manquait à l'appel.
Les pensées de Victoire se tournèrent vers sa meilleure amie alors qu'elle se replongeait yeux et esprit dans la brume qui ponctuait leur voyage de retour pour les vacances de Noël. Ana ne rentrerait pas chez elle cette année. Une semaine avant leur départ, la russe leur avait fait part de sa décision. Si elle avait servi une excuse à peine recevable auprès des jumelles, il n'avait pas été difficile pour Victoire de deviner la véritable raison de son refus de rentrer en Russie ; le simple souvenir de l'été précédent aux côtés de son frère Igor hantait toujours son amie. La française en était persuadée. Anastasiya n'en avait plus jamais reparlé depuis sa confession, en septembre, au sommet de la Tour d'Astronomie, mais Victoire se doutait bien qu'une telle épreuve ne pouvait si facilement s'oublier.
Elle-même tournait en boucle ses propres expériences en ce qui concernait l'Occlumancie, suivant à la lettre les conseils de Severus pour se parer d'une solide muraille qui protègerait son esprit des intrusions malsaines. Et elle avait enfin réussi. Victoire sourit béatement à cette pensée. Le soir où Regulus s'était proposé de remplacer Severus pour son cours clandestin, la française était enfin parvenue à placer des remparts autour de son esprit, refusant l'accès à chacune des tentatives de Regulus qui s'était frotté à un véritable mur infranchissable.
Non, pas à un mur à des miroirs. Les longues réflexions et prises de conscience que Victoire avait eues, ce jour-là, avaient été non seulement aidantes, mais en plus salvatrices. En plus de mieux supporter son quotidien, de mieux gérer son anxiété qui était devenue permanente et de se reconnecter progressivement avec elle-même, elle avait également fini par trouver le barrage idéal que même Severus commençait à peiner à percer à mesure que leurs séances avançaient. Lorsque Victoire faisait le vide dans son esprit, une immense salle sombre apparaissait. Depuis le centre de cette dernière, un véritable labyrinthe de miroirs se matérialisait autour d'elle, projetant son reflet en de multiples doubles dont les gestes faisaient échos les uns avec les autres. Si la Victoire originelle levait la main, les autres l'imitaient. Si elle prononçait un mot, ses reflets le soufflaient du bout des lèvres en silence. Si elle cachait dans les méandres de sa psyché un secret, une pensée interdite ou un souvenir trop précieux pour être dévoilé, alors les miroirs autour d'elle s'activaient pour tromper l'importun qui se retrouvait perdu dans le dédale aux multiples reflets.
Psyché. L'esprit et le miroir. L'intériorité face à l'apparence. L'essence face au masque.
« Pourquoi souris-tu ? »
La voix encore enfantine de son frère la sortit de ses pensées. Elle se pencha vers lui pour lui ébouriffer les cheveux, sous l'œillade désabusée du garçon qui ne chercha pourtant pas à la repousser.
C'était une habitude qu'elle avait depuis que son épaisse tignasse blonde était apparue au sommet de son crâne. Du plus loin qu'Edouard se souvenait, sa sœur s'était toujours amusée à le décoiffer de la sorte. Un geste affectif qu'il commençait à trouver gênant et infantilisant en grandissant, mais qu'il ne parvenait toutefois pas à repousser. Car si Victoire arrêtait de montrer ainsi son amour à son égard, qui d'autre le ferait ?
« Elle doit certainement penser à son amoureux secret, fredonna Amalia.
- C'est Regulus, son amoureux… » lança Edouard avec évidence.
Ophelia leva la tête de son livre, passant de Victoire à Edouard, avant de laisser ses yeux tomber sur sa sœur jumelle. Cette dernière semblait terriblement amusée par la situation, consciente que le frère de Victoire n'était pas au courant pour son échange de courrier secret, et certaine qu'il était encore un peu jeune pour tout saisir du véritable enjeu qui liait Regulus et sa sœur. Victoire, quant à elle, avait laissé retomber sa tête contre la vitre de leur cabine d'un air fataliste.
« De vraies commères, ces deux-là, marmonna-t-elle dans son écharpe.
- Que dis-tu, ma chérie ? s'enquit Amalia dans un français impeccable. Je n'ai pas bien entendu…
- Je n'ai pas d'amoureux et encore moins secret.
