Harry se réveilla et frotta ses yeux engourdis par le sommeil. Il fronça un instant les sourcils à la vue de la chambre aux murs bleu pâle, se demandant un instant où il pouvait bien se trouver. Son regard se posa finalement sur le lit en face du sien et il se remémora les événements de la veille à la vue de la silhouette encapuchonnée qui le fixait, assise sur le matelas. Pour dire vrai, lui et Osiris n'avaient que très peu communiqué et s'était contentés de quelques paroles banales pendant le dîner avant d'aller se coucher.
«Bonjour Harry. Bien dormi? Demanda l'homme, les mains croisées sur ses genoux.
- Très bien merci. Et toi?
- Pas trop mal. Que dirais-tu d'un petit déjeuné histoire de se réveiller et ainsi peut-être pourrons-nous discuter de notre collaboration?
- Avec plaisir.»
Les deux hommes se levèrent et Harry suivit le plus âgé vers le salon. Osiris s'engouffra dans la cuisine tandis que le jeune sorcier s'échouait sur un des fauteuils et pris sa tête encapuchonnée dans ses mains. Il se sentait si étranger ici. Sans que l'environnement ne lui soit hostile, il n'arrivait pas à déterminer si telle était sa place ou non. Il avait terriblement peur de faire une erreur. Et il ne pouvait pas se le permettre. Le monde entier comptait sur lui. Il n'avait pas le droit ni le temps d'échouer.
Cette pression l'écrasait et l'oppressait. Il ne savait que faire et s'en voulait pour cela. Après tout, il était Harry Potter. N'était-il pas supposé être le sorcier incroyablement puissant et rusé que dépeignait la presse? Ne devait-il pas avoir réponse à tout dans son esprit supposément brillant? Le statut d'Élu ne faisait-il pas de lui une sorte de surhumaincapable de résoudre les problèmes de chacun?
Non. Bien sûr que non. Il était un simple adolescent qu'on jetait sur le champ de bataille par couardise d'affronter le danger en face. Il était bien plus facile de remettre les espoirs du monde entier sur une cicatrice en forme d'éclair. Peu importait l'enfant forcé de grandir trop vite qui se cachait derrière.
C'était sa destinée. Harry n'avait pas le choix.
Une main gantée se posa sur son épaule, le tirant de ses réflexions complexes. Osiris exerça une légère pression sur la peau du plus jeune et déposa le plateau repas sur la table basse.
Il y eut un moment de flottement.
Et Osiris s'accroupit aux pieds de Harry, tentant de capter son regard à travers la barrière opaque du voile. Il prit les mains du jeune homme entre les siennes.
«Je vois bien que quelque chose te tracasse Harry. Je sais que tout cela va bien trop vite et j'aurais aimé te laisser bien plus de temps pour me faire confiance. Mais le temps est compté. Nous ne pouvons nous permettre de faire une erreur. Et c'est pour cela que je suis là. À tes côtés. Pour t'aider. Et je vois bien que tu es tracassé par quelque chose. Peut-être que si tu m'expliquais je pourrais... Faire en sorte d'atténuer quelques uns de tes doutes. Je sais qu'on ne se connaît pas mais... parler fait toujours du bien. Et si tu en as besoin je suis là.»
Osiris desserra l'étreinte de ses mains, s'apprêtant probablement à reculer quand il fut stoppé par des doigts serrant fortement son poignet.
«Attends. Tu prétends vouloir m'aider n'est-ce pas? Je veux dire, à vaincre Voldemort.
- C'est le cas.
- Mais sais-tu seulement qui est Harry Potter?
- Je l'ignore. Mais tu vas me le dire.
- C'est bien ça le problème. Tout le monde compte tellement sur Harry Potter. Le seul et l'unique. L'Élu. Le Survivant. Celui qui battra le méchant et terriblement puissant Voldemort. Celui sur lequel on peut s'appuyer, cracher, idolâtrer à volonté. Mais je ne suis pas lui. Je suis juste Harry. Je-Je n'ai aucune idée de comment faire. Tout le monde attend tellement de moi alors que je ne suis rien. Une simple figure creuse qu'on pare de mille artifices et qualités. Mais comment peuvent-ils tous être si certains que j'y arriverai? Je ne le sais pas moi-même alors comment pourraient-ils savoir, eux qui ne connaissent rien de moi? Je-Je ne sais pas quoi faire Osiris. Je suis perdu.»
Osiris tenta d'apercevoir les émeraudes scintillantes une fois de plus mais ne se heurta qu'à un mur de froideur argentée.
