"- Vos os seront brisés, vos cous tordus, vous serez frappés, battus et pour finir, pendus ! Tous ici, vous mourrez et disparaîtrez dans les souterrains de la mine des Gobelins !" chantonnait le roi grassouillet alors qu'on apportait de plus en plus de machines à torture.
L'une des créatures eut l'idée d'enlever l'épée de Thorin de son fourreau, ce qui provoqua la terreur du grand gobelin qui se mit à hurler.
"- Je connais cette épée ! C'est le Fendoir à Gobelins ! La Mordeuse, la lame qui a tranché un millier de têtes ! Égorgez-les, frappez-les, tuez-les ! Tuez-les tous ! Coupez-lui la tête !"
Simultanément, les bestioles s'étaient mises à l'œuvre et si au début du discours de leur chef elles s'occupaient de malmener les nains et uniquement ceux-ci, quand celui-ci ordonna qu'on tue tout le monde, certains se dirigèrent vers les Hommes. Alice n'en avait pas grand chose à faire. Ce qu'elle voyait surtout, c'était le Durin maintenu au sol par plusieurs de ces horribles créatures et une autre s'apprêtant à le décapiter. Un cri s'échappa malgré elle de sa gorge et elle se débattit d'entre les mains qui tentaient de la retenir, puis s'élança vers Thorin. Elle envoya valser le gobelin au couteau d'un coup de pied et Sirius, qui l'avait suivie dans un élan de courage, s'occupa de ceux qui emprisonnaient le roi.
C'est ce moment que choisit le tant attendu Magicien Gris pour faire son entrée, accompagné d'un petit effet lumineux des plus sympathiques. Il envoya les créatures qui attaquaient la Compagnie au sol, ainsi que ses membres au passage, grâce à une onde de choc. Les nains et les Terriens furent un peu sonnés mais reprirent vite contenance alors que Gandalf les apostrophait.
"- Saisissez-vous de vos armes, battez-vous. Battez-vous !"
Les prisonniers se relevèrent d'un seul homme et les choses sérieuses s'engagèrent, le nouvel arrivant commençant déjà à tuer des gobelins par-ci, par-là.
"- Il tient le Marteau à Ennemis ! s'exclama l'énorme gobelin à son encontre. La Batteuse, brillante comme le soleil !"
Bombur procéda à la distribution des armes. Kíli, étant très énervé, tua rapidement les monstres qui le séparaient des deux isolés :
"- Tenez ! Servez-vous en !" leur cria-t-il avant que certaines de leurs armes n'atterrissent dans leurs mains. Alice et Sirius le remercièrent et formèrent un cercle avec lui.
À trois, ils formaient un bon rempart à l'avant de l'esplanade. Ils empêchaient ainsi d'autres gobelins de venir aider leurs congénères. Thorin croisait le fer avec son homologue qui dégringola de l'étage.
Gandalf leur intima à tous de le suivre et il ouvrit un chemin vers la sortie en criant "fuyez", pour ne pas changer.
Ils durent encore une fois courir sur des sentiers accidentés. La descendante légendaire s'inquiétait de plus en plus pour Bilbon, durant sa fuite. Elle détestait le personnage de Gollum qui lui donnait d'horribles cauchemars quand elle était enfant.
Elle était un peu essoufflée, derrière Nori et Dwalin, quand des gobelins leur barrèrent la route. Celui au crâne rasé n'y fit guère attention et les découpa avec sa hache. La blonde siffla, impressionnée par ses réflexes. Le concerné se retourna pour lui faire un clin d'œil. Devant la quantité d'ennemis qui arrivait au-devant d'eux, les nains se taillèrent un pieu dans une des barrières qui encadraient le chemin. Ils balayaient les créatures grâce à cette grande pique.
La seule femme du groupe entendait Bifur et Fíli, juste derrière elle, mais elle n'osait pas se retourner de peur de se prendre un ennemi. Cependant, elle priait pour que Sirius, qui n'était plus à ses côtés, s'en sorte. Ce dernier, coincé entre Balin et Thorin, ne savait pas trop quoi faire. Les deux grands guerriers réussissaient à abattre les monstres avant qu'ils ne l'atteignent. Il se retrouvait donc les bras ballant à les regarder faire. Les fuyards durent s'arrêter car les abominations avaient réussi à les encercler.