- Evidemment, déclara Bilius Weasley sans quitter des yeux l'échiquier miniature sur lequel il jouait avec Edouard. Puisque c'est moi qui me marierai avec Victoire quand j'aurai terminé Poudlard. »
Edouard fit volte-face tandis qu'Amalia éclata de rire. Elle pointa du doigt tour à tour la mine écœurée du Gryffondor et celle interloquée de sa sœur, pendant que Victoire se cachait derrière la laine épaisse de son écharpe, rouge de honte. Bilius leva enfin la tête de sa partie d'échecs version sorcier. L'air toujours aussi sérieux, il haussa un sourcil avant de débiter : « Je plaisantais. »
Rectification : Victoire tolérait Bilius Weasley et acceptait de partager son compartiment de voyage avec lui mais elle ne parvenait toujours pas à s'habituer à l'humour complètement décalé du garçon avec qui son frère avait noué une amitié. En plus d'être un farceur invétéré qui allait probablement détrôner les Maraudeurs avant la fin de sa scolarité, il était capable de débiter n'importe quelle ineptie avec ce faux air extrêmement sérieux sans même sourciller. Que Merlin l'en garde ; pourvu qu'Edouard ne termine pas comme lui…
« Je ne suis pas sûr que Regulus te laisserait lui voler Victoire si facilement… médita un instant Edouard.
- Regulus n'a son mot à dire sur aucun de mes faits et gestes, trancha Victoire en lui faisant les gros yeux. Je ne lui appartiens pas. »
Pas encore.
« Je suis content que tu te sois réconciliée avec lui, tu sais, enchaîna Edouard en déplaçant l'un de ses pions sur l'échiquier.
- Hum, répondit distraitement Victoire.
- J'aurais aimé que tu puisses reparler à Sirius aussi, sans forcément lui hurler dessus ou l'insulter… »
Victoire se figea, détail que son frère manqua tant son attention était tournée vers la partie d'échecs qu'il menait contre ami. En revanche, il ne manqua pas à Ophelia, qui lui adressa un sourire embarrassé avant de se cacher derrière son livre. Ce fut Amalia qui réagit, les paupières fermées dans l'espoir vain d'entamer une sieste durant leur voyage.
« Je sais qu'il fait partie de ta maison, mais tu devrais te méfier de Black. Les puces, ça se refile. Pourrais-je dormir, à présent, s'il vous plaît ? »
Victoire entreprit de faire de même, s'allongeant à moitié sur la banquette jusqu'à atteindre les genoux d'Ophelia qui était assise à ses côtés. Son amie la laissa installer sa tête sur ses genoux sans quitter sa lecture. La blonde ferma les yeux, profitant du silence qui s'était abattu dans la cabine pour se retrouver face à ses miroirs.
« Vi', nous sommes arrivés à King's Cross… »
Victoire papillonna des yeux puis les frotta de ses mains. Perdue dans sa méditation, elle avait fini par s'endormir, éclipsant le reste du voyage le temps d'une sieste qui avait dû durer près de deux bonnes heures. Elle se releva pour jeter un œil au quai auquel le train venait d'accoster. Des élèves avaient déjà commencé à descendre pour rejoindre leurs familles.
Edouard se plaça face à elle, le visage également tourné vers la vitre. Il lui prit la main, et elle ne sut dire lequel des deux tentait de transmettre son courage à l'autre.
« Prêt ? demanda-t-elle.
- Non » souffla-t-il honnêtement.
Bilius était déjà parti. Ophelia étreignit rapidement Victoire avant de suivre Amalia hors du wagon, cette dernière ayant salué le frère et la sœur Duchesne d'un signe de main en leur souhaitant de joyeuses fêtes. Acculés au pied du mur, ils n'avaient plus d'autre choix que descendre à leur tour.
« Il ne te fera rien en ma présence » affirma la jeune fille tout en cherchant leurs parents depuis la fenêtre. « Allons-y. »
Le garçon hocha la tête puis attrapa ses bagages avant de sortir du compartiment. Ils traversèrent le train désert afin de rejoindre le wagon où était ouverte la seule porte de sortie. Regulus Black les y attendait patiemment, en retrait, sa propre valise posée à ses côtés. Ses yeux gris acier se posèrent sur Edouard puis sur Victoire, à qui il adressa un léger sourire. Il tendit la main vers le sac de sa fiancée, attendant visiblement qu'elle le lui cède. Face à l'absence de réaction, il éclaircit ses intentions.