«Je sais. Je suis là pour cela. M'assurer que tu as les capacités nécessaires. Et je ferais tout ce qui est en mon pouvoir à ce sens. Je t'en fais le serment. Je ne veux pas de ce Harry Potter. Je veux venir en aide à Juste Harry. Ce jeune homme perdu qui me fait face. Je ne peux apaiser tes propres doutes. Seul toi le peux. Ce que je sais c'est que si Albus te faisait confiance, ce n'était pas pour rien. Et il croyait en toi. Plus que ce que tu ne le penses. Et moi aussi.
- Mais- Comment peux-tu être certain que je n'échouerai pas le moment venu?
- Je ne le suis pas. Personne ne le peut. Tout ce que je peux t'apporter c'est mon soutient. Seul toi sera en réelle mesure de décider de l'issue du combat. Pourtant aussi incertaine ta victoire soit-elle je continue de t'accorder ma confiance. Et même s'il advenait que pour une quelconque raison tu échoues. Alors ce ne serait pas grave. Tu aurais fait de ton mieux. Et seul les imbéciles t'en tiendraient rigueur.»
Sans qu'il ne puisse l'expliquer, ces mots firent un bien extraordinaire à Harry. Savoir que son échec ne lui serait pas blâmé le libérait d'un poids invisible. Avec une voix rauque, il murmura:
«Merci Osiris.»
Le concerné hocha la tête et se dégagea de la poigne du plus jeune. Il alla s'asseoir dans le fauteuil en face et demanda d'une voix polie:
«Thé? Café? Jus de citrouille?
- Je veux bien du thé.
- Avec du sucre je suppose?
- Oui. Deux s'il te plaît.»
D'habiles coups de baguettes, Osiris glissa deux carrés blancs dans la tasse du plus jeune et la fit léviter jusqu'à lui. Il se servit lui-même une tasse de café et croisa ses jambes face à lui avant de porter le récipient à ses lèvres avec lenteur, l'air songeur.
«Bon. Il nous faut un plan. Qu'as-tu tiré comme conclusions jusqu'ici?
- Que... Dumbledore tenait beaucoup à Grindelwald et qu'il était assez réservé sur le sujet.
- De toute évidence. Et donc que penses-tu que nous devrions faire?
- Euh... je ne sais pas.
- Même pas une petite idée?
- Pas vraiment...
- Ça ne fait rien, je m'en doutais un peu... En fait, nous nous trouvons face à deux chemins différents. D'un côté, Grindelwald comme tu l'as si justement souligné. De l'autre, Abelforth. Je pense que les deux ont leur lot d'informations. Je ne sais pas exactement lequel est le plus judicieux. D'un côté, Grindelwald était tout de même un excellent manipulateur, il est possible que ses paroles ne soient que peu fiables. De l'autre, je crois savoir que Albus et son frère n'étaient pas en excellent termes et je ne sais pas si Abelforth acceptera de parler. De plus, peut-être est-il impliqué dans le jeu en tant que joueur auquel cas il serait donc plus compliqué à joindre. Que proposes-tu?»
Harry était dérouté de la façon dont le traitait Osiris. Malgré qu'il était flagrant que l'homme était plus âgé que lui, celui-ci semblait presque le considérer comme son égal. Comme si son avis importait réellement. Ce qui tranchait de façon plutôt claire avec les procédés d'Albus Dumbledore. Bien qu'il eut été très intelligent, l'homme n'avait jamais rien dévoilé à Harry, considérant qu'il était mieux pour le jeune homme de rester dans l'ignorance pour sa propre sécurité. Méthode qui s'était révélée peu efficace au vu du nombre de danger que courait le jeune homme. Sans doute aurait-il été plus juste qu'il ait connaissance de ce qui l'attendait. Mais qu'importe. Ce qui était fait était fait. Il ne servait à rien d'imaginer des univers parallèles quand on avait bien assez à faire dans le nôtre.
«Je ne sais pas. Je pense que Grindelwald serait peut-être plus judicieux. Après tout, peu de gens oseraient l'approcher, ce qui renforce son importance, non?
- Tu n'as pas tort...
- Mais comment allons-nous le contacter?
- Je crois qu'une petite visite à Nurmengard s'impose, déclara-t-il d'un ton satisfait.
- Et on peut y aller?
- Bien sûr. J'ai débloqué cet endroit en même temps que l'extrait de journal. Donc toi aussi par extension. Nous nous y rendons juste après le petit-déjeuner, cela te convient-il?
- C'est parfait, un peu d'action me fera le plus grand bien.»
Osiris approuva d'un hochement de tête et cela fit remarquer à Harry que le voile de son compagnon était toujours de l'originelle teinte argentée. Il posa sa tasse et sortit sa baguette.
«Chroma Cambiare.»
Une succession de couleurs défila devant ses yeux. Il inspecta les multiples teintes de ses yeux attentifs. Finalement, il pointa sa baguette sur une des cases avec un petit sourire ravi.
Vert menthe. Couleur de l'Espoir.