Une des bestioles surgit de sous le rebord de la nacelle où ils se trouvaient. Toute la Compagnie était occupée à trancher, découper, tuer, pour s'échapper de là et tracer leur chemin. Le Terrien prit alors son courage à deux mains. Chez les elfes, il avait appris à se battre mais n'avait jamais pu tester réellement ses capacités et, comme Alice, dès que la peur le prenait au ventre, il n'arrivait plus à rien.
Un gobelin ne représentait pas une grande menace en soi, mais si l'un avait trouvé le chemin, il y en aurait forcément d'autres pour le suivre. C'est pourquoi le bouclé ne s'étonna pas de faire face à six gobelins dégoûtants, voir carrément répugnants.
Il souffla un bon coup en observant les créatures se rapprocher et, comme ses professeurs le lui avaient appris, il essaya d'étendre un bouclier magique devant lui. Ce qui lui permettrait d'atteindre ses ennemis sans qu'eux ne puissent le toucher. Il le visualisa d'abord et quand le premier opposant leva son épée, cette dernière ne rencontra qu'un mur invisible en s'abattant. Sirius sourit pour lui-même et passa à l'action.
"- Incroyable..." murmura sa meilleure amie plus loin, ayant suivi toute la scène.
Elle ne put s'extasier plus longtemps car Thorin ordonna de couper les cordes. La partie où la majorité des créatures se trouvait bascula dans le vide.
Kíli, maintenant en première ligne, para des flèches grâce à son épée, mais c'était une solution très… hasardeuse. C'est pourquoi il se saisit de l'échelle la plus proche et, avec l'aide de Bifur, l'abaissa sur les gobelins, coinçant leurs têtes pour les faire reculer et par la suite tomber dans le vide. L'échelle servit à rejoindre deux passerelles entre elles et permit à la Compagnie de s'éloigner un peu de ces bestioles.
Gandalf et Thorin menaient la danse. Puis, ils se décidèrent à jouer à la balançoire avec une passerelle. Pendant qu'elle faisait des mouvements de balancier entre le côté où les gobelins étaient et l'autre où ça avait l'air sûr, la Terrienne les maudissait dans sa tête. Fíli l'attrapa d'un bras pour sauter alors que de l'autre, il coupait les cordes de la passerelle-balançoire.
"- Wow, merci beau blond. lui sourit-elle.
- De rien belle blonde !" lui souffla l'héritier sur le même ton.
Son frère et Sirius, qui avaient tout entendu, levèrent les yeux au ciel d'un bel ensemble. Les chemins des nains se séparèrent un instant et Alice retint un cri quand elle vit Bombur descendre de trois étages. Heureusement, ils se regroupèrent tous assez vite. L'Istar décrocha un morceau de roche de la paroi que Thorin ordonna de pousser. Sans réfléchir, les fuyards s'empressèrent d'obéir. Le rocher écrasa quelques assaillants, leur libérant momentanément le passage.
Ils allaient traverser une passerelle entre deux parois rocailleuses quand le roi gobelin surgit devant eux.
"- Vous pensiez pouvoir m'échapper. leur dit-il en agressant Gandalf qui vacilla, les nains le retenant. Que va-t-il faire maintenant, le magicien ?"
Pour toute réponse, le vieil homme lui creva un œil avec son bâton et lui taillada le gras de l'estomac.
"- Ouais, Gandalf ! l'encouragea sa disciple. Bottez-lui le fessier à ce tas de graisse !
- Ça suffira..." déclara ce dernier avant que l'homme en gris, porté par les paroles de la demoiselle, ne lui tranche le goitre et la gorge.
Sauf que ce qu'aucun n'avait prévu à ce moment, c'est que le poids mort de la créature s'affaissant sur la passerelle la ferait s'effondrer. La Compagnie dégringola alors encore plus bas.