« Nos parents attendent ensemble sur la Voie 9 ¾. Il serait étrange que nous ne descendions pas ensemble. Et malvenu de ma part si je ne porte pas ta valise ou ton hibou… »
Victoire ne répondit rien en se contentant de lui tendre avec hésitation son bagage, préférant conserver la cage de sa chouette. Regulus laissa descendre du train les deux Duchesne en premier avant de les suivre de très près. Les trois élèves arrivèrent très – trop – rapidement au niveau des familles Black et Duchesne qui les attendaient de pied ferme. Orion Black serra la main de son fils, tandis que Walburga lui posa une main squelettique sur l'épaule. Theobald Duchesne salua ses propres enfants d'un signe de tête digne. Seule Léda Malefoy-Duchesne entreprit de les serrer dans ses bras à tour de rôle de s'enquérir de leur voyage.
Ce fut à ce moment précis que les Potter passèrent près d'eux, rebroussant chemin pour quitter le quai. James Potter, leur fils unique, n'était pas revenu seul, cette année. À ses côtés se tenait Sirius Black, ce que ne manquèrent pas de remarquer les autres familles toujours présentes sur le quai.
Sirius s'arrêta un instant au niveau des Black et des Duchesne après avoir capté le regard haineux que sa mère lui portait. Il le maintint sans tressaillir, droit et fier comme un i, ses mèches de cheveux longues et rebelles retombant sur ses yeux gris.
« Mère. Père. Reg' » les salua-t-il avec désinvolture. « C'est toujours un plaisir de vous voir. »
Walburga Black pinça ses lèvres fines pour à peine étouffer son hoquet méprisant. Un sourire naquit sur les lèvres de Sirius à la réaction prévisible de sa mère. Il décida de la titiller un peu plus.
« Passez de bonnes fêtes au 12 Square De L'Horreur. Je vous enverrai peut-être une carte de vœux, si j'y pense. »
Victoire se pinça les lèvres à son tour, mais pour s'empêcher de sourire.
« Nous la brûlerons avant même de l'ouvrir » répondit sèchement Walburga sous l'œil vigilant des Potter, qui entraînèrent Sirius à leur suite. « Voilà à quoi conduit un enfant envoyé dans une autre maison que Serpentard » poursuivit-elle en dévisageant Edouard à son tour. « Enfantez-le, éduquez-le il ressortira des nids à sang-de-bourbe pourri jusqu'à la moelle ! »
Victoire ferma les yeux à l'entente de ces paroles. Que les vacances commencent…
La nausée envahit Victoire lorsqu'elle atterrit dans le salon du Manoir Duchesne. Dès qu'elle lâcha la manche de son père à laquelle elle s'était tenue durant leur transplanage, elle tituba jusqu'au large canapé pour s'y asseoir un instant.
« Il faudra bien finir par t'y habituer, si tu souhaites obtenir le permis de transplaner » fit-il remarquer de sa voix grave et froide.
Victoire se contenta d'inspirer profondément avant de pousser une longue expiration. Au même moment, un crac sonore annonça l'arrivée de sa mère et de son frère. Ce dernier avait toujours mieux supporté ce mode de transport que sa sœur. Aussi, à peine arrivé, Edouard tourna immédiatement les talons avant d'être stoppé par Theobald.
« Où comptes-tu aller ainsi, mon garçon ? »
Edouard s'arrêta net dans l'encadrement de la porte qu'il n'avait pas eu le temps de franchir. Il se tourna lentement vers son père qui venait de s'installer dans le fauteuil attenant au canapé où se trouvait toujours Victoire, les bras sur les accoudoirs et les jambes croisées. Theobald semblait avoir gagné davantage de blancheur dans la grisaille naissante de sa chevelure en l'espace de trois mois. Les traits de son visage, en revanche, étaient toujours aussi fermés qu'à l'accoutumée. Cela faisait des années que ses deux enfants ne l'avaient plus vu esquisser l'ombre d'un sourire heureux ou même joyeux. Sa ride du lion, quant à elle, ne semblait plus quitter son visage. L'homme resta silencieux un moment, se contentant de sonder ce fils qui avait quitté le domicile familial le temps de quelques mois pour la première fois depuis sa naissance, avant de s'humecter les lèvres et de prononcer :
« Approche, Edouard. »
Victoire regarda discrètement Theobald qui ne quittait pas son fils des yeux, avant de lancer un regard à Edouard qui avançait à petits pas au milieu du salon. Léda, quant à elle, était restée debout derrière Victoire, les mains posées sur le dossier à proximité de sa fille.
« Eh bien, Edouard ? demanda calmement Theobald. Installe-toi, allons ! Ta mère et moi pensions que tu nous parlerais un peu de ton entrée à Poudlard. »
Au ton étrangement enjoué qu'il venait d'employer, Theobald paraissait presque sympathique. Victoire n'eut pas besoin de se retourner pour savoir que sa mère était inquiète ; la pression de ses mains sur le velours du canapé de part et d'autre de sa tête suffisait à en témoigner.