Les étages supérieurs écrasèrent les nains. Fort heureusement pour eux, les Terriens atterrirent en haut de la pile. Alice intima alors au bouclé de se dépêcher de descendre, pour une raison inconnue du jeune homme. Malgré cela, il obéit tout de même à son amie et ils se postèrent à côté de l'Istar, s'étant lui aussi extrait des décombres.
"- Ça aurait pu être pire. déclara Bofur, enthousiaste. La jeune femme grimaça. Le corps inanimé du roi gobelin les écrasa quelques secondes plus tard.
- Non mais tu plaisantes ou quoi ? s'énerva Dwalin, au milieu des nombreuses plaintes de ses compagnons.
- Gandalf ! s'écria Kíli après avoir jeté un coup d'œil au flanc de la montagne qu'ils venaient de descendre. En effet, tous les gobelins arrivaient à une vitesse phénoménale.
- Il y en a beaucoup trop ! On n'a aucune chance. grogna le nain tatoué, portant un Nori mal en point.
- Une seule chose nous sauvera. intervint alors Alice, s'attirant tous les regards. La lumière.
- Venez ! Allez debout !" les encouragea le magicien.
Les nains ne se firent pas prier et bien qu'ils soient de bien meilleurs sprinters que coureurs de longue distance, ils reprirent leur course effrénée pour sortir de la mine des gobelins.
Et enfin, ils furent dehors. Cependant, ils ne s'arrêtèrent pas d'avancer une fois sortis, la peur les poussant à s'éloigner un peu plus du danger. Ils courraient à travers les arbres, heureux de respirer l'air frais. Ce n'est qu'à une distance qu'ils estimèrent raisonnable qu'ils ralentirent.
"- Cinq, six, sept, huit... en profita pour les compter l'homme en gris. Bifur, Bofur : ça fait 10. Ah Fíli, Kíli ! 12. Et Bombur bien entendu, ça fait 13. Alice, Sirius...
- Où est Bilbon ?" interrogea la Terrienne à sa place.
La question jeta un froid et tout le monde se mit à chercher autour de soi avant de se regarder les uns, les autres.
"- Où est notre hobbit ? s'agaça Gandalf, même si ce ton révélait plus son anxiété. Où est notre hobbit !?
- Maudit soit le semi-homme ! Il est perdu maintenant ! s'écria Dwalin.
- Il n'était pas avec Dori ? demanda Glóin.
- Ne m'accuse pas ! lui répondit le concerné.
- Où l'avez-vous vu la dernière fois ? s'enquit le vieillard, dépassé par les événements.
- Je l'ai vu s'éclipser quand ils nous ont conduits à la grande salle. le renseigna Nori.
- Que s'est-il passé au juste ? Dites-le moi ! ordonna le magicien.
- Je vais vous dire ce qu'il s'est passé ! coupa soudainement Thorin. Maître Sacquet a sauté sur la première occasion de s'enfuir ! Il ne pense qu'à son lit douillet, qu'à son feu dans l'âtre depuis qu'il a franchi le seuil de sa porte. Nous ne reverrons pas notre hobbit, il doit être loin."
Les paroles de Thorin résonnèrent dans l'air, glaciales. Les uns se regardaient interdits, les autres fixaient le sol. C'est le bruit d'une claque qui attira de nouveau l'attention sur le monarque. Il avait la main posée sur sa joue, où l'on pouvait déjà distinguer une marque rouge vif. Alice, en face de lui, avait le regard dur malgré les larmes qui menaçaient de couler de tristesse, de colère et de douleur à cause de sa main endolorie, certainement. Elle parla d'une voix si vibrante de rage et si tranchante qu'elle tua dans l'œuf les premières rebellions qui naissaient contre elle pour avoir osé lever la main sur le roi.
"- Comment osez-vous ? Comment osez-vous dire toutes ces choses odieuses sur Bilbon et après l'appeler "votre" hobbit !? Vous n'êtes pas digne de lui, ni de son amitié et encore moins de son aide ! Chacun d'entre vous ! vociféra-t-elle en tournant sur elle-même pour regarder chaque nain, puis elle revint foudroyer le chef des yeux. Il serait peut-être temps que vous vous remettiez en question et que vous pesiez le poids de vos paroles et de vos actes, Thorin Écu-de-Chêne. Et si Bilbon est en effet déjà loin comme vous le dites, il a peut-être bien fait.
- Non, il n'est pas loin. interrompit alors une voix, apportant le soulagement dans plus de cœurs et d'esprits qu'il ne semblerait.
- Bilbon Sacquet ! l'accueillit Gandalf, très heureux. Je n'ai jamais été aussi content de voir quelqu'un.
- Bilbon ! s'exclama Kíli, alors que le hobbit donnait une tape sur l'épaule de Dwalin. On ne vous espérait plus !
- Comment avez-vous échappé aux gobelins ? s'enquit Fíli, fronçant les sourcils.
- Comment, en effet... reprit le tatoué à voix basse.
- Aha ! se contenta de répondre le nouvel arrivant en touchant nerveusement sa poche. Geste qui fut très clairement capté par les deux magiciens présents.
- Bon, mais quelle importance ! balaya le plus vieux des deux, désireux de dissiper le malaise. Le revoilà !
- C'est très important ! le contrecarra Thorin. Je veux savoir. Pourquoi êtes-vous revenus ?
- Je sais que vous doutez de moi. commença Bilbon après un petit temps de réflexion. Que c'est le cas depuis le début. C'est vrai, je pense souvent à Cul-de-Sac. Mes livres me manquent et mon fauteuil, mon jardin. Je suis chez moi là-bas. C'est mon foyer. Alors, je suis revenu parce que... vous n'en avez aucun, de chez-vous. On vous l'a pris. J'essaierai de vous aider à le reprendre."
L'héritier de Durin baissa la tête. Tous considéraient les paroles du semi-homme. Alice et Sirius contemplaient le tableau et une réalité les frappa de plein fouet : à la fin de la quête, le cambrioleur retrouvera sa maison à Cul-de-Sac les nains s'établiront à Erebor et Gandalf ira où il devra, mais eux ? Que deviendront-ils ? Où iront-ils ?
"- Et puis... certains n'ont vraiment nulle part où aller dans ce monde. ajouta le Sacquet maladroitement. Les regards se tournèrent vers les deux Terriens qui n'allaient pas très bien. Et je me voyais mal les abandonner ainsi sans savoir ce qui leur serait arrivé."
Les concernés sourirent doucement au hobbit. Ce dernier remercia alors son amie pour son petit discours, celle-ci balaya ses mots d'un revers de main et le prit dans ses bras. Les nains observaient toujours les deux jeunes gens. C'était vrai qu'eux n'avaient absolument aucun endroit où aller après la quête. Ils n'avaient même pas demandé l'asile à Thorin. Eux, qui se considéraient comme les plus démunis dans cette affaire, voyaient maintenant la dure réalité des deux recrues.
Des hurlements vinrent briser ce moment si émouvant. Aucun doute : des wargs arrivaient et avec eux, leurs maîtres.
"- On tombe de Charybde...
- En Scylla ! Fuyez, vite ! Fuyez ! commanda Gandalf.
- Encore ? s'indigna Alice, épuisée.
- Eh oui, allez courage blondinette !" la motiva Bofur en passant.
Les wargs les poursuivaient au travers des sapins et des rochers. Ils gagnaient du terrain et la Compagnie, fatiguée de la nuit passée dans Goblintown, ne parvint pas à les distancer. Un warg sauta au-dessus de Bilbon avant de se retourner vers lui. Il chargea mais le semi-homme planta son épée dans son crâne. Les premiers wargs furent abattus par certains des guerriers de la troupe mais ils étaient parvenus au bord de la falaise.
"- Tous dans les arbres, dépêchez-vous ! les dirigea Gandalf, à peine paniqué. Allez, grimpez ! Bilbon, grimpez !"
Le petit homme essayait de retirer son épée de la tête du warg, sans grand succès.
"- Les voilà ! hurla Thorin. Alice, à un mètre de lui, fit demi-tour pour aller aider son ami. Mais qu'est-ce que vous faites !?
- J'aide Bilbon, ça ne se voit pas ?" lui répondit la jeune femme, de dos.