« Ne souhaites-tu pas t'asseoir ? » insista le père de famille en voyant son fils toujours debout et garder une distance respectable entre lui et le reste de sa famille.
Faux. Il garde une distance de sécurité, se douta Victoire. La simple présence de la table de salon entre eux le prouvait.
« Aurais-tu perdu la langue en plus de ta fierté, à Poudlard ? s'impatienta Theobald d'un ton moins doux.
- Theobald… soupira Léda. Edouard, mon chéri as-tu fait bon voyage ?
- Oui, Mère, acquiesça le garçon. Je suis resté assis longtemps durant le trajet en train…
- Tu as l'air fatigué, poursuivit Léda avec douceur. Ta première année se passe-t-elle convenablement ?
- Oui, Mère. Poudlard est… différent. »
Sa remarque fit ricaner Theobald depuis son fauteuil. Léda lui lança un nouveau coup d'œil inquiet.
« Cela doit être différent de ce que nous t'avons raconté de notre propre scolarité, en effet, concéda-t-elle. J'avais été répartie à Serpentard, à l'époque, tout comme Victoire aujourd'hui. Ton père a, quant à lui, suivi ses études à Beauxbâtons, et n'a donc pas connu les couloirs de Poudlard… Raconte-nous un peu ton quotidien dans la maison Gryffondor.
- La maison de l'infamie… susurra Theobald.
- Tout se passe très bien à Gryffondor, bredouilla Edouard. Les autres sont très gentils… »
Il fut coupé par un nouveau ricanement désapprobateur de Theobald, qui claqua des doigts. Rany, leur elfe de maison, apparut immédiatement avec un verre de whisky-pur-feu préalablement rempli qu'elle lui tendit avant de s'incliner et de disparaître aussi vite qu'elle était venue.
« Comment se passent les cours ? relança Léda en essayant de sourire chaleureusement à son fils.
- Très bien, Mère. Victoire est là pour m'aider, en cas de besoin. Il m'arrive parfois d'étudier avec elle, à la bibliothèque.
- Quand tu n'es pas occupé à jouer les histrions durant ton temps libre, fit remarquer Theobald en buvant une gorgée de son whisky.
- Qui sont tes amis ? Tes camarades de dortoirs ? interrogea Léda en tâchant d'ignorer son mari.
- De la vermine que notre fils n'aurait jamais dû approcher, répondit le père de famille à la place de son fils.
- Mon ami Bilius est de Sang-Pur, contredit Edouard.
- Les Weasley sont des traîtres à leur sang.
- Pourquoi ? demanda naïvement Edouard. Je ne vois aucune différence entre Bilius et moi...
- Aucune différence, n'est-ce pas ? » répéta Theobald avec un rictus moqueur.
Il posa son verre sur la table de salon. Le rythme cardiaque de Victoire accéléra au moment où le verre claqua légèrement contre la surface en ébène.
« Les Weasley sont envoyés de génération en génération à Gryffondor, tandis que les autres familles de Sang-Pur rejoignent dignement la noble maison de Salazar Serpentard. Quelle différence y a-t-il entre ces deux maisons, Edouard ? »
Le garçon garda le silence, les yeux rivés sur le tapis persan.
« Pardon, je reformule ma question ; quelle différence y a-t-il entre Serpentard et les trois autres maisons de Poudlard ?
- Vous n'y êtes pas allés vous-mêmes, chuchota Edouard pour lui-même.
- Que viens-tu de dire ? »
Victoire vit son père effleurer la poche de son veston. Celle dans laquelle sa baguette était toujours soigneusement rangée. Il reprit sèchement :
« La différence entre Serpentard et les autres, Edouard, est que peu de sorciers au sang impur y sont admis. Salazar avait déjà constaté la suprématie des véritables sorciers à son époque... Et c'est là qu'aurait dû être ta place. Alors comment expliques-tu que mon propre fils, descendant de deux prestigieuses familles de sorciers de Sang-Pur depuis d'innombrables générations, ait pu être envoyé ailleurs ? »
Le calme avant la tempête, pensa Victoire. Ne réponds pas, Edouard. Laisse-le parler, mais ne dis rien…
« Je n'ai pas été envoyé à Poufsouffle… fit remarquer Edouard.