Heureusement pour eux, ils réussirent juste à temps et grimpèrent dans l'un des sapins les plus proches. Les loups géants leur passaient sous les pieds et certains les ayant repérés essayaient de grimper aux arbres.
"- Gandalf ! Vous pensez que c'est le moment de murmurer à l'oreille d'un papillon !? s'agaça l'envoyée des Valar, beaucoup trop proche de la gueule d'un warg à son goût.
- Propose donc d'autres solutions, toi ! s'énerva à son tour Kíli.
- Azog…" souffla son oncle au même moment.
La situation se corsait légèrement et en défaveur de la Compagnie. Un duel de regards s'ensuivit entre le roi et l'Orc Pâle. Ce dernier bafouilla quelques mots dans sa langue qui ressemblaient à des insultes ou à des choses pas très agréables. Ce que Thorin comprit puisqu'il lui lança son regard le plus noir possible quand il prononça son nom.
"- C'est impossible... murmura le nain, dans le déni complet.
- Je dirais plutôt improbable puisque rien n'est impossible... grogna Alice en dardant son regard sur "la tronche de rat délavée" d'Azog, comme elle le disait si bien elle-même.
- Qu'est-ce qu'il a dit ? s'inquiéta Dori.
- Un truc qui se rapproche de "celui-là est à moi" en désignant Thorin et "tuez les autres" je crois. traduit-elle pour eux.
- Super ! Génial !" paniqua le dernier recruté en date, voyant les orcs charger sur eux.
Les nains durent se réfugier encore plus haut sur leur perchoir. Les wargs arrachaient les branches des sapins dans le but de les atteindre. Les conifères commencèrent à plier sous les assauts. Ils tombèrent sur leurs voisins et les membres de la Compagnie en profitèrent pour changer d'arbre. Ils sautaient de branche en branche et de tronc en tronc. Alice fut rattrapée par Bifur pour le premier arbre mais l'effet de domino s'appliqua et ils atterrirent tous sur le même sapin, le dernier : celui tout au bord de la falaise. C'est Dwalin qui les réceptionna cette fois, Sirius et elle. Elle le remercia rapidement d'une tape sur le bras et grimpa dans l'arbre.
Le rire d'Azog leur parvint à travers les aboiements, les craquements du bois et le vent. Il savait qu'il était sur le point de gagner.
Le Magicien Gris enflamma sa première pomme de pin et leur lança.
"- Je ne suis pas pour la maltraitance animale mais là, c'est eux ou nous alors mettez leur le feu, Gandalf ! lui hurla la Terrienne.
- Je prépare les munitions, ne vous inquiétez pas !"
Et c'était vrai. Il passa la suivante à Fíli, puis Bilbon, puis Kíli, Dori, etc. Tout le monde se mit à jeter les projectiles sur leurs ennemis. La stratégie semblait bien fonctionner, mettant en rogne le Grand Orc. Les nains se réjouissaient mais il ne fallait pas crier victoire trop vite. L'arbre sur lequel ils se trouvaient ne supporta soudainement plus leur poids et il se coucha au-dessus du vide. Ori glissa et se rattrapa à la botte de son plus vieux frère.
"- NON ! hurla Alice, son cri se confondant avec ceux de Nori et Dwalin. Fort heureusement, l'Istar rattrapa les deux frères Ri avec son bâton quand ils chutèrent.
- Accrochez-vous !"
Thorin, très énervé quant à la tournure des événements ainsi que par le coupable, se releva sur le tronc. La blonde le vit comme au ralenti se mettre à courir vers Azog, à travers les flammes et sous les supplications du nain à la barbe blanche qui le priait de rester là. Le roi leva son épée, son ennemi le chargea avec son warg blanc et le premier fut fauché et mit à terre. Alice entendait en fond les supplications d'Ori et Dori qui glissaient le long du bâton de Gandalf et elle voyait au premier plan le chef de la Compagnie en danger de mort. Son cœur battait la chamade, sa tête bourdonnait et ses oreilles sifflaient. Elle remarqua à peine qu'inconsciemment elle avait fait se lever le vent plus en bas de la falaise.