- Les sang-de-bourbe sont aussi nombreux dans cette maison que dans l'autre ! explosa Theobald. Quand bien même ! Tu aurais bien pu être envoyé à Serdaigle ! Cela n'aurait rien changé à l'humiliation que tu nous fais subir, à ta mère et à moi-même ! Regarde donc ta sœur ! »
Victoire tressaillit. Lorsqu'elle était citée en exemple par son père, elle s'attendait toujours au pire…
« Elle a fréquenté des sang-de-bourbe à Beauxbâtons ! Elle a caché des ouvrages et des jeux moldus sous le plancher de sa chambre ! Dans ma propre demeure ! Je l'ai retrouvée en plein milieu du Paris moldu avec Sirius Black ! »
Oh oui, elle avait fait fort. Elle devait bien l'admettre. Mais en dépit des punitions, elle n'était jamais parvenue à entièrement le regretter…
« Puis Poudlard et la maison Serpentard l'ont accueillie ! Elle a su retrouver la raison, et elle s'est enfin approchée de ce à quoi une jeune fille de Sang-Pur est censée ressembler ! Elle deviendra une femme - une sorcière - respectable et respectée. Elle sera la meilleure épouse que Regulus Black aurait pu rêver avoir ! »
Victoire n'aimait décidément pas la tournure que prenait la conversation.
« Un seul élément dans l'équation a posé problème dans l'éducation de Victoire, annonça finalement Theobald à sa femme. Sirius Black. N'en déplaise à Orion et Walburga... Avec tout le respect que je leur dois, ce fils raté ne leur a jamais autant rendu service qu'en quittant leur demeure, et ce en dépit du déshonneur qu'il leur a causé ! Quand je pense que notre fille était destinée à ce traître à son sang depuis sa naissance… »
Des larmes traîtresses montèrent aux yeux de Victoire. Elle les refoula.
« Voilà où mène l'entrée d'un sorcier de Sang-Pur à Gryffondor, Edouard. Tu ne vaudras guère plus qu'un Weasley ou un Sirius Black si tu suis cette voie de disgrâce que tu as visiblement choisi d'entreprendre, au vu des divers courriers que j'ai reçus de la part du directeur en l'espace de trois mois… »
Les cheveux encore humides de la douche qu'elle venait de prendre, Victoire sortit de la salle d'eau attenante à sa chambre. Elle se dirigea vers l'une des hautes fenêtres pour en écarter les lourds rideaux et l'ouvrir. La brise hivernale pénétra immédiatement dans sa chambre, la faisant trembler de froid sous sa mince chemise de nuit.
Elle inspira l'air pur en contemplant le ciel étoilé, cherchant les astres luisants et les nommant un par un. Ce rituel, lorsqu'elle se trouvait chez elle, lui permettait de retrouver Poudlard et ses cours d'Astronomie qu'elle chérissait tant. Il lui réchauffait le cœur et la rassurait quant aux jours à venir. Parce qu'elle ne se sentirait jamais autant chez elle qu'au sein de cette école, loin de l'atmosphère étouffante de la demeure familiale.
Elle ne resterait que deux semaines au Manoir Duchesne. Deux semaines entrecoupées par des détours au 12 Square Grimmaurd. Deux semaines à veiller sur son frère et à essayer de le faire entrer dans les bonnes grâces de son père. Deux semaines à observer sa mère s'indigner face à la sévérité de son mari sans pour autant s'interposer. Deux semaines à supporter les pépiements de Walburga Black, qui avait décidé de rapprocher au plus vite son fils de sa promise…
Deux semaines, et elle serait de retour à l'école de sorcellerie.
Mais que fera-t-elle, une fois le temps à Poudlard terminé ?
Comme pour répondre à son interrogation, un hibou strié qu'elle ne connaissait pas se posa sur le rebord de sa fenêtre sans manquer de la faire sursauter. Il lui tendit une patte amicale à laquelle était attachée une enveloppe. Elle détacha précautionneusement le courrier, se détourna un instant pour aller chercher une friandise pour hibou afin de le remercier, et le laissa s'envoler.
Bon courage à toi ainsi qu'à Eddie pour ces vacances en « famille ». Bien que ton réveillon se passera très probablement au 12 Square de L'Horreur, je te souhaite de joyeuses fêtes de fin d'année.
Amicalement tien.
S.O.B
à suivre...
Note de l'auteure : Si des Poufsouffles passent dans le coin, ne soyez pas vexés par l'exemple que j'en ai pris s'il vous plaît. Edouard a seulement tenté de soulager sa propre situation, bien que maladroitement. ^^' Par ailleurs... les tests de simulation des quatre maisons sont formels : je suis moi-même une Poufsouffle :3 et fière de l'être !