Thorin se leva et fut de nouveau envoyé à terre à cause d'un coup que le Profanateur lui asséna avec son arme. Balin hurla. Lui, il en avait la force. Bilbon, visiblement tout aussi horrifié par la scène se jouant sous ses yeux, se hissa sur le tronc du sapin tandis que le warg mordait le souverain. Ce dernier hurla de douleur et c'est ce qui réveilla sa recrue féminine, comme un électrochoc. Elle suivit le même chemin que le cambrioleur. Dwalin essaya de la suivre en hurlant le nom de son dirigeant et ami, mais il glissa et se rattrapa à une branche. Thorin, dans un élan de lucidité, frappa le museau de la bête qui l'envoya valser au bord de la falaise. Le chef orc ordonna quelque chose en noir parlé à un de ses subordonnés. Les nains ne comprirent pas mais n'en furent pas pour autant rassurés.
Le blessé essayait en vain d'attraper son épée alors que l'orc levait la sienne au-dessus de sa tête pour lui trancher la gorge. Mais au moment fatidique, un hobbit passa dans son champ de vision, plaquant la créature au sol. Le petit homme le tua assez facilement tandis que la demoiselle s'interposait entre l'Orc Pâle et le roi, bien vite rejointe par Bilbon. Thorin tomba dans les vapes simultanément.
Azog se tenait devant eux, montant son warg blanc. Il était un peu énervé mais souriait étrangement à la vue de ces deux petits êtres. Le Sacquet balançait maladroitement son épée devant lui pour le faire reculer. Les deux amis n'avaient pas vraiment peur. Ils étaient plutôt furieux et inquiets pour leur chef. D'autres orcs montant leurs wargs se tenaient maintenant derrière leur commandant. Ce dernier leur ordonna de tuer les deux fauteurs de trouble. Les ennemis s'approchaient doucement quand un cri résonna dans l'air, suivi par d'autres. C'était Fíli, Kíli et Dwalin qui venaient les aider. Ils tuaient déjà les orcs quand le semi-homme et Alice se jetèrent eux aussi dans la bataille à corps perdu, tout en gardant un œil sur le monarque. Le petit homme fut repoussé par le warg blanc d'Azog et il regarda, impuissant, ce dernier se rapprocher de lui puis du nain. L'apprentie magicienne s'interposa une nouvelle fois. Son regard était noir et les runes de ses mains flamboyaient dans l'obscurité. Le Profanateur l'étudia en silence. Ils se toisaient. Mais le cri de Sirius qui désignait du doigt Dori et Ori tombant dans le vide capta son attention. Elle commanda à une bourrasque de vent d'aller plus vite et grâce à cela un des aigles appelés par Gandalf et enfin arrivés les rattrapa de justesse.
Azog était descendu de son warg pendant ce temps-là et se tenait maintenant à un mètre d'elle. Autour d'eux, les rapaces continuaient leur ramassage tout en attaquant les orcs et les wargs. L'un d'entre eux se saisit de Thorin qui lâcha son bouclier de chêne en décollant. L'Orc Pâle, frustré, poussa un cri tandis que l'aigle suivant se saisissait de Bilbon. La descendante légendaire lui dit alors :
"- Si tu veux les tuer, il faudra me tuer d'abord. Et sache que je me ferais un véritable plaisir de séparer ta tête de tes épaules."
Et sans attendre de réponse, elle sauta dans le vide où elle fut réceptionnée par l'aigle transportant Thorin. Les nains avaient un peu peur de leurs sauveurs et c'était assez drôle de les entendre crier après eux mais toute l'attention d'Alice était focalisée sur le passager entre les serres de son aigle. Fíli ne cessait d'appeler son oncle mais ce dernier restait inconscient.
Ils survolèrent des montagnes par-delà les nuages avec des pans jaunissants, de merveilleux paysages. Ils débouchèrent entre deux chaînes montagneuses, là où une rivière serpentait et où une esplanade trônait : le Carrock. Les premiers arrivés furent Thorin et l'envoyée divine, très vite suivis du magicien qui écarta la jeune femme. Cette dernière alla se réfugier entre Bilbon et Sirius, à l'écart des autres, tandis que Gandalf murmurait des incantations en passant sa main sur le visage du roi. Ce dernier papillonna des yeux, arrachant un hoquet de surprise à la demoiselle.
"- Le semi-homme ? s'enquit-il difficilement. La Terrienne sentit une pointe de jalousie naître dans son cœur alors qu'elle poussait le hobbit devant elle et son ami.
- Tout va bien, Bilbon est là. Il est sain et sauf !"
Le souverain essaya de se mettre debout avec l'aide de son subordonné au crâne rasé et de Kíli qu'il repoussa.
"- Vous ! commença-t-il à l'égard du petit homme, très énervé. Qu'est-ce qui vous a pris ? Vous avez failli être tué ! N'avais-je pas dit que vous seriez un fardeau ? Que vous ne pourriez survivre dans les Terres Sauvages ? Que vous n'avez pas votre place parmi nous ? le somma-t-il en s'avançant de plus en plus. Je ne me suis jamais autant trompé de ma vie !"
Et Thorin prit un Bilbon à la fois choqué et heureux dans ses bras. Les nains éclatèrent de joie et la blonde leva les pouces en direction du chef. Elle était fière de lui. La voyant, le roi relâcha l'habitant de la Comté.
"- Je suis navré d'avoir douté de vous.
- Non, j'aurais aussi douté de moi. bégaya le hobbit. Je ne suis pas un héros ou un guerrier. Pas même un cambrioleur..."
Les aigles s'en allèrent alors sous les regards ébahis de la Compagnie. Thorin croisa le regard d'Alice et les rejoignit, elle et Sirius.
"- Je tiens d'abord à vous remercier pour m'avoir aidé dans la mine des gobelins. s'adressa-t-il au Terrien en lui tendant la main. Et à m'excuser quant à l'accueil que je vous ai réservé.
- Oh euh, pas de soucis, c'est normal... bredouilla le jeune homme en serrant la main tendue. Merci de m'avoir accepté dans la Compagnie.
- C'est un plaisir. lui sourit le roi avant de se tourner vers son autre recrue. Je pourrais refaire le même discours qu'à Bilbon mais l'effet de surprise ne serait pas là et je n'ai pas envie de me prendre une deuxième baffe.
- Désolée, mais vous l'aviez amplement méritée. lui répondit la jeune femme, les bras croisés sur sa poitrine.
- C'est vrai. admit-il. Je m'excuse pour tout ce que j'ai pu dire jusqu'ici et qui n'avait pour aucun autre but que d'être désagréable. Ensuite, je tiens à vous remercier aussi. J'étais peut-être inconscient mais je vous ai vueavec Bilbon et j'ai l'ouïe fine. dit-il en faisant allusion à la promesse/menace qu'elle avait faite à Azog. Vous êtes une femme impressionnante.
- Oh, arrêtez-vous là ou je vais pleurer ! le coupa Alice en riant avant de le prendre dans ses bras. D'abord surpris, le nain n'hésita pas à refermer ses bras autour d'elle.
- Câlin groupé !" s'écrièrent Kíli et Bofur, entraînant les autres en gloussant gaiement.
Ce n'est que quelques minutes plus tard que les yeux de Thorin se portèrent sur ce qui apparaissait à l'horizon. Tous suivirent son regard et s'avancèrent en même temps que lui sur le bord du Carrock.
"- Est-ce ce que je pense ? interrogea Bilbon.
- Erebor... déclara solennellement Gandalf. La Montagne Solitaire. Le dernier des Grands Royaumes des Nains de la Terre du Milieu.
- Notre Royaume... souffla Thorin, empreint de fierté.
- Un corbeau ! s'exclama le sourd de la Compagnie. Les oiseaux s'en retournent vers la Montagne.
- Mon cher Óin, il s'agit d'une grive ! déclara l'apprentie magicienne, souriante.
- Considérons ça comme un signe. Un bon présage. dit alors le monarque au cambrioleur, lui aussi ayant un fin sourire aux lèvres.
- Vous avez raison. décréta ce dernier. Je crois bien que le pire est derrière nous."
Cette phrase arracha un frisson à Alice, lui faisant même perdre son sourire. Gandalf ne le loupa pas. Et dire qu'il y avait un dragon qui s'éveillait, là, au loin...
